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Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/768
{{tiret2|Expres|sions}} usitées dans différentes Provinces pour désigner une espèce de boisson, faite avec de l’eau jetée sur le marc du raisin, & qui fermente avec lui pendant quelque temps. Pourroit-on se persuader que c’est la seule & unique boisson spiritueuse dont s’abreuve plus de la moitié franche des vignerons & des valets de métairies pendant tout le cours de l’année ! Cependant rien n’est plus certain ; & ; si cette classe si nombreuse boit quelquefois du vin de la vigne qu’il cultive, c’est le dimanche dans le cabaret, ou par une générosité extrêmement rare du propriétaire. Si ce cultivateur est propriétaire, il destine sa récolte au paiement des impôts & à subvenir aux frais de la chétive nourriture de sa famille & à son modique entretien. De toutes les productions du royaume aucune n’est aussi chargée de droits, de taxes, de sujétions que le vin, & tous ces droits sont toujours au détriment du cultivateur. Les droits d’entrée d’un muid de vin de Languedoc, dans l’intérieur de Paris, se montent à un prix aussi haut que l’achat de sept muids dans le pays. Ce rehaussement prodigieux sur le prix primitif, rend la denrée dans la main d’un cultivateur d’une valeur si médiocre, que, malgré le travail le plus assidu, il végète dans la misère. Outre les droits accumulés sous toutes les dénominations possibles, les pays de vignobles sont infiniment plus chargés d’impôts que les autres ; cependant, depuis la libre exportation des grains, le prix de toutes les denrées, tous les objers de consommation ont tiercé & le vin n’a pas augmenté de valeur. Il n’est donc pas étonnant que les propriétaires de vignobles réduisent leurs malheureux valets à ne boire que de la piquette, & que plusieurs d’entre les maîtres y soyent eux-mêmes réduits. Après que la vendange fermentée a rendu, sur le pressoir, la quantité de vin qu’elle contient, les valets prennent le marc, l’émiettent, rejettent dans la cuve & ils y ajoutent une quantité d’eau proportionnée à celle du marc. C’est-à-dire que si le vin d’une cuvée a rempli quinze à vingt barriques, le marc peut en fournir deux ou trois de petit vin. Lorsque le marc, pris pour exemple, est placé dans la cuve & bien émietté, on l’arrose le premier jour avec environ cent pintes d’eau, il s’établit une petite fermentation. Le lendemain, on ajoute la même quantité d’eau & ainsi pendant plusieurs jours de suite, enfin, jusqu’à ce que l’on ait à peu près la quantité de petit vin que l’on désire. Si dès le premier jour on mettoit toute la quantité d’eau, il n’y auroit point de ''{{RozierL|FERMENTATION|fermentation}}'' vineuse, (''consultez'' ce mot) elle passeroit tout de suite à la putride, attendu que le reste du principe spiritueux & mucilagineux se trouveroit noyé dans une trop grande masse de véhicule aqueux. Il est donc nécessaire que l’eau s’imprègne peu à peu des principes susceptibles de la fermentation vineuse. Après huit à dix ou douze jours au plus de cuvage, on tire la piquette de la cuve & on la vide dans des barriques. Elle y bouillonne, elle y écume pendant quelques jours comme le vin, plus ou moins, suivant le climat, l’année, la qualité du vin. L’écume n’est pas autant colorée que celle du vin, elle n’est presque pas visqueuse ni colorée ; dès qu’elle diminue & s’arrête, on bouche rigou><section end="PIQUETTE ou PETIT VIN, ou REVIN, ou BUVANDE"/> <references/>
Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/102
qu’à ce moment il se frappait la poitrine, s’arrachait les cheveux, et que si ce n’eût été la piété dont ses parents l’avaient nourri dès ses jeunes années, et qui lui était devenue une habitude, il aurait maudit son existence. Affamé, n’en pouvant plus, il s’étendit sur le sol et mangea des racines et des herbes qui poussaient autour de lui. Cette nuit ne fut qu’agonie et qu’épouvante. « Je connaissais, me disait-il, toute l’horreur de ma situation ; je savais très bien qu’à moins que le Tout-Puissant ne vînt à mon secours, il me faudrait périr dans ces bois inhabités ; je savais que j’avais fait plus de cinquante milles, sans avoir rencontré un filet d’eau pour y étancher ma soif, ou du moins calmer la chaleur brûlante de mes lèvres desséchées et de mes yeux injectés de sang ; je savais que, si je ne trouvais pas quelque ruisseau, c’en était fait de moi, car je n’avais pour toute arme que ma hache ; et bien que des daims et des ours vinssent à passer de temps en temps à quelques pas et même à quelques pieds de moi, je n’en pouvais pas tuer un seul. Ainsi, au sein de l’abondance, impossible de me procurer même une bouchée, pour apaiser les tortures de mon estomac. Ah ! monsieur, que Dieu vous préserve de ressentir jamais ce que j’éprouvai durant ces mortelles heures ! » Personne ne peut se faire une idée de sa situation pendant les quelques jours qui suivirent. Lui-même m’assurait, en me racontant cette triste aventure, qu’il avait perdu tout souvenir de ce qui lui était arrivé. « Enfin, continua-t-il, Dieu sans doute me prit en pitié ; car un jour que je courais comme un insensé à travers <references/>
Fénélon - Oeuvres complètes, Tome XVII, 1830.djvu/87
jours avec des personnes préoccupées de leurs sentiments, qui en parlent dans les conversations les plus familières. Ils nous imputent, direz-vous, mal à propos tels excès sur les images, sur l’invocation des saints, sur la prière pour les morts, sur les indulgences. Voilà à quoi se réduit ce que l’Eglise enseigne sur le baptême, sur la confirmation, sur le sacrifice de la messe, sur la pénitence, sur la confession, sur l’autorité des pasteurs, sur celle du Pape, qui est le premier d’entre eux par l’institution de Jésus-Christ même, et duquel on ne peut se séparer sans quitter l’Eglise. Voilà, continuerez-vous, tout ce qu’il faut croire : ce que les Calvinistes nous accusent d’y ajouter n’est point la doctrine catholique : c’est mettre un obstacle à leur réunion, que de vouloir les assujettir à des opinions qui les choquent, et que l’Eglise désavoue ; comme si ces opinions faisaient partie de notre foi. En même temps, ne négligez jamais de montrer combien les Calvinistes ont condamné témérairement les cérémonies les plus anciennes et les plus saintes ; ajoutez que les choses nouvellement instituées, étant conformes à l’ancien esprit, méritent un profond respect, puisque l’autorité qui les établit est toujours celle de l’épouse immortelle du Fils de Dieu. En leur parlant ainsi de ceux qui ont arraché aux anciens pasteurs une partie de leur troupeau, sous prétexte d’une réforme, ne manquez pas de faire remarquer combien ces hommes superbes ont oublié la faiblesse humaine, et combien ils ont rendu la religion impraticable pour tous les simples, lorsqu’ils ont voulu engager tous les particuliers à examiner par eux-mêmes tous les articles de la doctrine chrétienne dans les Ecritures, sans se soumettre aux interprétations de l’Eglise. Représentez l’Ecriture sainte, au milieu des fidèles, comme la règle <references/>
Du halde description de la chine volume 1.djvu/462
Le roi de ''Guei'' s’était attaché le fameux général, dont je viens de parler, nommé ''Ou ki'' : il avait conçu une aussi haute idée de la sagesse de ce grand homme, que de sa valeur. Un jour qu’il s’entretenait familièrement avec lui sur les richesses et sur la puissance de son État, que la nature avait fortifié par des rochers inaccessibles, ''Ou ki'' lui répondit qu’il se trompait fort, s’il mettait sa confiance et la sûreté en des rochers escarpés ; que la force et la grandeur d’un État dépendait de la vertu et de l’application de celui qui le gouvernait. Cette réponse augmenta dans l’esprit du prince l’estime, dont il était déjà prévenu en faveur de ce capitaine. C’est pourquoi ayant déclaré la guerre au roi de ''Tsin'' il lui donna le commandement de son armée. ''Ou ki'' attaqua l’armée ennemie, la défit entièrement, et força le prince à demander la paix. D’autres actions également éclatantes, par lesquelles ce général signala sa valeur, le firent tendrement aimer du prince ; il crut même devoir le récompenser, en l’élevant à la dignité de son premier ministre. Ce choix ne plut pas aux Grands du royaume ; ils tâchèrent de rendre sa fidélité suspecte, et firent entendre au roi qu’il n’était pas prudent de mettre la charge la plus importante de l’État entre les mains d’un étranger. ''Ou ki'' étant informé des mauvais offices qu’on tâchait de lui rendre, sortit secrètement du royaume, et se retira à la cour du roi de ''Tsou''. Son mérite ne fut pas longtemps sans y être connu : on le mit à la tête des troupes, et après avoir gagné plusieurs batailles, il obligea différents princes de rechercher l’amitié et l’alliance de son maître. Tant de mérite et de prospérités irritèrent l’envie des Grands, qui s’efforcèrent de le ruiner dans l’esprit du roi : mais n’ayant pu y réussir, ils conspirèrent non seulement contre ce favori, mais encore contre la personne de leur souverain. ''Ou ki'' découvrit la conspiration ; et tous ceux qui y avaient trempé, furent, ou chassés du royaume, ou mis à mort. Il changea ensuite la forme du gouvernement. Il donna des bornes à l’autorité des Grands et des ministres, et réunit toute la puissance dans la seule personne du prince. Cette réforme de l’État le rendit si florissant, qu’il devint redoutable à tous les princes voisins : ils agirent de concert avec les gouverneurs et les magistrats du royaume de ''Tsou'' pour perdre un homme qui avait établi le roi son maître dans une si grande supériorité de puissance et d’autorité. On le trouva assassiné dans sa propre maison. L’année quarante-deuxième du cycle, où finit la vie de l’empereur, mit son fils ''Lie vang'' sur le trône. <references/>
Collins - Le Secret.djvu/202
{{tiret2|Porth|genna}}. Aussi était-elle bien décidée à ne pas demeurer seule dans sa cuisine, alors qu’elle avait chance d’attraper au vol quelque lambeau de conversation, ou d’entrevoir quelques-uns des incidents qui pouvaient se produire entre les personnes réunies dans le haut de la maison. Cependant la femme de charge, suivie de tout son monde, était parvenue au palier du premier étage, à droite et à gauche duquel étaient situés les principaux appartements du pavillon ouest. Stimulés par les craintes et par les soupçons, les yeux de Sarah eurent bientôt découvert les réparations qui venaient d’être faites aux marches et aux rampes du second étage. « Vous avez eu des ouvriers dans la maison ? demanda-t-elle vivement à mistress Pentreath. — Vous voulez dire sur les escaliers, repartit aussitôt celle-ci... Oui, on a travaillé par ici. — Et nulle part ailleurs ? — Non... Mais il y a d’autres endroits où, par malheur, il y a de l’ouvrage à faire... Même ici, et c’est la meilleure partie du bâtiment, la moitié des chambres du haut sont à peine habitables. Elles n’étaient déjà rien moins que bien pourvues, même quand vivait feu mistress Treverton... et depuis qu’elle est morte... » La femme de charge s’arrêta court, fort surprise, et avec une grimace de mécontentement. En effet, la dame aux modestes vêtements, au lieu de justifier la réputation de courtoisie que lui faisait la lettre, de mistress Frankland, venait de tourner brusquement le dos à son interlocutrice, avant que celle-ci eût achevé sa phrase. Déterminée à ne pas se laisser imposer silence d’une façon aussi peu pertinente, elle reprit dans les mêmes termes : « Et, depuis que mistress Treverton est morte... » Pour la seconde fois elle fut interrompue. L’étrangère se retournant tout à coup, très-pâle, les yeux animés par une curiosité inexplicable, la regarda bien en face, et lui posa, de but en blanc, une question parfaitement inopportune : « Parlons de cette histoire de revenant... Dit-on que le fantôme soit celui d’un homme, ou d’une femme ? — Je parlais de feu mistress Treverton, répliqua la femme de charge avec l’accent du reproche le plus sévère... nullement de ce conte de spectre qu’en a fait sur les appartements du nord. Vous ne vous y seriez pas trompée, si vous m’aviez fait l’honneur de prêter quelque attention à mes paroles. <references/>
Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 11.djvu/254
{{nr|250|{{sc|revue philosophique}}|}}dans l’autre le sentiment est ensemble le but et le principe directeur. Mais le choix entre ces genres d’activité, la part respective attribuée à chacune d’elles, l’établissement d’une règle de la vie en général, sont évidemment des déterminations volontaires, et dans les rapports des hommes entre eux, dans la vie sociale, c’est la volonté qui domine. Son idéal est d’obéir aux directions de l’intelligence, mais il ne suffit pas de connaître la règle ou de s’en faire une, il faut encore la force de l’observer. Le plus souvent sans doute, au témoignage intérieur que nous nous rendons, la valeur de notre conduite dépend moins de la connaissance du bien que de la fidélité à suivre la règle connue. Ici, le travail de l’intelligence porte moins sur la fixation du but à poursuivre que sur la découverte et sur le choix des moyens propres à l’atteindre. D’ailleurs, tout aboutit finalement à des résolutions, à des actes volontaires. On peut donc dire, avec une Clarté suffisante, que la vie sociale est la propre sphère où là volonté se cultive et se déploie avec le concours de toutes les forces de l’âme. Une certaine distinction de facultés dans l’esprit humain subsistera toujours ; et, même si l’on persiste un peu dans l’observation psychologique (sans se préoccuper avant le temps des rapports incontestables entre les phénomènes qu’elle étudie et les modifications qui se produisent dans nos organes), on ne tardera pas à constater des états de lutte intérieure, des sollicitations en sens contraire, des tensions plus ou moins violentes, qui impliquent nécessairement pour la conscience un jeu de forces opposées, de sorte que la pluralité des puissances intérieures ne saurait être toujours considérée comme une simple manière de parler, mais correspond à des faits bien réels. Il resterait, sans doute, à savoir si ces divisions réelles en un sens quelconque se confondent avec les divisions adoptées pour désigner les différentes classes de phénomènes concrets, ce que nous nous garderons bien d’affirmer. Ne compliquons donc pas notre marche de l’examen de cette question, pour intéressante qu’elle puisse être ; ne parlons plus de {{corr|facutés|facultés}} ; parlons de fonctions, par où nous entendons simplement des genres d’états et d’actions analogues de forme et de but. N’insistons pas trop non plus sur une triplicité de fonctions qui laisse fort à désirer, quoiqu’elle suffise à notre objet. Il est clair en effet que le sentiment et la pensée, qui sont deux modes de la conscience, se ressemblent plus entre eux qu’ils ne ressemblent à la volonté, dont les actes n’apparaissent à la conscience qu’après leur accomplissement. Il reste que nous voyons notre activité se partager en un certain nombre de directions différentes, dont aucune ne suffit à remplir la vie, et qui la laissent morcelée, même en se complétant <references/>
Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 112.djvu/24
moteur unique et central, conformément à la même conception napoléonienne et jacobine de l’État enseignant, conception redoutable qui, chaque année plus envahissante, plus largement et plus rigoureusement appliquée, exclut de plus en plus la conception contraire, la remise de l’éducation aux intéressés, aux ayans-droit, aux parens, aux entreprises libres et privées qui ne dépendent que d’elles-mêmes et des familles, à des corps permanens, locaux, spéciaux, propriétaires, organisés par un statut, et régis, administrés, défrayés par eux-mêmes. Sur ce modèle, quelques hommes d’esprit et de cœur, instruits par le spectacle de l’étranger, essaient de constituer, dans nos grands centres académiques, des universités régionales, et l’État va peut-être leur concéder, sinon la chose, du moins le nom et le simulacre de la chose ; mais rien au-delà. Par son droit public, par les attributions de son Conseil d’État, par sa législation fiscale, par le préjugé immémorial de ses juristes, par la routine de ses bureaux, il est hostile aux individus collectifs ; jamais ils ne seront pour lui des individus véritables ; s’il consent à les ériger en personnes civiles, c’est toujours à condition de les tenir sous sa tutelle étroite, de les traiter en mineurs et en enfans. — Au reste, même majeures, ces universités resteraient ce qu’elles sont, des officines de grades ; elles ne peuvent plus être maintenant un asile intellectuel, une oasis au terme de l’instruction secondaire, une station de trois ou quatre ans pour la libre curiosité, pour la culture désintéressée de soi-même. Depuis l’abolition du volontariat d’un an, un jeune Français n’a plus le loisir de se cultiver ainsi ; la curiosité libre lui est interdite ; il est trop harcelé par un intérêt trop positif, par le besoin des grades et diplômes, par les préoccupations de l’examen, par la limite d’âge ; il n’a pas de temps à perdre en tâtonnemens, en excursions mentales, en spéculation pure. Désormais notre système n’admet pour lui que le régime auquel nous le voyons soumis, à savoir l’entraînement, l’essoufflement, la course au galop sans répit dans une piste, et les sauts périlleux, de distance en distance, par-dessus des obstacles préparés et numérotés. Au lieu de se restreindre et de s’atténuer, les inconvéniens de l’institution napoléonienne s’étendent et s’aggravent, et cela tient à la façon dont nos gouvernans la comprennent, au procédé original et héréditaire de l’esprit jacobin. Quand Napoléon édifia son Université, ce fut en homme d’État et en homme d’affaires, avec les prévisions d’un entrepreneur et d’un praticien, avec le calcul de la dépense et du rendement, des besoins et des débouchés, de manière à se fabriquer, au plus vite et avec le minimum de irais, les outils militaires et civils qui lui <references/>
Du Camp - Paris, tome 6.djvu/341
ne quittèrent point la ville ; ils y restèrent, appauvris, mécontents de ce chômage forcé, et fort en peine de pourvoir aux besoins de la vie pendant l’hiver de 1789, qui fut d’une dureté exceptionnelle, centuplée par la disette des grains. La forme extérieure et brutale de la révolution, c’est-à-dire l’émeute, trouva là une force disponible, prête à tous les désordres, que vinrent bientôt augmenter les bataillons fédérés attirés de la province. L’élément parisien est déjà submergé à cette époque par les éléments provinciaux et étrangers<ref>Dans les notes écrites en 1802 par Lenoir, ancien lieutenant général de police, et publiées par J. Peuchet, on trouve la confirmation de ce fait : « Chaque province, dit Lenoir, a sa représentation spéciale d’États et son foyer de résidence particulière dans la capitale. Ceci ne varie dans aucun temps ; les hommes passent, mais les statistiques restent, l’équilibre se maintient. C’était (Paris) en quelque sorte le royaume lui-même, réduit sur une petite échelle et rassemblé par échantillons dans un périmètre d’une huitaine de lieues. »</ref>. Lorsque l’on dit : Paris fait une révolution, on confond le théâtre et les acteurs ; la vérité est que les provinciaux font une révolution à Paris : les Parisiens ne s’en mêlent guère. Il faut admettre, en thèse générale, et malgré la fable de Bertrand et Raton, que ceux qui profitent d’une révolution sont ceux qui ont eu intérêt à la fomenter et qui l’ont dirigée ouvertement ou par des menées secrètes. Aussitôt que la prise de la Bastille annonce que le vieil ordre de choses a vécu, aussitôt que la ville de Paris, prenant comme emblème les émaux de son écusson, gueules et azur, et y ajoutant l’argent pour affirmer sa réconciliation avec la royauté, a inauguré le drapeau tricolore, trois hommes sont adoptés par la Révolution et la symbolisent ; ils parlent, ils écrivent, ils sont armés en son nom et pour elle. Sa voix, c’est Mirabeau, né à Bignon ; sa plume, c’est Camille Desmoulins, né à Guise ; son épée, c’est Lafayette, né à Chavagnac. Lorsque les mauvais jours sont venus, que les <references/>
Léonard de Vinci - Traité élémentaire de la peinture, 1803.djvu/408
sur l’horizon, les corps qui par leur distance paroissent de couleur d’azur, participeront à cette couleur rouge ; de sorte qu’il se fera un mélange d’azur et de rouge, qui rendra toute la campagne riante et fort agréable : tous les corps opaques qui seront éclairés de cette couleur mêlée, paroîtront fort éclatans et tireront sur le rouge, et tout l’air aura une couleur semblable à celle des fleurs de lis jaune. L’air qui est entre la terre et le soleil, quand il se lève ou se couche, offusquera plus les corps qu’il environne que l’air qui est ailleurs, parce que l’air en ce temps-là est plus blanchâtre entre la terre et le soleil, qu’il ne l’est ailleurs. Il n’est pas nécessaire de marquer de traits forts toutes les extrémités d’un corps auquel un autre sert de champ ; il doit au contraire s’en détacher de lui-même. Si un corps blanc et courbe se rencontre sur un autre corps blanc, il aura un contour obscur, et ce contour sera la partie la moins claire de celles qui sont éclairées ; mais si ce contour est sur un champ obscur, il paroîtra plus clair qu’aucun autre endroit qui soit éclairé. Une chose paroîtra d’autant plus éloignée <references/>
Cicéron - Des suprêmes biens et des suprêmes maux, traduction Guyau, 1875.djvu/136
conscience, pour obéir aux incertitudes de l'opinion. On peut dire de toutes les autres vertus ce que je viens de dire de la justice : c'est les fonder en l'air que de les fonder sur la volupté, comme vous faites. Pourrions-nous alors, par exemple, admirer dans l'ancien Torquatus une véritable force d'âme ? Vous avez beau me dire que je ne puis vous corrompre : j'aime à parler des grands hommes de votre famille et de votre nom ; et même j'ai toujours devant les yeux combien, dans les temps que tout le monde sait, A. Torquatus me donna des marques d'amitié qui me seront toujours chères. Elles devraient pourtant me l'être bien moins, si je croyais qu'en cela il n'eût regardé que son intérêt et non pas le mien, à moins que vous n'en reveniez à dire que tout le monde a toujours intérêt de bien faire. Si vous le dites, j'ai gagné ; car je ne prétends autre chose dans notre dispute, sinon que le fruit du devoir est le devoir même. Mais ce n'est pas là ce que veut votre sage ; il veut tirer la volupté de toutes choses, comme un salaire qu'il exige. Je reviens à l'ancien Torquatus. Si ce fut en vue de la volupté qu'il en recevrait, qu'il combattit contre le Gaulois auprès de l'Anio, et s'il lui arracha ce collier auquel il dut son surnom pour quelque autre motif que pour faire une action digne d'un homme de courage, il n'est plus tel pour moi. Que si la modestie, l'honneur, la pudeur, en un mot la tempérance, ne se maintiennent que par la crainte de la punition ou de l'infamie, et si elles ne se conservent, pour ainsi dire, par leur propre sainteté ; à quels adultères, à quelles <references/>
Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/266
{{elzesans|1762}}, aujourd’hui {{elzesans|15}} septembre {{elzesans|1778}}, se porte mieux que vous et moi... Ici notre homme frémit et recule ;... un instant je le crus coupable, mais les suites me convainquirent bientôt de mon erreur. — Ce que vous me dites est bien difficile à croire, monsieur, me répondit le curé, il faut approfondir,... cela en vaut la peine ; mais trouvez bon que je m’informe avant, à qui ai-je l’avantage de parler ? — A un honnête homme, monsieur, répondis-je avec douceur, ce titre ne suffit-il pas pour éclaircir une trahison ? — Mais ceci peut devenir matière à un procès, et je dois savoir ;... — point de procès, monsieur, il s’en faut bien que ce soit vous que l’on soupçonne ; l’intention est de traiter tout à l’amiable, et vous pouvez recevoir ma parole, que rien de ce qui va se faire, ne nous passera : je suis l’ami de madame de Blamont ; c’est de sa part que je viens vous trouver : je puis donc vous répondre, et du mystère où tout ceci restera, et de l’extrême éloignement qu’on a de <references/>
Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/190
à un espace de six à huit pieds sur neuf à dix de hauteur, donner chaque année un gros fagot de bourgeons & de branches & pas un seul fruit. Pour le mettre à fruit, lui supprimer deux grosses racines, le mutiler, &c., & le tout très-inutilement ; tandis que si on avoit arraché ses deux voisins, si on avoit étendu ses branches sans les rogner, si dans cette position on les avoit laissé pousser à volonté, elles auroient donné du fruit dès la seconde année. Si on se promène dans un jardin, on voit une disproportion révoltante entre l’arbre sur coignassier & sur franc. Celui-ci présente un tronc fort & bien nourri, ses branches, grandes, vigoureuses, ses feuilles d’un vert foncé, enfin tout l’arbre respire la santé & la vie. À côté est le poirier greffé sur coignassier, dont le tronc couvert d’écailles raboteuses annonce la foiblesse, ses branches sont tortueuses, ses bourgeons maigres & fluets ; il est si chargé de boutons à fruit, qu’à peine il a la force de produire des boutons à bois ; presque toujours la greffe fait ''{{RozierL|BOURRELET|bourrelet}}'', (''voyez'' ce mot), ses feuilles sont jaunes, pâles, languissantes, rougissent à la première gelée blanche & tombent, tandis qu’il faut un froid bien décidé pour que celles sur franc éprouvent le même sort. Tout dans le premier annonce la vigueur & la force, & tout dans le second est l’image de la foiblesse & de la misère. Cette bigarrure d’arbres, sur franc & sur coignassier est révoltante dans un jardin où la véritable beauté des arbres consiste à présenter à l’œil la même force dans les arbres, la même activité de végétation, la même hauteur & la même forme. Cette égalité ne peut plus se trouver lorsque la vie d’un arbre est beaucoup plus courte que celle d’un autre, & lorsque la même vigueur, la même activité ne se trouvent plus dans l’un comme dans l’autre. On objectera encore que dans les terrains maigres, pierreux, graveleux, l’arbre greffé sur coignassier réussit mieux que sur franc, donc celui-ci réussira mieux dans les sols forts, tenaces & même un peu humides. Voilà déjà à peu près la moitié des espèces de terrain gagnée en faveur de l’arbre sur franc. Quant au terrain supposé pierreux, maigre, &c. (il s’agit ici d’un jardin & non d’un arbre livré à lui-même en plein champ), je dis & j’avance que le franc & le coignassier y réussiront tous deux également, chacun dans leur genre & en admettant toute circonstance égale. Chaque jour j’en ai la preuve sous les yeux ; mais j’ajoute que si on plante un poirier sur franc ''avec son pivot'', il réussit beaucoup mieux que le poirier sur coignassier, planté même avec son pivot. Comment concevoir que le premier étant par lui-même fort & vigoureux (avec ou sans pivot), & le second étant naturellement foible (avec ou sans pivot), ce dernier puisse mériter la préférence ? Cela n’est pas croyable & est contraire à l’expérience de tous les jours & de tous les lieux. Si l’arbre se nourrissoit uniquement par ses racines (''consultez'' l’article ''{{RozierL|AMENDEMENT|amendement}}'' & le dernier chapitre du mot ''{{RozierL|AGRICULTURE|agriculture}}''), on pourroit admettre cette supposition, parce que les arbres plantés si près suivant la coutume ordinaire, s’affament les uns & les autres ; & il faut moins de nourriture à celui<section end="POIRE, POIRIER"/> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/708
veille de sa ruine, ce petit monde anéanti. Entrons dans l’église sombre de Robert de Luzarches, au sol pavé de tombes ; jetons un regard sur l’autel que décore la ''Cène'' sévère de Philippe de Champagne ; puis, la clôture franchie, pénétrons dans le chœur où chantent, blanches et droites devant leurs stalles sculptées, les quatre-vingts religieuses. Après les vêpres, suivons la procession des nonnes, faisant le tour du préau du cloître jonché de roses, chacune tenant un cierge en main, dans la lente psalmodie des proses et des hymnes. Puis, c’est l’assemblée du chapitre, et l’admirable concile de ces robes candides, signées d’une croix de sang, sous le voile aux ailes noires ; ce sont les exercices de la communauté, l’ordre et le silence du réfectoire, le long corridor des dortoirs, avec ses devises sépulcrales sur le linteau de chaque cellule, les offices charitables de l’infirmerie, de la lingerie, ceux de la porte où se fait, dans le large panier tenu par deux valets, la distribution du pain aux mendians. Une autre page nous montre la récréation, où les moniales filent en cercle sur les bancs de la « Solitude, » à l’ombre d’un petit bois, arrosé d’un ruisseau, et que domine un Calvaire. Et tout autour, ce site charmant, demeuré, lui, presque intact, où Racine enfant rêva ses premiers vers. Certes, ce sont de médiocres gravures que celles de Magdeleine de Boulogne et de Magdeleine Hortemels : pourtant il s’en dégage un parfum que n’ont pas beaucoup d’œuvres plus adroites et plus ambitieuses. C’est la mélancolie des choses qui vont mourir. Il ne faudrait pas croire le XVIIe siècle inaccessible à cette sorte d’émotions. On n’a pas attendu Chateaubriand pour comprendre et goûter la poésie du christianisme. Ces âmes cloîtrées connaissaient le génie des cloîtres. Je n’évoquerai pas les divins chœurs d’''Esther'' à propos de ces naïves images. Mais comment ne pas rappeler ces expressions touchantes de la sœur Anne-Eugénie qui, en regardant le ciel au-dessus du dortoir, « s’imaginait, dit-elle, qu’il y était plus serein qu’ailleurs ; » qui, en ses jours d’abattement, se sentait « toute ravie » en apercevant les étoiles, et ne résistait pas à la « douce harmonie » que faisait, dans le vallon, la palpitation des trois cloches de Port-Royal ? L’essentiel du livre, c’est l’admirable répertoire de portraits qu’il nous offre : il y a là, en trois cents figures, l’annuaire complet de Port-Royal, tout ce qui se meut, vit, intrigue, combat, dispute, agit ou s’agite pour ou contre, partisans, adversaires, amis ou ennemis, hommes et femmes, clercs et laïcs, évêques, papes, princes, gens d’épée ou de robe, tout ce qui, de près ou de loin, dans un sens <references/>
Sand - Valvèdre.djvu/277
dans une auberge, car je ne devais pas laisser savoir à sa famille que je fusse resté ou revenu à Genève, et, le jour de la noce, j’avais été vu de trop de personnes de l’intimité des Obernay pour ne pas risquer d’être rencontré par quelqu’une d’entre elles. Je fis venir une voiture où je m’enfermai, et j’allai demander asile à Moserwald, qui me cacha dans son propre appartement. De là, j’écrivis un mot à Henri, qui vint me trouver presque aussitôt. Ma soudaine présence à Genève et le ton mystérieux de mon billet étaient des indices assez frappants pour qu’il n’hésitât plus à reconnaître en moi le rival dont Valvèdre, par délicatesse, lui avait caché le nom. Aussi l’explication des faits fut-elle comme sous-entendue. Il contint du mieux qu’il put son chagrin et son blâme, et, me parlant avec une brusquerie froide : — Tu sais sans doute, me dit-il, ce qui vient de se passer entre M. de Valvèdre et sa femme ? — Je crois le savoir, répondis-je ; mais il est très-important pour moi d’en connaître les détails, et je te prie de me les dire. — Il n’y a pas de détails, reprit-il ; madame de Valvèdre a quitté notre maison, il y a une demi-heure, en nous disant qu’une de ses amies mourante, je ne sais quelle Polonaise en voyage, la faisait demander à Vevay, et qu’elle reviendrait le plus tôt possible. Son mari n’était plus là. Elle a paru désirer le voir ; mais, au moment où j’allais le chercher, elle <references/>
Alembert - Trois mois à la cour de Fréderic : lettres inédites.djvu/48
{{t|passer le reste de ses jours avec Jean-Jacques, qui ira le trouver. »|90}} {{interligne}} Milord Maréchal venait de se lier étroitement avec Jean-Jacques Rousseau. Gouverneur du comté de Neuchâtel quand l’auteur d’''Émile'', chassé de France et de Genève, y vint chercher un refuge, il accueillit l’exilé avec la plus grande distinction et il n’hésita pas à le protéger contre l’intolérance religieuse des habitants. Une étroite affection naquit bientôt entre eux, et Milord Maréchal eut la rare fortune de vaincre l’humeur farouche et soupçonneuse de Jean-Jacques ; non seulement le solitaire de Motiers se fit sociable pour son nouvel ami, mais encore il renonça en sa faveur au principe qu’il s’était posé et accepta de lui une pension, alors que peu de temps auparavant il avait repoussé celle que lui offrait le roi de Prusse. Leur intimité devint telle qu’ils projetèrent de finir leurs jours ensemble dans une douce retraite. Le gouverneur de Neuchâtel, fatigué des tracasseries incessantes des habitants, demanda son congé et l’obtint. Il partit pour Berlin faire ses adieux à Frédéric avant de <references/>
Espinas - La Philosophie sociale du XVIIIe siècle et la Révolution.djvu/275
{{Tiret2|guillo|tine}} tine a expédié hier et aujourd’hui quarante-trois scélérats qui ont laissé à la République près de 30 millions. » Maignet a été l’un des hommes politiques les plus en faveur auprès de Robespierre. Gouillart a été membre du tribunal révolutionnaire d’Arras, puis de celui de Cambrai. Il a si bien secondé Joseph Le Bon, qu’il a été appelé à Paris avec les mêmes fonctions. Sa correspondance n’est pas non plus sans intérêt psychologique. De Cambrai, le 20 floréal : « C’est à fa fin d’une course nocturne que je me dispose à vous écrire. Cette nuit fut le coup, de mort pour tous les aristocrates de cette commune. Les pères, mères, femmes et sœurs, oncles, tantes, parents et amis des émigrés ont été par nous arrêtés... Demain le tribunal tient sa première séance... Vingt-sept seront mis en cause pour commencer. Nous allons faire en sorte de détruire tous les scélérats qui fourmillent dans les prisons de cette ville. » D’Arras à ses amis de Béthune : « Courage, continuez, ça va ; allons au pas de charge plus que jamais ; point de quartier... Je vous fais passer la liste des guillotinés d’aujourd’hui... J’ai appris que vous serez charmés de savoir tous les jours les noms des guillotinés ; je vous les ferai passer ainsi que les nouvelles des armées. Adieu. Salut et fraternité. » On se rappelle que c’est ce Gouillart ou Goullard que Germain a sacré chevalier de l’Ordre des Egaux dans la prison d’Arras. Il est maintenant commissaire de police à Paris<ref> ''La Terreur dans le Pas-de-Calais et dans le Nord, Hist. de Joseph Le Bon'', etc., par Paris, Arras, 1864.</ref>. Darthé (étudiant en droit en 1789) a rempli les fonctions d’accusateur public auprès des tribunaux révolutionnaires d’Arras et de Cambrai. Il a été le premier lieutenant du proconsul du Nord et le grand pourvoyeur de la guillotine dans toute la région. « Le Bon, écrit-il le 29 ventôse, est revenu de Paris transporté d’une sainte fureur contre l’inertie qui entravait les <references/>
Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/276
Je regrette vraiment, reprit-elle à voix basse, qu’il n’ait pas un coup de vin à boire, pour se donner des forces... — Il s’agit bien de boire ! murmura le père, qui tirait de son orgue quelques accords isolés pour s’assurer que les touches du clavier faisaient vibrer exactement toutes les cordes de l’instrument. Il s’agit de mon honneur, il s’agit de notre fortune. Nous allons jouer notre va-tout devant le roi et devant la cour. Ce soir, nous serons riches et heureux ; sinon, il me faudra renoncer à la musique et remonter sur le théâtre, pour gagner notre vie péniblement, misérablement, car il y a trop de comédiens en France, et le métier devient plus mauvais tous les jours. — Nous réussirons, j’en suis sûre, Jacques ! répliqua la vieille, qui n’avait des yeux que pour l’enfant, dont elle dirigeait et encourageait l’appétit. Quand notre Jean-Baptiste aura mangé à sa faim, il fera des merveilles... — Aura-t-il bientôt fini de tordre et avaler ? grommela le musicien, qui avait terminé l’examen de la tonalité des accords de son instrument. Il est grand temps qu’il rentre dans sa boîte... — Rien ne presse, Jacques, dit la bohémienne avec un air suppliant. L’enfant était si affamé, après avoir jeûné tout le jour... D’ailleurs, mon pauvre petit, tu emporteras là-dedans les pâtisseries et les sucreries... — Oh ! qu’il se garde bien de faire le moindre bruit ! s’écria le musicien avec colère, car nous devons paraître devant le roi, à neuf heures précises, et le moment est proche. Entends-tu, Jean-Baptiste, si tu manques ton jeu, si tu fais une fausse note, je te fouetterai jusqu’au <references/>
Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 6.djvu/705
(1782, à Vienne) de son premier ouvrage allemand. « Trop de notes, beaucoup trop de notes, mon cher Mozart, » aurait dit l’empereur Joseph II après une répétition. « J’en demande bien pardon à Votre Majesté. Il y en a tout juste autant qu’il faut. » ? Voir aussi dans Stendhal l’anecdote de Mozart entrant un soir incognito à l’Opéra de Berlin, qui jouait ''l’Enlèvement'', et donnant, au grand scandale des spectateurs et des interprètes, qui ne le reconnurent pas tout d’abord, des marques fort bruyantes tantôt de son contentement et tantôt de son déplaisir. Quelle était à cette époque la vie de Mozart, la vie de sa vingt-cinquième année, on le sait par sa correspondance : une vie toute de travail, d’amour pour sa fiancée, bientôt sa femme, sa « bonne et chère Constance, » dont l’héroïne de son opéra portait justement le nom; une vie toute de joie aussi, de cette innocente, pure, divine joie qui fut le génie même de Mozart et que la douleur humaine ne put jamais détruire ou seulement altérer. Dans ses lettres d’alors, Mozart parle aussi de la musique, de la sienne, et de la musique en général. C’est là que se trouve la phrase tant de fois citée : « Je ne sais... Mais dans un opéra il faut absolument que la poésie soit la fille obéissante de la musique. » Et ce qui suit : « Pourquoi donc les opéras italiens plaisent-ils partout, malgré toute la pauvreté de leurs livrets? Parce que la musique y règne en souveraine et fait oublier tout le reste. » Pour la pauvreté, le livret allemand de ''l’Enlèvement au sérail'' ne craint pas de rivaux. Mozart pourtant ne méprise pas ce qu’il appelle avec indulgence « la poésie de la pièce en général. » A son avis, tel air de Belmont « ne saurait être mieux écrit pour la musique. » Tel autre (de Constance) « n’est pas mal non plus. » Quant à la souveraineté de la musique, il ne s’agit pas d’une froide et surtout égoïste souveraineté. Toujours et partout Mozart veut une musique expressive, au besoin passionnée. Il n’en connaît même pas d’autre : « Savez-vous comment j’ai rendu l’air de Belmont, en ''la'' majeur?<ref> Au premier acte.</ref> Le cœur qui bat est déjà annoncé d’avance par les violons en octaves... On y voit le tremblement, l’irrésolution; on voit se soulever le cœur gonflé, ce qui est exprimé par un ''crescendo'' ; on entend les chuchotements, les soupirs, rendus par les premiers violons en sourdine et la flûte à l’unisson. » Ainsi Mozart, le plus grand peut-être des purs musiciens, n’est pas un moindre musicien <references/>
Lavergne - Fleurs de France, 1924.djvu/112
fêtée, la plus demandée en mariage de toutes les demoiselles de la ville. – Bah ! que sais-tu donc ? – Je vous le dirai demain, dit Jack, l’heure avance. Je vois déjà les chaises et les carrosses escortés de flambeaux passer dans la rue. Allons à l’Aigle-d’Or avec armes et bagages. »<section end=s1/> ---- {{t3|LA VEILLÉE DE CENDRILLON|II}} Les dames de Haütern étaient parties : les chambrières, tasses d’avoir travaillé, tout le jour aux parures de bal, se jetèrent sur leur lit pour reposer quelques heures. Les autres domestiques se couchèrent, après avoir remis du bois dans les poêles, et Sabine Lichtlin se retira dans sa petite chambre. Elle devait veiller, et bien loin de regretter le bal, toute jeune et belle qu’elle était, elle se dit : Enfin je vais avoir une soirée à moi, et jouir du silence et des souvenirs’ du temps passé ! Elle ajusta son feu, sa lampe, et, posant sur sa petite table un léger coffret de bois de rose, dont la clef ne quittait jamais sa ceinture, elle l’ouvrit et prit quelques lettres, quelques fleurs et une bague ancienne en or guilloché de noir, et dont le chaton était formé par une table de saphir. Elle relut ces lettres : Plusieurs d’entre elles, d’une écriture baroque et tremblée, et dont le cachet portait des armoiries, ne contenaient que quelques mots, presque toujours les mêmes. « Chère petite amie, je vous attends demain pour étudier avec vous notre duo. » L’une d’elles, plus mal écrite que les autres, disait : « Je<section end=s2/> <references/>
Bouyer - Claude Lorrain, Laurens.djvu/94
90 les propositions d'un empereur do Russie. Impérissable el fragile testament d'artiste, mais ipn faillit faire torl à sa gloire, ou, <ln moins, à son génie, car si les biographes onl enjolivé la vie de Claude, les esthètes mil méconnu le carac- tère de simi Livre: opposons sa méthode de travail à leurs fantaisies. Observons il abord comment une hypothèse devieni une vérité: n'est-ce pas un progrès déjà que de savoir qu'on ne saii rien ? El puis méfions-nous «1rs traducteurs de des- sins autan! que des restaurateurs de tableaux ! Car les soi- disanl fac-similé du Livre accusenl les infidélités, peut- être même les retouches que ses! permises le graveur anglais Richard Earlom en gravanl ces 200 Iaxis publiés le 2b mars 1777. après trois ans de travail, par l'éditeur John Boydcll,à Londres, sons le titre dorénavant consacré de Liber I eritatis ! Pourquoi ce recueil? Quelle en esl l'origine? L opinion la pins accréditée le représente comme une sorte de registre exactement tenu par un négociant de génie pour déjouer le nombre croissanl des faussaires el des pasticheurs de son ail : dès sa gloire naissante, on lin volait ses compositions à peine ébauchées, on les peignail dans sa manière el l'on vendait le plagiat comme authen- tique avant même l'achèvement de l'original. C'était à l'époque «le ses travaux pour Philippe IV. le roi d'Espagne. On voulait faire croire que le maître se répétait. Las de ces manœuvres et des discussions consécutives, Claude aurait décidé de former un Livide avec les dessins exacts de Ion les <references/>
Giraudoux - Siegfried et le Limousin.djvu/188
d’ondine que le Baedeker confirmait dans la prochaine édition, tous les esprits et éléments qui personnifient l’insaisissable toujours apprivoisés en quelques heures entre Rhin et Elbe, — et d’où vient l’amitié rapide qui lie soudain pour toujours, dans le premier restaurant auprès de la gare de l’Est, le grand exilé tchèque ou anglais avec le garçon berrichon qui le sert ? Geneviève était toujours logée à la place exacte où la baie et le salon du Casino, de leur soleil ou de leur ripolin, l’eussent sécrétée comme une perle. Eva à celle où la municipalité eût élevé la fontaine ou la statue. Deux ou trois fois j’entendis Eva appeler des animaux sous le prétexte que sa robe était de leur couleur et qu’ils étaient frères. — Venez, leur disait-elle, j’ai votre pelage ! Mais les braques blancs fuyaient ses robes blanches, les serins sa robe jaune, et acclamaient Geneviève en vert pomme. L’instinct qui révélait à Geneviève ce que les inconnus contenaient en héroïsme et en souffrance l’arrêtait aussi devant les bicyclettes qui avaient eu des accidents mortels et devant les maisons riches en drames mesquins ou confortables. C’est ainsi qu’elle nous mena prendre tous les jours le café chez les Weissberger. Frau Weissberger avait d’abord rougi de nous voir arriver juste à l’heure où la lumière soulignait le délabrement de son chalet et ses premières rides. Fanny Weissberger, au temps où elle était Fraülein Horn de Hambourg et millionnaire, méprisait sa fortune, ne pensait qu’à lui échapper, et, au prix de vingt années, après deux divorces, — de même que ses oncles les Friedlander avaient gagné la religion catholique en deux temps, le premier l’athéisme, le second le {{tiret|pro|testantisme}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/658
mal, mission tentante pour qui est, connue Jacob à cette époque, capable de tout souffrir, sauf qu’on ne soit pas chrétien. Son intolérance religieuse lui avait valu plus d’une querelle. « Je me glissai dans le premier bureau venu ; un homme était assis devant un pot de colle, une paire de ciseaux à la main. — De l’ouvrage. — De l’ouvrage ? — Et il m’écarta d’un grand geste de ses ciseaux. — On ne travaille pas ici, c’est un bureau de journal ! » Ailleurs le directeur l’interpelle : — Qu’êtes-vous ? — Charpentier. Assez naturellement l’autre éclate de rire et le met à la porte. Cette porte, Riis la rouvre pour lui montrer le poing. — Vous riez... vous riez aujourd’hui ; mais attendez un peu ! On eut tout le temps d’attendre. Après avoir fait des corvées de mainte nature, il devint, faute de mieux, commis voyageur ; mais son incompétence en matière de chiffres lui valut d’être toujours plumé. Une mauvaise fièvre le retenait dans une auberge de grand chemin, quand il apprit le mariage prochain d’Elisabeth. Elle allait épouser un officier muni de beaux états de service et des talens du monde, plus âgé qu’elle d’un certain nombre d’années, ce qui grandissait son prestige aux yeux de la fiancée passionnément éprise. Alors, pour la première et pour la seule fois de sa vie, Jacob Riis souhaita de mourir ; mais on ne meurt pas d’amour à vingt-quatre ans. On en vit, quelque souffrance qu’il vous apporte. Jacob se releva de son grabat en songeant que le mariage ne devait avoir lieu que l’été suivant. Quelque chose pouvait encore survenir ! Ce qui survint pour lui fut la misère noire. Il avait regagné New-York à pied par étapes, faisant le long du chemin un peu de colportage. Ses derniers dollars furent dépensés pour un surnumérariat au télégraphe qui ne lui procura pas d’emploi. Cependant le directeur de l’école télégraphique, l’ayant pris en estime, vint lui dire sous le porche, dont il faisait son domicile provisoire, que l’Association des journaux de New-York cherchait un reporter actif, à dix dollars par semaine pour commencer. Ce jour-là, un jour de neige, Jacob Riis tomba évanoui, <references/>
Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/225
Mme des Ursins, avec qui la connoissance ne pouvoit pas être encore bien faite depuis le bord de la mer où elle l’avoit rencontrée. En arrivant à Figuères, le roi, impatient de la voir, alla à cheval au-devant d’elle et revint de même à sa portière, où, dans ce premier embarras, Mme des Ursins leur fut d’un grand secours, quoique tout à fait inconnue au roi, et fort peu connue encore de la reine. En arrivant à Figuères, l’évêque diocésain les maria de nouveau avec peu de cérémonie, et bientôt après ils se mirent à table pour souper, servis par la princesse des Ursins et par les dames du palais, moitié de mets à l’espagnole, moitié à la française. Ce manège déplut à ces dames et à plusieurs seigneurs espagnols, avec qui elles avoient comploté de le marquer avec éclat ; en effet, il fut scandaleux. Sous un prétexte ou un autre, de la pesanteur ou de la chaleur des plats, ou du peu d’adresse avec laquelle ils étoient présentés aux dames, aucun plat François ne put arriver sur la table, et tous furent renversés, au contraire des mets espagnols, qui y furent tous servis sans malencontre. L’affectation et l’air chagrin, pour ne rien dire de plus, des dames du palais étoient trop visibles pour n’être pas aperçus. Le roi et la reine eurent la sagesse de n’en faire aucun semblant, et Mme des Ursins, fort étonnée, ne dit pas un mot. Après un long et fâcheux repas, le roi et la reine se retirèrent. Alors ce qui avoit été retenu pendant le souper débanda. La reine se mit à pleurer ses Piémontaises. Comme un enfant qu’elle étoit, elle se crut perdue entre les mains de dames si insolentes, et quand il fut question de se coucher, elle dit tout net qu’elle n’en feroit rien et qu’elle vouloit s’en retourner. On lui dit ce qu’on put pour la remettre, mais l’étonnement et l’embarras furent grands quand on vit qu’on n’en pouvoit venir à bout. Le roi déshabillé attendoit toujours. Enfin la princesse des Ursins, à bout de raisons et d’éloquence, fut obligée d’aller avouer au roi et à Marsin <references/>
Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/519
adversaire de Napoléon, les Anglais, après notre succès de Port-Mahon, redevinrent maîtres de la mer et purent s’emparer de nos colonies, avec lesquelles nos communications étaient coupées. Malgré une glorieuse résistance, Montcalm succomba au Canada, Lally-Tollendal aux Indes. Une à une, nos autres possessions furent cueillies par les Anglais. Il est plus difficile de s’expliquer que la guerre n’ait pas mieux tourné pour nous en Allemagne. On se rend compte des fautes militaires que nos généraux commirent. Mais il leur manquait, à eux aussi, le feu sacré, la conviction : on soupçonne d’Estrées d’avoir été hostile à l’alliance autrichienne, et si Frédéric II, dont cette guerre fit un héros germanique, finit par échapper à la quadruple alliance, à la formidable coalition qui l’attaquait, il ne dut pas son salut à ses talents militaires seuls mais à l’espèce de popularité que la mode philosophique et littéraire, habilement soignée, lui avait donnée jusque chez ses adversaires. En 1757, la Prusse, attaquée de quatre côtés à la fois, semblait sur le point de succomber. Nous avions mis hors de combat les Anglo-Hanovriens qui avaient capitulé à Closterseven. Les Anglais avaient perdu leurs moyens d’agir sur le continent, mais ils ne se sont jamais inclinés devant une défaite continentale tant qu’ils ont été maîtres de la mer. Les États de Frédéric étaient envahis par les Suédois, les Russes et les Autrichiens qui venaient d’entrer à Berlin. L’armée française, avec un contingent important que les princes allemands avaient fourni, s’avançait vers la Saxe. Frédéric, à Rosbach, bouscula les vingt mille hommes de troupes auxiliaires allemandes qui se débandèrent et battit Soubise. Nous avons, dans notre histoire, subi des défaites plus graves. Il n’en est pas qui aient été ressenties avec plus d’humiliation que celle de Rosbach. À cette sorte de honte, un sentiment mauvais et nouveau se mêla chez les Français : le plaisir d’accuser nos généraux d’incapacité, d’opposer le luxe de nos officiers aux simples vertus du vainqueur. Jamais l’admiration de l’ennemi n’alla si loin : elle a duré, elle a profité à la Prusse jusqu’à la veille de 1870. Frédéric de Hohenzollern passa pour le type du souverain éclairé. Ses victoires, <references/>
Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/24
{{tiret2|ques|tions}} minutieuses que l’on m’a adressées sur la littérature latine ; mais je me suis pleinement relevé pour la littérature française, où un heureux sort m’a fait tomber sur l’auteur et les matières qui m’étaient le plus familiers : Descartes et la philosophie française. Enfin, bonne amie, voici le dernier résultat, tel qu’il a été définitivement proclamé. Sur les seize admissibles, quatorze ont été reçus, et sur ces quatorze, je suis placé le quatrième. Les deux premiers sont de l’École Normale : elle a pourtant cette fois éprouvé un échec, comparativement à ses succès passés ; car plusieurs de ses candidats ont été éliminés, soit à l’examen oral, soit aux épreuves écrites. Je n’ai qu’à me louer des égards et de la bienveillance de mes juges, bien que je ne leur fusse recommandé par personne. Comme on doit inscrire en tête de sa copie de composition le nom de l’établissement où l’on a fait son éducation, j’ai du parler du petit séminaire, mais comme on aurait pu en conclure que je me destinais à la carrière de l’enseignement ecclésiastique (équivoque d’autant plus facile que quelques autres ecclésiastiques faisaient partie du concours), j’ai écrit une lettre à M. Le Clerc, où je lui ai donné on quelques lignes significatives tous les éclaircissements nécessaires. J’ai songé quelque temps à profiter de cette circonstance pour lui faire une visite. Mais j’ai trouvé le prétexte trop vague : cela ne compterait que pour visite de formalité, et n’aurait pas eu de <references/>
Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/69
madame de Beauiuont ; mais il se liait successivement avec mesdames de Bressieux, de Valory, de Gontaut, de Chàtenay,avec lebonM. de Clause !, dont le tempérament religieux et contemplatif ne s’était point encore échauffé aux ardeurs de la discussion parlementaire ; avecM.deFéletz, qui se plaignait de l’avoir connu trop tard, et dont il vantait souvent l’ingénieuse polémique,l’atticisme etle sens exquis ; avec un de mes parents, le docte et pieux M. de Lacalpradc, que je ne puis nommer sans que s’éveille en mon âme un profond sentiment de reconnaissance ; avec M. l’abbé Gallard, M. l’abbé Cotteret, depuis évoque de Beau vais, M. de Saint-Surin, M. de Bonald, M. le comte de Sèze, M. Romain de Sèze, son fils, et quelques autres hommes rangés dans la nuance d’opinions que la plupart de ces noms rappellent. Je ne crois pas toutefois qu’à l’époque de la restauration il ait bien sérieusement partagé les vivacités du cercle qui l’entourait. 11 jugeait fort sévèrement les maximes d’état de M. de Bonald, quoiqu’il aimât beaucoup son caractère et sa personne ; il reprochait, avec une grâce charmante, à M. de Clausel de se laisser détourner, par les tourbillons du moment, de sa primitive et pacifique destination ; enfin, écrivant à un anglais de ses amis, M. Frisell, homme plein de science, que lui avait rendu cher un cœur excellent caché sous des dehors sévères, il disait, au sujet d’un des articles magistraux du Conservateur : « II a fait ici beaucoup de bruit, et peut-être beaucoup de bien ; mais « qui le sait ? » À ces indices, et malgré quelques colères passagères dont je rencontre les traces ça et là, il me semble qu’il regardait un peu la politique comme audessous de lui quant aux passions qu’elle engendre, <references/>
Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 15.djvu/648
métallurgie, en général, emploie peu de jeunes gens ; et, d’autre, part, chaque ouvrier y demeure, tant qu’il le veut ou qu’il le peut, sans jamais sortir de sa catégorie ou spécialité. Il n’y a donc point entre les catégories ou spécialités de répartition par âge voulue et délibérée, mais seulement cette répartition naturelle et automatique que le temps opère lui-même. Voici l’usine que nous avons désignée sous le nom d’usine A. On y comptait, au mois d’octobre 1902, 1 704 ouvriers qui, par âge, de la jeunesse à la vieillesse, et il serait à peine excessif de dire d’un extrême à l’autre extrême, de quinze à quatre-vingts ans, se répartissaient ainsi : <center>''Classement des 1 704 ouvriers, par âge, et de 5 en 5 ans'' : </center> ! ! |----- | 15 à 20 | 183 | 20 à 25 | 155 |----- | 25 à 30 | 295 | 30 à 35 | 241 |----- | 35 à 40 | 224 | 40 à 45 | 225 |----- | 45 à 50 | 136 | 50 à 55 | 98 |----- | 55 à 60 | 75 | 60 à 65 | 47 |----- | 65 à 70 | 15 | 70 à 75 | 7 |----- | 75 à 80 | 3 |} Et voici ce que disent ces chiffres, en prenant pour point de départ le premier nombre, celui des ouvriers âgés de quinze à vingt ans, qui représente l’apport de l’élément nouveau, l’appoint de la génération nouvelle. Entre vingt et vingt-cinq ans, l’obligation du service militaire abaisse ce nombre, comme il est dans l’ordre ; et si elle ne l’abaisse pas davantage, c’est que, sans tenir compte des exemptions, dispenses ou ajournemens, au-delà de vingt ans et presque de vingt à vingt et un ans, entre la conscription et l’incorporation, il y a un intervalle, un délai ; il y a une marge qui ne reste pas inoccupée ; c’est aussi qu’après vingt-trois ans ou vers vingt-quatre ans, et en tout cas de vingt-quatre à vingt-cinq ans, lorsqu’un contingent quitte l’usine, un autre, une partie d’un autre y est rentrée, et ce qui doit revenir est revenu. De vingt-cinq à trente ans, la ligne monte rapidement, la courbe s’élance comme en fusée et atteint son point le plus haut ; elle redescend, elle s’infléchit un peu de trente à trente-cinq ans ; encore un peu de trente-cinq à quarante ; elle s’aplanit là, semble prendre son niveau et le garder de quarante à quarante-cinq ans ; puis brusquement, et par bonds, qui de cinq ans en cinq ans diminuent chaque fois environ de moitié les chiffres correspondant à cinquante, à cinquante-cinq, à soixante, à soixante-cinq, à soixante-dix, à soixante-quinze, à quatre-vingts ans, en sept étapes revient toucher terre aux approches de zéro. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 52.djvu/518
extérieures se réconcilient, la nature est cruelle, mauvaise, inexplicable ; elle est une détestable maîtresse de morale. Si nous nous en tenons au point de vue positiviste, selon lequel elle est le dernier terme assignable, le dernier principe de la connaissance, elle n’a le droit de prétendre ni à notre respect ni à notre approbation. A force de fantaisie et de mysticisme mêlés, on a fait d’elle une sorte de grand hiéroglyphe. Mais qu’on lui applique seulement une des règles de la moralité humaine, le grand hiéroglyphe, comme l’a si puissamment montré J. Stuart Mill, devient un monstre. Il n’est pas de crime qui ne soit tous les jours commis par la nature ; elle ignore tout sentiment de justice ou de pitié ; ses tendresses illusoires et sa bienfaisance se tournent à chaque instant en perfidie ; elle est indifférente ou traîtresse. « Tantôt elle joue le rôle de l’avarice, tantôt celui de la prodigalité ; elle offre ici une pureté sublime, ailleurs une corruption révoltante, et, s’il faut la juger d’après un type moral, ses capacités admirables ne font qu’ajouter à l’horreur de ses crimes. Comment donc y aurait-il quelque chose de noble et de sacré dans l’intimité de cette grande criminelle<ref> W. Mallock, ouvrage cité ; pages 155-165. </ref> ? » Et voyez comme elle s’intéresse à ceux qui la servent avec passion, à ceux qui l’ont le plus aimée. Voici un savant qui, sur quatre-vingts ans de sa vie, en a dévoué plus de soixante à ce culte ardent du vrai, à la poursuite de la nature dans toutes ses retraites et ses mystères ; il a vécu plus que tout autre « dans cette communion divine, » dont nous parle Tyndall. « Il a subordonné à cette passion maîtresse tous les mobiles inférieurs de la vie, l’intérêt, les jouissances, le plaisir. La fin d’une si belle vie aurait dû être calme, douce et consolée ; mais cette marâtre nature qui récompense si mal ici bas ce qu’on fait pour coopérer à ses fins, montra en ce qui le concerne sa noire ingratitude. Les dernières années de M. Littré furent remplies par de cruelles souffrances<ref> Discours de M. Renan à la séance de réception de M. Pasteur. </ref>. » Et pourquoi l’éloquent écrivain qui nous fait entendre cette plainte s’étonnerait-il de cette dureté de la nature ? A coup sûr, M. Littré, en vrai positiviste, ne s’en serait ni étonné ni scandalisé. Il savait que la nature ne punit et ne récompense personne ; impassible, elle déroule autour de nous l’ordre fatal de ses phénomènes ; elle développe devant nous ses mondes et ses soleils sans se soucier de nous qu’elle ne connaît pas. Comment aurait-elle quelque tendresse pour ceux qui coopèrent à ses fins, puisqu’elle-même, si elle a des fins, les poursuit en aveugle et les ignore éternellement ? Supposer même qu’elle a des fins, ne serait-ce pas sortir de la règle et des conditions de la doctrine ? <references/>
Anonyme - Doon de la Roche.djvu/73
{{Numérotation|{{sc|introduction}}||{{sc|lxix}}}}''F'', il secourt l’empereur de Constantinople contre son ennemi, l’''{{lang|es|almirante Mirabel}}'', réussit à le vaincre et à anéantir son armée ; l’empereur lui donne la main de sa fille Mergelina et lui cède l’empire (fol. c. {{rom-min|vj|6}}. v°). — Bientôt après ce mariage, Enrrique se rappelle Tomillas et sa trahison envers Oliva ; avec l’approbation de sa femme, il organise une expédition pour châtier le traître. — Sur ces entrefaites, la renommée des exploits d’Enrrique étant parvenue en France, le pape avait ordonné au comte de La Roche de reprendre sa femme. Il en résulte un différend entre le comte et Tomillas, dont la fille se trouve répudiée ; le roi prend parti pour Tomillas ; guerre : le comte et Oliva sont assiégés dans La Roche. — Venu en France avec son armée, Enrrique trouve ses parents assiégés ; il pénètre sous un déguisement dans le château, sans cependant se faire reconnaître ; puis il attaque les traîtres avec son armée : il tue de sa propre main Malindre, son demi-frère (fol. d. {{rom-min|iij|3}}. v°) ; Tomillas est pris et supplicié (fol. d. {{rom-min|vij|7}}. v°)<ref>L’innocence d’Oliva est démontrée d’une façon ingénieuse et compliquée, qui doit être une invention de l’auteur espagnol (fol. d. {{rom-min|v|5}}. v°), étant en rapport avec la forme spéciale qu’a revêtue dans ''E'' la machination de Tomillas contre Oliva.</ref>. On voit que cette suite d’événements ressemble en gros à ce qui est raconté dans ''F'', mais en diffère par bien des détails ; la grande différence consiste en ceci que, dans ''E'', le fils, Enrrique (= Landri) passe seul en Orient, le père restant en France ; par conséquent, Doon n’est pas fait prisonnier en combattant l’empereur de Constantinople au service du roi de Hongrie ; la délivrance du père par le fils a lieu dans des circonstances tout autres. Cet épisode de la guerre d’Orient, du combat entre le père et le fils, etc., est-il une invention de l’auteur de ''F'', ou bien se trouvait-il dans l’original de ''E'' et a-t-il été laissé de côté par le traducteur espagnol ? On pourrait discuter longuement là-dessus, <references/>
Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 56.djvu/64
coupables : car ils ont primé, commandé sans droit, et, contre tous les droits, abusé de l’homme; ayant joui de leur rang, il est juste qu’ils en pâtissent. Privilégiés à rebours, ils seront traités comme les gens sans aveu l’étaient sous leur règne, ramassés par la police avec leurs familles, expédiés au centre, emprisonnés en tas, exécutés en masse, à tout le moins expulsés de Paris, des ports, des villes fortes, internés, obligés chaque jour de se présenter à la municipalité, privés des droits politiques, exclus des fonctions publiques, « des sociétés populaires<ref> Buchez et Roux, XXXIII, 323 (Rapport de Saint-Just, 26 germinal an II, et décret du 26-29 germinal, art. 4, 13, 15). ''Ibid''., 215. </ref>, des comités de surveillance, des assemblées de commune et de section. » Encore sommes-nous indulgens; puisqu’ils sont notés d’infamie, nous devrions les assimiler aux galériens et les embrigader pour les faire travailler aux routes<ref> Buchez et Roux, XXIX, 166 (Rapport de Saint-Just,10 octobre 1793). «Ce serait le seul bien qu’ils auraient fait à la patrie... Il serait juste que le peuple régnât à son tour sur ses oppresseurs et que la sueur baignât l’orgueil de leur front. » </ref>. « La justice condamne les ennemis du peuple et les partisans de la tyrannie parmi nous à un esclavage éternel<ref> ''Ibid''., XXXI, 309. (Rapport de Saint-Just, 8 ventôse an II.) </ref>. » Mais cela ne suffit pas ; car, outre l’aristocratie de rang, il en est d’autres auxquelles l’Assemblée constituante n’a pas touché<ref> ''Ibid''., XXVI, 435. (Discours de Robespierre sur la Constitution, 10 mai 1793.) « Qu’étaient nos usages et nos prétendues lois, sinon le code de l’impertinence et de la bassesse, où le mépris des hommes était soumis à une espèce de tarif et gradué suivant des règles aussi bizarres que multipliées? Mépriser et être méprisé, ramper pour dominer, esclaves et tyrans tour à tour, tantôt à genoux devant un maître, tantôt foulant aux pieds le peuple, telle était notre ambition à tous tant que nous étions, ''hommes bien nés ou hommes bien élevés, gens du commun ou gens comme il faut, hommes de loi ou financiers, robins ou hommes d’épée''. » — Archives nationales, F7 31167 (Rapport de l’observateur Charmont, 10 nivôse an II). « L’effigie de Boileau, qui était au collège de Lisieux, a été descendue parmi les statues de saints qu’on a retirées de leurs niches. Ainsi plus de distinctions : les saints et les auteurs sont rangés dans la même classe. » </ref>, notamment l’aristocratie de fortune. De toutes les souverainetés, celle que le riche exerce sur les pauvres est la plus pesante. En effet, non-seulement, au mépris de l’égalité, il consomme plus que sa part dans le produit du travail commun, et il consomme sans produire; mais encore, au mépris de la liberté, il peut à son gré fixer les salaires, et, au mépris de l’humanité, il fixe toujours le plus bas qu’il peut. Entre lui et les nécessiteux il ne se fait jamais que des contrats iniques. Seul détenteur de la terre, du capital et de toutes les choses nécessaires à la vie, il impose ses conditions que les autres, dépourvus d’avances, sont obligés d’accepter sous peine de mourir de faim ; il exploite à sa discrétion des besoins qui ne peuvent attendre, et profite de son monopole pour maintenir les indigens dans <references/>
Bloy - La femme pauvre.djvu/136
Clotilde, restée seule, se demanda, pour la première fois de sa vie, ce que pouvaient être les Anges de Dieu !... <section begin="chapitre18"/><nowiki/> {{T3|XVIII}} {{PM|M|onsieur}}, vous êtes beau comme un ange. — Madame, vous avez de l’esprit comme un démon. S’il y eut jamais un champ de manœuvres où se soient exercés avec ampleur les instincts de prostitution particuliers à la race humaine, c’est assurément le royaume des esprits célestes ou le sombre empire des intelligences réprouvées. On a tellement compris que l’habitacle cellulaire de la Désobéissance est rempli de compagnons invisibles, qu’on a voulu, dans tous les temps, les associer en quelque manière aux actes visibles qui s’accomplissaient dans les divers cabanons. Alors, on s’est appelé mon chérubin ! ou mon petit satan ! et toutes les cochonneries sublunaires, aussi bien que les sottises les plus triomphales, ont été pratiquées sous d’arbitraires invocations qui déshonoraient à la fois le ciel et l’enfer. Et pour assouvir les cœurs en travail de démangeaisons sublimes, la poésie et l’imagerie plastique se sont évertuées aux apothéoses ! Ils sont Sept, — ô mon tendre amour ! — qui vous regardent curieusement des sept encognures de l’Éternité ! On les croirait sur le point de coller leurs bouches aux<section end="chapitre18"/> <references/>
Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/528
aura point de mariage cette nuit non plus, et s’il n’y en a point du tout, ce sera encore mieux. Soupons, puisque nous y voilà. C’est un bon cœur que ce M. Doucin, et vous lui avez bien obligation, mademoiselle, dit-elle à ma future, on ne saurait croire combien il vous aime toutes deux, votre bonne sœur et vous ; le pauvre homme ! il s’en va presque la larme à l’œil, et j’ai pleuré moi-même en le quittant ; je ne fais que d’essuyer mes yeux. Quelle nouvelle pour cette sœur, mon Dieu ! qu’est-ce que c’est que nous ? À qui en avez-vous donc, madame, avec vos exclamations ? lui dit Mlle Habert. Oh ! rien, reprit-elle ; mais me voilà bien ébaubie. Passe pour se quitter toutes deux, on n’est pas obligé de vivre ensemble, et vous serez aussi bien ici : mais se marier en cachette ; et puis ce Pont-Neuf où l’on se rencontre ; un mari sur le Pont-Neuf ! Vous qui êtes si pieuse, si raisonnable, qui êtes de famille, qui êtes riche : oh ! pour cela, vous n’y songez pas ; je n’en veux pas dire davantage ; car on m’a recommandé de ne vous parler qu’en secret ; c’est une affaire qu’il ne faut pas que tout le monde sache. Et que vous apprenez pourtant à tout le monde, lui répondit Mlle Habert d’un ton de dépit. Non, non, reprit la discrète d’Alain, je ne parle que <references/>
Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/498
maître pour aller frapper à la porte. « Mon oncle Tobie, démentant en ce moment sa manière invariable de traiter son fidèle domestique, ne lui répondit rien. — La vérité étoit qu’il n’avoit pas encore bien rédigé toutes ses idées. Il auroit désiré une autre conférence avec Trim. Et tandis que le caporal montoit les trois marches qui étoient devant la porte, mon oncle Tobie cracha deux fois. — À chaque fois le caporal s’arrêta par une sorte d’instinct ; — il resta une minute le marteau de la porte suspendu dans sa main ; — il hésitoit sans savoir pourquoi. — Cependant Brigitte, morfondue à force d’attendre, faisoit sentinelle en dedans, le pouce et le premier doigt appuyés sur le loquet. Mistriss Wadman, assise derrière le rideau de sa fenêtre, retenoit son souffle, et guettoit leur approche. — On lisoit dans ses yeux le présage de sa défaite. « Trim, dit mon oncle Tobie ! » — Mais comme il ouvroit la bouche, la minute expira, et Trim laissa tomber le marteau. Mon oncle Tobie, voyant qu’il ne pouvoit plus reculer, se mit à siffler son lilla-burello. <references/>
Gautier - Le Second Rang du Collier.djvu/86
Dans le salon, les convives sont maintenant réunis et causent par groupes, assis ou debout... Tous n’ont pas été invités : la maison est hospitalière et la table s’allonge indéfiniment. Nombre d’artistes italiens, jeunes ambitions ou espérances déçues, sont les clients de ces gloires ; ils évoluent dans leur atmosphère, attirant sur eux un peu de lumière, ou se réchauffant à leur rayonnement. Beaucoup de personnes connues, fameuses même en ce temps-là, sont les intimes des deux grands artistes et leur forment une cour. Ce soir, j’aperçois la jolie barbe noire de Gaetano Braga, le délicieux violoncelliste, qui est aussi, et surtout, compositeur. On a représenté de lui, au Théâtre-Italien, un opéra en trois actes : ''Margherita la Mendicante'', et sa ''Sérénade'', pour chant avec accompagnement de violoncelle et de piano, a fait fureur. Braga vient souvent nous voir à Neuilly : nous nous glissons à travers les groupes, ma sœur et moi, pour aller lui dire bonsoir. Il n’a pas l’air, tout d’abord, de nous reconnaître, puis nous regarde d’un air consterné : — Pourquoi vous a-t-on déguisées comme cela ? Nous ne pensions plus à nos toilettes ! — Avec de si jolies figures... On veut donc vous enlaidir ?... Et il s’éloigne, en haussant les épaules. Nous allons rejoindre Giulia Grisi, dans le petit salon. Elle est assise sur un divan avec ses fillettes <references/>
T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/445
<poem> Plus de chef, plus d’audace ; il est quelques Complices Dont je puis à loisir ordonner les supplices. Mais quelle émotion agite votre cœur ? Un peu de sang versé vous fait-il tant de peur ? Pour goûter pleinement le fruit de ma vengeance, Voyez de votre amour qu’elle fait l’assurance, Et libre à disposer de vos vœux les plus doux, Jouissez d’un plaisir qu’elle n’offre qu’à vous. Qu’un bien si précieux vous la doit rendre chère ! Vous la connoissez mal, goûtez-la toute entière, Et puis que votre rage en chérit tant l’appas, Voyez-y des douceurs que vous n’attendiez pas. Ne vous imputez point un crime détestable ; Si Théodat est mort, j’en suis seule coupable, Votre haine à sa perte a peu contribué, Par vous, par vos fureurs, c’est moi qui l’ai tué. C’est moi qui vous immole une tête si chère. Ciel ! Que me dites-vous ? Ce qu’il ne faut plus taire. Malgré tout mon orgueil Théodat fut mon choix, Hier je m’en expliquai pour la première fois, Il sut que je l’aimois, et cette connoissance Rendant à son amour toute sa violence, Ni votre cœur offert, ni le titre de roi, Ne purent obtenir qu’il renonçât à moi. Il suivit de son feu l’emportement funeste, Combattit mon hymen. Vous avez fait le reste, Et son sang répandu, lors qu’il ne craignoit rien, En vengeant votre amour, désespère le mien. Pardonne, Théodat, à ma jalouse envie. Ma fierté fit toujours le malheur de ta vie, Et par un surprenant et déplorable sort, Pour s’être démentie, elle cause ta mort. </poem> <references/>
Froissart - Poésies (1829).djvu/322
{{Nr|306|POÉSIES|}}<poem style="padding-left:4em;">Et moi bellement conforter, Et le plaisir ma dame attendre Où par bien je pooie tendre. Et aultrement ne le fis oncques. Elle le savoit bien adonques, Aussi je li monstroie au mains. Mès, par Dieu ! c’estoit sus le mains. Par parolles ne li pooie Monstrer l’amour qu’à li avoie, Forsque par signes et par plains De quoi j’estoie lors moult plains. :À l’entrée dou joli may, Ceste que par amours amai Un jour esbatre s’en ala. De son alée on me parla, Et de celle qui o li furent. Je soc bien l’eure qu’elles murent. Moi et un mien ami très grant, Pour faire mon plaisir engrant Nous mesins en cesti voiage ; Et par ordenance moult sage Mon compagnon nous fist acointe De celles dont j’oc le coer cointe ; Car sans ce qu’on s’en perçuist Et que nulles d’elles sceuist Au mains celle que je doubtoie, Avec elles fumes en voie. Diex ! que le temps estoit jolis, Li airs clers et quois et seris, Et cil rosegnol hault chantoient</poem> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 16.djvu/693
avait vu à Valparaiso la ''Diana'', de 50 canons, et au Callao, ainsi que nous venons de le dire, l’''Aurora''; mais en dehors de ces seules données positives, on n’avait pour tous renseignemens que des bruits recueillis çà et là comme au hasard, et provenant, qui plus est, des Russes eux-mêmes, lesquels disaient avoir en ce moment dans ces mers trois frégates, une corvette, deux bricks et trois vapeurs. Il résultait de cette ignorance que la question était loin de se présenter aussi nettement qu’on eût pu le désirer : s’il était en effet permis de supposer que l’ennemi concentrerait ses navires dans ses possessions des côtes orientales d’Asie, on pouvait craindre d’un autre côté que quelqu’une de ses frégates, sous le commandement d’un officier audacieux et habile, n’essayât de recommencer contre le commerce maritime des alliés dans ces mers la célèbre croisière du capitaine Porter sur l’''Essex''<ref> Le nom du capitaine David Porter est resté célèbre dans les annales du Pacifique par la hardiesse avec laquelle, pendant la guerre de 1812, 1813 et 1814, il promena sur ce vaste océan le pavillon américain, dont il était le seul représentant. Parti des États-Unis sur l’''Essex'', frégate de quarante-six canons, après avoir fait quelques prises dans l’Atlantique, il vint doubler le cap Horn, et remonta la côte occidentale d’Amérique jusqu’au groupe des îles Gallapagos, centre d’une importante pêche baleinière à cette époque. Habile à se déguiser et à tromper par sa manœuvre un ennemi trop confiant, il réussit à capturer 12 bâtimens anglais; puis, ayant été informé qu’une division de quatre navires, portant ensemble plus de cent canons, avait été expédiée d’Angleterre avec la mission spéciale de mettre un terme à ses ravages, il quitta sa croisière pour réparer en un mouillage sur son navire fatigué par une longue navigation, et, chose assez curieuse, le point choisi par lui à cet effet, en raison du secret que lui promettait cette position écartée, fut précisément la baie d’Anna-Maria, dans l’île de Nukahiva, où nous verrons qu’en 1854 les amiraux alliés fixèrent le rendez-vous de leurs bâtimens. Ce fut seulement en mars 1814 qu’attaqué par une force supérieure dans le port de Valparaiso, au mépris de la neutralité chilienne, l’''Essex'' dut se rendre au Commodore Hillyar dans un état qui témoignait de l’acharnement de sa résistance. Indépendamment des frais d’armement des navires envoyés à sa poursuite, les pertes que cette croisière avait fait éprouver au commerce britannique s’élevèrent à plus de 13 millions de francs; la terreur que l’Essex répandait fut si grande que tous les ports de la côte d’Amérique étaient pleins de navires anglais qui préféraient l’inaction aux chances d’une capture à peu près certaine. Peu de lectures sont d’un intérêt plus vif que le journal où le capitaine Porter a présenté le récit de sa campagne, et surtout peu de livres offrent un tableau plus vrai de la curieuse existence d’un navire livré à ses propres ressources pendant une pénible navigation de plusieurs années. </ref>. En autres termes, le but à poursuivre était double, et l’importance des nombreux navires marchands répandus sur la côte, de San-Francisco au cap Horn, pouvait faire craindre d’abandonner sans défense cette riche proie à un ennemi que l’on irait inutilement chercher dans les ports de la Sibérie et du Kamtchatka. Il est probable que des préoccupations de ce genre eurent d’abord sur l’esprit des amiraux français et anglais une influence que ne justifiait guère l’esprit généralement peu aventureux de la marine russe. Toujours est-il que l’on vit commencer <references/>
Nodier - Ackermann - Vocabulaire de la langue française.djvu/153
{{tiret2|l’en|droit}} des épaules. | Il se dit aussi en parlant D’un habit. (Ca-ru-re.) f CARTAYER. v. n. Se dit D’un cocher qui met une ornière entre les deux chevaux et entre les deux roues de , la voiture. ( Cartë-ié. ) CARTE, s. f. (Cfiarta.) Assemblage de plusieurs papiers collés l’un sur l’autre. Dans ce sens, on dit plutôt Carton. | Petit carton fin, coupé en carré long, qui est marqué, d’un côté, de qq, figure et de qq. couleur, et dont on se sert pour jouer à divers jeux. | Le dessous des cartes t La partie colorée de& cartes, qui reste cachée quand on donne ou qu’on coupé, | Demander carte, Proposer de mettre de côté un certain nombre de cartes pour en prendre de nouvelles. | Fig. et fam., Le dessous des cartes , Les ressorts secrets d’une affaire. | Fig. et fam., Brouiller les cartes, Chercher à mettre du trouble, à embrouiller les affaires. | Fie. et fam., Cartes sur table, Sans dissimuler. | Tirer les cartes, Chercher l’avenir dans la disposition fortuite des cartes. | Fig. et fam., Château de cartes, Petite maison de campagne fort enjolivée et peu solidement bâtie. | Au plur., De ce que les joueurs laissent pour le payement des cartes : on dit aujourd’hui Mettre au flambeau, | L’espèce de billet, ordinairement imprimé , qu’on délivre à une personne pour qu’elle soit admise en qq. lieu , ou pour qu’elle puisse, au besoin, faire reconnaître sa qualité, etc. [ Carte de visite , ou carte , Petite carte sur laquelle on a écrit ou fait graver son nom, et qu’on laisse à la porte des personnes qui se trouvent absentes lorsqu’on va pour leur rendre visite. | Carte d* adresse % Carte sur laquelle un fabricant, un marchand fait imprimer son adresse et une note des objets qu’il fabrique ou qu’il vend. | Prov. et fig., Donner carte blanche , Plein pouvoir. | Chez les traiteurs, Liste des mets qu’on peut demander. | Le mémoire de la dépense du repas. | Feuille de papier sur laquelle est représentée qq. partie de la surface du globe terrestre. | La connaissance géographique d’un pays. | Carte universelle. V. Mappemonde, f Carte CAR des prisonniers. | L’ornement qui entoura le cadran de certaines pendules portative» faites pour être appliquées à la muraille, dans un appartement ; La pendule même. (Car-tel.) CARTERON. s. m. V m Quakterox. CARTÉSIANISME, s. m. Philosophie de Descartes. (Car-té-zi-a-nisme.) CARTÉSIEN, IENNE. adj. Qui a rapport , qui appartient a la doctrine de Descartes. | Adj. et subst., Qui a adopté cette doctrine. (Car-té-zi-in ; ë-ne.) CARTHAJV1E. s. m. ( Carthamus. ) Plante, n. autr. Safran bâtard , dont les fleurs servent à teindre en rouge , et qui porte des semences purgatives, appelées Graines de perroquet. (Car-ta-me.) CARTIER, s. m. Celui qui fait et vend des cartes à jouer. (Car-tié.) CARTILAGE, s. m. {Cartilago.) Partie blanche, dure, lisse, élastique, privée de sentiment , qui se trouve surtout aux extrémités des os , et qu’on appelle vulgairement le croquant dans la viande de boucherie, (Car-ti-la-je.) CARTILAGINEUX , EUSE. adj. ( Carttlaginosus. ) Qui est de la nature du cartilage, qui est composé de cartilages. (Car-tila-ji-neû ; ze.) CARTISANE. s. f. Petits morceaux de carton fin , autour desquels on a tortillé du fil, etc., et qui font relief dans les dentelles et les broderies. (Car-ti-za-ne.) CARTON, s. m. Carte grosse et forte, faite de papier broyé , battu et collé. | Carton fin, Celui qui n’est fait que de plusieurs papiers celles les uns sur les autres. | Boîte Faite de carton , dans laquelle on serre des papiers ou des Tionnets , etc. | Carton de dessins, Grand portefeuille de carton, dans lequel on serre des dessins, I La pâte même dont on fait le carton ordinaire. | Un ou plusieurs feuillets d’impression détachés d|une feuille entière. | Feuillet qu’on refait, à cause de qq. changement qu’on veut y faire. | Se dît De dessins en grand, tracés sur du papier, d’après lesquels le peintre fait sa fresque, ou qu’on donne aux ouvriers en tapisseries pour servir de modèles. | T # d’archit., carton ou de fer-blanc chan- générale, La carte de .toute une contrée, par opposition à Carte particulière. | Carte hj- Feuille de drographiqut , ou marine , Carte qui repré- tournée qui sert à tracer des profils, sente les côtes , les mouillages , les son- " " dages et les rumbs de vent. | Carte astronomique ou céleste, Carte qui représente les constellations daas la situation qu’elles ont les unes à l’égard des autres* | Carte généalogique , Tableau qui contient toute la généalogie d’une maison. | Fig. et tam., Perdre la carte , Se troubler. * CARTEL, s. m. (Chartella.) Défi par écrit pour un combat singulier. (Défi par écrit pour un combat dans une fête , comme aux tournois. | Règlement fait entre deux partis ennemis pour la rançon, ou l’échanse CARTONNAGE, s. m. Action de cartonner un livre , de le relier en carton ; ou L’ouvrage qui en résulte. (Car-to-na-je. ) CARTONNER, v. a. Relier un livre en carton. (Car-to-né.) CARTONNIER. s, m. Celui qui fabrique et vend du carton. | Celui qui travaille en carton. (Car-to-nié.) CARTOUCHE, s. m. ( Cartoccio , ù. ) Ornement de sculpture ou de peinture, représentant un carton roulé et tortillé par les bords. CARTOUCHE, s. f. Charge pour le {{tiret|ca|non}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/225
Cet officier a publié depuis, en Angleterre, des documens intéressans sur la marine russe{{lié}}<ref>{{lang|en|''The Russian fleet in the Baltic in 1836, with some remarks intended to draw attention to the danger of leaving our navy in its present extremely reduced state'', by H.{{lié}}W.Craufurd, commander in the royal navy. London, 1837.}}</ref>. Venu à Saint-Pétersbourg dans l’été de 1836, il a été accueilli par l’empereur avec la bienveillance et l’urbanité parfaites que tous les étrangers trouvent près de ce souverain. Je citerai donc ses paroles, mais en faisant remarquer préalablement qu’un sentiment de patriotisme, bien louable sans doute, a, ce me semble, augmenté, aux yeux du capitaine Craufurd, depuis son retour en Angleterre, les inquiétudes que lui causent les progrès de la marine naissante de la Russie. Ce qui a d’abord frappé {{M.|Craufurd}} en Russie, c’est l’empressement que l’empereur met à montrer sa flotte et à fournir aux officiers étrangers tous les moyens de l’examiner ; c’est aussi l’activité immense et la connaissance pratique de l’empereur en ce qui concerne les manœuvres et les détails de l’armement maritime. Un officier-général prussien, le comte de Bismark, venu à Pétersbourg dans l’été de 1835, et qui a publié ses observations sur l’armée russe après avoir assisté aux manœuvres de Tzarskoé-Célo, comme {{M.|Craufurd}} a publié ses remarques sur la flotte russe après avoir vu les manœuvres de Cronstadt, parle avec le même enthousiasme de la capacité et de la science militaire de l’empereur, de la connaissance approfondie qu’il possède de tous les détails des troupes, et de la précision avec laquelle il les commande, portant la connaissance du ''métier'' jusqu’à donner les signaux des mouvemens de cavalerie par son trompette, non pas seulement en prononçant le mot du commandement, mais en marquant lui-même avec la voix les airs usités pour les marches{{lié}}<ref>{{lang|de|''Die kaiserliche russiche {{corr|krieqsmacht|kriegsmacht}} im jahre 1833'', von dem général-lieutenant grafen von Bismark. Carlsruhe, 1836}}.</ref>. Il est facile de concevoir que les armées russes de terre et de mer doivent se ressentir d’un tel chef. En cette année 1838, la flotte russe, mouillée à Cronstadt, se composait de vingt-sept vaisseaux de ligne, sans compter les frégates et les navires d’une moindre force. J’y ai compté moi-même trois vaisseaux à trois ponts, de 110{{lié}}canons ; six à deux ponts, de 84, et dix-huit de 74, et de plus, un vaisseau rasé armé de 56{{lié}}canons comme une frégate, une frégate de 52, et dix-sept frégates de 44 ; enfin, trois grandes corvettes et un assez grand nombre de bâtimens légers. {{M.|Craufurd}}, qui visita cette flotte en même temps que moi, {{tiret|assu|rait}} <references/>
Andersen - Contes danois, trad. Grégoire et Moland, 1873.djvu/56
les enfants de la maison et le bienfait accordé au nom de la science n’a rien d’humiliant pour eux. Cet usage remonte au moyen âge, où il était pratiqué dans toutes les villes universitaires. « Je me trouvais alors affranchi de la dure discipline de l’école ; mon répétiteur était un jeune homme et avait un caractère original dans le genre du mien. « Je faisais beaucoup de progrès ; mais en revanche je contractai un vilain défaut : c’était de me railler de mes propres sentiments, de ne plus admettre en ce monde que la froide raison. Je subissais l’influence du recteur qui s’était attaché à ridiculiser ma nature, si portée à l’émotion. Je me mis à parodier les vers que j’avais écrits naguère en pleurant. Toutes mes poésies de cette époque ont une tournure humoristique et sarcastique. « Elles plurent à Heiberg, un de nos meilleurs auteurs, le même qui a transplanté en Danemark le vaudeville français ; il publia deux pièces de moi dans un recueil périodique, ''la Poste volante'', mais sous le voile de l’anonyme. « Le soir même où parut le recueil, je me trouvais dans une maison où l’on m’aimait assez, mais où l’on traitait mon talent de poète comme s’il n’eût point existé. Le facteur apporte ''la Poste volante''. Le premier qui l’ouvre s’écrie : « Voilà deux excellentes pièces ; elles doivent être d’Heiberg ; aucun autre ne peut écrire avec autant d’esprit et d’humeur. » Et il lit mes vers, aux applaudissements de tous. Alors la fille de la maison, que j’avais mise dans le secret, leur dit que l’auteur c’était moi. Ils ne dirent pas un mot et furent de mauvaise humeur toute la soirée ; et moi je me sentis encore plus malheureux qu’eux. <references/>
Basset - Contes arabes, 1883.djvu/76
« Raconte-moi ton histoire, » lui demanda le prince. « Seigneur, lui dit le vieillard, ce jeune homme avait un frère que je jetai avec lui dans la mer. » Puis il fit, d’un bout à l’autre, le récit de ses aventures. Alors le roi poussa un grand cri, s’élança de son trône et embrassa son père et son frère en disant : « Par Dieu, tu es mon père, voilà mon frère et ta femme est ma mère. » Ils demeurèrent tous à verser des larmes ; ensuite le prince fit connaître l’événement à ses sujets et ajouta : « Ô peuple, comment jugez-vous mon habitude d’examiner les conséquences d’une action. » Les gens s’émerveillèrent de la sagesse et de la prudence de leur souverain. Celui-ci s’adressa à son père : « Si tu avais réfléchi aux résultats de ta conduite et si tu n’avais pas apporté de la précipitation dans ta manière d’agir, tu n’aurais pas été en butte au repentir et au chagrin pendant tout ce temps. » Puis il fit venir sa mère, ils se réjouirent tous ensemble et passèrent leur vie dans la satisfaction et le contentement. « Quoi de plus nuisible, termina le prisonnier, que de ne pas considérer les suites d’une action ! Ne te hâte donc pas de me faire {{tiret|pé|rir}} <references/>
Tite Live - Histoire romaine (volume 1), traduction Nisard, 1864.djvu/263
laissé debout, que le fer ou le feu eût pu détruire. XV. Cependant on annonçait de nombreux prodiges ; mais la plupart furent reçus avec assez d’incrédulité et d’indifférence, soit parce qu’ils n’étaient appuyés que par un seul témoignage, soit parce que la guerre avec les Étrusques éloignait les haruspices capables d’en diriger l’expiation. Un seul attira l’attention générale : un lac, dans la forêt d’Albe, s’accrut et s’éleva à une hauteur extraordinaire, sans que l’on pût expliquer cet effet merveilleux, ni par l’eau du ciel, ni par toute autre cause naturelle. Pour savoir ce que les dieux présageaient par ce prodige, on envoya des députés consulter l’oracle de Delphes. Mais un autre interprète avait été placé plus près du camp par les destins : un vieillard de Véies, au milieu des railleries échangées entre les sentinelles romaines et les gardes étrusques, chanta ces paroles d’un ton prophétique : "Tant que les eaux du lac d’Albe n’auront point disparu, le Romain ne sera point maître de Véies.’On laissa d’abord tomber ces paroles comme jetées au hasard ; mais bientôt elles furent recueillies et commencèrent à se répandre. À la fin, comme la durée de la guerre avait établi entre les soldats des deux partis une certaine familiarité, un soldat des postes romains demanda au plus rapproché des gardes de la ville quel était l’homme qui avait émis ces paroles si obscures touchant le lac d’Albe. Ayant appris que c’était un haruspice, ce soldat, dont l’esprit était religieux, sous prétexte d’un prodige qui l’intéressait personnellement, dit qu’il voudrait, s’il était possible, consulter le devin, et l’attira ainsi à une entrevue. Lorsqu’ils furent allés tous deux à l’écart, sans armes et sans méfiance, le jeune Romain, plus vigoureux, s’élança sur le faible vieillard, et l’ayant enlevé à la face de tous, malgré les menaces des Étrusques, le transporta au camp. L’autre, mené au général, fut envoyé à Rome au sénat ; et là, interrogé sur le sens de ce qu’il avait dit touchant le lac d’Albe, il répondit « que sans doute les dieux étaient irrités contre le peuple véien le jour où ils lui avaient inspiré la pensée de révéler la ruine que les destins réservent à sa patrie. Il ne pouvait donc revenir aujourd’hui sur des paroles qu’il avait prononcées par une inspiration de l’esprit divin ; et peut-être n’y aurait-il pas un moindre crime à taire des choses que les dieux immortels veulent rendre publiques, qu’à divulguer celles qui doivent rester secrètes. Ainsi les livres des destins et la science étrusque enseignent que lorsque les Romains auront épuisé le lac d’AIbe, après une crue de ses eaux, la victoire leur sera donnée sur les Véiens ; jusque-là les dieux ne cesseront de protéger les remparts de Véies. » Il indiqua quelles solennités devaient accompagner le détournement des eaux. Mais son autorité ne parut ni assez importante ni assez sûre en si grave matière ; et le sénat décida qu’on attendrait les députés et la réponse de l’oracle pythien. XVI. Avant que ces envoyés fussent revenus de Delphes et qu’on eût trouvé les moyens d’expier le prodige d’AIbe, les nouveaux tribuns militaires avec puissance de consuls entrèrent en fonctions:c’étaient Lucius Julius Iulus, Lucius Furius Médullinus, pour la quatrième fois, Lucius Sergius Fidénas, Aulus Postumius Régillensis, Publius Cornélius Maluginensis, Aulus Manlius. Cette année parurent de nouveaux <section begin="s2"/>XV. Prodigia intérim multa nuntiari ; quorum pleraqoe, et qnia singnli auctores erant, parum crédita spretaque, et quia , hnstibns Etruscis, per quos ea procurèrent, haruspices non erant. In unum omnium curæ vers» sunt t quod lacus in albano nemore siue uliis qjplestibus aquis, causave qua alia, quæ rem miraculo eximeret, in aititudinem insolitam crevit. Quidpam eo dii portenderent prodigio, miss ! sciscitatum oratores ad Delphicum oraculum : sed propior interpres fatis oblatus senior quidam veiens , qui, inter ravinantes in stationibus ac castodiis milites romanos etruscosque , valicinantis in moduii ) cecinit, « Priusquam ex lacu albano aqua emissa foret, nunquam potiturum Veiis Romannm. » Quod primo, velul teraere jacturn, sperni, a pi tari deinde serin oni bus cœptum est ; douée unus ex sialione roman a perennetatus proximum oppidauorum ( jara per longinquitateni belli commercio sermonum facto), quisnam is esset, qui per ambages de lacu albano jaceret ? postquam audivit haruspicem esse, vir haud iutacti religione anirui, causatus de privati portent ! procuratione, si operæ illi esset, consulere relie, ad colloquium vatem elicuit. Quumque progressi ambo à suis longius essent inermes, sine ullo raetu 0 prævalens juvenis romanus senem infir- mura, in conspectu omnium raptum, nequicquara tumultuantibus Etruscis, ad suoa transttilit. Qui quuro perduclus ad imperatoreni, inde Romani ad senatum mistus esset, scisciiaiitibus quiduam id esset, quod de lacu albaoo docuisset, respoodit : « Profecto iralos deos veieoti populo illo fuisse die, quo sibi eam meutem objecissent, ut excidium patriœ fatale proderet. Itaque, quæ tura cecinerit divino spiritu insiiiictus, ea se nec, ut indicta sinl, revocare posse : et taceudo forsitan, quæ dii immortalea vulgari velint, haud minus, quam celauda effando, nefas contrabi. Sic igitur libris fatalibus, sic discipliua etrusoa traditum esse, ut quando aqua albana abundasset, tara , si eam Romanus rite emisisset, Victoria in de Veientibus dari : antequam id fiat, deos mœnia Veientiuiu desertoros non esse. • Exsequebatur inde, quæ solleunis derivatio esset. Sed auctorem levem, nec satis fldumfeuper tanta re Patres rati, decrevere legatos sortesque oraculi pytbia exspectandas. XVI. Priusquam a Delpbis oratores redirent, albanivo prodigii piacula invenirentur, novi tribuni mililum consulari potestate, L. Julius Julus, L. Furius Medulüuus quartum, L. Sergius Fidenas, A. Postumins Regillensi*. P. Cornélius Maluginensis, A. Manlius, magistratum <section end="s2"/> <references/>
Bernard - La science expérimentale.djvu/356
{{tiret2|circula|tion}} exalte d’abord les manifestations cérébrales et nerveuses. Toutefois ces réactions de la modification circulatoire sur les organes nerveux demandent pour s’opérer un temps très-différent selon les espèces. Chez les animaux à sang froid, ce temps est très-long, surtout pendant l’hiver ; une grenouille reste plusieurs heures avant d’éprouver les conséquences de l’arrêt de la circulation ; on peut lui enlever le cœur, et pendant quatre ou cinq heures elle saute et nage sans que sa volonté ni ses mouvements paraissent le moins du monde troublés. Chez les animaux à sang chaud, c’est tout différent : la cessation d’action du cœur amène très-rapidement la disparition des phénomènes cérébraux, et d’autant plus facilement que l’animal est plus élevé, c’est-à-dire possède des organes nerveux plus délicats. Le raisonnement et l’expérience nous montrent qu’il faut encore placer, sous ce rapport, l’homme au premier rang. Chez lui, le cerveau est si délicat qu’il éprouvera en quelques {{tiret|se|condes}} <references/>
Nichault - Le Mari confident.pdf/56
deux fois sans qu’il l’eût entendue. Adalbert fut obligé de le tirer par le bras, en disant : — Madame la duchesse te demande quand arrivera ton père. — Demain soir, Madame, il a voulu se reposer un jour de plus à Rome ; s’il avait pressenti le bonheur qui l’attendait ici... — Il ne serait pas venu un moment plus tôt, dit la duchesse en interrompant Sosthène. Le temps passe si vite et si agréablement à Rome. La comtesse de M... y est-elle toujours ? — Oui, Madame, elle y reste pour prouver à tous ceux qui visitent l’Italie, qu’une femme du monde peut avoir le talent d’un artiste, et qu’une Française aimable est ce qu’il y a de plus aimable sur terre, ajouta Sosthène en regardant madame des Bruyères. — Voilà qui est plus flatteur pour vous que pour nous, dit la marquise à Clotilde, mais comme nous sommes de l’avis de Monsieur, nous ne nous en fâcherons point, seulement vous êtes forcée de le justifier. — Ou de me taire, dit Clotilde avec modestie, ce qui me paraît plus facile et plus sûr. — Ah ! Madame, ne me punissez pas d’une partialité que vous rendez si excusable, s’écria {{tiret|Sos|thène}} <references/>
Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/199
feu, de manière pourtant qu’il y ait plus de fumée que de flamme ;<ref>On demande pourquoi cette préférence pour ces deux plantes ? agissent-elles par leur odeur ? Dans ce cas, pourquoi ne pas se servir d’herbes plus odorantes ? Est-ce par leur fumée ? dans ce cas, il vaudroit mieux les moins faire sécher, elles donneroient plus de fumée & moins de flamme.</ref> la fumée ira sur toutes les feuilles, & fera périr tous les tigres qui y seront, pourvu qu’on réitère plusieurs fois cette fumigation ; ou bien on ramassera à la fin d’octobre toutes les feuilles qui seront tombées de ces arbres infectés de tigres, & on les jettera aussitôt au feu<ref>Tout insecte est prudent, & sa grande attention est de veiller à la conservation de son espèce ; aussi il ne livre point aux.feuilles qui doivent tomber, pourrir, & être emportées par les vents, un dépôt si précieux. C’est sous les gerçures de la peau, sous la vieille écorce que son trésor est confié. Là il brave les vents, les pluies & les frimats, & attend en paix le retour de la belle saison. À coup sûr, les œufs n’écloront que lorsque les feuilles seront dans le point de perfection nécessaire à la nourriture de l’insecte.</ref>. Quinze jours après on fera la même chose, & ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on ait brûlé toutes les feuilles qui seront tombées de l’arbre, alors on ratissera doucement les branches avec un couteau de bois, ce qui fera tomber à terre les œufs de l’insecte & les fera périr<ref>Ce troisième moyen est préférable aux deux premiers, mais on ne doit pas laisser ces débris sur la terre, au contraire il faut les recevoir avec soin sur un linge à mesure qu’on les fait tomber, & porter le tout au feu.</ref>. La vapeur de la chaux vive, ainsi que la décoction d’absente, sont aussi d’excellens remèdes.» » On peut encore, quand il n’y a plus de feuilles aux arbres, chercher les tigres dans les trous de mur de l’espalier. On les en fera sortir avec un petit plumasseau ; on les fera tomber eux & leurs œufs sur un morceau de toile étendue au pied du mur, & ensuite on le secouera sur le feu... D’autres se contentent de jeter avec un goupillon sur les feuilles de l’arbre, de l’eau dans laquelle on aura fait tremper du tabac... Le plus sûr, pour les chasser, est de semer du chenevis autour & dessous les arbres qui en sont attaqués... La forte odeur du chanvre les fatigue, & on continue d’en semer tous les ans jusqu’à ce qu’on soit sûr qu’ils ont entièrement abandonné les arbres. » Les mêmes recettes sont copiées dans le Dictionnaire Économique ; mais l’auteur ajoute qu’il faut seringuer vers le mois de mars, temps où le soleil commence à échauffer les œufs de ces insectes, de l’eau bouillante dans les treillages, sur les grosses branches, principalement dans les trous & crevasses des murs. Chaque fois qu’on pompe l’eau bouillante, il faut tremper la seringue dans l’eau froide, autrement elle ne prendroit pas d’eau, l’air étant raréfié par la chaleur. Un auteur qui a copié cette recette a encore renchéri dans le Journal Économique du mois d’avril 1764 ; & il ajoute : « on doit seulement faire en sorte que l’eau bouillante ne donne point sur les feuilles naissantes : les œufs n’étant déposés que dans les petites fentes de l’écorce des branches, ce ne sont que ces repaires qu’il faut attaquer, » Est-il possible de seringuer toutes les branches sans qu’une partie de<section end="POIRE, POIRIER"/> <references/>
Kant - Critique de la raison pure, II.djvu/321
{{nr|{{t||80}}|{{t|DISCIPLINE DE LA RAISON PURE|80}}|{{t|307|80}}}} <section begin="CRT-T2-MT-Ch1-S1"/>{{tiret2|transcen|dentales}}, ne saurait donc, comme si la route qu’elle a suivie conduisait droit au but, regarder devant elle avec assez de confiance et compter assez sûrement sur ses prémisses pour se croire dispensée de reporter souvent ses regards en arrière et de voir si par hasard elle ne découvrirait pas dans le cours de ses raisonnements des fautes qui lui seraient échappées dans les principes et qui l’obligeraient soit à mieux déterminer ces principes, soit à les changer tout à fait. Je divise toutes les propositions synthétiques (qu’elles soient démontrables ou immédiatement certaines) en ''dogmata'' et en ''mathemata''. Une proposition directement synthétique par concepts est un ''dogma'', tandis qu’une proposition synthétique par construction des concepts est un ''mathemata''. Les jugements analytiques ne nous apprennent proprement rien de plus sur l’objet que ce que le concept que nous en avons contient déjà, parce qu’ils n’étendent pas la connaissance au delà du concept du sujet, mais qu’ils ne font que l’éclaircir. Ils ne peuvent donc pas être proprement appelés des dogmes (expression que l’on pourrait traduire par celle de ''sentences'' 1<ref>1 ''Lehrsprüche''. </ref>). Mais des deux espèces de propositions synthétiques ''à priori'' dont je viens de parler, celles qui appartiennent à la connaissance philosophique sont les seules qui, d’après la manière commune de parler, portent ce nom, et il serait difficile d’appeler du nom de dogmes les propositions de l’arithmétique ou de la géométrie. Cet usage confirme donc l’explication que nous avons donnée en disant que les jugements par concepts peuvent seuls être appelés {{tiret|dog|matiques}}<section end="CRT-T2-MT-Ch1-S1"/> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/754
refoulent vers Frœschwiller et y entrent les premiers. Mac Mahon n’a plus à se demander s’il défendra son réduit maison par maison : il n’y a plus de maison tenable ; il n’a plus à délibérer s’il prescrira la retraite : elle s’opère avec rage sans ses ordres. Sa gauche s’est effondrée comme sa droite et son centre. Il n’a désormais (4 heures) qu’un souci : limiter le désastre. Il va vers Ducrot qui avait encore cinq bataillons intacts et deux batteries ; il le charge de couvrir la route de Reichshoffen. {{c|IX }} Entre la cohue allemande qui va en avant et la cohue française qui recule et que Ducrot protège de son mieux, il est un groupe devant lequel il faut s’arrêter avec une indicible admiration, avant de quitter ce lieu maudit, le groupe de la résistance à outrance, des indomptables qui continuent le combat, alors que Mac Mahon lui-même y a renoncé. C’est la réserve d’artillerie : pour n’être pas enlevée, elle a été obligée de reculer, mais elle s’est reformée un peu plus loin ; elle met en position quelques pièces de différentes batteries et tant qu’elle trouve des boîtes à mitraille dans les coffres, elle les épuise. C’est le 2e régiment de lanciers : il aperçoit deux batteries prussiennes en avant de la ligne de ses tirailleurs ; il les charge. C’est la compagnie du génie, Gallois : on l’a postée en avant du village ; elle n’en bouge pas et elle lutte. C’est surtout Raoult. Le matin, il avait tout tenté pour qu’on ne s’engageât pas sur ce champ de bataille, maintenant on ne peut l’en arracher. Entouré de ce qui reste d’hommes de son incomparable division, il dispute chaque palme de terrain, et il se montre en quelque sorte victorieux de la défaite. Les Allemands sentent cruellement ses derniers coups. Bose est de nouveau blessé, et cette fois grièvement ; un de ses lieutenans d’état-major tombe à ses côtés ; le chef d’état-major de Stein a un cheval tué sous lui ; beaucoup d’autres succombent et ne voient pas la victoire. Est-il nécessaire, hélas ! d’ajouter que ces exploits surhumains sont vains ? La réserve d’artillerie est réduite à s’engouffrer à son tour dans l’entonnoir lugubre de la route ; ses lanciers sont mitraillés et leur colonel, Poissonnier, est tué. La compagnie Gallois est contrainte de suivre le courant. Raoult seul <references/>
Malato - La Grande Grève.djvu/319
autres avaient pu gagner le ''Fier Lapin'', grâce au dévouement de Bernard et de sa poignée de camarades qui avaient concentré sur eux tous les coups. Devant l’auberge, ils trouvèrent une foule assez houleuse, mais formée d’éléments très divers. Une vingtaine de mineurs, de ceux qui avaient promis à Bernard de défendre les orateurs, s’y étaient portés directement, afin d’empêcher la police de des Gourdes d’envahir et occuper exclusivement la salle. Ils s’y étaient rencontrés avec l’arrière-bande de cette police, une trentaine d’hommes environ, tous les autres étant disposés sur le parcours de la gare au ''Fier Lapin''. Le reste de la foule se composait de curieux très mélangés, les uns affectant une dévotion moins réelle qu’apparente envers des Gourdes, les autres, au contraire, intérieurement sympathiques aux organisateurs de la réunion. La lutte s’était déroulée, acharnée sur la côte des Mésanges sans que cette multitude expectante y prît part et même pût s’en rendre compte. Mais lorsque la demi-douzaine d’hommes échappés au guet-apens apparut courant et laissant derrière elle la dernière mêlée confuse, il y eut un grand mouvement de la foule. Des cris violents de : « À bas les rouges ! » s’élevèrent, poussés par les hommes de Moschin, cris auxquels répondirent aussitôt ceux de : « Vive la République ! Vivent les travailleurs ! » Et comme les gens de la bande voulaient s’élancer, gourdins levés, contre les arrivants, les mineurs aussitôt se précipitèrent pour les protéger. Il y eut une confusion, un commencement de mêlée. Cependant Paryn s’écriait, haranguant la foule : — Citoyens, je vous prends à témoin du guet-apens infâme qui nous a été tendu. Vous laisserez-vous terroriser et ravir le droit de réunion par une bande d’assassins ? — Non ! s’écrièrent quelques voix. <references/>
Paul Bourget – L’étape.djvu/72
{{nr|60|L’ÉTAPE|}}belle-mère, le respect de sa fiancée pour les convenances bourgeoises, les conseils d’un proviseur paternel et qui s’intéressait à l’avenir d’un sujet brillant, la crainte des sévérités administratives, tout s’était réuni pour déterminer le jacobin à une concession qu’il n’avait d’ailleurs pas renouvelée lors de la naissance de ses enfants. Il ne pardonnait pas plus cette première et dernière faiblesse à l’Empire que ses aînés, les professeurs républicains de 1852, ne pardonnaient au débonnaire Napoléon III le serment prêté pour conserver leur chaire. Les innombrables discours que Jean avait entendu son père tenir sur ce point douloureux lui revinrent à la mémoire. Il crut entendre aussi les réponses qu’avaient faites sa mère, son frère aîné, sa sœur, son plus jeune frère. À l’image torturante, mais délicieuse, de Brigitte, d’autres images se substituèrent, aussi torturantes, mais sans cette extase de martyre qui mêle une ivresse aux pires désespoirs de l’amour. En quelques minutes, et tout en continuant de marcher sur ces trottoirs que son père, à son âge, et comme élève du séminaire laïque de la rue d’Ulm, avait tant suivis, il revécut les années d’un malaise moral, d’abord obscur et inexplicable, puis réfléchi et interprété par ses raisons profondes, que représentait pour lui ce mot si doux, si bienfaisant à tant d’autres : la famille. Dans cette conversation, poussée pourtant bien à fond, il n’avait fait à M. Ferrand que des demi-aveux Il n’avait pas caché les troubles de sa pensée {{tiret|reli|gieuse}} <references/>
Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/25
son goût. Ils s’aimèrent sans doute. Commirent-ils quelque imprudence ? Le sentiment qu’ils eurent l’un pour l’autre dépassa-t-il les bornes de cette galanterie superficielle qui est presque un de nos devoirs envers les femmes ? Beauvoir ne s’est jamais franchement expliqué sur ce point assez obscur de son histoire ; mais toujours est-il constant que le commandant se crut en droit d’exercer des rigueurs extraordinaires sur son prisonnier. Beauvoir, mis au donjon, fut nourri de pain noir, abreuvé d’eau claire, et enchaîné suivant le perpétuel programme des divertissemens prodigués aux captifs. Sa cellule, située sous la plate-forme du donjon, était voûtée en pierre dure ; les murailles avaient une épaisseur désespérante ; la tour donnait vraisemblablement sur un précipice ; il n’y avait pas la moindre chance de salut. Lorsque le pauvre Beauvoir eut reconnu l’impossibilité d’une évasion, il tomba dans ces rêveries qui sont tout ensemble le désespoir et la consolation des prisonniers. Il s’occupa de ces riens qui deviennent de grandes affaires. Il compta les heures, les jours ; il fit l’apprentissage du triste ''état de prisonnier''. Il reçut le baptême <references/>
Œuvres de C. Tillier - III.djvu/47
{{nr||SUR LA RÉFORME ÉLECTORALE.|31}}passeport, qui n’ait de ce mot plein la bouche. L’intérêt de l’État ! Mais l’intérêt de l’État, c’est l’intérêt de tous, or, je vous le demande, comment l’intérêt de tous serait-il compromis, si l’intérêt de tous était représenté ? La majorité peut comprendre mal ses intérêts ; mais c’est un axiome de justice que la satisfaction du plus grand nombre doit être préférée à celle du plus petit. Or, quand la majorité a déclaré qu’elle est satisfaite, toute discussion est terminée. Le peuple ferait mauvais usage de ses droits ! Mais comment savez-vous cela ? avez-vous aussi le privilège de prédire ? Voici un homme qui comparaît devant la cour d’assises ; c’est vrai, dit-il : j’ai volé à cet homme son argent, mais je prévoyais qu’il en ferait mauvais usage ; au lieu de me punir, récompensez-moi : j’ai agi dans l’intérêt de l’État, je suis un bon citoyen, et ce procureur du roi qui requiert contre moi est un séditieux. — Cet argument que vous trouveriez détestable dans la bouche d’un voleur, pourquoi serait-il bon dans la vôtre ? La différence des positions fait-elle celle des consciences, et l’iniquité, quand elle porte un habit noir, peut-elle se faire passer avec impunité pour la justice ? Encore une petite parabole, s’il vous plaît. On procède dans un village à l’affouage de la forêt commune ; le maire fait distribuer à chacun sa portion de bois. — Toi, Jacques, dit-il à un pauvre homme, je confisque ton bois à mon profit. — Et pourquoi cela, monsieur le maire, répond Jacques. — Parce que je suppose que tu es un homme négligent, et de cette supposition, je conclus que tu mettrais le feu au village. Ne te fâche point, Jacques ; c’est dans ton intérêt que j’agis. Bonaparte, quand des lauriers de Marengo il voulut se faire un diadème, disait que les assemblées primaires faisaient un mauvais usage de leurs droits. {{lié|Louis XVIII}}, vingt ans plus tard, dit que les électeurs à trois cents francs qu’il nous avait octroyés, faisaient un mauvais usage de leurs droits. Vous-mêmes, selon {{lié|Charles X}}, vous faisiez un mauvais usage de vos droits, quand vous vouliez <references/>
Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 6.djvu/337
une sorte de férocité, à montrer des dons si précieux, un indomptable courage, l’énergie de l’amour, la hauteur de l’imagination non-seulement alliés au crime, mais engendrant le malheur, tandis qu’il semble vouloir nous faire fuir et mépriser les dons modestes qui peuvent seuls apporter le bonheur et la paix. Du vivant de Byron, la critique, après avoir proclamé son génie, ne pouvait point ne pas lui opposer ces objections ; c’était son devoir. Cependant ces objections où tendent-elles, sinon à effacer l’originalité même qui fait de Byron une des plus grandioses et des plus, saisissantes figures de la poésie ? L’explication de l’œuvre de Byron ne peut passer de l’étude de son âme et du commentaire de sa vie ; c’est pour lui surtout que je regrette de ne pas rencontrer chez M. Jeffrey une appréciation générale prise à ce point d’intersection unique demandé par la perspective critique, d’où l’on saisit l’unité harmonieuse et la signification réelle de l’œuvre d’un poète. Le critique de la ''Revue d’Edimbourg'', qui avait parfaitement raison de proposer le style de Byron pour enseignement aux poètes affectés, aux puérils et emphatiques maniéristes de son époque, se trompait évidemment lorsqu’il indiquait à Byron, comme un modèle à suivre, la variété qui anime les inventions de Walter Scott, et la moralité consolante qui y règne. Est-il des natures poétiques plus différentes que celles du baronnet d’Abbotsford et de l’auteur de ''Childe-Harold'' ? Il y a des poètes, ce sont d’ailleurs les privilégiés du génie, et Walter Scott était de cette famille, qui semblent planer sur la vie et s’en emparer par l’observation, qui ont étudié d’un œil curieux toutes les nuances des caractères humains, qui, depuis la joie jusqu’à la douleur, ont retenu toutes les notes de la gamme des sentimens, et les rappellent et les réunissent avec une merveilleuse habileté dans des combinaisons où leur cœur n’est pas néanmoins directement intéressé, où il n’est amené que par les jeux de leur imagination, les calculs de leur raison et les évocations de leur mémoire. Le poète qui ricane avec Méphistophélès s’est-il tué bien sincèrement par désespoir d’amour avec Werther ? Celui qui souffle à Falstaff ses joyeuses bouffonneries, ou dont l’insouciante fantaisie entrelace les arabesques du ''Songe d’une Nuit d’été'', s’est-il, comme Lear, abreuvé jusqu’au délire du fiel de l’ingratitude filiale, ou, après des déchiremens horribles, a-t-il succombé avec Hamlet sous le poids d’un affreux devoir ? Mais il est d’autres poètes, qui s’enferment dans leurs propres émotions, qui n’écoutent pour les répéter aussitôt que les frémissemens mélodieux que la douleur ou la joie imprime aux fibres de leur cœur. Ils <references/>
Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/570
avant lui. Tout le reste n’est rien ; il accepte l’inconséquence de sa position, la responsabilité la plus grave qui puisse échoir à un gouvernement ; il vit grace à l’incertitude qui règne dans tous les esprits ; il se contente d’une existence hasardeuse qui se traîne à travers des épisodes d’antichambre et se poursuit d’équivoque en équivoque. La presse s’est emparée de cette question brûlante ; le pays tout entier commence à s’inquiéter, à s’agiter, et cette émotion légitime, naturelle, favorise toutes les entreprises du parti carliste. Le cabinet, lui, se borne à attendre sans rien faire. Il ne fait rien, disons-nous avec raison, car la première, l’indispensable mesure qu’il aurait à prendre, ce serait de convoquer les chambres et de confier à la représentation nationale le soin de prendre quelque résolution mûrie, vigoureuse et salutaire, sur une question qui est arrivée à un tel degré de publicité, que la retirer du domaine de la discussion légale, c’est la livrer aux chances de l’insurrection, qui peut éclater d’un jour à l’autre. Triste situation sur laquelle nous ne pourrons nous empêcher de revenir ! Triste pays où la royauté se manque à elle-même, et où les conseillers sévères et dignes manquent à la royauté ! Cette crise intérieure de l’Espagne deviendra plus grave encore, si le ministère anglais a, comme il l’espère, avec le nouveau parlement, une plus grande liberté d’allure dans sa politique étrangère. Les élections auxquelles l’Angleterre procède en ce moment ne semblent que trop assurer à lord Palmerston une majorité et une force qui lui permettront de donner l’essor à son humeur entreprenante. Du reste, les observateurs les plus clairvoyans sont déroutés dans leur attente ; cette année, les élections générales se font en Angleterre sans une idée, sans un cri de ralliement qui agite tout le pays, sans ces grandes luttes entre les deux partis qui s’étaient partagé le pouvoir. C’est que, depuis nombre d’années, des changemens profonds se sont opérés dans la vie politique de l’Angleterre. Aux traditions aristocratiques a succédé la prépondérance des classes moyennes l’industrie et les intérêts commerciaux voient augmenter tous les jours le nombre de leurs représentans dans la chambre des communes ; les hommes obscurs y abondent ; ils y arrivent avec un nom tout-à-fait inconnu, dont les membres de l’aristocratie sont obligés de s’informer. Pour nos voisins, c’est nouveau. Si l’on excepte la nomination de M. Lionel de Rothschild, qui est un hommage au principe de la liberté de conscience, et l’allocution de sir Robert Peel à ses électeurs, dans laquelle il a professé plus hautement que jamais une économie politique vraiment radicale, tout jusqu’ici s’est passé sans beaucoup d’éclat. Lord John Russell a été très sobre de développemens devant ses électeurs, et nous n’avons pas encore appris que lord Palmerston ait harangué les siens. Pour ce dernier, pour ses amis, le moment est décisif. Nous saurons dans quelques jours si le cabinet a devant lui un long avenir, sauf à le partager avec un ancien et illustre adversaire. L’acceptation du gouvernement général de l’Inde par lord Dalhousie, un des membres du cabinet que dirigeait sir Robert Peel, a fait croire à un rapprochement entre ce dernier et lord John Russell. Il ne faut pas se dissimuler que si, par les élections générales et par quelques combinaisons ministérielles qui en seraient la conséquence, le cabinet whig se fortifiait, il y aurait là pour le ministère du 29 octobre de nouvelles raisons de redoubler de vigilance. Ainsi de tous côtés le gouvernement peut sentir la nécessité d’imprimer à sa marche plus d’ensemble et plus d’énergie. C’est ce que doivent {{tiret|vive|ment}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 75.djvu/621
jusqu’à la licence avec autant de ponctualité qu’aux ordres du grand Frédéric ; l’amusement faisait partie de l’administration. Les femmes, peu sévères, les hommes, entièrement désœuvrés, n’avaient que le plaisir pour étude et en faisaient, en l’assaisonnant de subtilités de toute espèce, une science comico-sérieuse. A Berlin, la Prusse paraissait, selon le mot de Mirabeau, arrivée à la pourriture sans avoir passé par la maturité. On ne se réveilla de ces folies qu’en 1806. Gentz, tout porté par sa nature vers cette vie de plaisir, s’y trouve dès l’abord dans son élément ; seulement de loin en loin quelque embarras d’argent le ramène à la morale, il se préoccupe de la vertu par économie, et fait un effort pour s’arracher au tourbillon : il écrit à Elisabeth Graun, lui confesse ses faiblesses, la prend à témoin de ses intentions de réforme, qu’il oublie bientôt au premier sourire d’une meilleure fortune. Nommé en 1785 à un petit emploi au ministère de la guerre, il avait demandé la main de la jeune personne de Kœnigsberg ; mais, ayant rencontré un refus, il s’était hâté d’épouser la fille d’un fonctionnaire, le conseiller des finances Gilly, grave imprudence de la part d’un homme qui, peu capable de porter le fardeau d’aucun devoir positif et de régler sa vie, n’aurait point dû assumer si tôt les charges d’une famille. Cependant la révolution avait éclaté ; il n’est pas étonnant que cet événement, qui arrachait à l’immuable orbite de ses habitudes le philosophe de Kœnigsberg, mît en ébullition les cervelles oisives de Berlin. Gentz ne résiste pas à l’entraînement universel. Il écrit au philosophe Ch. Garve, un de ses compatriotes : « Si cette révolution échouait, ce serait un des plus grands malheurs qui puissent frapper le genre humain ; elle est le premier triomphe effectif de la philosophie, le premier exemple d’un gouvernement fondé sur des principes et sur un ensemble d’idées rationnelles ; elle est le remède des maux séculaires sous le poids desquels gémit l’humanité. » En 1791, il publie une dissertation sur les principes supérieurs du droit public où il s’écrie : « Le monde moral édifié par la raison (c’est-à-dire ici la révolution) est immuable et indestructible. » Cette belle ardeur pour la raison ne dura pas longtemps ; dès l’année suivante, nous trouvons Gentz dans le camp des adversaires du nouveau régime établi en France, traduisant coup sur coup, sans se soucier des nuances d’opinion plus ou moins prononcées qui séparent ces différens auteurs, le pamphlet de Burke contre la révolution, les ''Recherches'' de Mounier ''sur les causes qui ont empêché les Français de devenir libres et sur les moyens qui leur restent pour acquérir leur liberté'', le livre de Mallet du Pan intitulé ''Considérations sur la nature de la révolution de France et sur les causes qui en prolongent la durée''. <references/>
Dumas les garibaldiens revolution de sicile 1861.djvu/148
{{nr||LES GARIBALDIENS|129}}cette valise ; si je ne reviens pas, disposez de son contenu comme bon vous semblera. Le général Letizia partait tout simplement pour piller la maison de campagne du marquis Pasquatino. On s’étonnera peut-être de ce que je nomme en toutes lettres les héros de ces anecdotes au lieu de les désigner sous des initiales ; mais mon avis a toujours été qu’avec certains hommes, il ne suffit pas de soulever les masques, il faut les arracher. {{d|19 juin, minuit.|fs=90%|3}} {{il}} Tandis que je travaille, retentit tout à coup une vive canonnade : les coups se succèdent irrégulièrement et comme ceux d’un feu à volonté. Je quitte mon bureau et vais au balcon, où je trouve mes compagnons réunis. Ils ont sauté à bas du lit ; deux sont dans le costume de la Juive, trois autres dans celui de Britannicus, de Néron et de Narcisse ; avec mon pantalon à pieds, je suis le plus vêtu de tous. On voit la lueur des coups et l’on entend le bruit. Deux des nôtres prennent leur montre et calculent, par le temps qui s’écoule entre la lueur et la détonation, que le combat doit avoir lieu à quinze ou dix-huit milles en mer. <references/>
Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/127
expressions qu’on voudra, pourvu que le peuple s’en serve encore, même si elles proviennent d’ailleurs que de la Toscane ; qu’on prenne même de temps en temps des mots français et espagnols, si l’usage les a adoptés et s‘ils répondent à des idées nettement définies <ref>Seulement il ne fallait pas aller trop loin dans cette voie. Les poëtes satiriques mêlent à leurs vers des bribes d’espagnol, et Folengo (sous le pseudonyme de Limerno Pitocco, dans son ''Orlandino'') émaille son poëme de mots français ; mais ils ne le font que dans une intention moqueuse. Dans les comédies on voit souvent un Espagnol qui parle un jargon ridicule, composé d‘espagnol et d‘italien. Il est extraordinaire qu’une rue de Milan .............française, de 1500 à 1512 et de 1515 à 1522, s‘appelait rue Belle, porte encoreaujourd’hui le nom longue domination espagnole ; tout au plus quelques édifices et ...............</ref>. C’est ainsi qu’on formera, à force d’intelligence et de travail, une langue qui ne sera pas, il est vrai, le vieux toscan pur, mais qui sera italienne, qui sera riche comme un délicieux jardin plein de fleurs et de fruits. Il faut qu’à toutes les autres perfections le courtisan joigne celle du langage, qui peut lui permettre de faire valoir son tact, son esprit et ses nobles sentiments. Comme la langue était devenue pour la société une question d‘intérêt commun, les archaïstes et les puristes virent en grande partie échouer leurs efforts. Il y avait dans la Toscane même trop d’auteurs remarquables et d’hommes distingués qui méprisaient leurs prétentions on même qui s’en moquaient, chose qui arrivait surtout quand quelque sage venu du dehors essayait de prouver aux Toscans qu’ils n’entendaient pas leur propre langue <ref>{{sc|Firenzuola}}, ''Opere'', I, dans la préface sur la beauté féminine, et II, dans les ''Ragionamenti'' qui précèdent les nouvelles.</ref>. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/562
et cela par deux raisons que les hommes politiques de l’Angleterre conçoivent à merveille, et dont ils font une si heureuse application aux affaires de leur pays : l’une, qu’à l’exception des partis excentriques, décidément hostiles à la constitution et opposés à la marche générale de la nation, les partis alliés sont au fond d’accord sur la plupart des affaires et des doctrines gouvernementales ; l’autre, que si dans tout système politique il est des principes, des bases dont le parti qui professe ce système ne saurait s’écarter sans abaissement et sans honte, il est aussi une foule de points secondaires, une partie moins invariable, susceptible de plus et de moins, et qui peut devenir, sans reproches pour personne, matière de négociations, d’attermoiemens, de transactions. Est-ce là une doctrine relâchée, inventée aujourd’hui même, pour la circonstance ? Nullement. Placé entre les démocrates et les fédéralistes, entre Jefferson et Hamilton, membres l’un et l’autre du ministère, que leur disait Washington, celui dont nul ne conteste la sagesse, la prévoyance, le patriotisme, la moralité ? « Faites-vous des concessions les uns aux autres, cela est toujours possible à des hommes éclairés et prudens ; l’intérêt de la commune patrie vous le commande ! » Voulait-il par-là leur conseiller l’abandon de leurs principes, l’abaissement de leur caractère, la versatilité, le déshonneur ? Qui oserait le dire ? Il les priait seulement de suspendre, d’ajourner leurs débats et de se rallier en attendant sur ce terrain commun que découvrent toujours les hommes honnêtes, sensés, jaloux de la grandeur et de la prospérité de leur pays. Il faut bien le dire : le grand homme ne fut guère écouté. Aussi Jefferson lui-même a été plus tard débordé par le parti démocratique, et d’un autre côté les fédéralistes ne sont plus aujourd’hui qu’un souvenir historique. Le cabinet, par ses actes, ne s’est écarté en rien de la position qu’il a prise en entrant aux affaires. Il avait rassuré tous les fonctionnaires, quelle que fût leur origine, qui se rallieraient franchement à lui et se pénétreraient de l’esprit impartial et conciliateur du gouvernement. A-t-il manqué à ses promesses ? Où sont ces destitutions qu’on a si souvent annoncées ? Où sont ces larges faveurs qu’il devait distribuer à la gauche à pleines mains, comme un timide vassal voulant apaiser à tout prix la colère de son suzerain ? « Cela se fera, cela ne peut manquer d’arriver ; » et on fait à ce sujet des prédictions, on rappelle des bruits sans nombre sur lesquels nul ne garde le silence que le ''Moniteur''. Nous nous en tenons au ''Moniteur''. Ajoutons seulement deux observations l’une qu’il n’y aurait pour nous, amis sincères de la conciliation, ni injustice, ni scandale, ni danger, si quelques-uns des hommes de la gauche franchement ralliés au gouvernement et capables de bien remplir les fonctions qui leur seraient confiées, étaient appelés à quelques postes vacans. Nous ne concevons pas une transaction qui consisterait à tout prendre et à ne rien accorder. Le blâme ne serait légitimement encouru que le jour où le cabinet livrerait les affaires à la gauche, que le jour où des destitutions ne seraient opérées que <references/>
Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 20.djvu/1016
dans mille attitudes désespérées. Le roi, le char, les coursiers, tout est gigantesque par rapport aux ennemis de l’Égypte. Le poitrail des chevaux lancés au galop domine la forteresse et couvre l’armée tout entière des vaincus. Plus loin, le vaillant Pharaon est aux prises avec un chef ennemi qu’il tient à la gorge et va percer ; son pied écrase un adversaire qu’il vient d’immoler. Le mouvement qui exprime cette double action est sublime. Ailleurs on voit Séthos traîner après lui les peuples soumis par ses armes, et, ce qui est plus extraordinaire, emporter plusieurs chefs sous son bras, ainsi qu’on emporterait un enfant mutin. Puis les vaincus font acte de soumission, ils abattent les forêts de leur pays comme pour l’ouvrir devant les pas du vainqueur. Le roi revient en triomphe dans ses états, où il reçoit les hommages de ses peuples, et où les grands et, ce qui est à remarquer, les prêtres, inclinés devant lui et représentés avec une stature très inférieure à la sienne, offrent en toute humilité leurs respects au Pharaon victorieux<ref> Les exploits de Ramsès-le-Grand, fils de Séthos, sont également figurés à Karnac sur un mur. Champollion avait cru retrouver là écrit en hiéroglyphes magnifiques ce qu’il avait vu écrit en caractères cursifs sur un papyrus appartenant alors à M. Sallier. Ce papyrus, dont Salvolini a traduit quelques lignes, traduction qu’il a publiée sous le titre un peu fastueux de ''Campagnes de Ramsès-le-Grand'', ce papyrus, maintenant à Londres, paraît se rapporter à une expédition différente de celle qui est sculptée sur le mur de Karnac.</ref>. C’est sur une muraille de Karnac que Champollion a découvert ce fait si curieux qui est tout à la fois une preuve de la lecture des hiéroglyphes et un indice des lumières que cette lecture peut fournir à l’histoire. Sur le mur méridional de la grande salle de Karnac est représenté le roi égyptien Sésonch traînant aux pieds de ses dieux un grand nombre de figures humaines ; toutes portent écrit sur la poitrine le nom des peuples et des pays dont elles sont des personnifications. Champollion a lu très distinctement, et tout le monde peut, comme je l’ai fait, lire après lui sur la poitrine de l’une de ces figures, ''Ioudh malk'', ce qui veut dire en hébreu royaume de Juda<ref> Ou plutôt ''Juda royaume. Malk'' est la traduction phonétique du signe ''pays'', qui suit toujours les noms de peuples, et qui est ici après ''malk''. Les Égyptiens avaient l’habitude d’écrire un mot en toutes lettres à côté de la figure ou du symbole qui exprimait un objet ou une idée. </ref>. On ne doit pas s’étonner de voir un mot étranger écrit en caractères hiéroglyphiques, c’est-à-dire en lettres égyptiennes. Nous en faisons autant quand nous écrivons en lettres françaises le ''pachalik'' de Damas ou le ''beylik'' de Constantine. Or, le ''Livre des Rois'' nous apprend que le roi égyptien Sésac, dans lequel il est impossible de ne pas reconnaître le roi Sésonch de Karnac, a pris Jérusalem et a emmené captif le roi Roboam, et voilà qu’on découvre le royaume de Juda parmi les pays dont Sésonch a triomphé. Pouvait-on trouver une concordance plus frappante entre le ''Livre des Rois'', les monumens égyptiens, et les listes de Manéthon, qui placent ici <references/>
Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 107.djvu/726
étrangère à ces méfaits. Quand une crise éclate, si les particuliers sentent que l’atmosphère qu’ils respirent est infectée à ce point, leur anxiété redouble. La crise dégénère en panique et fait de plus grands ravages. Il est donc vraisemblable que la crise des États-Unis est rendue plus violente par les faits immoraux qui se sont produits depuis quelque temps. Cela ne veut point dire assurément que la société américaine soit démoralisée, et par conséquent menacée de décadence. La race anglo-saxonne a ce mérite, par lequel elle surpasse la nôtre, qu’elle porte en elle une puissance indéfinie de réaction. Comptant sur elle-même, elle ne désespère jamais de l’avenir, et, à force de résolution et d’activité, elle se tire des passes les plus mauvaises. San-Francisco, il y a douze ou quinze ans, était une ville où l’écume du monde civilisé faisait la loi, où d’anciens voleurs de grands chemins occupaient des emplois considérables. Aujourd’hui à San-Francisco, les fonctions publiques ne sont confiées qu’à des hommes recommandables, le règne des lois est établi, chacun travaille et vit en sécurité, tant le génie de la race anglo-saxonne sait réagir contre le crime et le vice. Il en sera de même, à plus forte raison, dans des cités telles que New-York, où les bons élémens sont en immense majorité ! On peut en trouver le gage dans un document des plus sérieux : c’est le message adressé, à l’ouverture de la dernière session, à la législature locale par le gouverneur de l’état auquel appartient cette opulente et populeuse métropole. Ce gouverneur est le général Dix, homme respectable et ferme, qui a occupé pendant une suite d’années, avec honneur, le posté de ministre des États-Unis à Paris. Dans ce message, il a fait en traits énergiques le tableau des scandales financiers dont venait de se déshonorer l’administration municipale de New-York ; il a dénoncé ces infamies à ses compatriotes, et il a conjuré la législature d’adopter les mesures nécessaires pour en prévenir le retour. Les recommandations du général Dix seront sans doute écoutées, il y va de l’honneur et de la liberté des Américains, car avec des fonctionnaires pervertis la liberté n’est qu’un vain mot ; mais il reste toujours deux faits, l’un que la crise américaine est rendue plus rigoureuse par l’invasion de l’esprit de dol et de déprédation, contre lequel l’opinion publique ne se montrait pas assez sévère, — l’autre, d’intérêt plus général, qu’une nation qui est digne d’institutions libres n’a qu’à le vouloir pour secouer définitivement le joug des malhonnêtes gens et des aventuriers quand elle a eu le malheur de les subir. {{D|CH. DE MAZADE. |5}}{{—|lh=2}}{{D|''Le directeur-gérant'', C. BULOZ.|7}} <references/>
Arrhenius - L’évolution des mondes, 1910.djvu/283
{{nr||— 15 —|}}métallifères, description des principaux minerais, essais des minerais. Programme d’une exploitation, projections et sondages, abatage, percement des galeries, fonçage des puits, aérage, éclairage el assèchement des mines, transports, extraction, translation des ouvriers, extraction, préparation mécanique des minerais, emploi de l’air comprimé, emploi de l elcctricité, levés el nivellements de mines. Législation française, conversion de mesures étrangères on mesures françaises, tableaux divers. Dictionnaire des termes de mines français, anglais et espagnols, par P. F. Chalon, ingénieur conseil des mines, chevalier de la Légion d’honneur. I volume in-18 jésus contenant 95 figures dans le texte. Relié 12 fr. 50 Exploitation des mines. Exploitation des mines. Giles minéraux. Minéraux utiles non métallifères. Minerais. Eaux souterraines. Marche générale d’une exploitation, recherches, aménagements. Transmission de la force dans les mines. Travaux d’excavalioti, outillage et procédés de l’abatage. Sondages. Puits, galeries, tunnels. Aérage, éclairage. Trans- ]>orls souterrains. Extraction, descente des remblais, translation des ouvriers. Assèchement des mines. Méthodes d’exploitation. Sièges d’exploitation, transports extérieurs, manipulations au jour. Préparation mécanique des minerais, épuration de la houille. Accidents, loi des mines, par E -J. Doriun, ingénieur civil. 1 volume in-8° avec figures dans Lo texte 25 fr. La sécurité dans les mines. La sécurilé dans les mines. Elude pratique des causes des accidents dans les mines el des moyens employés pour les prévenir. L Accidents dans les puits. Ruplures des câbles, mises à molettes el évile-molettes, chutes el accidents divers. 11. Eboulements et chutes de pierres. III. Accidents dus au yrisou. Eclairage et lampes de sûreté, explosifs, organisation du service électrique, aérage et grisoumé-Irie. IV. Lutte contre les poussières de charbon. V. Incendies et dêyagcments d’acide carbonique. VI. Inondations. VIL Explosifs. VIII. Circulation et manœuvres au fond, appareils de securité pour plans inclinés, circulation dans les voies de roulage et aux recel les, appareils respiratoires, stalions de sauvetage, outillage et matériel de secours, organisation du sauvetage, règlementations, par H. Schmibker. ingénieur des arts el manufacllires. 1 fort volume grand in-8° avec 589 figures dans le lexle. Relié 25 fr. Appareils de sécurité employés dans les mines. Mines. Les appareils de sécurité à PExposilion de 1900. par H. ScHMEnnni, ingénieur des arts et manufactures. 1 volume in-8° contenant 47 figures dans le texte et i planche hors-texte 3 fr. Ventilation des mines. Manuel de la ventilation des mines. L’air des mines. Grisou et poussières charbonneuses. Production du mouvement de l’air el la venlilalion. Notions théoriques concernant la venlilalion. Venlilalion naturelle. Ventilation artificielle. Introduction et répartition du courant d’aérage. Ventilation des travaux. Eclairage des mines. Appareils respiratoires ; incendies des mines, explosions de grisou et moyens usités pour combattre ces accidents, par Jaroslav Jicinsky, ingénieur, directeur des mines de Rossilz (Aulrichc). Traduit d’après la 4° édition allemande. Revu et augmenté par le Dr L. Gâcher. 1 volume grand in-8° avec 254 figures dans le texte et 2 planches en couleurs. Relié 15 fr. Ventilateurs. N. B. — Les études suivantes ont pani dans le Portefeuille des Machines el se vendent, avec la livraison qui les renferme, au prix de 2 fr. la livraison. Ventilateur genre Guibal, de 6 mètres de diamètre, de la C" des Mines d’Anzin, avec 1 planche. Livraison d’octobre 1901 2 fr. Ventilateur industriel Farcot, avec 3 pi. Livraison de janvier 1905. ... 2 fr. Le ventilateur diamétral, système Mortier, el sa transformation en diamétral centrifuge, avec 2 planches. Livraison d’août 1909 2 fr. Transport mécanique des matériaux. Elude théorique et pratique sur le transport el la manulenlion mécanique des matériaux et marchandises dans les usines, magasins, chantiers, mines, etc., par G. von Hanepstencel, ingénieur diplômé, privât dozent à l’Ecole technique royale de Berlin, traduit de l’allemand par M. Chavane, ingénieur civil des mines. <references/>
Leblanc - Les Dents du Tigre, paru dans Le Journal, du 31 août au 30 octobre 1920.djvu/58
— De fausses clefs, oui. — Mais les agents de police qui surveillent la maison, de dehors ? — Ils la surveillent encore, comme ces gens-là surveillent, en marchant d’un point à un autre, et sans songer que l’on peut s’introduire dans un jardin tandis qu’ils ont le dos tourné. C’est ce qui a eu lieu, à l’arrivée comme au départ. [[Fichier:Les Dents du tigre - Jean Routier - 024.jpg|centré|vignette|500px|{{centré|''Ils la surveillent encore''}}]] Le brigadier Mazeroux semblait abasourdi. L’audace des criminels, leur habileté, la précision de leurs actes, le confondaient. — Ils sont bougrement forts, dit-il. — Bougrement, Mazeroux, tu l’as dit, et je prévois que la bataille sera terrible. Crebleu ! quelle vigueur dans l’attaque ! La sonnerie du téléphone s’agitait. Don Luis laissa Mazeroux poursuivre sa communication, et, prenant le trousseau de clefs, il fit aisément fonctionner la serrure et le verrou de la porte, et passa dans le jardin avec l’espoir d’y trouver quelque vestige qui faciliterait ses recherches. Comme la veille, il aperçut, à travers les rameaux de lierre, deux agents de police qui déambulaient d’un bec de gaz à un autre. Ils ne le virent point. D’ailleurs ce qui pouvait se passer dans l’hôtel leur paraissait totalement indifférent. « C’est là ma grande faute, se dit Perenna. On ne confie pas une mission à des gens qui ne se doutent pas de son importance. »
Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/1018
saurions le penser. Les faits attestent que partout cette intervention a été jugée nécessaire au début des lignes de ''steamers'', et que le capital ainsi dépensé a été placé à gros intérêts pour la nation. Que veut de plus l’économie politique, à moins qu’elle ne préfère immobiliser les théories en dehors de la pratique, dussent ces théories empêcher ou seulement retarder l’accomplissement de ce qui est utile ? Il lui reste assez à faire dans cette question si complexe des encouragemens accordés à l’industrie, d’abord pour veiller à ce que ces encouragemens ne dépassent pas la juste limite en dehors de laquelle l’intérêt public serait lésé, puis pour conseiller les mesures les plus propres à augmenter la puissance des forces que la nature, la science, l’action des gouvernemens et l’ardeur de l’esprit d’entreprise mettent chaque jour à la disposition de la société tout entière. Pour les gouvernemens comme pour les individus, l’utilité pratique, l’utilité présente ou à venir, est la première loi, quand les principes de morale et de justice ne sont pas atteints, et pour les lignes de paquebots, de même que pour les lignes de chemins de fer, n’est-il pas vrai que, le concours libéralement accordé par l’état s’est soldé par des profits incalculables ? Que le service postal s’exécute sur mer avec la régularité qu’il obtient sur les routes de terre, que les correspondances et une certaine classe de voyageurs et de produits soient transportés plus vite, que les gouvernemens et les peuples soient plus promptement informés des événemens qui se passent loin d’eux, c’est beaucoup sans doute, et cela suffirait pour justifier les subventions ; mais il y a plus. Le principal mérite des paquebots, c’est d’avoir développé, à l’usage de tous les hommes et pour l’avenir à l’usage de tous les produits, le transport à la vapeur. Chaque paquebot est, pour ainsi dire, le père d’une légion de ''steamers''. Les émigrans qui, chaque année, partent des rivages d’Europe pour se rendre dans les deux Amériques n’auront plus à passer de longues et insupportables journées à bord des navires à voiles que l’on voit encore à Liverpool, au Havre, à Brème, et où ils sont arrimés comme des ballots de marchandises. Désormais la vapeur est à leurs ordres. Ils sont aujourd’hui trois cent mille ; encore quelques années, et ils seront un million. Un nouveau ressort est fourni aux mouvemens de la race européenne, qui pourra s’épandre plus librement sur le globe et porter en Amérique, en Afrique, en Asie, les notions supérieures qu’il lui appartient de propager. La civilisation est tout entière dans cet épanouissement humain que la vapeur a rendu possible, et l’origine directe de ce grand bienfait, c’est le paquebot. C. LAVOLLEE. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/735
ne s’en affligeait pas et disait sans affectation : « Une vieille femme comme moi. » Chaque mot de son enfant et toutes ses petites compositions, qu’elle regardait comme des merveilles de génie, la remplissaient d’une joie douce, continue, qui rendait son humeur égale et charmante, quelles que fussent les robes brunes et simples qu’elle portait et l’uniformité excessive de sa vie. Les caprices de sa mère, le radotage presque idiot de son père, ne troublaient pas sa charmante sérénité. Un jour seulement, elle entra dans une colère de reine tragique ; voici à quelle occasion. Depuis la mort de George Osborne, huit ans s’étaient écoulés. Le vieux Osborne entendit parler de son petit-fils, qui s’appelait aussi George, de la gentillesse, de la grace, des mille qualités charmantes de l’enfant ; il se sentit vaincu par le poids même de sa colère et de sa rancune. Bientôt un avoué vint, de sa part, trouver Amélie et lui proposer de consentir à ce que l’enfant fût élevé par le grand-père : ce dernier lui laisserait sa fortune, paierait une pension à la mère et permettrait à cette dernière de venir quelquefois voir son fils. Pour la première fois Amélie éprouva un mouvement de fureur. « Moi ! vendre mon fils ! s’écria-t-elle. Vous m’insultez, monsieur ; vous m’insultez. Dites à M. Osborne que c’est indigne, oui, indigne. Je ne répondrai pas à cette lettre. » Elle jeta les morceaux de l’épître au nez de l’avoué, qui s’en alla tout confus ; comment aurait-il compris la fureur de la veuve à laquelle on voulait enlever son trésor ? Elle passa toute la journée à regarder George et à pleurer. Ses parens ne s’apercevaient pas même de sa tristesse ; ils avaient bien autre chose à faire. Des embarras personnels les absorbaient ; ils avaient trouvé moyen de se ruiner une seconde fois au sein de leur misère. Grace aux belles spéculations sur le vin et la houille, la famille n’avait plus de quoi vivre. Tout était engagé par le vieux Sedley. Les mémoires du modeste ménage, jusqu’alors régulièrement payés chaque semaine, commençaient à rester en arrière. Les remises n’étaient pas venues de l’Inde ; M. Sedley en avertit sa femme d’un air consterné. La pauvre dame avait toujours payé exactement ; aussi deux ou trois des fournisseurs auxquels elle fut contrainte de demander délai se montrèrent-ils récalcitrans, quelque habitués qu’ils fussent aux retards de quelques-unes de leurs pratiques moins régulières. La pension payée par Amélie vint au secours du petit ménage, réduit a la demi-ration. Le boucher revint hargneux, l’épicier insolent ; une fois ou deux George s’étant plaint du dîner, Amélie qui se serait contentée d’un morceau de pain, lui acheta de sa bourse quelques friandises. À la fin, on lui conta ces sortes d’histoires arrangées et incroyables à l’usage des personnes dans la gêne. Un jour qu’elle venait de toucher <references/>
Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 3.djvu/214
les confirment avec une précision remarquable : leur découverte me fit juger qu’il fallait diminuer de quinze à seize minutes le mouvement séculaire actuel du périgée lunaire, que les astronomes avaient conclu par la comparaison des observations modernes aux anciennes. Toutes les observations faites depuis un siècle ont mis hors de doute ce résultat de l’Analyse. On voit ici un exemple de la manière dont les phénomènes, en se développant, nous éclairent sur leurs véritables causes. Lorsque la seule accélération du moyen mouvement de la Lune était connue, on pouvait l’attribuer à la résistance de l’éther ou à la transmission successive de la gravité ; mais l’Analyse nous montre que ces deux causes ne produisent aucune altération sensible dans les moyens mouvements des nœuds et du périgée lunaire, ce qui suffirait pour les exclure, quand même la vraie cause serait encore ignorée. L’accord de la théorie avec les observations nous prouve que, si les moyens mouvements de la Lune sont altérés par des causes étrangères à l’action de la pesanteur, leur influence est très-petite, et jusqu’à présent insensible. Cet accord établit d’une manière certaine la constance de la durée du jour, élément essentiel de toutes les théories astronomiques. Si cette durée surpassait maintenant d’un centième de seconde celle du temps d’Hipparque, la durée du siècle actuel serait plus grande qu’alors de <math>365''{,}25</math> : dans cet intervalle, la Lune décrit un arc de <math>534''{,}6</math> ; le moyen mouvement séculaire actuel de la Lune en paraîtrait donc augmenté de cette quantité, ce qui ajouterait <math>13''{,}51</math> à son équation séculaire, que je trouve, par la théorie, de <math>31''{,}4248</math> pour le premier siècle compté de 1750. Cette augmentation est incompatible avec les observations, qui ne permettent pas de supposer une équation séculaire plus grande de <math>5''</math> que celle qui résulte de mon analyse ; on peut donc affirmer que la durée du jour n’a pas varié d’un centième de seconde depuis Hipparque, ce qui confirme ce que j’ai trouvé ''a priori'' dans le n{{o}} 12 du Livre V par la discussion de toutes les causes qui peuvent l’altérer. Pour ne rien omettre de ce qui peut influer sur le mouvement de la <references/>
Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 3.djvu/634
Quand Dieu, dans le paradis terrestre, bénit Adam et Eve, c’est encore avec des vers de Virgile que, dans Falconia, il leur donne sa bénédiction : <poem>Vivite felices interque virentia culta Fortunatorum nemorum sedesque beatas ; Haec domus, haec patria est, requies ea certa laborum ; His ego nec metas rerum nec tempora pono. </poem> Ainsi, dans cette bénédiction de Dieu, tout se trouve mêlé, les héros des champs Élysées, les exilés de Troie qui vont fonder un empire en Italie, et enfin les Romains, avec leur destinée de conquérir le monde et le temps. Les centons n’étaient pas seulement un travail de marqueterie, c’était aussi un système d’interprétation et d’allégorie mystérieuse. À force d’adapter les vers d’Homère et de Virgile aux récits et aux sentimens de l’Évangile, on en était arrivé à croire qu’il y avait un rapport prophétique entre les mots et les choses, et que les mots ne se prêtaient si bien aux choses que parce que Virgile avait pressenti Jésus-Christ. C’est ainsi non-seulement qu’on interprétait la quatrième églogue de Virgile, <poem>Ultima Cumaei venit jam carminis aetas ;</poem> on expliquait de la même manière certains vers de l’Énéide. C’étaient, disait-on, des prophéties et des vers sibyllins que le poète avait intercalés, par inspiration ou par miracle, au milieu de son poème. Après avoir allégorisé outre mesure tout l’Ancien Testament, on arrivait à allégoriser de même, les auteurs profanes, de telle sorte que le christianisme aurait été partout avant l’Évangile. Mais, quand il est partout, il n’est nulle part, et c’est là, selon nous, le défaut des apologistes chrétiens, qui ont voulu retrouver dans le polythéisme une figure ou une altération d’une révélation primitive conforme à la révélation du christianisme : Si le christianisme existe dans les temps qui l’ont précédé et qui l’ont ignoré, s’il est sous la forme d’emblème et comme une ombre, si surtout une critique attentive peut le reconnaître sous les emblèmes qui le couvrent et le dégager de ses voiles, alors l’Evangile n’a rien donné au monde ; il ne lui a donné que le véritable sens du paganisme. Voilà où aboutissent les interprètes chrétiens du polythéisme ; voilà aussi de quel côté penchaient les allégoristes et les faiseurs de centons. Saint Jérôme, dans une lettre à saint Paulin, s’élève contre cette école stérile et fausse. Il censure d’abord ceux qui accommodaient à leurs opinions quelques passages des prophètes et des apôtres « ne voyant pas, disait il, que c’est une très mauvaise manière d’enseigner que d’altérer l’Écriture et de la tirer par force à leur opinion particulière. Ils font de même que certains auteurs qui, ayant <references/>
Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 9.djvu/929
disons mieux (car il faut tout dire), de l’imposture. Il ne sert de rien, en effet, d’apporter des ménagemens de mots qui ne trompent personne. La religion doit être singulièrement fatiguée des politesses et des cérémonies des philosophes ; elle ne se laissera pas éconduire par des révérences. Il ne s’agit ici ni d’illusions, ni de légendes, ni de symboles. Les dogmes évangéliques ont été posés comme des faits par des témoins oculaires. Ou ces faits se sont passés au grand jour, ou ils ne se sont pas passés du tout ; ou les témoins ont dit vrai, ou ils ont menti : il n’y a pas d’intermédiaire. Qu’on cherche à imaginer un prodige sur lequel il n’y ait pas d’équivoque possible, on sera amené, à coup sûr, à imaginer celui qui sert de fondement à la religion chrétienne. Ce prodige est ou n’est pas : le dilemme est simple jusqu’à la niaiserie. Et si l’on veut bien accorder qu’à partir de la date supposée de ce fait miraculeux, la raison humaine a rencontré un appui qui lui avait manqué jusque-là, nous trouvons, à dire le vrai, plus honorable pour elle de le devoir à un miracle qu’à un mensonge. Telle est l’argumentation pressante par laquelle M. Nicolas conduit ses lecteurs jusqu’à l’entrée même du christianisme. Par la raison seule, on ne peut aller que jusqu’à ce point : constater d’une part le besoin que l’humanité avait du christianisme, la réalité d’abord puis la divinité de fait qui l’a produit. Ce sont là des questions d’analyse et de critique, de psychologie et d’histoire, dont aucune ne sort du domaine absolu de la raison. Mais veut-on aller plus avant ? veut-on plonger un regard dans l’intérieur même du dogme chrétien ? On le peut sans doute, non plus toutefois par les forces de la raison seule : il faut se laisser conduire à la direction de l’autorité et de la foi. Si la raison, en effet, pouvait à elle seule pleinement comprendre les vérités de la foi, elle aurait pu les inventer ; s’il lui était donné de se les approprier tout-à-fait, elle aurait pu s’en passer ; si la révélation était parfaitement compréhensible, elle aurait été parfaitement inutile. Dans l’idée même d’une révélation, le mystère, l’inintelligible, est par conséquent impliqué. La raison peut donc à elle seule éprouver les fondemens sur lesquels repose l’édifice de l’église, mais elle ne peut pénétrer dans le sanctuaire qu’à la condition de s’incliner en passant le seuil. Telle est la donnée d’un second ordre de preuves appelées par M. Nicolas preuves, intrinsèques du christianisme. Là, c’est la foi qui règne en souveraine ; ce sont les vérités d’origine, révélée qui sont exposées dans leur beauté simple. La raison, admise à les contempler, doit y connaître la satisfaction de ses besoins vagues, l’objet de ses pressentimens confus, l’idéal d’une beauté céleste dont elle conçoit les règles sans apercevoir nulle part l’image. C’est ici la contre-partie du spectacle présenté tout à l’heure par le premier ordre de preuves ; du sein de la raison s’élevaient des aspirations inattendues vers la foi : <references/>
Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/90
Et sur mon nom décliné, l’usinier, grand gaillard taillé en carabinier, recule, dessine du bras un tour de sabre et attaque mon ode aux Cuirassiers de Reichshoffen : {{g|{{taille|Nous combattons depuis l’aurore un contre dix...|90}}|4}} — Vous voyez, sourit-il, qu’au bout de près de dix ans je la sais encore. À présent que puis-je pour vous être utile ou agréable ? Rien à faire contre la destinée. La démence dont Zeus frappe ceux qu’il veut perdre est un mal contagieux que l’on sème même de la lyre. {{corr|La|''La''}} ''Vie Moderne'', dont je n’avais pas encore le titre, devait naître d’elle-même de toute éternité. Ce n’était plus ma faute. Que dis-je ?... J’en avais, chemin faisant trouvé l’idée financière, idée de génie s’il en fut, « œuf de Christophe Colomb » qui donne l’Amérique ou un cabanon à Sainte-Anne car tout fut extravagant et vésanique dans cette aventure que je vous conte sans transgresser d’une ligne son cadre d’exactitude. Mon idée financière n’était ni plus ni moins que celle d’appliquer à mon journal d’art le système organique de la coopération. Tous coopéraient, par une mutualité de fournitures réciproques, où j’abolissais les redevances et débours et soufflais sur les échéances comme on souffle sur des têtes volatiles de pissenlits en fleurs. Le papier remboursait le loyer, qui soldait l’impression, équilibrée par la gravure, laquelle de son côté fraternisait avec la double rédaction artistique et littéraire. Et l’on partageait les {{nobr|bénéfices ! ! !}} À cette conclusion hyperbolique, relevée d’une <references/>
Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T3.djvu/311
nité pour Marthe de devenir la maîtresse d’Horace nous paraissent déplaisants, indécents même. Tous ces débats semblent indélicats ; cela vient simplement de ce que le récit est fait à la première personne. Dans la suite du roman, lorsque l’auteur parle à la troisième personne, cette pénible impression, produite par certaines scènes du commencement, s’efface. Ce n’est que tout à fait vers la fin qu’on éprouve de nouveau un certain malaise, lorsque les quatre ou cinq personnages commencent à discuter la parenté de l’enfant de Marthe : est-il à Horace, à Paul Arsène ou peut-être même à tous les deux à la fois ? Admettons que George Sand ait voulu expressément peindre par là l’égoïsme et la sophistique d’Horace qui réapparaissent chaque fois que la vie réelle le réclame. Mais grâce à Théophile et Eugénie, on a de nouveau l’impression d’élucubrations pédantesquement indécentes sur un thème scabreux. Si on fait abstraction de cette erreur de forme commise par l’auteur, on est frappé par la manière magistrale avec laquelle il domine son sujet, par la finesse de ses observations, par la vérité de ses caractères. Horace seul y parle indéfiniment et avec emphase, comme il lui sied : les autres personnages sont bien moins loquaces ; leurs reparties sont plus simples, plus brèves, plus réalistes qu’elles ne le sont dans beaucoup de romans de George Sand. Quant à l’épisode des amours manques d’Horace avec la vicomtesse, ils sont peints avec un si grand réalisme de détails, les caractères de tous les personnages y sont si incisifs, respirent une satire si mordante et tout le récit est assaisonné de si intéressants apartés de l’auteur et de si fines digressions, que les romanciers de nos jours les plus en vogue n’auraient pas refusé de le signer. N’ayant pas osé peindre elle-même la liaison si douloureusement tragique, et faussée dans son principe, de Liszt avec la comtesse d’Agoult, et ayant cédé le sujet à Balzac, Mme Sand fut tentée de peindre quand même son ex-amie, et quoiqu’elle la représentât non avec le véritable héros de son roman, mais avec un personnage imaginaire, le portrait est assez cruel. Malgré cela, ces héros agissent dans leur diffé- <references/>
Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/128
OSER, mais en osant, se compromettre par la personnalité, trop apparente, de sa politique. Le Gouvernement provisoire, avec ses bulletins, avait fait de la nullité ; le 2 décembre, avec sa terreur, fait de la bascule. Toutes choses compensées, l’un n’avance guère plus que l’autre ; les mêmes difficultés, accompagnées des mêmes oppositions, subsistent. Le Gouvernement provisoire, ignorant la révolution, la laissait tomber ; le 2 décembre veut lui faire sa part, la soumet à ses vues, et de fait l’escamote. Le Gouvernement provisoire s’en est allé ; le 2 décembre ne se soutient déjà plus que par la force. Mais la force qui ne sait que contraindre au lieu de créer engendre la haine, et la haine est le salpêtre qui fait sauter les gouvernements. Puisse ne pas l'éprouver, à ses dépens et à nos frais , Louis-Napoléon !... <small>{{c|1. Opinion du 2 décembre sur sa propre situation.}}</small> La proclamation de Louis Bonaparte se référait, ainsi qu’on l’a vu, aux principes de 89. Elle accusait les vieux partis, se prononçait contre la royauté, réclamait les améliorations tant promises, faisait appel, enfin, aux sentiments révolutionnaires. Ce langage a-t-il été soutenu ? Oui et non, tour à tour, suivant que la politique du moment jugeait à propos d’avancer ou de reculer. D’abord, la dissolution d’une assemblée aux trois quarts royaliste, et l’arrestation des principaux chefs des partis dynastiques, semblaient témoigner d’un parfait accord entre les vues de l’Elysée et la donnée révolutionnaire. Mais huit jours ne s’étaient pas <references/>
Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/136
avaient dû renoncer au combat judiciaire et aux ordalies. Il leur fallut se résigner à chercher la vérité dans les dépositions des témoins, dans l’examen des faits, dans des interrogatoires habiles. Beaucoup d’États, nous l’avons vu, nous avaient devancés dans ce domaine. D’autres furent plus lents à réaliser ce progrès. Nos voisins de Hollande, constitués en République batave sous le protectorat déguisé de la France, n’abolirent la torture qu’en 1795<ref>Il est juste de faire remarquer qu’en dehors de la province de Hollande proprement dite, on n’usa plus guère de la question dans les Pays-Bas du Nord.</ref> ; encore l’abolition n’était-elle décrétée qu’en principe ; un règlement provisoire du 10 octobre 1798 autorisa le juge d’instruction à employer tel moyen qu’il croirait convenable pour forcer l’accusé à parler. On vit en 1802, à Amsterdam, un certain Jansen, accusé d’avoir assassiné sa femme, recevoir des coups de nerf de bœuf qui provoquèrent l’aveu sur lequel il fut condamné à mort<ref>Voir {{sc|Van Hall}}, ''{{lang|nl|Regtsgeleerde verhandelingen}}'', cité par {{sc|De Bosch-Kemper}}, I, {{sc|cxxxvi}}. — Voir aussi {{sc|Meyer}}, t. IV, p. 307. — {{sc|De Wind}}, ''{{lang|nl|Bijzonderheden}}'', p. 25.</ref> et exécuté en 1803. Ce règlement resta en vigueur jusque 1809. Chose incroyable, on vit en 1814 le prince-régent d’Angleterre, de cette Angleterre qui se vantait<ref>À tort, nous l’avons vu. Mais la torture avait disparu de ses tribunaux depuis plus de deux siècles.</ref> de n’avoir jamais connu la torture, réintroduire la question préparatoire dans la législation de Hanovre<ref>{{sc|Meyer}}, I, {{sc|xlvi}}, en note.</ref> ! Jusqu’en 1860, la torture se pratiquait en Suisse, dans les cantons de Fribourg et du Tessin<ref>{{sc|Tissot}}, ''Le droit pénal'', p. 243.</ref>, et elle ne fut supprimée dans la Sicile qu’après la constitution du royaume unitaire d’Italie<ref>{{sc|Lea}}, ''{{lang|en|Superstition and force}}'', p. 587.</ref>. Tant les abus séculaires les plus révoltants sont lents à disparaître de la surface de l’Europe<ref>Au moment où nous corrigions l’épreuve de cette feuille, M. P. Verhaegen, juge au tribunal de Bruxelles, a eu l’obligeance de nous indiquer un fait intéressant qui avait échappé à nos recherches. Le 27 octobre 1789, le comte de Trauttmansdorff écrivit à Vienne afin d’être autorisé à mettre à la torture plusieurs individus impliqués dans les complots ourdis contre le Gouvernement. Dès le 7 novembre, le prince de Kaunitz répondit par une interdiction formelle. Nous insérons la correspondance de Trauttmansdorff avec Kaunitz aux pièces justificatives, {{no}} X. Nous avons vu, p. 128, que Kaunitz, découragé par les circonstances, laissa restaurer la torture en 1792.</ref>. {{sep4}} <references/>
Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/246
de Tycho-Brahé ; je m’assis plus d’une fois, sur le bastion où mon grand-père, âgé de vingt-trois ans, était monté en 1741, côte à côte, avec les grenadiers de M. de Chevert. Je ne raconterai point ici le congrès de Prague, je renvoie, comme pour l’ambassade de Vienne, au récit de M. Thiers. On sait, d’ailleurs, que ce congrès prétendu ne s’est ouvert que ''pro formâ'', qu’il n’a duré que vingt jours, que ces vingt jours ont été consumés en contestations préliminaires, que jamais les plénipotentiaires ne se sont rencontrés face à face. Je fus peut-être le seul des nôtres ou des autres qui ne perdit pas son temps. J’avais été chargé par nos deux plénipotentiaires de dresser un état réel et complet des forces réunies par le gouvernement autrichien, à l’appui de sa médiation. Je m’en occupai activement, et je crois avec succès. Les moyens qu’on peut employer pour surprendre le secret d’un ami qui n’en est pas un ne sont jamais irréprochables ; ceux que nous employâmes ne l’étaient pas, et, pour la part que j’y pris, je l’avoue à ma honte. Bref, nous nous ménageâmes des intelligences dans les bureaux du ministère autrichien ; nous obtînmes des états de contrôle, <references/>
Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/157
de Capsa. Là, Marius fait halte avec toutes ses troupes, et se tient caché le mieux qu’il lui est possible. Aussitôt que le jour paraît, les Numides, ne redoutant aucune hostilité, sortent en grand nombre de la ville : à l’instant Marius ordonne à toute sa cavalerie et aux fantassins les plus agiles de se porter au pas de course sur Capsa, et de s’emparer des portes. Lui-même les suit en toute hâte, mais en bon ordre et sans permettre au soldat de piller. Dès que les habitants s’aperçurent du danger, le tumulte, l’excès de la crainte et de l’étonnement, enfin, la perte d’une partie de leurs concitoyens faits prisonniers hors des remparts, tout les oblige à se rendre. Cependant la ville est livrée aux flammes, tous les Numides en âge de porter les armes sont passés au fil de l’épée, le reste est vendu, et le butin partagé aux soldats. Exécution sanglante, contraire au droit de la guerre, et dont on ne doit pourtant accuser ni la cruauté ni l’avarice du consul {{refl|(120)|nosup}} ; mais cette place, position très avantageuse pour Jugurtha, était pour nous d’un difficile accès, et ses habitants, race mobile, perfide, ne pouvaient être enchaînés ni par la crainte ni par les bienfaits. {{rom-maj|XCII}}. Après avoir accompli, sans perdre un seul homme, une entreprise si importante, Marius, déjà grand et illustre, parut plus grand et plus illustre encore : ses projets les plus hasardés passaient pour l’effort du génie et du courage. Ses soldats, charmés de la douceur de son commandement, et enrichis sous ses drapeaux, l’élevaient jusqu’au ciel ; les Numides le redoutaient comme un être au-dessus de l’humanité ; enfin les alliés, aussi bien que les ennemis, lui attribuant une intelligence {{tiret|di|vine}} <references/>
Groulx - Mes mémoires tome IV, 1974.djvu/424
INDEX 405 18-19 ; sa mort, 18 ; 4 : 97 ; hom¬ mage, 147 Groulx, Lionel, ptre, chan., 2: 46, 146, 157n, 160, 178, 228n, 281 ; naissance et famille, 1: 15-19, 27-29, 67, 109; enfance, 21-29, 67 ; temps d’école, 33-36, 37-38, 40 ; campagne électorale, 38-40 ; leçons de travail, 29-32 ; 4: 98¬ 100 ; santé frêle, 1: 77, 90, 102, 115, 158-161, 169, 190, 223 ; 3 : 366-367 ; sa mère, 1: 16-19 ; 3 : 9-12 ; réflexions à sa mort, 4 : 91-103 ; son père, 1: 16-19 ; son beau-père, 19,\t36,\t409-412 ; deuils : sa sœur, Flore, 403-405 ; son frère, Albert, 405-408 ; ses soeurs, 4: 353 ; départ pour le collège, 1: 41-42 ; classe de litté¬ rature, 52-55 ; de rhétorique, 53¬ 57 ; camarades, 58, 60-61 ; maî¬ tres de ce temps-là, 44-46, 90, 214-215 ; mirages de l’ennui, 43¬ 44, 65, 157, 169-170; prix Prince de Galles, esprit de l'époque, 55¬ 57; vocation, 67, 70-71; au Grand Séminaire, 71-72, 74-76, 88, 89, 110, 113; 3: 171; séminariste à Valleyfield, 1: 77-78, 81-82; 3: 171-172; fonde Action catholique, 1: 87, 92, 107, 187; une Croisade d’adolescents, 102-108 ; neuvième croisade, 218-219; fondation ACJC, 104-105, 107-108, 202¬ 203 ; professeur au Collège de Valleyfield, 81,\t83,\t91,\t95, 103, 174-175, 181 ; 3: 171-172, 176; ses élèves, 1: 83-87, 175 ; relations avec Mgr Émard, 78¬ 79, 110-111, 172-174, 202-211, 224-225. 241 ; départ de Valley¬ field, 221-222, 241 ; tristesse de ce départ, 242-244 ; exeat, 226, 237 ; conditions, 248-249 ; arrivée à Montréal (1915), 1: 225¬ 227, 248; rôle de l’abbé Char¬ rier, 223, 249, 250 ; 2 : 329-330 ; intervention d’Henri Bourassa, 1 : 213-215, 227, 250, 251 ; au pres¬ bytère Saint-Jean-Baptiste, 247¬ 248, 255, 273 ; au presbytère du Mile End, l’école nationaliste, 273-275, 281-282, 282-285 ; tour¬ née à travers les collèges classi¬ ques (1916), 268 ; professeur aux HEC, 260-261; 4: 177-191; professeur d'histoire du Canada à l’Université de Montréal (1915), 1: 249-250; 3: 139, 223, 284; 1ère conférence (3 nov.), 1 : 257¬ 259 ; 2e conférence, 261, 262, 263¬ 266 ; état des archives, 295-296 ; 1er séjour aux, 215-216 ; état de l’enseignement de l’histoire, 251, 253, 294 ; cours de méthodologie historique, 151 ; enseignement, 2 : 366, 375-376 ; salaires et rajus¬ tements, 3 : 12-17, 167 ; 30e an¬ niversaire d’enseignement, 4: 16, 142-150; 50e anniversaire du 1er cours, 351 ; pension, 172-181 ; départ de l'Université, 165-181 ; professeur émérite, 175,\t180; voir Cours ; premier séjour en Europe (1906¬ 1908), confrères-bienfaiteurs, 1 : 110; 2: 76; 3: 176-177; à Ro¬ me, 1: 113-115 ; professeurs, 113, 131-132; compagnons d’étude, 131-133, 149, 154-155 ; souve¬ nirs de Rome, 117-121 ; audience Pie X, 118-119; études à Fri- bourg, 125-126,\t130,\t148-158, 154-158; maîtres, 150-154; com¬ pagnons de voyage, 123-124, 128, 149, 154-158, 163-168 ; malade à l’hôpital, 158-161 ; 4: 185 ; vi¬ sites, 1: 123-133 ; impressions, 163-167 ; séjour en Angleterre, 168 ; en Bretagne, chez le com¬ te de Cuverville, 135-139, 139¬ 147,\t172-173 ; en Italie, en <references/>
Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/256
252 LES ANNEES D’APPRENTISSAGE « Il voyait peu de monde a la ville, montait beaucoup a cheval, visitait les nombreuses connaissances qu’il avait à la campagne, et soignait les affaires de sa maison. A son retour, il descendait chez moi, entourait de soins affectueux mon mari, toujours plus malade ; il soulagea ses souffrances par le secours d’un habile médecin ; et, comme il s’intéressait à toutes mes affaires, il sut m’intéresser aussi à sa destinée. Il me parlait de ses campagnes, de son irrésistible penchant pour la vie militaire, de sa famille ; il me faisait part de ses occupations présentes ; enfin il n’avait rien de caché pour moi ; il me développait ses plus intimes pensées, laissait mon regard pénétrer dans les plus secrets replis de son cœur ; j’appris à connaître ses talents, ses passions. C’était la première fois de ma vie que je jouissais de la société d’un homme aimable et sincère. Je fus attirée, entrainée, avant d’avoir pu me reconnaître. « Sur ces entrefaites, je perdis mon mari, à peu près comme je l’avais épousé. Le fardeau des affaires du théâtre retomba sur moi ; mon frère, parfait sur la scène, n’était bon à rien dans l’administration. Je veillais tout, et cependant j’étudiais mes rôles avec plus d’ardeur que jamais. Je jouais de nouveau comme autrefois, ou plutôt avec une tout autre force et une vie nouvelle. C’était par lui et pour lui ; cependant mon jeu laissait souvent à désirer, quand je savais mon noble ami dans la salle ; mais quelquefois il m’écoutait à la dérobée, et vous pouvez juger combien son suffrage inattendu me surprenait agréablement. Certes, je suis une étrange créature dans chacun de mes rôles, il me semblait toujours que je faisais son éloge et célébrais sa gloire ; c’était la disposition de mon cœur, quel que fut le sens des paroles. Si je le savais parmi les spectateurs, je n’osais parler avec toute mon énergie, comme si je n’avais pas voulu lui jeter au visage mon amour et mes louanges. S’il était absent, j’avais libre carrière, je faisais merveilles, avec une tranquille assurance, avec une satisfaction inexprimable. Je retrouvais du charme aux applaudissements, et, quand le public prenait plaisir à m’entendre, j’aurais voulu m’écrier C’est à K lui que vous le devez « Oui, comme par l’effet d’un prodige, mes rapports avec le <references/>
Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/328
- :m — Dès son entrée dans la vie des lettres. Barbey d'Anre- villy se lieurtait. sans l'avoir encore mérité pent-èliv. au mauvais vouloir de ses confrères (^t se meurli'issail aux: murs d'airain des coteries. La critique universitaire ne lui était pas plus favorable que la ci'ilique académique : l'une et l'autre l'i.unoraienl de parti pris. Il m^ remportait décidément (]ue des succès mondains cl n'cnlovait (jue des sntfraties amis. La consolation eut été maiure. s'il n'avait méprisé le métier de littérateur. Mais oWo snllisail à sa nature fière et haulaini». C'est j)our lui-momi^ (pi'il écrivait, et pour de rares intimes des deux sexes, non pour le public. Néanmoins, en quelque dédain ciu'il liiil ropinion des professionnels et de la foule, il lui était penil)le qu'on méconnut à ce point ses efforts et son ceuvi'e. Son amour-propre n'en souffrait pas : an conti'aire, sa fatuité de grand seig-neur se faisait gloire d'une obscurité imméritée. Seulement ses intérêts d'écrivain, oblig-é de vivre au jour le jour et contraint à gagner chaque matin la subsistance quotidienne, eu étaient fort endommagés. Il ne se plaignait que de cet ennui, — ou plut'il il ne s'en plaignait pas, il dévorait ses tristesses en silence et déplorait tout bas, au fond de son cuMir endolori, la lamentable condition de son existence contrariée par les événements. A l'âge de quarante ans, il n'avait pas encore mois- sonné les pauvres épis d'une renommée même pas- sagère dans le vaste champ de la littérature; iln'avait fait qu'y glaner des déceptions. Et pourtant il s'était paré des toilettes de Brunnnell , il avait fait retentir les cris de passion d'Clic Vieille MaÀtrcssc et il ache- vait de réveiller la voix d'oiUre-tombe des Prop/ii'les du Passé ! <references/>
Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 40.djvu/426
convention et au club des jacobins<ref> La discussion eut lieu aux Jacobins le 21 avril 1793, et à la convention le 24 avril.</ref>, et dans ce discours, on peut en effet démêler une tendance incontestable au socialisme. Tout en déclarant que « la loi agraire est un fantôme et l’égalité des biens une chimère, » il demandait à « compléter » la théorie projetée par Condorcet. Il reprochait aux girondins de n’avoir pas compris que la propriété, comme tous les autres droits, a besoin d’être « limitée. » En conséquence, il proposait quatre articles additionnels qui furent votés aux Jacobins et que la convention renvoya au comité de constitution. Le premier définissait la propriété « le droit de jouir et de disposer ''de la portion de biens qui est garantie par la loi''. » Le second déclarait que le droit de propriété est « borné comme les autres ; . » dans le troisième il était dit que ce droit « ne peut préjudicier à l’existence de nos semblables, » et dans le quatrième que « toute possession qui viole ce privilège est illégitime et immorale. » Il demandait, en outre, que la constitution déclarât « que tous les hommes sont frères, » que « celui qui opprime une nation est l’ennemi de toutes les autres, » que « le souverain de la terre est le genre humain. » Enfin, dans le même discours, il proposait que les citoyens indigens « fussent dispensés de contribuer aux dépenses publiques<ref> La discussion eut lieu aux Jacobins le 21 avril 1793, et à la convention le 24 avril.</ref>. » Ce discours, et celui qui fut prononcé par Robespierre aux Jacobins, étaient évidemment une avance faite aux partis extrêmes de la convention et même aux hébertistes et à Anacharsis Clootz. Comment s’expliquer autrement cette phrase sur « la souveraineté du genre humain » que l’on ne trouve nulle part dans les discours de Robespierre ? Nous avons vu plus haut quelle a été la déclaration des droits des hébertistes. Pour l’emporter sur eux aux Jacobins et pour triompher des girondins à la convention, il était nécessaire de rompre avec les doctrines de ceux-ci et de faire des concessions aux doctrines de ceux-là. Mais était-ce bien là la vraie pensée de Robespierre ? y est-il resté fidèle et n’a-t-il pas changé de principe avec les circonstances ? C’est une conjecture que l’on doit à la sagacité d’Edgar Quinet, et que l’examen des faits vérifie complètement. En effet, le discours où Robespierre propose de limiter le droit de propriété à la portion de biens garantie par la loi est du 24 avril 1793 : c’est le moment de la grande lutte entre la gironde et la montagne. Il s’agit d’écraser les girondins. Il était donc opportun de dénoncer ceux-ci comme partisans d’un droit de propriété illimité qui, suivant Robespierre, n’était que le droit d’oppression des riches sur les pauvres. Mais la gironde est vaincue ; un mois après, la discussion sur la constitution recommence à la convention. Le projet <references/>
Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 41.djvu/123
passage, comme celui qui, dans les nouveaux programmes, conduit d’une division à l’autre ; seulement celui-là, étant le dernier de tous et le plus important, doit être aussi le plus sérieux. Le jury pourrait être composé des professeurs mêmes de l’établissement, présidés par un délégué de l’état ; une loi déterminerait la forme et les matières de l’examen. C’est ainsi que les choses se passent en Allemagne, et personne ne s’en plaint. Le premier avantage que j’y trouve, c’est que les professeurs de nos facultés seraient délivrés d’une besogne fastidieuse qui leur fait perdre, sans profit pour personne, un temps qu’ils doivent à la science. D’un autre côté, l’élève, qui comparaît devant des professeurs qu’il connaît et qui le connaissent, est moins exposé à se troubler et montre tout ce qu’il sait. Enfin le délégué de l’état, s’il est bien choisi, s’il remplit sérieusement son devoir, peut empêcher toute complaisance fâcheuse. Voilà le système qui me parait, en principe, le plus simple, le plus juste et le plus vrai. Je sais bien qu’on peut élever contre ce système une objection grave. Des examens ainsi faits se comprennent dans les lycées de l’état ; mais nous ne vivons plus sous le régime du monopole, l’enseignement est libre, et beaucoup de jeunes gens sont élevés en dehors de l’Université. Convient-il de les condamner sans pitié au baccalauréat, et s’il est vrai que ce système soit si mauvais et produise d’aussi tristes résultats, est-il juste qu’une grande partie, presque la moitié de notre jeunesse, soit forcée de le subir ? Mais, alors, que faut-il faire ? Pour moi, j’avoue que je ne verrais pas de grands inconvéniens à donner à quelques établissements libres, sous certaines conditions et avec certaines réserves, le droit dont jouiraient ceux de l’état. On l’accorderait, par un décret spécial, à ceux où l’on saurait que les études sont bien faites et qui posséderaient, par exemple, un nombre déterminé de professeurs pourvus de leurs grades universitaires. Il ne serait pas à craindre que, dans un collège important, bien dirigé, où les principales classes sont faites par dès licenciés, le niveau des études fût trop abaissé, et, en choisissant bien le délégué de l’état devant qui on subirait les épreuves, on pourrait croire que les examens seraient sérieux et mériteraient toute confiance. Quant aux jeunes gens élevés dans leurs familles ou dans les établissemens qui n’auraient pas le droit de décerner des diplômes, il resterait pour eux la ressource de l’ancien baccalauréat : comme il ne fonctionnerait plus que pour quelques candidats et à de plus rares intervalles, il ne pourrait plus avoir sur nos études l’influence déplorable que nous avons signalée. Mais ces changemens radicaux ne sont pas de ceux qu’on peut décréter en un jour. Ils demandent à être pesés, mûris, et il est <references/>
Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/219
laquelle il fut encore porté, je ne sais par qui, dans un autre pays... — Je ne sais lequel ! dit en riant M. Goefle, Voilà des renseignements un peu vagues, et je serais fort embarrassé, avec cela, de vous faire gagner votre cause ! — Ma cause ? — Oui ; je suppose que vous plaidiez pour reconquérir votre nom, vos droits, votre héritage ! — Oh ! soyez tranquille, monsieur Goefle, reprit Cristiano, vous n’aurez jamais rien à plaider pour moi. Je ne suis pas atteint de la folie ordinaire des aventuriers à naissance mystérieuse, qui, tout au plus, veulent bien consentir à être fils de rois, et passent leur vie à chercher par le monde leur illustre famille, sans jamais se dire qu’ils lui seraient probablement plus incommodes qu’agréables. Quant à moi, si je suis par hasard de noble famille, je l’ignore et ne m’en soucie guère. Cette indifférence fut partagée ou plutôt me fut inspirée par mes parents adoptifs. — Et qui furent vos parents adoptifs ? — Je n’ai connu et ne me rappelle ni ceux qui me reçurent de la fenêtre dans le bateau, ni ceux qui me mirent en nourrice, ni ceux qui me portèrent en Italie, toutes gens dont je ne saurais rien vous dire, <references/>
Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/281
d’aimer toujours Mme de Chevreuse ; et, depuis qu’elle eut perdu toute espérance de les culbuter, elle n’avoit pas moins d’empressement que le roi de l’attirer dans leurs parties particulières. Mme de Chevreuse, qui n’étoit pas moins détachée que son mari, ni moins désireuse que lui de vivre pour Dieu et pour elle-même, profita d’une fort longue infirmité pour se séquestrer, sous prétexte qu’elle ne pouvoit plus mettre de corps, sans quoi, en robe ou en robe de chambre, les dames ne pouvoient se présenter nulle part devant le roi. Lassé de son absence, il fît pour la rappeler de ses particuliers ce qu’il n’a jamais fait pour aucune autre. Il voulut qu’elle revînt à Marly avec dispense de tout ce qui étoit public, et que là, et à Versailles, elle vînt les soirs le voir chez Mme de Maintenon sans corps, et tout comme elle voudroit, pour sa commodité'', ''à leurs dîners particuliers et à toutes leurs parties familières. Il lui donna, comme on l’a dit, trente mille livres de pension sur les appointements du gouvernement de la Guyenne. Fort peu en avoient de vingt mille, et pas une seule dame de plus forte. Sa douleur, qui fut telle qu’on la peut imaginer, mais qui comme elle fut courageuse et toute en Dieu, lui fut une raison légitime de séparation, mais qu’il fallut pourtant interrompre par des invitations réitérées, non pour des parties, mais pour voir le roi en particulier. Après son deuil elle tira de longue, mais elle ne put éviter les parties et les particuliers. La mort du roi rompit ses chaînes ; elle se donna pour morte ; elle s’affranchit de tous devoirs du monde ; elle vécut à l’hôtel de Luynes et à Dampierre dans sa famille, avec un cercle fort étroit de parents qui ne se pouvoient exclure, et d’amis très-particuliers. Elle dormoit extrêmement peu, passoit une longue matinée en prières et en bonnes œuvres, rassembloit sa famille aux repas, qui étoient toujours exquis sans être fort grands, toujours surprise des devoirs que le monde ne cessa jamais de lui rendre, quoiqu’elle n’en rendît aucun. C’étoit un patriarche <references/>
Gautier - Voyage en Espagne.djvu/148
{{nr|142|VOYAGE EN ESPAGNE.|}}{{tiret2|Phébus-Apol|lon}} verse du haut du ciel aux heures de midi ne vous atteignent jamais ; les saillies des toits vous servent de parasol. Si, par malheur, vous êtes obligés de passer par quelque ''plazuela'' ou ''calle ancha'' exposée aux rayons caniculaires, vous appréciez bien vite la sagesse des aïeux, qui ne sacrifiaient pas tout à je ne sais quelle régularité stupide ; les dalles sont comme ces plaques de tôle rouge sur lesquelles les bateleurs font danser la cracovienne aux oies et aux dindons ; les malheureux chiens, qui n’ont ni souliers ni ''alpargatas'', les traversent au galop et en poussant des hurlements plaintifs. Si vous soulevez le marteau d’une porte, vous vous brûlez les doigts ; vous sentez votre cervelle bouillir dans votre crâne comme une marmite sur le feu ; votre nez se cardinalise, vos mains se gantent de hâle, vous vous évaporez en sueur. Voilà à quoi servent les grandes places et les rues larges. Tous ceux qui auront passé entre midi et deux heures dans la rue d’Alcala à Madrid seront de mon avis. En outre, pour avoir des rues spacieuses, l’on rétrécit les maisons, et le contraire me paraît plus raisonnable. Il est bien entendu que cette observation ne s’applique qu’aux pays chauds, où il ne pleut jamais, où la boue est chimérique et où les voitures sont extrêmement rares. Des rues étroites dans nos climats pluvieux seraient d’abominables sentines. En Espagne, les femmes sortent à pied, en souliers de satin noir, et font ainsi de longues courses ; en quoi je les admire, et surtout à Tolède, où le pavé est composé de petits cailloux polis, luisants, aigus, qui semblent avoir été placés avec soin du côté le plus tranchant ; mais leurs petits pieds cambrés et nerveux sont durs comme des sabots de gazelle, et elles courent le plus gaiement du monde sur ce pavé taillé en pointe de diamant, qui fait crier d’angoisse le voyageur accoutumé aux mollesses de l’asphalte Seyssel et aux élasticités du bitume Polonceau. Les maisons de Tolède présentent un aspect imposant <references/>
Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/147
veux-tu maintenant tourmenter ta famille, tes enfants ? Qu’ils grandissent tranquillement et, ensuite, ils agiront comme ils voudront. L’homme marié se tut ; mais un monsieur âgé, qui était présent, intervint pour lui. — Admettons, dit-il, qu’un homme marié, qui a accoutumé sa famille à une certaine aisance, ne puisse pas, tout d’un coup, l’en priver. Il est vrai que si l’éducation des enfants est déjà commencée il vaut mieux la terminer que de tout briser, d’autant plus que les enfants, une fois grands, choisiront eux-mêmes la voie qu’ils trouveront la meilleure. Je reconnais que pour un homme marié il est difficile, impossible même, de changer entièrement sa manière de vivre, sans commettre de péchés, tandis qu’à nous, c’est Dieu même qui l’ordonne. Ainsi moi, je vis maintenant affranchi de tout devoir, je ne vis, à vrai dire, que pour mon ventre : je mange, je bois, je ne fais rien, et je suis dégoûté de moi-même. Pour moi, il est temps de renoncer à cette vie, de distribuer mes richesses et au moins à la veille de la mort, de vivre comme Dieu l’ordonne, de vivre en chrétien. Mais on ne fut pas de l’avis du vieillard. Il y avait là sa nièce, sa filleule, dont il avait tenu tous les enfants sur les fonts {{corr|batismaux|baptismaux}} et auxquels il faisait des cadeaux à chaque fête ; et son fils était également présent. Tous se mirent à lui faire des objections. <references/>
Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/41
{{nr||VIE DE VOLTAIRE.|27}} vie, tandis qu’un homme étranger au christianisme pleure Zaïre, dont le cœur, égaré par sa tendresse pour son père, s’immole au préjugé superstitieux qui lui défend d’aimer un homme d’une secte étrangère ; et c’est là le chef-d’œuvre de l’art. Pour quiconque ne croit point aux livres juifs, ''Athalie'' n’est que l’école du fanatisme, de l’assassinat et du mensonge. ''Zaïre'' est, dans toutes les opinions comme pour tous les pays, la tragédie des cœurs tendres et des âmes pures. Elle fut suivie d'''Adélaïde du Guesclin'', également fondée sur l’amour, et où, comme dans ''Zaïre'', des héros français, des événements de notre histoire, rappelés en beaux vers, ajoutaient encore à l’intérêt ; mais c’était le patriotisme d’un citoyen qui se plaît à rappeler des noms respectés et de grandes époques, et non ce ''patriotisme d’antichambre'', qui depuis a tant réussi sur la scène française. ''Adélaïde'' n’eut point de succès. Un plaisant du parterre avait empêché de finir ''Mariamne'', en criant : ''La reine boit'' ; un autre fit tomber ''Adélaïde'', en répondant : ''Couci-couci'', à ce mot si noble, si touchant de Vendôme : ''Es-tu content, Couci ?'' Cette même pièce reparut sous le nom du ''Duc'' ''de Foix'', corrigée moins d’après le sentiment de l’auteur que sur les jugements des critiques ; elle réussit mieux. Mais lorsque, longtemps après, les trois coups de marteau du ''Philosophe sans le savoir'' eurent appris qu’on ne sifflerait plus le coup de canon d'''Adélaïde'' ; lorsqu’elle se remontra sur la scène, malgré Voltaire, qui se souvenait moins des beautés <references/>
Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/459
âge étaient des objets d’épouvante. On les nommait alors ''herbes du diable'' ; les bonnes femmes se signaient et passaient vite sans retourner la tête lorsqu’elles en rencontraient une au milieu des décombres. La médecine légale n’a que trop justifié le sentiment populaire, elle a rangé la plupart des solanées parmi les poisons narcotico-âcres. Toute cette famille végétale, sans excepter même l’honnête pomme de terre et l’innocente tomate, se révèle d’ailleurs à première vue par je ne sais quelle mine équivoque. Sans doute il en est d’élégantes : le nicandre des parterres, le tabac, les daturas exotiques, ne manquent certes ni de prestance ni de beauté ; mais les plus belles d’entre ces plantes étranges font penser à la mine hautaine et aux fières allures de certains personnages dont il est prudent d’examiner rigoureusement les papiers. Que dire de nos solanées indigènes ou naturalisées, de nos belladones, de nos jusquiames, de nos daturas, de ces innombrables morelles, qui dans tous les lieux vagues étalent leurs feuilles, leurs fleurs et leurs fruits, de ces pétunias multiflores que l’on s’ingénie à vouloir transformer en plantes d’ornement? Ce n’est pas seulement le triste aspect du feuillage, les allures et le port plus ou moins gauches des solanées qui prédisposent à se défier d’elles, c’est encore l’odeur ordinairement vireuse qu’elles exhalent, et surtout les couleurs dont elles se parent. Les feuilles sont généralement d’un vert sombre, et les fleurs ne sortent guère de leurs tons violacés habituels que pour nous offrir des roux malsains ou de vilains blancs jaunâtres, parfois rayés de lignes d’un noir sanguinolent. La physionomie générale de ces végétaux malsains justifie pleinement les dénominations peu flatteuses que les solanées ont reçues depuis Linné, qui tout d’abord les appela les ''livides'', jusqu’aux botanistes modernes, qui les stigmatisent des noms de ''suspectes'', de ''vénéneuses'' et même de ''hideuses''. Il faut dire que de temps à autre des protestations se sont élevées; quelques auteurs, peu nombreux à la vérité (Dunal, Pouchet, Michelet), se sont constitués les défenseurs des solanées en faisant valoir les services rendus par certains genres de cette famille, et en rappelant le parti que la science médicale tire des sucs vénéneux de quelques autres qui lui fournissent des remèdes héroïques; ce ne sont là que des circonstances atténuantes<ref> Il est bon d’ajouter que, par suite d’une erreur de classification rectifiée depuis, mais qui était bien faite pour attendrir les défenseurs des solanées, on faisait entre; dans cette famille le genre des molènes, qui se font remarquer par leur honnête physionomie et la douceur émolliente de leurs sucs. </ref>. Les principes vénéneux peuvent faire absolument défaut dans quelques solanées, ou ne s’y présenter qu’en proportions trop faibles pour influer d’une manière sensible sur l’économie animale; mais, toutes les fois qu’ils sont <references/>
Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/259
mais d’autorité : « Je ne soupçonne pas qu’aucun de vous s’y oppose ; » se lever, gracieuser un chacun, les convier de se trouver l’après-dînée au parlement, et si le roi mouroit le soir, ne faire cette assemblée que le lendemain matin, pour ne laisser pas la nuit au duc du Maine à cabaler le parlement, et au premier président d’y haranguer. Arrivé droit au parlement, lui dire qu’il vouloit par l’estime qu’il avoit pour la compagnie, sans rien de plus, leur venir faire part lui-même et se condouloir avec eux de la perte que la France venoit de faire, et de la régence qui lui échéoit par le droit de sa naissance, et les assurer du soin qu’il auroit de se faire éclairer de leurs lumières dans les besoins qu’il en auroit ; que, pour commencer à leur témoigner le désir qu’il en avoit, il leur communiquoit le plan qu’il estimoit le meilleur après M. le duc de Bourgogne, dans la cassette duquel il avoit été trouvé, et déclarer là les conseils sans nommer personne. Abréger matière, et finir la séance. Comme la régence étoit faite et déclarée avant que d’y entrer, les gens du roi n’auroient point eu à parler, ni le parlement à opiner ni rendre d’arrêt. Si M. du Maine s’étoit mis en devoir de parler, l’interrompre et lui dire que c’étoit à lui moins qu’à personne à vouloir contredire ce qui s’étoit fait comme dans toutes les régences précédentes à celle des deux dernières reines, dont le cas particulier de chacune d’elles demandoit la forme qu’elles avoient prise, qu’elle étoit trop nouvelle et trop différente de celle de tous les temps pour avoir la force de la changer par ces deux seuls exemples, et qu’après toutes les choses inouïes qu’il avoit obtenues, il devoit éviter avec soin de parler de ce qui étoit de règle, comme de ce qui n’y étoit pas, et sans attendre de réponse, lever la séance. Si le premier président avoit voulu parler sur la même chose, l’interrompre pareillement, lui dire qu’il marqueroit toujours au parlement toute l’estime et la considération qu’il méritoit, <references/>
L’Encyclopédie/1re édition/CARAVELLE
Bellin L’Encyclopédie, 1re éd. Texte établi par D’Alembert, Diderot, 1751 (Tome 2, p. 673-674). ◄ CARAVANSERASKIER CARAY ► dictionaryL’Encyclopédie, 1re éd.Bellin1751VTome 2Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvuDiderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvu/1673-674 CARAVELLE, s. f. (Marine.) c’est un petit bâtiment Portugais à poupe carrée, rond de bordage, & court de varangue ; il porte jusqu’à quatre voiles latines, ou à oreilles de lievre, outre les boursets & les bonnettes en étui. Ces voiles latines sont faites en triangle ; cette sorte de bâtiment n’a point de hune, & la piece de bois qui traverse le mât est seulement attachée près de son sommet. Le bout d’embas de la voile n’est guere plus élevé que les autres fournitures du vaisseau ; au plus bas il y a de grosses pieces de bois comme un mât, qui sont vis-à-vis l’une de l’autre, aux côtés de la caravelle, & s’amenuisent peu à peu en haut. Les caravelles sont regardées comme les meilleurs voiliers ; elles sont ordinairement du port de 120 à 140 tonneaux. Les Portugais se servent de ces sortes de vaisseaux en tems de guerre pour aller & venir en plus grande diligence ; la manœuvre en étant facile & faisant bien toutes les évolutions. On nomme aussi caravelle, sur quelques côtes de France, les bâtimens qui vont à la pêche du hareng sur les bancs ; ils sont ordinairement de 25 à 30 tonneaux. Ceux qui sont destinés pour la même pêche, qui se fait dans la Manche, s’appellent trinquarts ; ils sont depuis 12 jusqu’à 15 tonneaux. (Z)
Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/113
CHAP. IX. l'antique morale de la famille. 105 et ses progrès comme l'idée religieuse. Le dieu des premières générations, dans cette race, était bien petit ; peu à peu les hommes l'ont fait plus grand : ainsi la morale, fort étroite d'abord et fort incomplète, s'est insensiblement élargie jusqu'à ce que, de progrès en progrès, elle arrivât à proclamer le de- voir d'amour envers tous les hommes. Son point de départ fut la famille, et c'est sous l'action des croyances de la religion domestique que les devoirs ont apparu d'abord aux yeux de l'homme. Qu'on se figure cette religion du foyer et du tombeau, à l'époque de sa pleine vigueur. L'homme voit tout près de lui la divinité. Elle est présente, comme la conscience même, à ses moindres actions. Cet être fragile se trauve sous les yeux d'un témoin qui ne le quitte pas. Il ne se sent jamais seul. A côté de lui, dans sa maison, dans son champ, il a des protec- teurs pour le soutenir dans les labeurs de la vie et des juges pour punir ses actions coupables, a Les Lares, disent les Ro- mains, sont des divinités redoutables qui sont chargées de châtier les humains et de veiller sur tout ce qui se passe dans l'intérieur des maisons». — « Les Pénates, disent-ils encore, sont les dieux qui nous font vivre ; ils nourrissent notre corps et règlent notre âme' ». On aimait à donner au foyw l'épithète de chaste* et l'on croyait qu'il commandait aux hommes la chasteté. Aucun acte BQatériellement ou moralement impur ne devait être commis à sa vue. Les premières idées de faute, de châtiment, d'expiation, sem- blent être venues de là. L'homme qui se sent coupable ne peut plus approcher de son propre foyer ; son dieu le repousse. . Pour quiconque a versé le sang, il n'y a plus de sacrifice per- mis, plus de libation, plus de prière, plus de repas sacré Le dieu est si sévère qu'il n'admet aucune excuse ; il ne distingue pas entre un meurtre involontaire et un crime prémédité. L ��1. Plutarqae, Quut. rom-. Si. Macrobe, Sat., III. 4. 2. *AYMt< irAt 6i.%f»\i, Euripide, Hercul. fur., 706. �� � <references/>
Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 14.djvu/991
reçut dans sa famille une éducation soignée, qui lui donna une supériorité incontestable dans la carrière qu’elle voulait parcourir. Elle débuta à Naples, en 1781, on ne sait trop dans quel ouvrage, car tout est mystère dans l’histoire de ces créatures charmantes. Ce qu’il y a de certain, c’est que son succès fut aussi grand que spontané et lui valut une renommée qui se répandit promptement dans toute l’Italie. La Coltellini avait alors dix-sept ans, elle était dans tout l’éclat de la jeunesse, et son talent, encore enveloppé d’une timidité pleine de grace, laissait entrevoir un épanouissement radieux. L’empereur Joseph II, s’étant rendu à Naples vers la fin de l’année 1783, entendit la Coltellini et fut si charmé de son talent, qu’il la fit engager pour le théâtre italien de la cour de Vienne. C’est au commencement de l’année 1783 que Céleste Coltellini arriva pour la première fois dans la capitale de l’Autriche, où elle fut très bien accueillie par l’empereur. Joseph II parut même avoir pour cette cantatrice plus que de la bienveillance, s’il fallait s’en rapporter au témoignage un peu suspect de Lorenzo da Ponte, qui se trouvait alors à Vienne, préparant la toile où le génie de Mozart devait déposer toutes ses merveilles. Il ne faudrait point trop s’arrêter toutefois à ces méchans propos contre la Coltellini. Lorenzo da Ponte semble n’avoir méconnu son mérite que parce qu’elle passait pour être fort liée avec l’abbé Casti, son grand ennemi, qui lui disputait, dans la faveur de César, la succession de Métastase, mort depuis trois ans. Ce qui est certain, c’est que la Coltellini trouva à Vienne un public favorable et de plus les excellens conseils de Mancini, dont elle sut profiter avec beaucoup d’intelligence. Mancini était un sopraniste célèbre, qui, après avoir parcouru l’Italie en qualité de virtuose, était venu se fixer à Vienne, vers 1760, où il avait été nommé maître de chant des archiduchesses d’Autriche. Né à Ascoli, dans les états de l’église, élève de Bernacchi, qui tenait à Bologne une des meilleures écoles de l’Italie, Mancini possédait les bonnes traditions du bel art de charmer par les inflexions de la voix humaine, dont il transmettait les principes à ses élèves, principes qu’il a résumés ensuite dans un ouvrage curieux : — ''Pensieri e Riflessioni,pratiche sopra il canto figurato'', — qu’on lira toujours avec fruit. Mancini, qui mourut à Vienne le 4 janvier 1800, et qui remplissait toutes les conditions qu’exigeait la chaste Marie-Thérèse d’un maître qui devait avoir l’honneur d’approcher les belles princesses dont elle était la mère, Mancini a formé un grand nombre d’élèves, parmi lesquels on nous permettra de citer l’infortunée Marie-Antoinette. Lorsque le vieux sopraniste faisait chanter à cette charmante archiduchesse la cantate de Porpora, que j’ai là sous les yeux : <poem>Parti con l’ombra è ver L’inganno ed il piacer,</poem> <references/>
Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/70
éblouir les yeux des spectateurs. Les murs, naguère si nus et si tristes, étaient actuellement tapissés de tentures en velours bleu de ciel brodé en argent ; les chaises étaient en ébène, richement sculptées et garnies de coussins de même étoffe que les tentures ; on avait suppléé aux candélabres en argent qui éclairaient l’antichambre, par un vaste lustre du même métal. Le plancher était couvert d’un tapis d’Espagne, sur lequel on avait représenté des fleurs et des fruits en couleurs si vives et si naturelles, que l’on hésitait à poser le pied sur un travail aussi précieux. La table, faite de vieux chêne anglais, était d’avance couverte du linge le plus fin, et un grand buffet, dont les battants cintrés étaient ouverts, montrait des tablettes chargées d’un assortiment complet d’argenterie et de porcelaine. Au milieu de la table était une salière, ouvrage d’un artiste italien, haute de près de deux pieds ; cette magnifique pièce d’argenterie figurait le géant Briarée, dont les cent mains offraient aux convives toutes sortes d’épices et d’assaisonnements destinés à relever les mets. La troisième pièce était le boudoir. Elle était ornée d’une fort belle tapisserie représentant la chute de Phaéton ; car les métiers de Flandre exploitaient alors les sujets classiques. Le principal meuble de cet appartement était un fauteuil de parade qu’une marche ou deux isolaient du plancher, et assez large pour recevoir deux personnes. Il était surmonté d’un dais qui, aussi bien que les coussins, les draperies, et le tapis de pied lui-même, était de velours cramoisi brodé en perles. Au dessus du dais étaient deux couronnes de comte et de comtesse. Des tabourets recouverts en velours, et quelques coussins disposés à la manière orientale, et ornés d’arabesques dessinées à l’aiguille, tenaient lieu de chaises dans cet appartement, qui contenait des instruments de musique, des métiers à broder, et d’autres objets à l’usage des dames. Éclairé par une multitude de bougies ordinaires, ce boudoir l’était aussi par quatre flambeaux de cire vierge placés chacun dans les mains d’une statue représentant un Maure armé, dont le bras gauche portait un bouclier d’argent de forme ronde et parfaitement poli, qui, placé entre son corps et la lumière, la réfléchissait avec tout l’éclat d’un miroir de cristal. La chambre à coucher, qui complétait ce brillant appartement, était décorée avec moins de faste, mais non moins richement que les pièces précédentes. Deux lampes d’argent, alimentées par une huile parfumée, répandaient à la fois une odeur délicieuse et une <references/>
Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 80.djvu/103
idées personnelles. Il fit aussitôt cesser les hostilités et rentrer les troupes dans leurs cantonnemens. Il se contenta d’envoyer au ministre de la guerre des observations très justes et très motivées au sujet de l’énormité des concessions faites par le général Bugeaud à l’émir. Quand il protestait ainsi, le 15 juin, il était déjà trop tard. C’était à cette même date que le ministre lui faisait annoncer par dépêche télégraphique la ratification du traité. Peu de jours après, le duc d’Orléans, qui comprenait ce que devait souffrir l’âme généreuse et patriotique du gouverneur, lui écrivit pour adoucir par un témoignage de sympathie l’amertume de ses réflexions. « Monseigneur, répondit, le 7 juillet, au prince le général de Damrémont, la lettre que je viens de recevoir de Votre Altesse Royale est le seul bien que j’aie ressenti depuis trois mois que je suis en Afrique. Entouré de difficultés ici, méconnu à Paris, abreuvé de dégoûts, je me demandais si, dans cette situation, un homme qui a le cœur haut placé et la conscience parfaitement pure ne devait pas se démettre du pouvoir qu’on lui avait confié, s’il n’y avait pas un sentiment de dignité honorable à se retirer des affaires publiques et à reprendre l’indépendance de la vie privée, lorsque votre lettre si bonne, si affectueuse, m’est parvenue et m’a prouvé que Votre Altesse Royale avait repoussé la pensée que je fusse capable de petites et mesquines rivalités, et que l’estime dont elle m’honorait était restée entière et complète au milieu des fausses accusations dont mon nom était entouré à Paris. Ce sentiment que vous ne m’avez pas méconnu, monseigneur, lorsque tout le monde m’accusait si légèrement, si injustement, m’a rattaché à ma position ; c’était un ordre implicite de votre part d’y rester, de continuer l’œuvre commencée, pour laquelle, à mon départ de Paris, vous me donniez votre appui, vos encouragemens, qui devait avec son succès m’obtenir un jour une part plus grande dans votre estime et dans votre pensée. Enfin, monseigneur, vous avez relevé mon courage, et je ne vous exprimerai jamais assez vivement la profonde reconnaissance que j’éprouve pour tout le bien que vous venez de me faire. » L’œuvre commencée, l’œuvre qu’il fallait achever et parfaire, c’était la grande affaire de Constantine. Le général de Damrémont s’y dévoua désormais corps et âme. {{c|V. }} Dans la pensée du ministère, le problème de Constantine pouvait être résolu de deux façons ; la satisfaction que réclamait la France pouvait être militaire ou politique. Après la conclusion du traité de la Tafna surtout, cette idée d’une solution sans combat prévalut dans <references/>
Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/232
— Je ne veux rien alléguer contre elle. Vous a-t-elle jamais, à aucun propos, parlé de sa mère ? — Je lui ai entendu dire que sa mère ignorait sans doute la raison de sa fuite. Elle disait « Pauvre mère ! » d’un ton de pitié. — Cette mère est devenue ma femme, dit Bulstrode. Puis il s’arrêta un moment avant de continuer : — Vous avez un droit sur moi, monsieur Ladislaw, comme je le disais tout à l’heure, non un droit légal, mais un droit que ma conscience reconnaît. Je me suis enrichi par ce mariage, résultat qui n’aurait certainement pas été atteint, certainement pas à ce degré, si votre grand’mère avait retrouvé sa fille. Cette fille, à ce qu’il paraît, n’est plus en vie ! — Non, dit Will, sentant le soupçon et la répugnance s’éveiller si fortement en lui que, sans savoir au juste ce qu’il faisait, il prit son chapeau qu’il avait posé à terre et se leva. L’impulsion de son cœur était de repousser ce lien qui venait de lui être révélé. — Asseyez-vous, je vous prie, monsieur Ladislaw. Vous êtes saisi, sans doute, de la soudaineté de cette découverte. Mais j’implore votre patience pour un homme déjà courbé sous le poids de l’épreuve. Will reprit sa place, éprouvant une pitié mêlée de mépris pour cette volontaire humiliation d’un homme d’âge. — Mon intention est, monsieur Ladislaw, de réparer le tort qui a été fait à votre mère. Je sais que vous êtes sans fortune, et je désire vous faire jouir, dans une juste proportion, d’un bien qui vous appartiendrait sans doute déjà entièrement, si votre grand’mère avait été certaine de l’existence de votre mère, et si elle avait pu la retrouver. M.&nbsp;Bulstrode se tut. Il sentait qu’il accomplissait une œuvre remarquable de conscience scrupuleuse dans le {{Tiret|juge|ment}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 3.djvu/476
traits de cette pièce avaient suffi pour faire éclater son humeur irascible. « La France ingrate, oubliant ses bienfaits, s’attachait à lui pour l’outrager... On oubliait quel poids il pouvait mettre dans la balance de l’équilibre européen... On oubliait qu’il pouvait se venger, et il se vengerait... » Il se posséda cependant assez pour ne point exhaler son dépit en présence de M. de Saint-Simon lors de la première audience qu’il lui donna après cet incident, mais on vit clairement quelle contrainte il s’imposait. Brodant sur son thème favori, il se plaignit seulement des trames qui s’ourdissaient en France pour troubler tous les pays de l’Europe, il insinua des doutes sur les bonnes intentions du pouvoir en France ; il parla de la nécessité d’une ligue des souverains, s’ils voulaient ne pas être victimes de ces manœuvres perfides. Il était facile de lire dans ses paroles et dans sa contenance une irritation qu’il s’était interdit de laisser éclater ; mais quelques jours après, à la suite d’un dîner au château de Rosendal, il prit à part, selon sa coutume, M. de Saint-Simon, et s’engagea dans une de ces longues conversations d’où il sortait rarement sain et sauf. Il parla d’abord avec calme et douceur même ; il dit ensuite qu’il voulait s’expliquer franchement sur le compte du gouvernement français et peut-être lui soumettre quelques avis... On était effrayé en Europe, assura-t-il, des tendances du gouvernement français. On craignait qu’il n’agît pas très ouvertement avec les puissances, qu’il ne jouât pas cartes sur table, et que, loin de vouloir anéantir le parti révolutionnaire, il ne fût disposé à l’entretenir secrètement comme un puissant levier dont il se servirait contre les cours quand il jugerait à propos d’avouer ses projets d’agrandissement. Les révolutions de Belgique, de Pologne, de Suisse et d’Italie étaient l’ouvrage d’une propagande favorisée par le gouvernement français et soldée par lui. Les démentis officiels ne prouvaient rien. On avait manifesté publiquement et officiellement des vœux pour des rebelles contre une puissance alliée. On avait prêté deux fois un secours armé à la Belgique contre son souverain légitime. On avait porté le drapeau tricolore en Italie pour soutenir l’espoir des révolutionnaires et neutraliser l’influence pacificatrice des troupes autrichiennes. Enfin des agens avaient été arrêtés en Suisse ; dont les papiers et la correspondance prouvaient qu’ils étaient secrètement dirigés et payés par le gouvernement français... Tout cela avait convaincu les puissances qu’elles devaient exiger de la France qu’elle renonçât à un système de déception et qu’elle donnât enfin des garanties à l’Europe... « Vous que j’estime comme un homme d’honneur, monsieur le duc, jureriez-vous que votre roi est parfaitement sincère quand il dit qu’il veut combattre les révolutions et la propagande ?... » Ces imprudentes paroles avaient été prononcées au commencement d’octobre 1833. Elles ne restèrent pas longtemps sans réponse. Vers les premiers jours de <references/>
Maxine - La huronne, 1943.djvu/56
Je ne répondis pas et feignis de dormir... Lebrun retourna à son lit de camp, s’enveloppa dans une couverte et ne bougea plus... Au matin, il fallut réveiller le lieutenant et Pontet qui dormaient profondément... — C’est étrange, me dit ton père, j’ai la tête lourde, comme si j’avais fait la fête ! — Moi, de même, mon lieutenant, fit Pontet. — C’est le manque d’air dans la tente, dit Lebrun, les marins ne sont pas faits pour camper ! Tu sais le reste, mon fiston, comment ton père ne put s’acquitter de sa mission et fut accusé de trahison !... Cependant, faute de preuves, le Conseil de Guerre ne put le condamner à mort, mais il fut déchu de son grade... et je sais qu’il en mourut, pauvre lieutenant !... — Mais qui donc avait fait le coup ? — Ah ! J’arrive à la chose ! Après le retour à bord, quand je sus ce qui se passait pour ton père, je soupçonnai Lebrun d’avoir été traître... Je résolus de lui parler, un soir qu’il était seul sur le pont et m’approchant, je lui dis : — Je sais ce que vous avez fait dans la nuit du trente mai ! — Qu’est-ce que tu veux dire, Le Bourru ? — Vous avez volé, dans la tente, les papiers du lieutenant ! Alors il se retourne, blanc de colère, et saisissant une masse à portée de sa main, il m’en <references/>
Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 7.djvu/584
{{tiret2|ver|sés}} dans la critique pour démêler la vérité du mensonge, assez sages pour ne donner aucune confiance ni aux prétendus ossemens humains ni à toutes les relations de l’antiquité sur l’existence des ''géans'', ne laissent pas que d’être ébranlés par les récits de plusieurs navigateurs, qui rapportent qu’à l’extrémité du Chily vers les terres Magellaniques, il se trouve une race d’hommes dont la taille est gigantesque, ce sont les Patagons. M. Frezier dit avoir appris de quelques espagnols, qui prétendoient avoir vû quelques-uns de ces hommes, qu’ils avoient quatre varres de hauteur, c’est-à-dire neuf à dix piés. Mais on a très-bien observé que M. Frezier ne dit pas avoir vû lui-même quelques-uns de ces ''géans ;'' & comme les relations vagues des Portugais, des Espagnols, & des premiers navigateurs hollandois, ne sont point confirmées par des voyageurs éclairés de ce siecle ; que de plus elles sont remplies d’exagérations ou de faussetés en tant d’autres choses, on ne sauroit trop s’en défier. Enfin il est contre toute vraissemblance, comme le remarque l’auteur de l’''histoire naturelle'', « qu’il existe dans le monde une race d’hommes composée de ''géans'', sur-tout lorsqu’on leur supposera dix piés de hauteur ; car le volume du corps d’un tel homme seroit huit fois plus considérable que celui d’un homme ordinaire. Il semble que la hauteur ordinaire des hommes étant de cinq piés, les limites ne s’étendent guere qu’à un pié au-dessus & au-dessous ; un homme de six piés est en effet un homme très-grand, & un homme de quatre piés est très petit : les ''géans'' & les nains qui sont au-dessus & au-dessous de ces termes de grandeur, doivent donc être regardés comme des variétés très-rares, individuelles & accidentelles ». L’expérience nous apprend que lorsqu’il se rencontre quelquefois parmi nous des ''géans'', c’est-à-dire des hommes qui ayent sept à huit piés, il, sont d’ordinaire mal conformés, malades, & inhabiles aux fonctions les plus communes. Après tout, si ces ''géans'' des terres Magellaniques existent, ce que le tems seul peut apprendre, « ils sont du-moins en fort petit nombre ; car les habitans des terres du détroit & des îles voisines sont des sauvages d’une taille médiocre ». On lit dans les journaux que le P. Joseph Tarrubia, espagnol, a fait imprimer tout récemment (1756) une giganthologie, dans lequel ouvrage il prétend réfuter le chevalier Hans-Sloane, & prouver l’existence des ''géans'' sur des monumens d’antiquité indienne : mais en attendant que quelqu’un se donne la peine d’examiner la valeur de pareils monumens, qui selon toute apparence ne seront pas plus authentiques que tant d’autres en ce genre ; le lecteur curieux d’une bonne giganthologie physique, fera bien d’étudier celle du même chevalier Hans-Sloane, qui n’a pas plû au bon pere espagnol ; elle est insérée dans les ''Transact. philosoph. n°. 404 ;'' & par extrait, dans le ''suppl. du dict. de Chambers''. (''D. J.'') {{sc|Géans}}, (''Mytholog.'') enfans de la Terre qui firent la guerre aux dieux : Hésiode fait naître ces ''géans'' du sang qui sortit de la plaie d’Uranus ; Apollodore, Ovide, & les autres poëtes les font fils de la terre, qui dans sa colere les vomit de son sein pour faire la guerre aux dieux exterminateurs des Titans. Ces ''géans'', disent-ils, étoient d’une taille monstrueuse & d’une force proportionnée à cette prodigieuse hauteur ; ils avoient cent mains chacun, & des serpens au lieu de jambes. Résolus de déthroner Jupiter, ils entreprirent de l’assiéger jusque sur son throne, & entasserent pour y réussir le mont Ossa sur le Pélion, & l’Olympe sur le mont Ossa, d’où ils essayerent d’escalader le ciel, jettant sans cesse contre les dieux de grands quartiers de pierre, dont les unes{{DeuxColonnes}} qui tomboient dans la mer, devenoient des îles, & celles qui retomboient sur la terre faisoient des montagnes. Jupiter effrayé lui même à la vûe de si redoutables ennemis, appella les dieux à sa défense ; mais il en fut assez mal secondé ; car ils s’enfuirent tous en Egypte, où la peur les fit cacher sous la figure de différentes especes d’animaux. Un ancien oracle avoit prononcé que les ''géans'' seroient invincibles, & qu’aucun des dieux ne pourroit leur ôter la vie, à-moins qu’ils n’appellassent quelque mortel à leur secours. Jupiter ayant défendu à l’Aurore, à la Lune & au Soleil d’annoncer ses desseins, devança la Terre qui cherchoit à soûtenir ses enfans, & par l’avis de Pallas fit venir Hercule pour combattre avec lui ; à l’aide de ce héros, il extermina les ''géans'' Encélade, Polybetès, Alcyonée, Porphyrion, les deux Aloïdes, Ephialte, Othus, Eurytus, Clytius, Tithyus, Pallas, Hippolitus, Agrius, Thaon, & le redoutable Typhon, qui seul, dit Homere, donna plus de peine aux dieux que tous les autres ''géans'' ensemble. Jupiter après les avoir défaits, les précipita jusqu’au fond du Tartare, ou, suivant d’autres poëtes, il les enterra vivans, soit sous le mont Ethua, soit en différens pays ; Encélade fut enseveli sous la Sicile, Polybetès sous l’île de Lango, Othus sous l’île de Candie, & Typhon sous l’île d’lschia. Ces prétendus ''géans'' de la fable n’étoient, suivant plusieurs de nos Mythologistes, que des brigands de Thessalie qui vinrent attaquer Jupiter sur le mont Olympe où ce prince avoit fait bâtir une forte citadelle : ce mont Olympe, ajoûtent-ils, a été pris par les plus anciens poëtes pour le Ciel, & parce que les monts Ossa & Pélyon, qui sont peu éloignés de l’Olympe, servoient de retraite à ces bandits qui s’y étoient fortifiés, & qui de-là tenoient en respect la garnison de l’Olympe, on imagina de leur faire entasser montagnes sur montagnes, pour atteindre jusqu’au ciel. Mais quoique cette explication soit généralement adoptée, je croirois plûtôt que toute la fable des ''géans'' n’est qu’une tradition défigurée de l’histoire de Typhon & d’Osiris. On sait qu’il y avoit en Egypte des monumens plus anciens que les fables des Grecs, des villes sondees & un culte établi en l’honneur des mêmes animaux dont leurs poëtes nous disent que les dieux prirent la figure, en se retirant de frayeur dans ce pays là. (''D. J.'') {{sc|Géans}}, (''ossemens de'') ''Hist. nat. nat. Voyez'' {{EncL|Ossemens fossiles|OSSEMENS|O|11}}. {{sc|Géans}}, (''pavé des'') ''Hist. nat. Lythol.'' en anglois ''{{lang|en|Giant’s causeway}}. Voyez'' {{EncL|Pavé|PAVÉ|P|12}}. <section end="GÉANT"/> <section begin="GEARON"/><nowiki/> GEARON, (''Géog.'') ville de Perse au Tarsistan, entre Schiras & Bander-Congo, dans un terrein qui produit les meilleures dattes de toute la Perse. ''Long. 72. 32. latit. 28. 25.'' (''D. J.'') <section end="GEARON"/> <section begin="GEASTER"/><nowiki/> GEASTER, s. m. (''Hist. nat. bot.'') genre de plante ronde, composée de deux écorces, dont la premiere est découpée jusqu’à la base en forme d’étoile à plusieurs rayons ; l’autre n’est ouverte qu’au sommer par un orifice étoilé, rayonné, ou frangé : la substance du fruit adhere à la seconde écorce, & se trouve placée avec des semences & des filamens dans plusieurs cellules. Ajoûtez au caractere de ce genre, que dans le tems de la maturité la substance du fruit & les semences sortent au-dehors, comme dans le lycoperdon, par l’ouverture dont il a été fait mention. ''Nova plantar. americ. genera'', &c. par M. Micheli. (''I'') <section end="GEASTER"/> <section begin="GEBHA"/><nowiki/> GEBHA, (''Géog.'') ancienne ville ruinée de Barbarie au royaume de Fez dans la province d’Errif, à huit lieues de Vélez du côté du levant. Il y a tout près de cette ville un cap que les anciens nommoient ''le cap des oliviers'', à cause de la quantité d’oliviers sauvages qui y sont. Ptolomée donne à ''Gebha 9{{e|d}}. de long. & 34{{e|d}}. 56′. de latit''. (''D. J.'')<section end="GEBHA"/> </div> </div>
Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 51.djvu/763
circonstances étant données, même étrangères au débat, les objections soulevées contre les arrangemens prémédités pourraient faire accepter par le pouvoir exécutif des projets en apparence populaires, au fond dangereux ou peu mûris. On l’a bien vu le jour où une improvisation de M. Raspail, excluant de toutes les fonctions d’administrateurs des sociétés financières les députés et les sénateurs, a été favorablement et soudainement accueillie par la chambre. Comme député, M. Allain-Targé reproduirait plus aisément et avec moins de responsabilité les mesures qu’il n’avait pas cessé de croire utiles étant ministre. Il est donc plus que jamais nécessaire de prendre toutes les précautions désirables pour amener la solution qui rassurera chacun des intérêts en jeu, celui des porteurs de titres de nos sociétés de chemins de fer, dont le nombre est encore appelé à s’accroître par suite des appels qu’il faudra faire aux capitaux privés, celui du public jaloux de se servir des moyens de transport perfectionnés, enfin l’intérêt national représenté par l’état. Au risque d’être accusé de redites, et après le très concluant travail publié ici même par M. Lavollée a la date du 1{{er}} mars, et complété par celui de M. Paul Leroy-Beaulieu le 1{{er}} avril, nous pensons qu’il nous sera encore permis de rappeler tous les précédens de la question aujourd’hui soulevée pour en tirer une conclusion justifiée. Comment les divers gouvernemens qui se sont succédé en France ont-ils compris cette question si grave ? dans quel esprit l’ont-ils abordée ? quel a été à cet égard le sentiment universel et permanent des masses ? Après les éminens travaux des ingénieurs, des écrivains spéciaux, des administrateurs, cette simple revue historique peut encore avoir son utilité, car en interrogeant la conscience du public, plus accessible à des instincts qu’à des études réfléchies, en s’adressant à la simple équité et à la raison vulgaire, on a chance de mettre en lumière le vrai but à atteindre, et s’il semblait acclamé par une sorte de cri général, les moyens pour y parvenir ne feraient pas défaut. Avant de rechercher comment doit se constituer et s’exploiter la propriété des chemins de fer, rappelons quel en est le caractère, comment elle est comprise, quel jugement, en général, le public porte sur elle et ce qu’il en attend. A coup sûr, et dans l’esprit de tous, la nature de cette propriété est telle qu’il semble bien difficile d’en faire une propriété privée ; on a distingué, et l’opinion générale a sanctionné cette division, les chemins de fer en lignes d’intérêt général et en lignes d’intérêt local, selon que les unes répondaient aux nécessités stratégiques, aux grandes divisions du <references/>
La Sainte Bible, trad. Segond.djvu/1174
{{tiret2|in|telligence.}} {{verset|9|23}}Lorsque tu as commencé à prier, la parole est sortie, et je viens pour te l’annoncer ; car tu es un bien-aimé. Sois attentif à la parole, et comprends la vision ! {{verset|9|24}}Soixante et dix semaines ont été fixées sur ton peuple et sur ta ville sainte, pour faire cesser les transgressions et mettre fin aux péchés, pour expier l’iniquité et amener la justice éternelle, pour sceller la vision et le prophète, et pour oindre le Saint des saints. {{verset|9|25}}Sache-le donc, et comprends ! Depuis le moment où la parole a annoncé que Jérusalem sera rebâtie jusqu’à celui où un chef sera oint, il y a sept semaines ; dans soixante-deux semaines, les places et les fossés seront rétablis, mais en des temps fâcheux. {{verset|9|26}}Après les soixante-deux semaines, un oint sera retranché, et il n’aura pas de successeur. Le peuple d’un chef qui viendra détruira la ville et le sanctuaire, et sa fin arrivera comme par une inondation ; il est arrêté que les dévastations dureront jusqu’au terme de la guerre. {{verset|9|27}}Il fera une solide alliance avec plusieurs pour une semaine, et durant la moitié de la semaine il fera cesser le sacrifice et l’offrande ; le dévastateur commettra les choses les plus abominables, jusqu’à ce que la ruine et ce qui a été résolu fondent sur le dévastateur. '''''Chap. X.''''' {{verset|10|1}}La troisième année de Cyrus, roi de Perse, une parole fut révélée à Daniel, qu’on nommait Beltschatsar. Cette parole, qui est véritable, annonce une grande calamité. Il fut attentif à cette parole, et il eut l’intelligence de la vision. {{verset|10|2}}En ce temps-là, moi, Daniel, je fus trois semaines dans le deuil. {{verset|10|3}}Je ne mangeai aucun mets délicat, il n’entra ni viande ni vin dans ma bouche, et je ne m’oignis point jusqu’à ce que les trois semaines fussent accomplies. {{verset|10|4}}Le vingt-quatrième jour du premier mois, j’étais au bord du grand fleuve qui est Hiddékel<ref>''Hiddékel'', le Tigre.</ref>. {{verset|10|5}}Je levai les yeux, je regardai, et voici, il y avait un homme vêtu de lin, et ayant sur les reins une ceinture d’or d’Uphaz. {{verset|10|6}}Son corps était comme de chrysolithe, son visage brillait comme l’éclair, ses yeux étaient comme des flammes de feu, ses bras et ses pieds ressemblaient à de l’airain poli, et le son de sa voix était comme le bruit d’une multitude. {{verset|10|7}}Moi Daniel, je vis seul la vision, et les hommes qui étaient avec moi ne la virent point ; mais ils furent saisis d’une grande frayeur, et ils prirent la fuite pour se cacher. {{verset|10|8}}Je restai seul, et je vis cette grande vision ; les forces me manquèrent, mon visage changea de couleur et fut décomposé, et je perdis toute vigueur. {{verset|10|9}}J’entendis le son de ses paroles ; et comme j’entendais le son de ses paroles, je tombai frappé d’étourdissement, la face contre terre. {{verset|10|10}}Et voici, une main me toucha, et secoua mes genoux et mes mains. {{verset|10|11}}Puis il me dit : Daniel, homme bien-aimé, sois attentif aux paroles que je vais te dire, et tiens-toi debout à la place où tu es ; car je suis maintenant envoyé vers toi. Lorsqu’il m’eut ainsi parlé, je me tins debout en tremblant. {{verset|10|12}}Il me dit : Daniel, ne crains rien ; car dès le premier jour où tu as eu à cœur de comprendre, et de t’humilier devant ton Dieu, tes paroles ont été entendues, et c’est à cause de tes paroles que je viens. {{verset|10|13}}Le chef du royaume de Perse m’a résisté vingt et un jours ; mais voici, Micaël, l’un des principaux chefs, est venu à mon secours, et je suis demeuré là auprès des rois de Perse. {{verset|10|14}}Je viens maintenant pour te faire connaître ce qui
Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/57
{{tiret2|Lou|verture}} était prêt à se soumettre aux ordres du gouvernement français, en entrant en arrangement avec le capitaine-général, mais à condition qu’il fît cesser toute espèce d’hostilités. » Dans l’intervalle, T. Louverture se porta à Saint-Marc, sur l’avis qu’il reçut, que deux vaisseaux avaient canonné cette ville : ils avaient été repoussés par le colonel Gabart. L’ex-gouverneur revint aux Gonaïves pour attendre la réponse du capitaine-général. Le 14, cette réponse lui fut apportée par Placide et Isaac, l’âge de MM. Granville et Coisnon, et la crainte d’événemens sinistres sur la route les ayant portés à rester au Cap. Leclerc « invitait T. Louverture à venir auprès de lui ; il lui promettait ''d’oublier le passé, '' de le proclamer ''le premier lieutenant '' du capitaine-général dans la colonie, s’il se soumettait à ses ordres, sinon qu’il le déclarerait ennemi du peuple français et le mettrait ''hors la loi. '' En lui accordant au surplus ''quatre jours '' pour se décider, il l’informait qu’il avait donné l’ordre à ses gérnéraux de marcher contre lui ; mais que le général Boudet s’arrêterait à l’Artibonite, jusqu’à sa décision. » C’est alors que se passa une scène émouvante entre le père et les deux fils, — l’un adoptif, — l’autre naturel. Comme de raison, on n’en trouve la relation, ni dans les mémoires publiés par Isaac, ni dans le mémoire adressé au Premier Consul par T. Louverture : l’un et l’autre ne pouvaient avouer ce qui eut lieu en cette circonstance. Mais il paraît que, résolu à se défendre, irrité par les menaces de Leclerc, T. Louverture, en déclarant à ses enfans sa détermination de combattre, leur laissa la liberté d’embrasser ''le parti '' qui leur plairait : — de rester {{tiret|au|près}} <references/>
Chronique de Guillaume de Nangis/Année 1314
Guillaume de Nangis Chronique Règne de Louis X le Hutin (1314-1316) [1314] La jeune Marguerite, reine de Navarre, et Blanche, femme du frère puîné de Charles, roi de Navarre, furent, comme le méritaient leurs fautes, répudiées par leurs maris pour avoir commis de honteux adultères avec les deux frères les chevaliers Philippe et Gautier d’Aunay, la première avec Philippe, l’autre avec Gautier. Justement dépouillées de tous honneurs temporels, elles furent renfermées dans une prison, afin que, dans une étroite réclusion, privées de toute consolation humaine, elles terminassent leur vie dans l’infortune et la misère. Quant aux deux chevaliers, non seulement ils avaient avec infamie souillé le lit de leurs seigneurs, qui avaient en eux une confiance toute particulière, comme en de très-familiers domestiques ; mais c’étaient d’odieux traîtres ainsi que le prouvait certainement la livrée qu’ils portaient, et celle des gens de leur suite d’autant plus coupables en cette action, qu’ils avaient séduit par des douceurs et caresses ces femmes toutes jeunes et d’un sexe faible. Le vendredi après la Quasimodo, à Pontoise, ils confessèrent avoir commis ce crime pendant trois ans, et dans plusieurs lieux et temps sacrés. C’est pourquoi, expiant par un genre de mort et un supplice ignominieux un si infâme forfait, ils furent à la vue de tous écorchés tout vivans sur la place publique. On leur coupa les parties viriles et génitales, et leur tranchant la tête, on les traîna au gibet public où, dépouillés de toute leur peau, ils furent pendus par les épaules et les jointures des bras. Ensuite, après eux un huissier qui paraissait, à bon titre, fauteur et complice dudit crime, et un grand nombre, tant nobles que gens du commun de l’un et l’autre sexe, soupçonnés de complicité ou connaissance dudit crime, furent la plupart mis à la torture, quelques-uns furent noyés, un grand nombre furent mis à mort secrètement. Plusieurs trouvés innocens furent entièrement acquittés. Parmi ceux-ci on remarquait un frère Prêcheur, dit évêque de Saint-George, qu’on prétendait avoir coopéré ou participé audit crime par des........... du des sortilèges qui provoquaient les hommes au mal. Les uns disent qu’il fut retenu en prison chez les frères Prêcheurs, d’autres qu’il fut envoyé vers les cardinaux, le Siège apostolique étant vacant, et acquitté par leur jugement. Quoique Jeanne, soeur de ladite Blanche, et épouse de Philippe, çomte du Poitou, eût été dans le commencement violemment soupçonnée, séparée quelque temps de son mari, et gardée dans une prison au château de Dourdan, cependant, après une enquête faite à ce sujet, elle fut lavée désdits soupçons, déclarée tout-à-fait innocente dans un parlement tenu à Paris, et auquel assistaient le comte de Valois, le comte d’Evreux et beaucoup d’autres nobles ; et ainsi, avant la fin de l’année, elle mérita d’être réconciliée avec son époux. Au temps de Pâques, et dans la ville d’Avignon, le pape Clément entra dans la voie de toute chair, et par suite des discordes et violentes divisions élevées entre les cardinaux, le siège apostolique demeura long-temps vacant, à l’occasion surtout de l’incendie du palais de Carpentras, où ils s’étaient réunis pour l’élection d’un pape, et auquel le feu avait été mis par le marquis de Vienne, neveu de feu le pape Clément, qui voulait favoriser le cardinal de Gascogne, porté à l’élection en opposition aux cardinaux d’Italie et de France. On disait aussi certainement que ces discordes venaient des grands et nombreux dommages qu’avaient éprouvés en leurs maisons et biens plusieurs cardinaux et autres, particulièrement des marchands. On les vit aussi contraires et opposés pour le choix d’un lieu convenable à l’élection, que pour le principal sujet de l’élection elle-même, les Italiens disant qu’il fallait se rendre à Rome, d’autres désignant d’autres villes. C’est pourquoi les cardinaux se dispersèrent comme des perdrix effrayées, les uns à Orange, les autres à Avignon où ailleurs, selon l’idée de chacun d’eux. Edouard, roi d’Angleterre, affligé de ce que les Écossais, sous la conduite de Robert Bruce, leur commandant en chef, s’étaient comme il disait, emparés de sa terre, avec autant d’injustice que de violence et de fourberie, s’efforça de tout son pouvoir, pour la recouvrer, d’attaquer vigoureusement leur royaume. Vers la fête de la Décollation de saint Jean, ayant rassemblé une armée nombreuse des siens, il leur livra bataille en plaine, sans précaution et avec orgueil, présumant, d’après leur petit nombre, qu’il remporterait bientôt sur eux le triomphe qu’il desirait. Mais aussitôt les bataillons anglais furent écrasés par les armes puissantes des ennemis. Le roi Edouard lui-même, quittant le champ de bataille, accompagné d’un petit nombre de gens, trouva à grand’peine son salut dans la fuite ; ce qui couvrit à jamais les Anglais d’un opprobre éternel. Ledit Robert Bruce, chef des Ecossais était placé au milieu des siens comme le cœur au milieu des membres ; et bien que, selon le dire de plusieurs, ils fussent protégés par le cilice encore plus que par les armes, et fortifiés d’une confiance toute particulière dans le Seigneur, qui accorde la victoire aux plus dignes, cependant, comme Bruce s’élevait au milieu de tous non seulement par ses vertus et son courage, mais encore par l’humilité de sa dévotion, ce fut lui qui attira sur eux le secours divin. Décidés, s’il le fallait, à s’exposer à la mort avec un audacieux courage pour leur liberté et celle de leur patrie, non seulement ils soutinrent ce combat, mais remportèrent sur les Anglais une glorieuse victoire. Le comte de Glocester et beaucoup d’autres furent tués, beaucoup de grands et de nobles furent pris vivans, et se rachetèrent ensuite au prix de beaucoup d’argent. Les Ecossais partagèrent le butin provenant des rançons des prisonniers et des dépouilles des fuyards, et par là s’enrichirent, s’agrandirent et accrurent leurs forces. Cependant, quoique après cette victoire ils eussent pu facilement forcer à se rendre la reine d’Angleterre Isabelle, qu’ils tenaient assiégée dans un château voisin, par crainte ou par égard pour le roi de France son père, ils la laissèrent se retirer librement et paisiblement. Au temps d’une fête solennelle, les Flamands, ayant de nouveau chassé de Courtrai le bailli du roi, s’enflammèrent de l’esprit de rébellion contre le roi de France ; c’est pourquoi il fut porté une sentence d’excommunication contre tous les perturbateurs de la paix, et les complices des dissensions et révoltes ; elle fut proclamée d’abord à Paris, sur la place du Parvis, et ensuite à Tournai, Saint-Orner, Noyon, Arras et Douai, par l’archevêque de Rheims et l’abbé de Saint-Denis en France, à qui l’autorité apostolique en avait confié l’exécution, et qui coururent quelques dangers dans l’accomplissement de leur mission. On rapporte que les Flamands appelèrent de leur sentence au Siège apostolique. Philippe, roi de France, envoya de tous côtés, pour dompter les rebelles, différentes armées, à savoir Louis son fils aîné, roi de Navarre, à Douai Philippe, comte de Poitou, à Saint-Omer Charles, le troisième et le plus jeune de ses fils, avec Charles, comte de Valois, à Tournai ; et Louis, comte d’Evreux, à Lille ; assignant à chacun un certain nombre d’hommes. Enfin cependant, dans l’espoir de faire conclure la paix à certaines conditions, le comte de Saint-Paul et Enguerrand, comte d’Evreux, se portèrent médiateurs et entremetteurs entre les deux partis. Le comte de Flandre et les Flamands furent tenus de se rendre vers le roi de France dans un espace de temps fixé pour ratifier définitivement la paix. On commença par mettre en liberté Robert et les autres otages. Toute l’armée du roi de France s’en revint donc dans son pays sans avoir rien fait cette fois, s’étant laissé honteusement tromper et jouer avec trop de promptitude et de facilité par les ennemis auxquels elle avait prêté trop de foi. Vers le même temps, les électeurs s’étant rassemblés à Francfort pour élire un roi des Romains ne purent s’accorder, les uns donnant légitimement leur suffrage à Louis, duc de Bavière, et d’autres a Frédéric, duc d’Autriche. Ledit Louis l’emportant sur l’autre par les efforts de sa prudence et par la puissance des armes et le courage de ses partisans, sans rien obtenir sur l’esprit de ses adversaires, fut à Aix-la-Chapelle, vers la fête de la Nativité, couronné du diadème royal des Romains. Plus tard, le duc d’Autriche fut couronné vers la fête de la Pentecôte par l’archevêque de Cologne qui favorisait sa cause ; mais ce ne fut pas à Aix-la-Chapelle. Une extorsion injuste, une exaction inique et d’un nouveau genre, inaccoutumée dans le royaume de France, commença d’abord à Paris, et se répandit de là par tout le royaume, où on exerça des exactions, sous le prétexte des dépenses faites dans la guerre de Flandre ; c’est à savoir que tout acheteur et tout vendeur furent forcés de payer au roi, dans les mains de ses conseillers, satellites et agens, dix deniers par livre parisis de chaque chose vendue et achetée. Plusieurs nobles et gens du commun, les Picards et les Champenois 34, liés ensemble par un serment pour la défense de leur liberté et de celle de leur pays, ne pouvant aucunement souffrir cette exaction, s’y opposèrent vigoureusement, et obtinrent enfin la liberté qu’ils souhaitaient, l’extorsion cessant entièrement et complètement par l’ordre du roi, non seulement dans leurs terres, mais par tout le royaume de France. Quelques gens ont dit que ces exactions n’étaient pas venues de lui-même, mais lui avaient été suggérées par le conseil des méchans. Philippe, roi de France, fut retenu par une longue maladie, dont la cause inconnue aux médecins fut pour eux et pour beaucoup d’autres le sujet d’une grande surprise et stupeur ; d’autant plus que son pouls ni son urine n’annonçaient qu’il fût malade ou en danger de mourir. Enfin il se fit transporter par les siens à Fontainebleau, lieu de sa naissance. Là, peu de jours après, voyant approcher le moment de sa mort, pourvoyant avec soin et sagesse à sa maison et à ses affaires domestiques, il investit du comté de la Manche et du territoire environnant, le seigneur Charles son plus jeune fils, à qui il n’avait encore assigné aucun héritage. S’appliquant avec encore plus de zèle au salut de son ame, il fit cesser entièrement et complètement les exactions de la maltôte dont il avait entendu parler, et qui lui déplaisaient infiniment. Enfin, après avoir relu son testament avec une grande attention et l’avoir disposé sagement autant qu’il fut en son pouvoir, il donna à son fils aîné, déjà roi de Navarre des conseils salutaires et pleins de sagesse, lui ordonnant de les suivre, et le menaçant, en cas du contraire, de la malédiction paternelle et divine ; il lui recommanda spécialement et particulièrement, parmi les saintes églises catholiques, celle de saint Denis, patron spécial du royaume de France. Enfin après avoir, en présence et à la vue d’un grand nombre de gens, reçu le sacrement avec une ferveur et une dévotion admirable, il rendit heureusement son ame au Créateur, dans la confession de la foi véritable et catholique, la trentième année de son règne, le vendredi, veille de la fête de l’apôtre saint André. Son corps fut porté, le plus convenablement et honorablement qu’il fut possible, en la sépulture de ses pères, l’église de Saint-Denis, où il fut déposé tout entier, à l’exception de son cœur, dans un endroit séparé qu’il avait lui-même désigné de son vivant, avec les honneurs qui conviennent à la majesté royale, le vingt-cinquième jour de la lune, en présence des prélats, savoir : d’un archevêque, qui célébra la messe, de dix évêques et de quatorze abbés. Son cœur, qu’il avait destiné à être enseveli à Poissy, dans une église du nom de Saint-Dominique, qu’il y avait fondée, y fut porté et enterré avec les honneurs convenables le lendemain du jour où son corps fut enseveli. Louis, roi de France et de Navarre, destitua de sa dignité de chancelier l’évêque de Châlons, et mit à sa place Etienne de Maruges, expert dans le droit civil et chambellan de Charles son oncle. Vers la Nativité du Seigneur, il fit passer dans le pays de Sicile le chevalier Hugues de Boville, son chambellan et secrétaire, avec d’autres envoyés fidèles, pour lui amener Clémence, fille du roi de Hongrie, qu’il voulait prendre en mariage. Le roi de France envoya aussi vers la cour de Rome une ambassade ou députation solennelle, composée de Girard, évêque de Soissons, du comte de Boulogne, du chevalier Pierre de Blève, homme savant en droit, pour exciter les cardinaux à dire un souverain pontife ; mais cette démarche eut peu ou point de succès. 34. Il y a ici une lacune dans le texte.
Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/41
{{tiret2|scan|dalisé}} parce que je tâche d’égayer de mon mieux une triste route par quelques chants joyeux ? Le poète a dit : « La chanson est comme la rosée du ciel qui tombe sur le sein du désert ; elle rafraîchit le sentier du voyageur. » — Ami Sarrasin, dit le chrétien, je ne blâme pas le goût de la musique et de la gaie science, quoique nous lui accordions peut-être trop de place dans nos pensées, que nous pourrions diriger vers un meilleur but. Mais les prières et les saints psaumes conviennent mieux que les lais d’amour et les chants bachiques à des hommes qui traversent cette vallée de l’ombre de la mort, remplie d’esprits malins et de démons que les prières des saints hommes ont chassés du séjour des humains et réduits à errer ici au milieu d’une nature aussi maudite que la leur. — Ne parle pas ainsi des génies, répondit le Sarrasin ; car sache que tu t’adresses à un homme dont la famille et la nation tirent leur origine de cette race immortelle que votre secte craint et blasphème. — Je pensais bien aussi, répondit le croisé, que ta race aveugle tirait son origine de l’esprit malin, sans l’aide duquel vous n’auriez jamais pu réussir à défendre cette bienheureuse terre de Palestine contre tant de vaillants soldats de Dieu. Je ne prétends pas parler ici de toi en particulier, Sarrasin, mais de ton peuple et de ta religion. Il me paraît étrange cependant, non que vous descendiez de l’esprit malin, mais que vous vous en vantiez. — De qui le brave des braves se vanterait-il de descendre, si ce n’est du brave des braves ? dit le Sarrasin. À qui une race orgueilleuse pourrait-elle mieux attribuer son origine qu’à l’esprit des ténèbres, qui aima mieux se laisser précipiter du ciel par la force que de ployer volontairement le genou ? On peut haïr Éblis, étranger, mais il faut qu’on le craigne ; et les descendants d’Éblis, qui habitent le Kourdistan, sont semblables à leur père. » Toutes les connaissances de l’époque se composaient de contes de magie et de nécromancie, et sir Kenneth entendit son compagnon faire l’aveu de son origine diabolique sans aucune incrédulité et sans trop d’étonnement, quoiqu’en frissonnant intérieurement de se voir dans un lieu si effrayant avec un compagnon qui convenait d’un tel lignage. Cependant, naturellement exempt de crainte, il se signa, et demanda bravement au Sarrasin l’explication de la généalogie dont il se vantait. Ce dernier consentit volontiers à la donner. <references/>
Gauss - Méthode des moindres carrés, trad. Bertrand, 1855.djvu/104
{{nr||(&ensp;90&ensp;)|}}différences par les poids respectifs des observations correspondantes, et l’erreur moyenne obtenue de cette manière se rapporte aux observations dont le poids est pris pour unité. Dans le cas actuel, la somme des carrés dont nous parlons se confond évidemment avec la {{nobr|somme <math>\mathrm{S}</math>}}, et la différence <math>\varpi - \rho</math> avec le {{nobr|nombre <math>\sigma</math>}} des équations de condition. Par suite, pour l’erreur moyenne des observations dont le poids {{lié|est 1}}, nous aurons l’expression <math>\sqrt\frac{\mathrm{S}}{\sigma}</math>, et la détermination sera d’autant plus digne de confiance que <math>\sigma</math> sera plus considérable. Mais il est bon d’établir ce résultat, indépendamment des raisonnements du premier Mémoire ; pour y parvenir, nous introduirons quelques notations nouvelles. Supposons qu’aux valeurs {{c|<math>\begin{aligned}\xi &= a, & \eta &= b, & \zeta &= c, \ldots ,\end{aligned}</math>}} {{SA|répondent}} {{c|<math>\begin{aligned}x &= \alpha, & y &= \beta, & z &= \gamma , \ldots ,\end{aligned}</math>}} {{SA|de sorte que l’on ait}} &\alpha &{}={} a &\, (\alpha\alpha) &{}+{} b &\, (\alpha\beta) &{}+{} c &\, (\alpha\gamma) &{}+{} \ldots, \\ &\beta &{}={} a &\, (\alpha\beta) &{}+{} b &\, (\beta\beta) &{}+{} c &\, (\beta\gamma) &{}+{} \ldots, \\ &\gamma &{}={} a &\, (\alpha\gamma) &{}+{} b &\, (\beta\gamma) &{}+{} c &\, (\gamma\gamma) &{}+{} \ldots ; {{SA|et, en outre, qu’aux valeurs}} {{c|<math>\begin{aligned}\xi &= a', & \eta &= b', & \zeta &= c', \ldots ,\end{aligned}</math>}} {{SA|répondent}} {{c|<math>\begin{aligned}x &= \alpha', & y &= \beta', & z &= \gamma', \ldots ;\end{aligned}</math>}} {{SA|enfin, qu’aux valeurs}} {{c|<math>\begin{aligned}\xi &= a'', & \eta &= b'', & \zeta &= c'', \ldots ,\end{aligned}</math>}} {{SA|répondent}} {{c|<math>\begin{aligned}x &= \alpha'', & y &= \beta'', & z &= \gamma'', \ldots ,\end{aligned}</math>}} <references/>
Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/64
si depuis peu quelqu’un s’y fût assis. Les autres meubles étoient rangés précisément comme la dernière fois qu’elle les avoit vus ; et Emilie pensa qu’on n’en avoit touché aucun depuis son voyage d’Italie. Le silence et la solitude de ce pavillon secondoient en ce moment sa disposition à la mélancolie. Elle n’entendoit que le murmure du zéphyr qui soulevoit les feuilles des pampres, et celui des flots de la Garonne. Elle se plaça sur sa chaise près du balcon, et s’abandonna sans réserve à la tristesse de son cœur ; elle se rendoit présens les moindres détails de l’entrevue qu’à la veille de partir, elle avoit eue avec Valancourt. C’étoit en ce lieu, c’étoit là que s’étoient écoulés avec lui les plus heureux instans de sa vie, lorsque sa tante favorisoit leurs projets. Elle travailloit près de lui, il lisoit auprès d’elle, et souvent ils causoient ensemble. Elle se rappeloit la sagacité avec laquelle il lui désignoit les plus beaux passages des livres qu’ils préféroient, l’enthousiasme avec lequel il les lui répétoit. Il s’arrêtoit pour en admirer l’excellence ; il écoutoit ses remarques avec un tendre plaisir, et souvent dirigeoit son goût. — Est-il possible, s’écrioit Emilie, est-il possible qu’un esprit si sensible aux belles, <references/>