id
stringlengths 3
248
| text
stringlengths 433
1.85M
|
---|---|
Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/204
|
encore le temps où les serpents gîtent pour s’engourdir.
Ce disant Bruyère, d’un léger mouvement, se dégagea des mains de Mme Perrine, dont le cœur se serra en voyant disparaître la jeune fille au milieu des ténèbres formées par la voussure du four.
À ce moment... mais Bruyère ne pouvait plus l’entendre, retentit de nouveau, et cette fois... perçant, distinct et rapproché, le cri de l’aigle de Sologne.
— Un oiseau de proie... c’est triste... mauvais présage... — dit tout bas Mme Perrine, en tressaillant.
Puis, comme si cette pensée eût redoublé ses craintes pour la jeune fille, elle se pencha vers la noire entrée du four, et s’écria :
— Bruyère... mon enfant... parlez-moi donc...
— Je cherche au long de la voûte, et partout... dame Perrine ; et je ne trouve rien... — répondit tristement la jeune fille.
— J’en étais sûre... pauvre enfant !... — dit Mme Perrine.
Puis, prêtant l’oreille du côté d’où venait le vent, elle ajouta à demi-voix :
— C’est singulier... on dirait le galop de plusieurs chevaux qui approchent.
Elle écouta de nouveau et reprit :
— Ce sont les poulains de quelque métairie voisine qui restent la nuit dans les prés, et s’ébattent au clair de lune...
<references/>
|
Brocher - Souvenirs d’une morte vivante, 1909.pdf/295
|
À quel degré de bestialité ces malheureux soldats
étaient-ils tombés ?
Je continue ma route, je {{erratum|travers|traverse}} le canal ; dans mon
parcours je vois des horreurs. On veut me forcer
d’enlever des pavés à chaque barricade, je ne réponds
pas, je file ; me prenant pour un gamin on me laisse
passer. Inutile de dire qu’entre toutes les barricades il
y avait des cadavres, les femmes étaient assez nombreuses.
(Ces femmes héroïques, n’étaient pas venues
expirer là pour le plaisir, comme l’ont écrit certains
écrivains bien pensants. Les courtisannes de haut et
bas étage ne seraient pas venues se fourvoyer au
milieu de nos luttes, elles n’y auraient rien gagné.)
Je traverse la place du Château d’Eau, même tableau
sur tout mon parcours. Les faibles, les lâches et les
vainqueurs hissaient des drapeaux tricolores à toutes les
fenêtres pour éviter l’invasion de l’armée versaillaise
(le drapeau de la France, était le talisman sauveur presque
à l’égal du scapulaire des catholiques romains).
Je descends la rue du Temple, la rue Turbigo, je me
trouve à l’entrée de la rue St-Martin ; dans toutes ces
rues si agitées la veille, il régnait un silence de mort.
De place en place, des militaires l’arme au bras, marchent
de long en large ; excepté eux, il n’y a pas un
chat dehors. Tandis que les jours précédents il avait
plu, ce jour-là, le soleil brillait sur toutes ces choses
macabres.
Rue St-Martin, je passe devant un poste de police
qui se trouvait à gauche ; un agent m’appelle :
— Où vas-tu, camin ? dit-il en mauvais français.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 65.djvu/550
|
se joue et se perd dans cette extase naturaliste par laquelle l’homme se dépossède de lui-même et se répand, se verse tout entier dans les choses, abdiquant l’action, l’effort, la vie même, qui est un effort perpétuel tendu vers l’être, pour se transporter dans l’existence universelle et s’y bercer dans le rythme d’une force qui n’est plus la sienne, mais celle de la nature, où il devient successivement tout être sans aucune forme déterminée, vivant la vie de l’animal, de la plante, du minéral, sentant à chaque degré décroître la volonté, le sentiment, la sensation, l’impression enfin, qui s’obscurcit et qui s’achève dans je ne sais quel voluptueux néant. — C’était aussi le sentiment douloureux d’une santé précaire, de plus en plus menacée, et qui lui imposait des idées noires. Quand l’homme extérieur se détruit et qu’il assiste à sa propre destruction, s’il ne se rattache pas à des espérances immortelles, s’il ne peut pas jeter l’ancre dans un dogme, s’il ne se prend pas tout entier à la foi, « qui est une certitude sans preuve, » la vie de chacun de nous n’est plus que « le démembrement forcé de son petit empire, le démantèlement successif de son être par l’inexorable destin. Et quoi de plus dur que d’assister à cette longue mort, dont les étapes sont lugubres et le terme inévitable ? »
Certaines de ses qualités mêmes se retournaient contre Amiel : je veux parler de ce sentiment passionné de l’idéal qui l’agitait stérilement et le brisait contre tous les obstacles. Il avait conçu une idée trop haute, irréalisable, de la vie, de la société humaine, de la destinée, du progrès. Il s’était forgé une utopie de ce qui devait être ici-bas ; il se désolait d’assister, jour par jour, à la ruine de ses belles chimères. Il y a des révoltes d’âme et de doctrine qui sont le résultat d’un grand espoir trompé, la protestation de la conscience contre le réel. L’idéal, pour Amiel, c’était l’anticipation de l’ordre par l’esprit. En voyant l’ordre, tel qu’il le concevait, si cruellement troublé par les événemens et par les hommes, il s’attristait et s’enfuyait ; il devenait le transfuge de la vie. Non-seulement il faut que nous assistions aux triomphes scandaleux de la force et de la ruse ; mais si l’on cherche les signes du prétendu progrès qui doivent consoler un philosophe du mal présent par la lente conquête du mieux, on ne les trouvera pas. Si l’humanité s’améliore, c’est malgré elle. Le seul progrès voulu par elle, c’est l’accroissement des jouissances. Tous les progrès en justice, en moralité, en sainteté, lui ont été imposés ou arrachés par l’effort de quelques justes, par quelque noble violence. Le sacrifice, qui est la volupté des grandes âmes, n’a jamais été et ne sera jamais la loi des sociétés. Le monde humain est encore sous la loi de la nature, il reste réfractaire, comme au premier jour, à la loi de l’esprit. Le perfectionnement dont nous sommes si fiers pourrait
<references/>
|
Bazin - La Terre qui meurt, 1926.djvu/27
|
La cadette se leva aussitôt, et elle était si petite
debout, qu’elle ne dépassait pas la tête de Marie-Rose
assise. Prestement, elle secoua son tablier noir, sur
lequel des bouts de fil s’étaient collés, embrassa la nièce
sur les deux joues :
— Adieu, Rousille ! Demain tu n’auras qu’à revenir
ici, ton argent y sera avec nous.
Dans la paix du bourg assoupi, on entendit descendre,
le long de la ruelle, le pas glissant de Véronique.
Celle-ci n’avait pas plutôt disparu, qu’Adélaïde se
rapprocha de Marie-Rose, et, pointant sur elle ses yeux
toujours indulgents et clairs, mais dont les paupières, en
ce moment, battaient d’inquiétude :
— Petite, dit-elle vivement, tu as du chagrin ? Tu as
pleuré ? Tiens ! tu pleures encore !
La main ridée saisit la main rose de l’enfant.
— Qu’as-tu, ma Rousille ? Dis-moi comme à ta
mère : j’ai de son cœur pour toi.
Marie-Rose retenait ses larmes. Elle ne voulait pas
pleurer, puisqu’elle pouvait parler. Frissonnante au
contact de la main qui touchait la sienne, les yeux
brillants, ferme de visage, comme si elle s’adressait à
tous les ennemis devant lesquels elle s’était tue :
— Ils ont renvoyé Jean Nesmy ! dit-elle en se levant.
— Lui, ma chère ? un si bon travailleur ! Comment
ont-ils fait cela ?
— Parce que je l’aime, tante Michelonne ! Ils l’ont
chassé ce matin. Et ils croient que tout sera fini entre
nous parce que je ne le verrai plus. Ah ! mais non ! Ils ne
connaissent donc pas les filles d’ici ?
— Bien dit, Maraîchine ! fit la Michelonne.
— Je leur donnerai tout mon argent, oui, je veux
bien. Mais mon amitié, où je l’ai mise, je la laisserai. Elle
est jurée comme mon baptême. Je n’ai pas peur de la
misère ; je n’ai pas peur qu’il m’oublie. Le jour où il
reviendra, car il a promis de revenir, j’irai au-devant de
lui. Personne ne m’en empêchera. Quand il y aurait le
Marais à traverser en yole, et de la neige, et de la glace,
et toutes les filles du bourg pour rire de moi, et mon père
et mes frères pour me le défendre, j’irai !
Debout, irritée, elle jetait son amour et sa rancune
<references/>
|
Chevremont - Marat, index du bibliophile et de l’amateur de peintures, gravures, etc., 1876.djvu/318
|
300 BIORT DE MÂRAT.
bustes de Marat et Lepelletier, par Coupigny, des ba-
reaux de la Marine, musique de Gossec»
Du magasin de musique à T usage des fêtes natio-
nales, rue Joseph, n*" 16. — Petit io-A de 2 pages.
Air noté.
STATION DES VERSAILLAIS, devant le buste de
Marat, paroles de Félix Nogaret, musique de Giroust.
Chez Frère, passage du Saumon, rue Montmartre.
— In-8 de 2 pages, sans imp. — Air noté.
COMPLAINTE SUR LA MORT DE MARAT. Air du
Pauvre Jacques.
Chez Frère, passage du Saumon, rue Montmartre.
{In-8 de 2 pages. — Air noté.)
LES CATILINAS MODERNES, ou la Mort de Marat.
Représenté pour la première fois au théâtre national,
rues de la Loi et de Louvois, le 7 ventôse, an II
(25 février 1794).
Le citoyen Mole remplissait le rôle de Marat. —
(Voir le Moniteur du 7 ventôse, an II.)
VOES SUR LES FÊTES PUBLIQUES, et application
de ces vues à la fête de Marat. Par le citoyen Gence,
de la section Chalier, ci-devant Beaurepaire. Présentées
à la Convention nationale le 8 ventôse (26 février 179i.)
A Paris. De Timp. de Renaudiëre j., imp. des sans-
culottes, rue Vieille-Bouclerie, n<» 131. An II de la
République, une et indivisible. (In-8 de 1& pages.)
HYMNE AUX VERTUS DE MARAT. Présenté à k
Société populaire des Gardes-françaises, par Mamy.
17 ventôse an II (7 mars 1794).
Paris. De Timp. de Pellier. — (In-8 de S pages.)
— Voir le Quérard, art. Marat, n« 161.
<references/>
|
Grave - L’Anarchie, son but, ses moyens.djvu/72
|
qui le poursuivent la part de butin qui devrait les arrêter.
Si, encore, ce qu'ils présentent comme réalisable après ce châtrage, était accepté par la bourgeoisie, cela ne voudrait pas dire qu'il y aurait un grand pas de fait, mais enfin, à la rigueur, on comprendrait cette tactique puisqu'ils pourraient prétendre que c'est la sagesse de leurs réclamations qui les a fait accepter. Il n'y aurait plus qu'à en produire de nouvelles.
Mais, loin de là. D'autres, et ce sont les plus nombreux, trouvent ce minimum «réalisable», trop «irréalisable» encore, et ils taillent et ils rognent dans ce qui déjà, a été taillé et rogné. De sorte qu'après toutes ces opérations, les parlements votent des mesures absolument dérisoires.
Alors que sont si nombreux ceux auxquels plaît tant cette besogne d'élagage dans les aspirations humaines, il me semble qu'il serait plus logique de corser nos réclamations puisque, justement, à cause de cette ignorance dont se plaignent les socialistes, elle seront soumises à la castration par tous ceux qui ne voient pas plus loin que l'état présent. Il nous resterait de bon tout ce qui aurait échappé à leurs coups de ciseaux.
En rêvant des aspirations de liberté et d'émancipation que, sous prétexte que l'heure de les appliquer n'est pas encore venue, ils s'évertuent à diminuer, les socialistes me font l'effet de ces enfants qui s'amusent à souffler de jolies bulles de savon pour avoir le plaisir de les crever.
Si d'aucuns, rétrogrades endurcis, sous prétexte de sens pratique, veulent tailler et rogner dans notre
<references/>
|
Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/527
|
dans laquelle puisse se former ce jet de cristallisation en tout sens ; car, si l’eau tombe de la voûte, ou coule le long des parois d’une cavité vide, elle ne produira que des concrétions ou ''guhrs'', nécessairement étendus et dirigés dans le seul sens de l’écoulement de l’eau qui se fait toujours de haut en bas : ainsi cet effet particulier du jet des cristaux en tout sens, aussi bien que l’effet général et combiné de la réunion des molécules qui forment la cristallisation, ne peuvent donc avoir lieu que dans un volume d’eau qui remplisse presque entièrement, et pendant un long temps, la capacité du lieu où se produisent les cristaux. Les anciens avaient remarqué, avant nous, que les grandes mines de cristal ne se trouvent que vers les hauts sommets des montagnes, près des neiges et des glaces, dont la fonte, qui se fait continuellement en dessous par la chaleur propre de la terre, entretient un perpétuel écoulement dans les fentes et les cavités des rochers ; et on trouve même encore aujourd’hui, en ouvrant ces cavités auxquelles on donne le nom de ''cristallières'', des restes de l’eau dans laquelle s’est opérée la cristallisation : ce travail n’a cessé que quand cette eau s’est écoulée et que les cavités sont demeurées vides.
Les spaths cristallisés dans les fentes et cavités des bancs calcaires se sont formés de la même manière que les cristaux dans les rochers vitreux : la figuration de ces spaths en rhombes, leur position en tout sens, ainsi que le mécanisme par lequel leurs lames se sont successivement appliquées les unes aux autres, n’exigent pas moins la fluctuation libre des molécules calcaires dans un fluide qui leur permette de s’appliquer dans tous les sens, suivant les lois de leur attraction respective : ainsi toute cristallisation, soit dans les matières vitreuses, soit dans les substances calcaires, suppose nécessairement un fluide ambiant et tranquille, dans lequel les molécules dissoutes soient soutenues et puissent se rapprocher en liberté.
Dans les lieux vides au contraire, où les eaux stillantes tombent goutte à goutte des parois et des voûtes, les sucs vitreux et calcaires ne forment ni cristaux ni spaths réguliers, mais seulement des concrétions ou congélations, lesquelles n’offrent qu’une ébauche et des rudiments de cristallisation : la forme de ces congélations est en général arrondie, tubulée, et ne présente ni faces planes, ni angles réguliers, parce que les particules dont elles sont composées ne nageant pas librement dans le fluide qui les charrie, elles n’ont pu dès lors se joindre uniformément, et n’ont produit que des agrégats confus sous mille formes indéterminées.
Après cet exposé que j’ai cru nécessaire pour donner une idée nette de la manière dont s’opère la cristallisation, et faire ressortir en même temps la différence essentielle qui se trouve entre la formation des concrétions et des cristallisations, nous concevrons aisément pourquoi la plupart des stalactites dont nous allons donner la description ne sont pas des cristallisations, mais des concrétions demi-transparentes ou opaques, qui tirent également leur origine du quartz, du feldspath et du schorl.
{{—|6|m=4em}}
<references/>
|
Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/344
|
{{tiret2|demi-|douzaine}} d’assaillants tombes en dedans de la palissade étaient
groupés sous les murs des bâtiments.
— La nature nous dit comment il faut nous conduire, fit observer
Joël en montrant à ses compagnons ceux qui étaient près de
la Hutte. Vous voyez ces hommes en dedans des palissades, ils
sont plus en sûreté que nous, et si ce n’était par respect pour les
apparences, je désirerais être avec eux. Cette maison ne sera prise
qu’après un combat désespéré, car le capitaine est un vieux guerrier
et il aime l’odeur de la poudre. (Le lecteur comprend par les
paroles que la mort du brave vétéran n’était connue que des habitants
de la Roche.) — Il ne se rendra pas, tant qu’il aura de
quoi charger un fusil. Si j’avais vingt hommes, non trente vaudraient
mieux à mettre à la même place qu’occupent ces compagnons,
je crois que la place serait emportée en quelques minutes
alors la liberté aurait raison et les hommes de la monarchie seraient
mis à bas comme ils le méritent.
— Que faire ? demanda le chef Mohawk, parlant anglais avec
un accent guttural. Pas tirer, pas pouvoir tuer les bûches.
— Non, chef ; ce que je vous dis est raisonnable et faisable. Il n’y
a qu’un des côtés de la porte de posé et je me suis arrangé pour
que les étais de celui qui n’est pas dans ses gonds soient défaits.
Si j’avais seulement avec moi un homme de bonme volonté, l’affaire
serait faite et promptement.
— Allez, vous, répondit le Mohawk avec une expression de
méfiance et de mépris.
— Chacun a son emploi, chef. Le mien est la paix, la politique,
la liberté ; le vôtre est la guerre. Pourtant je puis vous mettre,
vous et vos compagnons, sur la voie, et vous verrez alors ce que
vous pourrez faire. Miséricorde ! combien je vois de diables désespérés sur le toit. Je ne serais pas étonné s’ils tuaient ou blessaient
quelqu’un.
Telles furent les délibérations de Joël Strides sur la bataille. Les
chefs indiens cependant donnèrent ordre d’amener leurs jeunes
guerriers, et après avoir envoyé des messagers dans différentes
directions, ils quittèrent la meule de foin en obligeant Joël à les
accompagner. Les résultats de ce mouvement furent bientôt apparents.
Le plus courageux des Mohawks leur montra le chemin
en entrant dans le ruisseau au nord des bâtiments, et ils furent
bientôt au pied des rochers. Ils virent aussitôt que le trou que
<references/>
|
Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/217
|
{{t|« Il faut faire aux autres tout le bien dont on est capable, et attendre d’eux tout le contraire. La première partie de cette sentence est un précepte évangélique, la seconde est le résultat d’une expérience qui n’admet que très-peu d’exceptions.|90}}
<br />
L’ancien évêque de Blois se livrait tout entier à ses travaux littéraires, lorsque les électeurs d’un département qui, après avoir donné le premier signal de notre révolution, s’était toujours distingué par son attachement aux idées libérales, jetèrent les yeux sur lui pour leur représentant. MM. Bérenger et Duchesne (le fils de l’ancien tribun), tous deux aujourd’hui membres de la Chambre des députés, furent les premiers à répandre la pensée de cette élection et à faire des ouvertures à celui qui devait en être l’objet. Une des réponses de Grégoire montre qu’il n’avait point lui-même recherché cet honneur ; elle est datée du 14 juillet 1819.
<br />
:::{{t|« Monsieur,|90}}
{{t|« Le reproche que vous me faites de n’avoir pas répondu aux lettres qui m’ont été écrites concernant les élections prochaines dans le département de l’Isère, est|90}}
<references/>
|
Tamizey de Larroque - Mélanges.djvu/219
|
{|width="100%"
|-valign="top"
|{{ts|ac}} width="5%" |5||{{ts|ac}} width="15%" |Febvrier||width="30%" {{ts|al}}| ||width="50%" |{{a|À M. de Lomenie père, M. de la Ville aux Clercs, du Puy, de la Baroderie.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|10||{{ts|ac}}| » ||{{ts|al}}| ||{{a|À M. Barclay, avec la balle de Buon des 150 exemplaires des poemes, au cavalier Gualdo.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|15||{{ts|ac}}| » ||{{ts|al}}| ||À M. de Maussac<ref>L’helléniste Philippe de Maussac, auquel sera consacré un des plus prochains fascicules des ''Correspondants de Peiresc''.</ref>.
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|17||{{ts|ac}}| » ||{{ts|al}}| ||{{a|Au S. Eschinard, aux {{Srs}} Lumaga de Gènes, au S. Aleandro, au S de Bonnaire.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|25||{{ts|ac}}| » ||{{ts|al}}| ||{{a|Au S. de Bagni, au S. Rubens<ref>À Carpentras, date du 12. Très longue lettre. Rubens, affligé de la perte de sa fille Claire, l’aînée de ses enfants, âgée de 13 ans, n’avait pas écrit à Peiresc depuis quelques mois. Le 28 octobre 1623, il reprend la correspondance par une lettre perdue. Peiresc répond par un véritable mémoire sur la cornaline et la statue de Messaline et par l’envoi d’une copie de la lettre de ''los Alombrados'' et d’autres choses (R.)</ref>, avec le fragment du Laterculus, los Alombrados.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|21||{{ts|ac}}|Mars||{{ts|al}}| ||{{a|À M. de Lomenie, de la Ville aux Clercs, le Beauclerc. le Pelletier, de Valletot, de Malerbe.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|25||{{ts|ac}}| » ||{{ts|al}}| ||{{a|À M. Bignon, à M. Saulmaise, avec la boitte et figure Togata.}}
|-valign="top"
|{{ts|ac}}|12||{{ts|ac}}|Avril||{{ts|al}}| ||{{a|Au cardinal Bentivoglio, au S. Aleandro avec l’Epistomius et la lettre de M. Viaz, au S. de Bonnaire, sur l’indult, à la Barclay, au S. Pignoria avec son ''Atys'' etc.}}
|}<ref follow=p218>nombreuses, quelque livre ou quelque manuscrit ; je juge inutile de produire ici la mention de ces documents, énumérés dans les lettres de mon grand recueil. </ref>
<references/>
|
Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/108
|
{{nr|98|{{sm|L’ORIENT.}}|}}large substruction en talus. Là trônait l’affreuse idole de Witziputzli à qui l’on fourrait dans la bouche, sur une cuiller d’or, des cœurs d’hommes fumants. Il y a trois cents ans à peine que cela se passait. L’humanité est vraiment longue à se civiliser et quelques expositions universelles lui sont nécessaires.
Au second étage de l’Okkel, ce caravansérail-bazar, où la foule s’arrête à regarder travailler dans leurs petites boutiques ces ouvriers arabes si gracieusement adroits avec leur outillage primitif, on remarque une porte sur laquelle est tracée cette inscription : « Le public n’entre pas ici. » C’est le musée anthropologique, une collection de plusieurs centaines de crânes, dont quelques-uns remontent à une si haute antiquité, qu’on pourrait les dire plus anciens que le monde sans trop d’hyperbole.
Dans cette collection se trouvent des caisses de momies de différents siècles, tirées de tombeaux ou de syringes qui n’ont pas été violées par les chercheurs de trésors, et lundi
<references/>
|
Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/185
|
Après cette soirée délicieuse, la difficulté étant d’affronter la colère de {{Mme}} Léeman, Nicolas eut l’idée la plus triomphante en pareil cas : ce fut d’acheter une paire de pendeloques assez belles chez un bijoutier de la rue de Bussy. La précaution n’était pas inutile, car en entrant Nicolas et Sara trouvèrent devant la porte l’infortuné Florimond, que la veuve avait mis dehors en le voyant revenir seul. Dégrisé par la scène d’imprécations qu’il avait subie, il se livrait au désespoir. Nicolas affronta bravement l’orage, qu’il parvint à calmer en faisant briller entre ses doigts sa récente acquisition. Tout rentra dans l’ordre habituel.
La mère était toutefois décidée à ne point admettre qu’on prît du plaisir en son absence. « Puisque Sara a besoin de distraction, dit-elle un jour, je la conduirai à la promenade sur les Grands Boulevards. » Elles partirent donc pour s’y rendre par une belle soirée de printemps. Nicolas, retenu jusqu’à sept heures à son imprimerie, devait les aller rejoindre. Il les retrouva assises sur des chaises dans une contre-allée, faisant partie de deux ou trois rangées de femmes élégantes et très remarquées. Un homme mis avec soin, fort brun, et qui paraissait un créole, s’était assis près d’elles, et avait déjà noué une conversation assez soutenue avec la mère. Sara semblait sérieuse ; — elle sourit en apercevant Nicolas, et lui fit place près d’elle. Le cavalier ne tarda pas à saluer ses nouvelles connaissances, et reprit sa promenade.
Deux ou trois jours après, une affaire importante empêcha Nicolas d’aller retrouver les dames à l’heure habituelle. {{Mme}} Léeman lui dit en raillant que le cavalier brun leur avait tenu compagnie. La même circonstance se reproduisit l’un des jours suivants. Sara prit Nicolas à part en rentrant et lui dit : « Vous m’abandonnez à des vues
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 82.djvu/740
|
Néanmoins, les salles sont de bonnes dimensions, et si quelques inconvéniens se produisent, c’est dans les annexes du service principal. Pas d’infirmiers, mais des infirmières, ce qui est excellent : la femme est plus compatissante, plus sobre, plus maternelle que l’homme, elle est bien à son office au chevet de la souffrance, et la créature malade, quel qu’en soit le sexe, l’émeut et lui obéit volontiers. Les 46 lits du début se sont multipliés, car aujourd’hui j’en compte 134, distribués en trois divisions séparées, occupées par les hommes, les femmes et les enfans.
On me parait très hospitalier dans cette maison et l’on n’y redoute pas les séjours prolongés auxquels les hôpitaux cherchent ordinairement à se soustraire. Dans un lit placé près d’une fenêtre, j’aperçois un homme éclairé en pleine lumière ; sa barbe d’un noir bleuâtre, le teint de son visage qui rappelle la patine des bronzes florentins, la sclérotique de ses yeux éclatante et nacrée, lui donnent l’aspect d’une idole des pays primitifs. Je lui parle, il ne me comprend pas : il arrive des côtes du Malabar et ne sait que des idiomes qui nous sont inconnus ; il baragouine quelques mots d’anglais, il peut réciter ses prières en hébreu, et c’est tout. Sa main repose sur les draps et ressemble à une main de momie qui a longtemps trempé dans le bitume. On n’a pas eu à l’interroger sur son mal, qui se dénonce de lui-même par ses ongles bombés et de cette forme hippocratique que les médecins connaissent bien ; le pauvre homme est tuberculeux, la phtisie le dévore, lente ou rapide, nul ne peut le deviner, mais dût-elle le garder là pendant des mois et pendant des années, il y restera ; car ici l’hôpital ne rend ses malades que guéris ou morts ; celui qui souffre lui appartient, et il ne s’en sépare pas aux heures de la convalescence pour faire place à d’autres. Une fois de plus, je répéterai que le système hospitalier de l’assistance publique est très bon ; mais il est insuffisant, il ne peut répondre à toutes les exigences qui l’assaillent. Parfois il est obligé de se montrer cruel et de fermer ses portes, même quand il sait qu’il devrait les ouvrir, car on pourrait doubler le nombre de ses lits ayant qu’il pût accueillir tous ceux qui l’invoquent.
L’Indou poitrinaire que j’ai remarqué dans la salle des hommes m’a paru être le seul malade gravement atteint ; les autres avaient figure de convalescens et lisaient des journaux qu’ils font acheter, ou les livres que leur prête la bibliothèque assez bien munie de la maison. Dans la division des femmes, on hospitalise aussi les maladies lentes, et si longues, si longues, qu’elles ne se terminent qu’avec la vie. Une femme jeune encore est étendue ; sous ses cheveux noirs, son visage, qui ne manque point de grâce, est d’une pâleur mate et profonde ; nulle apparence de sang sous cette chair épuisée ; le sourire est très doux et le regard presque joyeux : on y
<references/>
|
Gautier - Isoline et la Fleur Serpent, Charavay frères, 1882.djvu/254
|
Fleur-dc-Roseau était en ce moment occupée à
faire rapidement une reprise dans une vieille nappe
de soie jadis blanche, maintenant toute jaune et
mangée des vers.
Klle poussa un cri et se cacha vivement le visage
derrière la large manche de sa robe, en voyant un
homme entrer.
— « Ne fuis pas, je t'en prie, ma jolie cousine,
dit Coeur-de-Rubisens'arretant de l'autre côté de
la table. Je suis venu en avance, dans l'intention
de te parler un instant.
— Auriez-vous donc du mépris pour moi, seigneur, dit Fleur-de-Roseau toujours à l'abri des
regards derrière son bras levé, que vous me parlez
ainsi qu'on le fait aux femmes vulgaires et sans pudeur?
— Je te parle simplement et avec sincérité,dit le
jeune homme. Letemps me manque pour les belles
phrases et les manières que commandent les usages.
Sache que depuis bien longtemps mon coeur n'est
empli que de toi, FIeur-de-Roseau,etque je désire
savoir si tu veux bien m'aimer et approuver les pro-
jets que j'ai conçus, ou si je ne suis bon qu'à m'accrocher à quelque poteau, un cordon de soie au cou.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 29.djvu/919
|
Allemagne. La France, d’après lui, depuis vingt ans, avait complètement renoncé à la « revanche, » et ne demandait qu’à vivre en paix avec tous ses voisins, et en particulier avec l’Allemagne. Si, depuis une dizaine d’années, les relations entre les deux peuples ont été plus d’une fois tendues, la faute en était toujours à l’Allemagne qui se vengeait par des coups de force des constantes maladresses de sa lamentable diplomatie.
Pas plus que la France, la Russie ne souhaitait et ne voulait la guerre. Des intérêts divergens, des souvenirs communs de famille et d’histoire, de bonnes relations économiques et intellectuelles, tout semblait devoir maintenir les deux Empires voisins en bonne intelligence. Prétendre le contraire, c’est travestir la vérité : « confusion des esprits indescriptible, océan de mensonges et de falsifications, qui est malheureusement teint de rouge, et menace de submerger complètement notre bonheur et notre bien-être. »
Et enfin, pour ce qui est de l’Angleterre, celui de tous ses ennemis que l’Allemagne hait de la haine la plus vivace, comment soutenir sérieusement qu’elle ait provoqué et machiné la guerre ? Et l’auteur de ''J’accuse ! '' rappelle en quelques pages très nourries et très persuasives les efforts véritablement inlassables faits par l’Angleterre aux divers congrès de La Haye, et en dehors de ces congrès, pour assurer la paix, pour régler l’arbitrage, pour limiter et diminuer les arméniens, pour se rapprocher de l’Allemagne ; et l’Allemagne, toujours, repoussant ces avances, ou tâchant de les exploiter à son profit, ou faisant avorter, par son opposition systématique et hargneuse, toutes les tentatives, même les plus anodines, pour soustraire à la force brutale les rapports internationaux.
Et la conclusion de tout ceci est que, de toutes les grandes Puissances engagées dans le présent conflit, les deux seules qu’on puisse accuser de l’avoir délibérément préparé sont l’Autriche et l’Allemagne.
Ce qui donne à cette conclusion le caractère d’irréfutable démonstration, c’est l’examen impartial et complet des faits et des pourparlers qui ont immédiatement précédé l’ouverture des hostilités. L’auteur de ''J’accuse ! '' se livre à cet examen et le poursuit avec une conscience critique, une rigueur logique difficiles à surpasser. Des différentes publications diplomatiques, — et du ''Livre Blanc'' et du ''Livre Rouge'' eux-mêmes, — il extrait les
<references/>
|
Sand - Correspondance 1812-1876, 4.djvu/124
|
<br />{{T4|À SON ALTESSE LE PRINCE NAPOLÉON (JÉRÔME),<br />À PARIS|CDXIX}}
<br />{{Droite|Nohant, 17 décembre 1857.|5|fs=85%}}
Oui, monseigneur, vous avez raison, et, comme
toujours, vous voyez les choses de haut. Il ne s’agit
pas tant de réussir que de faire ce que l’on doit, et on
n’est jamais mortifié d’échouer, quand on n’a songé
qu’à se risquer pour les autres. Comme toujours aussi,
vous avez été bon ; que Dieu se charge du reste !
Ce qui vous rend triste, cher prince, c’est le mal
d’un génie comprimé. Sans chercher à qui la faute,
ni quelle sera l’issue, je me demande ce qui peut occuper
le présent d’un être jeune et dans toute sa
force, à qui le véritable emploi de cette force n’a pas
été donné par les circonstances. Je m’imagine que les
études scientifiques et surtout de philosophie scientifique,
auxquelles vous vous intéressez, et que ''vous savez'',
sans en faire montre, pourraient vous devoir
une somme de progrès. Les membres de votre famille
qui se sont adonnés à la science n’ont pas été les
moins utiles, et ne seront pas les moins illustres, dans
le jugement de l’avenir. Peut-être, aussi, n’ont-ils pas
été les plus malheureux.
Je vous vois et je vous envie la possession de trois
<references/>
|
Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/314
|
''Fleur''. Jaune, formée par un mufle à deux mâchoires, & dont le fond est terminé par un éperon ou queue semblable à la pointe d’un capuchon. B représente le pistil sortant du milieu du calice, entre la partie supérieure de la fleur C & l’inférieure D, dans chacune desquelles se trouvent deux étamines ; en tout quatre étamines, dont deux plus longues & deux plus courtes.
''Fruit''. E Coque partagée en deux loges F, remplies de semences plates G, qui ont la figure d’un petit rein, entourées à leur bord d’un feuillet membraneux, & elles sont noires.
''Feuilles''. En forme de lance, linéaires, serrées contre la tige.
''Racine''. A Blanche, dure, ligneuse, rampante, traçante.
''Port''. De la même racine, s’élèvent à la hauteur d’un pied, & quelquefois davantage, plusieurs tiges cylindriques & branchues à leur sommet, où naissent des fleurs en épi, portées par de courts pédoncules qui naissent de l’airelle des feuilles.
''Lieu''. Les terreins incultes ; la plante est vivace & fleurit pendant les grandes chaleurs.
''Propriétés''. Son odeur est fétide, & sa saveur légèrement salée & amère ; elle est fortement résolutive, émolliente & diurétique.
''Usages''. On emploie toute la plante ; on s’en sert rarement pour intérieur ; appliquée en cataplasme, elle est anti-hémorrhoïdale ; son suc, {{corr|employée|employé}} contre les ulcères, a peu de vertu.
<section end="LINAIRE COMMUNE, ou LIN SAUVAGE"/>
<section begin="LINIMENT"/><nowiki/>
LINIMENT. Espèce de médicament qui s’applique à l’extérieur, & dont on frotte légèrement la partie malade. Le liniment, proprement dit, doit être d’une consistance moyenne entre l’huile par expression, le baume artificiel & l’onguent.
<section end="LINIMENT"/>
<section begin="LIS BLANC ou LIS COMMUN"/><nowiki/>
LIS BLANC ou LIS COMMUN. Von Linné le classe dans l’hexandrie monogynie, & le nomme {{lang|la|''lilium candidum''}}. Tournefort l’appelle {{lang|la|''lilium album vulgare''}}, & le place dans la quatrième section des herbes à fleur régulière en lis, composée de six pétales, & dont le pistil devient le fruit.
''Fleur''. Blanche & sans calice, en forme de cloche étroite à sa base, composée de six pétales droits, évasés, recourbés, & chaque pétale a un nectaire à sa base ; les étamines au nombre de six & un pistil.
''Fruit''. Capsule formée par le renflement du pistil, marquée de six sillons, à trois loges, à trois valvules, renfermant des semences plates, en recouvrement les unes sur les autres.
''Feuilles''. Éparses, simples, très entières ; celles qui partent des racines sont larges, longues & pointues ; celles des tiges plus étroites & plus petites, à mesure qu’elles approchent du sommet.
''Racine''. Bulbeuse & formée d’écailles appliquées les unes sur les autres.
''Port''. La tige s’élève depuis deux jusqu’à quatre pieds, suivant la nature du sol, du climat & de la culture ; cette tige est herbacée, feuillée, très-simple ; les fleurs naissent au sommet, & elles ont une ou deux stipules au bas de chaque pédoncule.
''Lieu''. La Palestine, la Syrie, cultivé dans nos jardins, où il n’est pas<section end="LIS BLANC ou LIS COMMUN"/>
<references/>
|
Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/105
|
hérissées, hostiles... Mais l’averse lunaire ruisselait sur les feuillages légers des acacias, des bouleaux, des trembles, inondant les troncs pâles d’un éclat mouillé.
Le chemin descendait vers les pâturages en friche qui bordent la route de Rouvrenoir. On entendait la clochette d’un crapaud, parmi les bruyères. Vitalis marchait en avant. Fanny le suivait, précédant Augustin. Parfois, elle se détournait pour lui sourire.
Jamais elle ne l’avait senti plus vibrant. Elle-même frémissait, envahie par une anxiété singulière, dans l’attente de quelque événement mystérieux. Était-ce la musique, l’odeur du bois, la nuit de lune qui leur bouleversaient ainsi l’âme et les sens ? Ils n’osaient parler. Ils se regardaient à peine. Et Fanny rougissait comme une vierge aux pensées qui lui venaient.
Elle s’arrêta :
« Des ronces ont accroché ma jupe. Je ne peux plus avancer. Aidez-moi. »
Augustin mit un genou en terre, tira la branche épineuse, dégagea l’étoffe qui criait en se déchirant. Fanny, penchée, appuyait une main sur son épaule.
« Je vous remercie, dit-elle. C’est fait. »
Il ne bougeait pas. Et tout à coup, s’inclinant, il saisit le pied de la jeune femme, baisa le petit soulier et la cheville dans le bas à jour... Fanny fit un « Oh ! » de surprise. Augustin se releva, et, prévenant le reproche qu’il prévoyait :
« J’ai déchiré votre robe. Je suis un maladroit. Je m’humilie... Ne dites rien. »
Elle resta stupéfaite. Quoi ! ce janséniste opiniâtre, qui discutait si rudement, tout à l’heure, et ne souffrait pas la contradiction, il avait pu se prosterner devant une femme, lui baiser les pieds, dans un éland d’amour éperdu ?
Hors du bois, ils trouvèrent l’abbé qui les attendait. Tous trois s’en allèrent jusqu’au presbytère. Vitalis paraissait triste et fatigué.
« Le brouillard monte, dit-il ; ne vous attardez pas... Rentrez chez vous, madame. Adieu. »
Augustin et Fanny remontèrent vers le Chêne-Pourpre, et, soudain, s’arrêtant au milieu du chemin, ils s’embrassèrent.
Tout près, un grand châtaignier abritait quelques masures. Le feuillage, décoloré par la lune, se perdait dans le bleu verdâtre du ciel. Une cendre aérienne diluait au loin la forêt grise, et les murs des maisons étaient d’un blanc miraculeux, d’un blanc de
|
Le Libre-échange et autres écrits/Tome 2/Texte 41
|
Frédéric Bastiat Le Libre-échange et autres écrits/Tome 2 Le Libre-échange et autres écrits, Guillaumin, 1862, Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, tome 2 (p. 225-228). ◄ 40. Deux modes d’égalisation de taxes 42. Discours à Bordeaux ► collectionLe Libre-échange et autres écrits/Tome 2Frédéric BastiatGuillaumin1862ParisTŒuvres complètes de Frédéric Bastiat, tome 2Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvuŒuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/11225-228 41. — L’IMPÔT DU SEL. 20 Juin 1841. Pour la seconde fois, la réduction de l’impôt sur le sel a été votée par la Chambre des députés à la presque unanimité ; ce qui n’aura d’autre conséquence, à ce qu’il paraît, que de déterminer le ministère à mettre la question à l’étude pour l’année prochaine. Parmi les arguments dont on s’est servi dans le débat, il en est un qui revient à propos de toute réduction de taxes et particulièrement au sujet des droits de douane. Par ce motif, nous croyons utile de rectifier les idées qui ont été émises à ce sujet. Les députés qui ont soutenu la proposition de M. Demesmay ont cru devoir prédire un accroissement de consommation, d’où ils concluaient que le déficit du Trésor serait bientôt à peu près comblé. Ceux qui repoussaient la mesure assuraient, au contraire, que la consommation du sel, en ce qui concerne l’emploi qui en est fait directement par l’homme, était aujourd’hui tout ce qu’elle peut être ; qu’elle ne serait point modifiée par la réduction de la taxe, ni même alors que le sel serait gratuit ; d’où la conséquence que le déficit du Trésor serait exactement proportionnel à la diminution de l’impôt. Sur quoi, nous croyons devoir examiner rapidement et d’une manière générale cette question : « Une diminution dans la taxe, et par conséquent dans le prix vénal de l’objet taxé, entraîne-t-elle nécessairement un accroissement de consommation ? » Il est certain que ce phénomène s’est produit si souvent, qu’on pourrait presque le considérer comme une loi générale. Cependant, il y a une distinction à faire. Si l’objet que frappe la taxe est d’une nécessité telle que ce soit une des dernières choses dont l’homme consente à se passer, la consommation, quelle que soit la taxe, sera toujours tout ce qu’elle peut être. Alors, à mesure que l’impôt en élève le prix, il arrive qu’on se prive de toute autre chose, mais non de l’objet supposé nécessaire. De même, si le prix baisse par suite d’une réduction d’impôt, ce n’est pas la consommation de cet objet qui augmentera, mais celle des choses dont on avait été forcé de se priver pour ne pas manquer de l’objet indispensable. Il faut à l’homme, pour respirer, une certaine quantité d’air. Supposons qu’on parvienne à le frapper d’une taxe élevée : l’homme fera évidemment tous ses efforts pour continuer à avoir la quantité d’air sans laquelle il ne pourrait vivre ; il renoncera à ses outils, à ses vêtements et même à ses aliments, avant de renoncer à l’air ; et si l’on vient à diminuer cette odieuse taxe, ce n’est pas la consommation de l’air qui augmentera, mais celle des vêtements, des outils, des aliments. Il nous semble donc que ceux de MM. les députés qui ont repoussé la réduction de l’impôt du sel, en se fondant sur ce que la consommation, malgré la taxe, est tout ce qu’elle peut être, ont, sans s’en douter, produit le plus fort argument qu’on puisse imaginer contre l’exagération de cet impôt. C’est comme s’ils avaient dit : « Le sel est une chose si indispensable à la vie, que, dans tous les rangs, dans toutes les classes, on en consomme toujours, et quel qu’en soit le prix, une quantité déterminée et invariable. Maintenez-le à un prix élevé, n’importe ; l’ouvrier se vêtira de haillons, il se passera de remèdes dans la maladie, il se privera de vin et même de pain plutôt que de renoncer à une portion quelconque du sel qui lui est nécessaire. Diminuez-en le prix, on verra l’ouvrier se mieux vêtir, se mieux nourrir, mais non consommer plus de sel. » Il est donc impossible d’échapper à ce dilemme : Ou la consommation du sel augmentera par suite de la réduction du prix ; en ce cas, le trésor n’aura point à subir la perte annoncée ; Ou elle n’augmentera pas ; et alors, cela prouve que le sel est un objet tellement nécessaire à la vie, que la taxe la plus exagérée n’a pu déterminer les hommes, même les plus pauvres, à en retrancher de leur consommation une quantité quelconque. Et quant à nous, nous ne pouvons imaginer contre cet impôt un argument plus décisif. Il est vrai que les besoins du Trésor sont toujours là, comme une fin de non-recevoir insurmontable. Qu’est-ce que cela prouve ? hélas ! une chose bien simple, quoiqu’elle paraisse peu comprise. C’est que, si l’on veut voter ces réductions d’impôts, il ne faut pas commencer par voter sans cesse des accroissements de dépenses. Combien de temps doit durer l’éducation constitutionnelle d’un peuple pour qu’il arrive enfin à la découverte ou du moins à l’application de cette triviale vérité ? C’est un problème qu’il n’est pas aisé de résoudre. Modérez l’excès des travaux publics, s’est écrié M. Dupin aîné qui, du reste, nous semble avoir donné à tout ce débat sa véritable direction. Nous répéterons ce mot avec une légère variante. Modérez l’excès des services publics, ne laissez à l’État que ses attributions véritables ; alors il sera facile de diminuer les dépenses et par conséquent les impôts. L’accroissement de consommation, par ricochet, est infaillible ici et ne nuit à personne. Il en est tout autrement de ces effets vantés par l’école protectionniste, à l’égard desquels l’auteur a dit : Quand MM. les protectionnistes le voudront, ils me trouveront prêt à examiner le sophisme des ricochets. V. au tome V, la note 2 de la page 13 ; et de plus, au tome IV, les pages 176 à 182. (Note de l’éditeur.) V. au tome V, page 407, le Budget républicain ; et page 468, le Discours sur l’impôt des boissons. (Note de l’éditeur.)
|
Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 126.djvu/118
|
le bonheur est dans ce que le destin nous dénie avec tant d’obstination. Mais lorsque, la vie nous ayant montré tout ce qu’elle contenait, on voit qu’elle ne contenait rien ; lorsque, les années nous ayant livré le secret de la destinée, on s’aperçoit qu’il n’y a pas de secret de la destinée et que les lèvres du sphinx ne se refermaient que sur du néant, alors cela est pire que le désespoir et l’on est vraiment prêt pour la mort.
Ainsi Watts est le peintre de l’Amour et de la Mort, mais non de la mort odieuse ou ridicule, de ce squelette échappé d’un cabinet d’anatomie, qui mène la Danse macabre ou que le vieillard des contes populaires retient prisonnière dans son oranger, non de l’Amour gouailleur et polisson, de ce bambin bon à fouetter qui fait des niches aux nymphes de Thorwaldsen, ou crible de flèches en papier les jeunes bergers de M. Bouguereau. Son Amour est viril et sa Mort est bienfaisante. Le premier soutient la vie et la seconde la guérit. Son Dieu ailé est le Dieu fort qui fait battre les cœurs pour le sacrifice ; sa Déesse voilée est la mère attentive qui berce les corps pour le repos. A lui on va, lorsqu’on veut lutter encore, parce qu’il est la lumière des esprits qui se troublent elle soutien des volontés qui ploient. A elle on retourne, lorsque, ayant senti la meurtrissure des défaites, ou mieux, le vide des victoires, on se résigne à goûter la paix et la sérénité du jour sans lendemain. Et lorsque le vieil artiste, inspiré par un coup de génie, met en présence cet Amour et cette Mort, grands comme il les a conçus, beaux comme il les a faits, tels pour ainsi dire qu’il les a réhabilités, alors il atteint le sommet de son œuvre et de sa pensée. Ce petit Amour, qui se bat comme une sentinelle, qui se raidit, qui virilement refuse de laisser passer la sombre visiteuse, est noble et grand : il est persuadé que la vie est un bien pour celui qu’il protège ; il veut la lui conserver : il fait son devoir. Mais noble et grand aussi ce fantôme qui s’avance, sans colère, et semble dire à l’enfant courageux : « Tu ne sais ce que tu fais ! Tu l’as accompagné, tu l’as soutenu dans les sentiers escarpés : je le conduirai dans le royaume où il n’est plus de fatigue. Ton rôle est Uni ; laisse le mien s’accomplir. Tu peux moins que moi pour lui. Tu l’éblouis, mais je l’éclaire ; tu le guides, mais je le recueille ; tu le consoles, mais je le guéris. »
Un jour que Michel-Ange et Raphaël, avec ses élèves, se rencontrèrent dans les jardins de Rome, le vieillard plaisanta le jeune homme ainsi : « Tu vas entouré de monde, comme un chef d’armée ! — Et toi, répondit le Sanzio, tu vas seul, comme le bourreau. » Ce mot s’applique aussi à Watts, à son art que personne ne suit, à l’effroi qu’il inspire, à la profonde empreinte
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 112.djvu/154
|
mêmes originaux que Molière, ses renseignemens sont d’un grand prix ; grâce aux ''Précieuses ridicules'' et aux ''Femmes savantes'', il a pour nous le même intérêt que ces scoliastes de l’antiquité, plats grammairiens et critiques sans goût, désormais inséparables des grands écrivains auxquels ils se sont attachés.
Qu’est-ce donc, selon Somaize, qu’une précieuse ? Entre les nombreuses définitions qu’il nous offre, on n’a que l’embarras du choix. La plus complète se trouve dans la préface du ''Grand Dictionnaire''. Il y distingue quatre sortes de femmes. Les premières, tout à fait ignorantes, ne sachant « ce que c’est que de livres et de vers et incapables de dire quatre mots de suite ; » celles-là, naturellement, n’existent pas pour lui. Les secondes, intelligentes, mais lisant peu, « esprits bornés qui ne s’élèvent ni ne s’abaissent, et qui doivent tout à la nature, rien à l’art ; » elles ont peu d’importance. « Les troisièmes sont celles qui, ayant un peu plus de bien ou un peu plus de beauté que les autres, tâchent de se tirer hors du commun ; et, pour cet effet, elles lisent tous les romans et tous les ouvrages de galanterie qui se font. » Cependant, elles n’en font pas elles-mêmes, et se contentent d’ouvrir leur maison aux littérateurs et aux gens de goût ; « elles tâchent de bien parler et disent quelquefois des mots nouveaux sans s’en apercevoir, qui, étant prononcés avec un air dégagé et avec toute la délicatesse imaginable, paraissent souvent aussi bons qu’ils sont extraordinaires. » Voilà, selon Somaize, les femmes que Molière a raillées : « Ce sont ces aimables personnes que Mascarille a traitées de ridicules dans ses ''Précieuses'', et qui le sont, en effet, sur son théâtre par le caractère qu’il leur a donné, qui n’a rien qu’une personne puisse faire naturellement, à moins que d’être folle ou innocente. » Quant à la quatrième sorte de femmes, « ce sont celles qui, ayant de tout temps cultivé l’esprit que la nature leur a donné, et qui, s’étant adonnées à toutes sortes de sciences, sont devenues aussi savantes que les plus grands auteurs de leur siècle et ont appris à parler plusieurs belles langues aussi bien qu’à faire des vers et de la prose. Ce sont de ces deux dernières sortes de femmes dont M. de Somaize parle dans son dictionnaire sous le nom de précieuses. »
L’idéal d’une vraie précieuse, selon Somaize, est donc celui-ci : « Voir beaucoup de monde, et surtout des gens de lettres, parler de toutes choses, mettre au monde quelque auteur, ce que chacune d’elles affecte en particulier, faisant gloire de donner de la réputation à ceux qui s’attachent à leur montrer ce qu’ils font de nouveau. » Les éloges qu’elle tient à cœur de mériter, « c’est d’aimer fort la lecture, les vers, et surtout la conversation ; de savoir bien coucher par écrit, d’avoir de grandes connaissances, de faire
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 6.djvu/265
|
cités comme étant en voie de prospérité, et les trois sur l’avenir desquels il est impossible, à cause de leur nouveauté, de se prononcer,
les autres, pour la plupart, sont tombés, par suite de leurs tendances
en désaccord avec l’esprit et aussi avec les préjugés du public auquel ils s’adressaient ou par le peu d’intérêt de leur rédaction.
Envisagée comme un instrument de régénération et de progrès
et tenue jusqu’ici en dehors de toute idée de spéculation industrielle, la presse arménienne a pour elle les sympathies et l’appui
de l’élite de la nation, fraction encore minime sans doute, mais dont
le patriotisme ne recule devant aucun sacrifice pour répandre parmi
les Arméniens les journaux, les livres utiles et les lumières de l’instruction<ref> Ce sont des libéralités particulières, suggérées aux donateurs par le désir de contribuer à l’avancement de leurs compatriotes, qui ont couvert les frais de cette masse de publications faites par les révérends pères mekhitharistes, et dont plusieurs ont coûté des sommes considérables. Les dons faits dans ces derniers temps pour cet objet par les familles Duz et Dadian de Constantinople doivent leur mériter une éternelle reconnaissance de la part des Arméniens. J’en dirai autant de la famille Lazaref de Saint-Pétersbourg. A Ortha-Keni, dans la banlieue de Constantinople, les souscriptions de l’association littéraire qui porte le nom de ''Thankaran verdzanouthian'' (cabinet de lecture) nous ont valu tout récemment la publication d’un historien arménien inédit du Xe siècle, Thomas Ardzrouni, précieux pour la connaissance des expéditions des Arabes en Arménie. </ref>. La munificence particulière rivalise de zèle sur ce terrain avec l’action collective de ces associations, véritables sociétés de mutualité que les Arméniens ont organisées presque partout où ils se sont fixés; mais c’est surtout dans la création des établissemens,
d’éducation que ces efforts se sont manifestés depuis une cinquantaine d’années avec le plus de persévérance et ont produit les plus
utiles résultats. Il suffira de mentionner les plus importans de ces
établissemens pour donner une idée de ce qui a été accompli jusqu’à présent, et de ce qui reste à faire.
Le premier de tous, tant par son ancienneté que par le niveau supérieur des études que l’on y professe et les services qu’il a rendus, est
le collège connu sous le nom d’Institut Lazaref des langues orientales (''Lazarerkii Institout vostotchnik yazikov''), à Moscou. L’histoire
de la fondation de ce collège est inséparablement liée à celle de la
noble famille dont il porte le nom et à la générosité de laquelle les
Arméniens en sont redevables. L’aïeul de cette famille, Manoug Lazar,
descendait de l’un de ces chefs arméniens qui, après la destruction
du royaume de Cilicie, vers le milieu du XIe siècle, réussirent à se
maintenir dans leur patrie asservie, en conservant un reste d’indépendance. Lorsqu’en 1605, Schah-Abbas le Grand transplanta à Ispahan
les habitans des provinces riveraines de l’Araxe, Manoug émigra
avec eux. Le schah, voulant leur faire oublier la violence qui les avait
arrachés de leurs foyers, et donner l’essor à leur industrieuse activité
<references/>
|
Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/42
|
m’informai de l’endroit où il s’était retiré ; on m’apprit
qu’il habitait une terme située non loin d’Arzew, dont il
avait fait obtenir la concession à un ancien matelot
nommé Sebastian, qui avait longtemps servi sa famille.
— Comment, interrompit Julian, il serait possible ? Ce
Sebastian serait donc ?...
— Votre prisonnier ; oui, monsieur.
— Non pas, c’est logique, au contraire : ne vous ai-je
pas dit qu’un lien mystérieux attachait ces deux hommes
l’un à l’autre : un crime peut-être.
— C’est malheureusement probable. Continuez, monsieur, je vous prie.
— Je me rendis à cette ferme. Le colonel et Sebastian
étaient partis depuis deux jours, me dit-on avec un visible
embarras, pour chasser la panthère, on ne savait dans
quel douar ; dans tous les cas, on ne pouvait me préciser
la date de leur retour. Je me retirai assez décontenancé
et sans laisser mon nom, malgré l’insistance de l’individu
qui m’avait reçu. Un mois plus tard, son congé étant
expiré, le colonel reprit le commandement de son
régiment, mais il n’était pas reconnaissable. Il était
maigre, pâle, avait les traits tirés comme s’il fût relevé
d’une grave maladie. Son humeur était changée ; il était
sombre, inquiet, nerveux, tressaillait au moindre bruit
insolite, tremblait et semblait près de s’évanouir quand il
recevait une visite à laquelle il ne s’attendait pas. Bref,
ce n’était plus le même homme. Il était plongé dans une
inexplicable apathie, ne s’intéressait à rien, et la plupart
du temps n’entendait pas ce qui se disait. Cependant, peu
à peu cette irritation nerveuse, que personne ne savait à
quoi attribuer, commençait à se calmer. Il devenait plus
communicatif et le sourire reparaissait sur ses lèvres,
lorsqu’un matin, un peu après le rapport, Sebastian arriva. Il était en sueur, son cheval se soutenait à peine ;
tout faisait deviner qu’il avait fait une longue course à
franc étrier. Le colonel pâlit en l’apercevant. Il l’entraîna
dans sa tente, où ils restèrent seuls ; d’autres officiers et
<references/>
|
Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/467
|
{{tiret2|féo|dalité}}, eussent régné, peut-être, encore un siècle, — comme en Russie<ref>Louis Blanc a très bien défini Brissot en disant qu’il était de ces hommes qui sont « aujourd’hui républicains avant l’heure, et demain révolutionnaires attardés », gens qui n’ont pas la force de suivre le siècle, après avoir eu l’audace de le devancer. Après avoir écrit dans sa jeunesse que ''la propriété c’est le vol'', son respect pour la propriété est devenu tel qu’au lendemain du 4 août il blâmait l’Assemblée pour la précipitation qu’elle avait mise à lancer ses décrets contre la féodalité. Cela, à un moment où les citoyens s’embrassaient dans la rue pour se féliciter de ces décrets.</ref>.
Il faut lire Brissot pour comprendre tout ce que préparaient les bourgeois d’alors pour la France, et ce que les Brissotins du vingtième siècle préparent encore, partout où une révolution va éclater.
« Les troubles de l’Eure, de l’Orne, etc. », dit Brissot, « ont été causés par les prédicateurs contre les riches, contre les accapareurs, par les sermons séditieux, sur la nécessité de taxer à main armée les grains et toutes les denrées. »
Et à propos d’Orléans : « Cette ville, raconte Brissot, jouissait, depuis le commencement de la Révolution, d’une tranquillité que n’avaient pas même altérée les troubles excités ailleurs ''par la disette des grains'', quoiqu’elle en fût l’entrepôt... Cette harmonie entre les pauvres et les riches n’était pas dans les principes de l’anarchie ; et un de ces hommes, dont l’ordre est le désespoir, dont le trouble est l’unique but, s’empresse de rompre cette heureuse concorde, en excitant les sans-culottes contre les propriétaires. »
« C’est encore elle, l’anarchie », — s’écrie Brissot, « qui a créé le pouvoir révolutionnaire dans l’armée » : « Qui peut maintenant douter, — dit-il — du mal
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/487
|
{{SDT}}
{{c| '''JEANNE D’ARC'''<ref> ''Copyright by'' Gabriel Hanotaux. </ref>|fs=200%|lh=2}}
{{—|lh=2}}
{{c| II<ref> Voyez la ''Revue'' du 15 mai. </ref>|fs=130%|lh=2}}
{{c| LA MISSION|fs=120%|lh=2}}
{{—|lh=5}}
Voici donc cette fille de dix-sept ans, à cheval, en habit d’homme, l’épée au côté, qui traverse la France pour aller à Chinon, trouver le Roi, celui qu’elle appellera « son gentil Dauphin, » tant qu’elle ne l’aura pas fait sacrer à Reims. Ainsi commence cette carrière qui, en moins de deux ans, par Orléans, Reims, Paris, Compiègne, la conduira au bûcher de Rouen : alternatives surprenantes qui relèvent si haut pour la précipiter au martyre.
Cette vie, elle l’avait devinée, annoncée, acceptée ; elle allait disant : « Je suis née pour cela ! »
Sur ce point, elle n’hésite jamais : elle est toute abnégation. Une volonté supérieure la pousse : « elle est envoyée de par Dieu pour sauver la France. » Elle-même, de la première heure jusqu’à la dernière, sans jamais varier, ni désemparer, affirme le miracle. Elle l’affirme de toute sa croyance, de toute sa sincérité, de toute sa modestie. Car, en ce haut rôle qu’elle s’attribue, pas l’ombre de vanité personnelle : rien de convenu, ni de choquant : elle est naturellement surnaturelle.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 142.djvu/570
|
M. English se plaint encore des typographes ; mais nous connaissons le truc. Toutes les fois que M. English s’aperçoit qu’il a mis un verbe au singulier avec un nom au pluriel, ou estropié un mot, nous sommes sûrs de voir apparaître des lamentations sur les fautes d’impression « absolument inconcevables » qui se sont glissées dans son dernier volume. Il est parfaitement dans son droit en ignorant l’orthographe, puisqu’il n’a pas été à l’école. Nous trouvons seulement fâcheux qu’il dirige une revue. Il n’y a pas de spectacle plus pitoyable que celui d’un homme n’ayant même pas l’instruction primaire, et qui se fait pourvoyeur de belles-lettres pour l’humanité. »
Il est vrai qu’il n’y aurait pas eu de revues en Amérique — toujours d’après Edgar Poe, — s’il avait fallu attendre de trouver des directeurs instruits. A défaut de science, accordons-leur une philosophie indulgente, puisqu’il s’en trouva un pour publier le conte impertinent que Poe a intitulé : ''la Vie littéraire de Bob Thingum, esq''. C’est l’histoire d’un jeune Yankee très avisé, qui a résolu d’arriver à la gloire et à la fortune par la littérature. Il commence par acheter quelques vieux bouquins « complètement oubliés ou inconnus », qu’il traduit ou copie avec discernement. A l’un, il prend l’histoire « d’un certain Ugolin, qui avait une potée d’enfans » ; à l’autre, un long passage sur « la colère d’Achille » ; à un troisième, qui est aussi d’un bonhomme aveugle, des tirades sur « la Sainte-Lumière » et sur Adam, « premier-né du ciel. » Bob recopie proprement « ses poèmes » et les envoie aux quatre ''magazines'' les plus importans. Ils sont refusés, non pas qu’on ait reconnu les vers d’Homère ou de Milton, mais parce qu’ils sont traités de fatras. Instruit par l’expérience. Bob débute modestement par un distique sur un produit de parfumerie. Il apprend d’un éditeur influent l’art de la réclame, celui de tuer la concurrence en déshonorant les confrères, et de supprimer les frais de rédaction en se faisant payer par ses collaborateurs. La fortune lui sourit aussitôt. Il devient propriétaire de « trois périodiques », l’argent afflue dans sa caisse et les échos de la presse quotidienne retentissent de son nom : il est le grand Bob, le fameux Bob, « l’immortel Bob. »
Poe résumait dans les termes que voici — ou à peu près — le spectacle offert aux environs de 1840 par le monde des lettres américain : « En tant que nation littéraire, nous sommes un immense ''humbug'' ; il n’est pas un homme raisonnable qui n’en
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 34.djvu/669
|
lourdes draperies des statues, tandis que l’art allemand s’y abandonnait avec je ne sais quel pédantisme et quelle application violente... Ce serait une nouvelle enquête que nous ne saurions aborder dans cet article, mais dont les conclusions ne seraient pas inutiles, si elles devaient nous amener à mieux comprendre comment, à travers tous les changemens des modes, des circonstances, des théories régnantes et des influences contradictoires, un irréductible « esprit » se laisse toujours reconnaître présent et efficace dans toute « œuvre de France. » Depuis les maîtres de nos cathédrales jusqu’à Nicolas Poussin (qui voulait qu’on mit « de la raison partout ») et à Corot, il existe, on pourrait dégager, une tradition « française. » En nous rendant ainsi de plus en plus capables de ''comprendre'' et d’aimer d’un bout à l’autre de son histoire toute la raison et toute la beauté de notre art, on pourrait du même coup, peut-être, introduire un peu de clarté, d’ordre et de précision dans la conscience des artistes d’aujourd’hui, troublés par tant de « systèmes, » hésitans entre des traditions trop souvent mal connues et mal défendues et des nouveautés plus apparentes que réelles, soucieux d’une « originalité » dont ils ignorent la véritable source et résolus pourtant à se consacrer, après la guerre, au travail sacré d’où devra sortir une France de plus en plus digne, par son art, par ses œuvres, par sa « vertu, » de l’héroïsme de ses soldats et de la gloire de son passé.
ANDRE MICHEL.
<references/>
|
Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/330
|
— Rien, chère Vanda, rien du moins qui vous intéresse.
— Tout ce qui vous touche m’intéresse, Armand,
répondit-elle avec sentiment.
— Bien vrai ? fit-il en essayant de sourire.
— En doutez-vous ? reprit-elle d’une voix mutine.
— Que sais-je ? murmura-t-il en retombent dans sa
tristesse.
— Vraiment, je renonce à vous comprendre, fit-elle
avec dépit.
— Eh ! suis-je bien sûr de me comprendre moi-même ?
reprit-il en hochant la tête.
— Qu’avez-vous, mon frère ? Vous m’inquiétez sérieusement. D’où provient cette tristesse, qui depuis quelque
temps s’est emparée de vous ? Seriez-vous indisposé,
souffririez-vous ?
— Je n’ai rien, je vous assure ; je suis comme tous les
jours.
— Oui, depuis quelque temps, reprit-elle avec mélancolie : autrefois, il y a quelques mois à peine, nous nous
disions tout ; nous n’avions pas de secrets l’un pour
l’autre.
— C’est vrai, chère Vanda, fit-il avec un soupir étouffé ;
mais nous étions des enfants alors.
— Que sommes-nous donc à présent ? répliqua-t-elle
avec un doux sourire.
— Vous êtes une adorable jeune fille, que tout le monde
admire, chère Vanda.
— Allons ! dit-elle gaiement, tout n’est pas perdu
encore, vous redevenez galant ; merci, Armand ; mais
vous, qu’êtes-vous à présent ?
— Moi, Vanda, je sens que je suis un homme, car je
commence à souffrir.
— Oh ! pourquoi ne me le disiez-vous pas ! J’aurais
essayé de vous consoler, mon frère, comme je le faisais
autrefois quand vous aviez des chagrins.
— Ces chagrins n’étaient que des enfantillages, Vanda ;
aujourd’hui, ce sont de véritables douleurs.
— Mon frère...
<references/>
|
Boyer d’Argens - Thérèse philosophe.djvu/164
|
monstrueuse, puisse être reçu dans un espace où je puis à peine introduire le doigt ? D’ailleurs, si je deviens mère, je le sens, j’en mourrai. Ah ! mon cher ami, continuai-je, évitons cet écueil fatal ; laissez-moi faire. Je caressais, je baisais ce que vous nommez votre ''docteur'' ; je lui donnais des mouvements qui, en vous dérobant comme malgré vous cette liqueur divine, vous conduisaient à la volupté et rétablissaient le calme dans votre âme.
Je remarquais que, dès que l’aiguillon de la chair était émoussé, sous prétexte du goût que j’avais pour les matières de morale et de métaphysique, vous employiez la force du raisonnement pour déterminer ma volonté à ce que vous désiriez de moi.
C’est l’amour-propre, me disiez-vous un jour, qui décide de toutes les actions de notre vie. J’entends par amour-propre cette satisfaction intérieure que nous sentons à faire telle ou telle chose. Je vous aime, par exemple, parce que j’ai du plaisir à vous aimer. Ce que j’ai fait pour vous peut vous convenir, vous être utile ; mais ne m’en ayez aucune obligation. C’est l’amour-propre qui m’y a déterminé : c’est parce que j’ai fixé mon bonheur à contribuer au vôtre ; et c’est par ce même motif que vous ne me rendrez parfaitement heureux que lorsque votre amour-propre y trouvera sa satisfaction particulière. Un homme donne
<references/>
|
Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/176
|
{| style="text-align:right;font-size:90%;line-height:140%"
|-
| align=left | Outils à menuisiers, de toutes sortes, || 43 || colspan=3 | 30
|-
| align=center colspan=2 | ''Cordages''. || colspan=3 |
|-
| align=left | Prolonges doubles || 86 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Cables pour chevres || 20 || colspan=3 | 12
|-
| align=left | Prolonges simples || 100 || colspan=3 | 50
|-
| align=left | Paires de traits à canons || 200 || colspan=3 | 120
|-
| align=left | Paires de traits communs || 42 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Ballots de cordages, pour emballer || 42 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Menus cordages || 3500 l. || colspan=3 | 2200 l.
|-
| align=left | Ficelles || 500 l. || colspan=3 | 500 l.
|-
| align=center colspan=2 | ''Bois de remontage''. || colspan=3 rowspan=6 |
|-
| align=left | Timons || 200
|-
| align=left | Limonniers || 50
|-
| align=left | Essieux || 100
|-
| align=left | Jantes || 500
|-
| align=left | Rais || 800
|-
| align=left | Roues de 24, ferrées, || 20 || colspan=3 | 20
|-
| align=left | Roues de 24, en blanc, || 10 || colspan=3 | 10
|-
| align=left | Roues de chariots, à corps de canon || 30 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Roues de chariots, à ridelles & à boulets, || 10 || colspan=3 | 10
|-
| align=left | Roues d’avantrains || 10 || colspan=3 | 8
|-
| align=left | Leviers || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | Coins de mire || 800 || colspan=3 | 500
|-
| align=left | Chapiteaux || 300 || colspan=3 | 300
|-
| align=left | Madriers à plate-forme || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | Planches de sapin || 500 || colspan=3 | 500
|-
| align=center colspan=2 | ''Artifices''. || colspan=3 |
|-
| align=left | Souffre || 2000 l. || colspan=3 | 1000 l.
|-
| align=left | Salpetre || 2500 l. || colspan=3 | 2000 l.
|-
| align=left | Balles à feu || 150 || colspan=3 | 150
|-
| align=left | Fascines goudronnées || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | Huile de térébenth. || 50 l. || colspan=3 | 50 l.
|-
| align=left | Goudron || 200 l. || colspan=3 | 200 l.
|-
| align=left | Caisses d’ustenciles à bombardiers || 1 || colspan=3 | 1
|-
| align=left | Cire préparée pour coëffer les fusées à bombes, || 300 l. || colspan=3 | 300 l.
|-
| align=left | Cire jaune || 100 l. || colspan=3 | 100 l.
|-
| align=left | Barrils de pulverin || 2 || colspan=3 | 2
|-
| align=left | Caisse de composition || 1 || colspan=3 | 1
|-
| align=left | Fer neuf en plat, quarré, & long, || 5000 l. || colspan=3 | 3000 l.
|-
| align=left | Boëtes de fer de toutes sortes || 20000 || colspan=3 | 12000
|-
| align=left | Vieux clous de toutes sortes || 10000 || colspan=3 | 10000
|-
| align=left | Acier || 400 l. || colspan=3 | 300 l.
|-
| align=left | Clous à rouage || 10000 || colspan=3 | 6000
|-
| align=left | Clous à flasques || 15000 || colspan=3 | 10000
|-
| align=left | Clous de toutes sortes || 60000 || colspan=3 | 30000
|-
| align=left | Clous picards || 50000 || colspan=3 | 20000
|-
| align=left | Clous de tonnelier || 10000 || colspan=3 | 8000
|-
| align=left | Clous à écouvillon || 12000 || colspan=3 | 9000
|-
| align=left | Clous de cuivre à lanterne || 200 l. || colspan=3 | 200 l.
|-
| align=center colspan=2 | ''Mesures de fer blanc''. || colspan=3 |
|-
| align=left | de 10 || 200 || colspan=3 | 200
|-
| align=left | de 8 || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | de 6 || 80 || colspan=3 | 80
|-
| align=left | de 4 || 150 || colspan=3 | 150
|-
| align=left | de 3 || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | de 2 || 150 || colspan=3 | 150
|-
| align=left | de 1 || 80 || colspan=3 | 80
|-
| align=left | de demi-livre || 100 || colspan=3 | 100
{| style="text-align:right;font-size:90%;line-height:140%"
|-
| align=left | de deux once || 50 || colspan=3 | 50
|-
| align=left | Entonnoirs de fer blanc || 50 || colspan=3 | 50
|-
| align=left | Fleau avec ses plateaux || 1 || colspan=3 | 1
|-
| align=left colspan=2 | Poids de fonte de 25 liv. || colspan=3 rowspan=6 |
|-
| align=left | Poids de marc || 4
|-
| align=left | de 10 livres || 1
|-
| align=left | de 5 livres || 1
|-
| align=left | Soufflets || 8
|-
| align=left | Enclumes || 8
|-
| align=left | Fer de taules || 288 l. || colspan=3 | 288 l.
|-
| align=left | Feuilles de cuivre, pour pontons, || 9 || colspan=3 | 9
|-
| align=left | Peaux de mouton, pour écouvillons, || 210 || colspan=3 | 210
|-
| align=left | Paniers d’osier || 200 || colspan=3 | 200
|-
| align=left | Hottes d’osier || 300 || colspan=3 | 300
|-
| align=left | Sacs à boulets || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=center colspan=2 | ''Menus achats'' || align=center colspan=3 | ''Menus achats consommés''.
|-
| align=left | Bougies || 1100 l. || colspan=3 | 1100 l.
|-
| align=left | Chandelles || 800 l. || colspan=3 | 808 l.
|-
| align=left | Flambeaux || 144 l. || colspan=3 | 144 l.
|-
| align=left | Vieux-oing || 3100 l. || colspan=3 | 3100 l.
|-
| align=left | Torches à vent || 400 l. || colspan=3 | 400 l.
|-
| align=left | Dix-huit caisses de lanternes à éclairer || 570 || colspan=3 | 570
|-
| align=left | Lunes triangulaires, quarrées, plates, & rondes, || 116 || colspan=3 | 116
|-
| align=left | Petites lunes || 36 || colspan=3 | 36
|-
| align=left | Etaux || 4 || colspan=3 | 4
|-
| align=left | Fil de fer || 100 l. || colspan=3 | 100 l.
|-
| align=left | Fil de laiton || 47 l. || colspan=3 | 47 l.
|-
| align=left | Scies à main || 130 || colspan=3 | 130
|-
| align=left | Grandes scies || 3 || colspan=3 | 3
|-
| align=left | Rapes || 36 || colspan=3 | 36
|-
| align=left | Feuilles de fer blanc || 1200 || colspan=3 | 1200
|-
| align=left | Cricks || 5 || colspan=3 | 5
|-
| align=left | Toile peinte pour mulets || 100 || colspan=3 | 100
|-
| align=left | Toile peinte pour la poudre || 30 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Couvertures de toile cirée || 300 || colspan=3 | 300
|-
| align=left | Poulies de fonte || 32 || colspan=3 | 12
|-
| align=left | Rames de papier à états, fin || 5 || colspan=3 | 5
|-
| align=left | Rames de papier commun à faire gargouches || 52 || colspan=3 | 52
|-
| align=left | Rames de papier à lettre || 6 || colspan=3 | 6
|-
| align=left | Plumes || 200 || colspan=3 | 200
|-
| align=left | Canifs || 12 || colspan=3 | 12
|-
| align=left | Vrilles || 30 || colspan=3 | 30
|-
| align=left | Aiguilles || 500 || colspan=3 | 500
|-
| align=left | Fil à coudre || 20 l. || colspan=3 | 20 l.
|-
| align=left | Huile d’olive, pour les mineurs, || 80 l. || colspan=3 | 80 l.
|-
| align=left | Coton || 180 l. || colspan=3 | 120 l.
|-
| align=left | Lampes à éclairer || 60 || colspan=3 | 60
|-
| align=left | Poudre || style="white-space:nowrap" | 1411200 l. || colspan=3 style="white-space:nowrap" | 1176760 l.
|-
| align=left | Plomb || 150900 l. || colspan=3 | 130507 l.
|-
| align=left | Meche || 41800 || colspan=3 | 18794
|}
Comme dans le tems des sieges pour lesquels on a dressé les états précédens, on ne faisoit point usage des obus, il n’y en est pas fait mention ; mais comme l’on s’en est servi avec succès, au ''siege'' de Maestricht, en 1747, on ne doit point oublier d’en insérer dans le détail des munitions qui concernent les ''sieges. Voyez'' sur tout ce qui concerne ce sujet, & le détail des ''sieges'', notre ''traité d’artillerie'', & celui de l’''attaque des places'', seconde édition. (''Q'')
{{sc|Siege}} ''d’aisance'', s. m. (''Archit''.) c’est la devanture & la lunette d’une aisance.
{{sc|Siege}} ''d’une selle'', (''Manege''.) le ''siege d’une selle''<section end="SIEGE"/>
</div>
</div>
|
Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, Partie II, 1894.djvu/92
|
Toujours, un horizon très restreint, des collines grisâtres, largement ondulées, jetées sur le sol comme un manteau arabe. La vallée de la Medjerda sinuait à leur pied, avec sa rivière au courant jaune, tantôt calme, tantôt torrentueuse, entre les lauriers-roses et les eucalyptus en fleurs.
La contrée est d’un dessin plus tourmenté en cette portion de la Régence qui confine à la Kroumirie. Si le gabarier eût quelque peu voyagé dans le Tyrol, n’était l’altitude plus modeste des montagnes, il aurait pu se croire au milieu des plus sauvages sites d’un territoire alpestre. Mais il n’était pas au Tyrol, il n’était plus en Europe, il s’en éloignait chaque jour davantage. Et alors, les coins de sa bouche se relevaient, — ce qui rendait sa physionomie plus pensive, — et ses gros sourcils s’abaissaient, signe d’inquiétude.
Parfois, le jeune capitaine et lui se regardaient longuement, et ces regards, c’était toute une conversation, qui s’échangeait entre eux à la muette.
Ce matin-là, maître Antifer demanda à son neveu :
« Où arriverons-nous avant la nuit ?...
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 143.djvu/611
|
prend conscience de sa dignité par le remords ou par l’estime de soi, et, se repliant sur elle-même, sonde les abîmes intérieurs qu’elle offre au bonheur véritable, à ce bonheur qui la fuit toujours et l’attire par-delà l’horizon du regard.
A partir et au-dessous de cette région de la poésie pure, s’échelonnent nombre de compositions versifiées qui en participent encore, mais de moins en moins, tout en demeurant, d’ailleurs, éminemment œuvres d’art littéraires par les qualités techniques du vers, s’il est bien fait. Les poèmes didactiques, du moins les plus nobles, tels que ceux où s’essayait André Chénier, s’écartent le moins possible de l’idéal poétique, grâce à l’importance et à la gravité dont leur matière est susceptible. La satire, l’épître, la fable, qui s’accordent aux plus divers tons, admettent des accens élevés, au moins partiellement, mais la familiarité, surtout dans les deux dernières, y est habituelle. La versification française excelle à consacrer indifféremment toutes les pensées, de quelque ordre qu’elles soient, à les rendre mnémoniques par sa frappe indélébile. La Fontaine, Molière, Boileau, Corneille en maint passage de ses tragédies, pour ne citer que les noms les plus célèbres, ont ainsi marqué, pour une durée indéfinie, de solides ou fines maximes, de pénétrantes observations, précieuses pour la conduite ici-bas. Dans la comédie, le dialogue emprunte au vers, en dépit du zèle de nos comédiens à en dissimuler la mesure, une grâce légère et une vive allure qui secondent la verve et favorisent la gaîté. Combien de chansons populaires appropriées aux mœurs naïves sont touchantes ou joyeuses ! Combien d’autres, infiniment moins ingénues, mais mieux composées, sont étincelantes d’esprit et pleines de force comique !
Je ne pousserai pas davantage l’analyse de ce classement. Il suffit à mon objet de l’indiquer : le lecteur le complétera sans peine, aidé par l’ancienne distinction des genres, qui, à vrai dire, va s’effaçant tous les jours, mais n’en répond pas moins à des inspirations d’inégale valeur poétique.
La versification la plus habile, la plus savante, ne suffit donc pas, quelle qu’en soit la vertu, à constituer la poésie proprement dite ; c’est la beauté du sujet, beauté dont j’ai essayé de dégager le principe, qui seule y fait frissonner le souffle du large et des cimes.
<references/>
|
Rocco - Alcibiade enfant à l’école, 1866.djvu/109
|
}}
mon enfant ? évitez par-dessus toute chose,
cette vilaine tricherie. Il faut que le v{{loop|2|{{sp|0.01em|.}}}} soit
modéré, parce que ses excès, en nous privant
de la substance la plus pure, la plus vitale,
nous exténuent, nous dessèchent, nous consument.
„ Souvent ce n’est plus la semence qui en
sort, c’est le meilleur de notre sang ; le cerveau
se distille, les esprits animaux s’évaporent. De
là l’altération des traits, la pâleur livide, et
souvent une mort précipitée. En effet, la nature,
plus attentive à la conservation de l’espèce qu’à
celle de l’individu, concentre tous ses efforts dans
la préparation de la matière génératrice, en
sorte qu’à chaque évacuation de semence, elle
comble le vide par un autre produit semblable
dont elle prend la substance dans le plus pur de
notre sang, travail qui épuise les veines et les
parties les plus importantes et les plus vitales
de notre corps.
„ Quand on commence à se satisfaire avec les
mains, cette pratique ne tarde pas à se changer
en habitude, par la facilité qu’on y trouve. Une
irritation continuelle et incommode rend le vit
<references/>
|
Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/176
|
170 ROKEBY.
tueuse qui accourut à l’abbaye d’Eglistone, et qui remplissait la vaste enceinte de l’église, avec un murmure confus tel que la voix de l’Océan. Je décrirais les différens visages des spectateurs, les uns triomphans, les autres abattus ; ici l’indifférence avec ses regards sans expression ; là l’inquiétude et le tendre intérêt de l’amitié. Je ferais voir ces chevaliers vaincus et désarmés, qui osent à peine se livrer à leur tristesse ; leurs ennemis orgueilleux, dont l’arrogance et le méprisant sourire insultent au malheur ; et le peuple jaloux, qui applaudit à chaque changement de fortune et considère avec joie l’humiliation du mérite et des rangs élevés.
Mais c’est former trop tard un semblable désir. Il ne reste plus qu’à terminer un récit qui touche à sa fin, entraînant avec moi le lecteur et ma muse lassée. Je ressemble au voyageur qui, approchant de sa demeure, voit les ombres du soir descendre dans la plaine, et n’ose plus retarder ses pas ni choisir le sentier le plus agréable parce qu’il est aussi le plus long : il ne peut même plus suspendre sa marche aux lieux où un ombrage champêtre l’invite à respirer le zéphyr qui rafraîchit son front, et à cueillir une fleur sur sa tige.
XXVII.
L’antique abbaye d’Eglistone était dépouillée, profanée et abandonnée aux ruines : le soleil ne venait plus à travers les vitraux peints de toutes couleurs verser la douce lainière de ses rayons sur les riches ornemens de la sculpture gothique, ni dorer l’autel, le pilier et la niche du saint martyr.
La guerre civile s’était fait un jeu du sacrilège dans ces temps d’anarchie. De sombres fanatiques avaient détruit tous les ornemens du culte romain, et les vassaux, ennemis de leurs seigneurs, avaient démoli les tombeaux des Bowes, des Rokeby et des Fitz-Hugues. Aujourd’hui tous les yeux surpris contemplent dans cette enceinte sacrée, un échafaud tendu de noir. Au même lieu où naguère le
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 145.djvu/615
|
Wellington avaient pris sur eux d’agir sans attendre ses ordres, et d’autres avaient intelligemment désobéi à ceux qu’après tant de temps perdu, il s’était décidé à donner. Dans l’après-midi de la veille, le major Normann avait défendu Frasnes, le prince Bernard de Saxe-Weimar s’était porté avec sa brigade de Genappe aux Quatre-Bras, et le général Chassé avait concentré sa division à Fay. Un peu plus tard, Constant Rebecque, chef d’état-major du prince d’Orange, prescrivit, en l’absence de celui-ci, à Collaert de rassembler la cavalerie derrière la Haine, et à Perponcher de se préparer à marcher aux Quatre-Bras. A 11 heures du soir, enfin, le même Rebecque, ne pouvant éviter de transmettre aux divisionnaires l’ordre de Wellington de concentrer tout le corps néerlandais à Nivelles, c’est-à-dire de découvrir la route de Bruxelles, joignit à cet ordre des instructions verbales qui les laissaient libres de ne s’y point conformer. « On ne peut connaître à Bruxelles, disait-il, l’exacte situation des choses. » Perponcher n’hésita pas. Au lieu de maintenir à Nivelles la brigade Bylandt et d’y rappeler la brigade Bernard de Saxe, ainsi que le prescrivait Wellington, il marcha avec Bylandt sur les Quatre-Bras au secours du prince Bernard. Ah ! si Napoléon avait eu comme chef d’état-major un simple Constant Rebecque, et comme lieutenans seulement des Bernard de Saxe et des Perponcher ! Et quelle belle occasion, d’autre part, pour les professeurs de stratégie comme Charras de dénoncer la funeste indécision, la torpeur d’esprit, l’affaiblissement moral de l’Empereur si, la veille d’une bataille. Napoléon était resté dix heures sans concentrer ses troupes, avait ensuite prescrit un mouvement dans une direction opposée à celle de l’ennemi, et avait enfin passé la nuit à parader au bal !
Mais, à la guerre comme au jeu, rien ne prévaut contre la Fortune. Lorsque Wellington, parti de Bruxelles à 6 heures du matin, arriva vers 10 heures aux Quatre-Bras, il y trouva la division Perponcher, quand il aurait dû y trouver l’avant-garde du maréchal Ney. Sa Grâce, paraissant oublier que l’on avait agi à l’encontre de ses ordres, daigna féliciter le général Perponcher sur ces dispositions. Puis, après s’être avancé assez proche de Frasnes pour bien observer les emplacemens des avant-postes français, il dépêcha l’ordre à la division Picton et au corps de Brunswick, arrêtés à Waterloo, de reprendre leur marche, et il écrivit à Blücher que les Quatre-Bras étaient occupés par une
<references/>
|
Reinaud - Mémoire sur le Périple de la mer Érythrée.djvu/54
|
{{tiret2|Sou|rate,}} dans le voisinage, porta un grand coup au port de Barygaze. Cependant, au dix-septième siècle, il rappelait encore ce qu’il avait été au temps du Périple<ref>Voyez le ''Dictionnaire géographique'' de Bruzen de La Martinière.</ref> ! Ce qui a presque achevé sa ruine, c’est le grand développement que le port de Rombay a pris entre les mains des Anglais.
L’auteur du Périple s’est, en général, borné aux choses qui intéressaient le commerce. S’il a fait une exception à la loi qu’il s’était imposée, c’est en faveur des pays qui rappelaient le grand nom d’Alexandre. C’est ainsi sans doute qu’il faut expliquer le silence qu’il a gardé au sujet de la vallée du Gange et du rôle que commençait alors à jouer l’empire de Canoge. Cet empire avait acquis une sorte de suprématie sur les autres principautés de l’Inde, et cette prééminence se maintint pendant presque tout le temps de la domination des rois sassanides en Perse<ref>Voyez mon Mémoire sur l’Inde, p. 103.</ref>.
L’auteur du Périple, ayant terminé les affaires qui l’avaient appelé à Barygaze, reprend sa course vers le midi et s’arrête au port de Muziris, dans la Limyrice. Au bout d’un certain nombre de jours, il se remet en mer et il arrive à Nelcynda ou Nelcanidon, dans les États d’un roi nommé ''Parution''<ref>Page 295 de l’édition imprimée. Ptolémée décline le mot ''Pandion''. Le texte grec, liv. VII, ch. I, n° 11 et 89, porte Πανδιόνος κώρα et Πανδιόνων Μεσόγειοι.</ref>, lequel était maître de tout le midi de la presqu’île, jusqu’au cap Co-morin. Ce qu’il dit à ce sujet s’accorde en général avec ce que nous avait déjà appris Pline. On peut induire des deux récits que le nom du roi de la Limyrice, qui est appelé ''Celebrotha'', ou, comme porte le Périple, ''Keprobothre'', de même que le nom de Pandion, sont moins des noms d’individus que des noms de dynastie. Je ne suis pas en état de rétablir le mot ''Celebrotha''.
<references/>
|
Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/337
|
blanche de l’intrigant. Une des principales vertus est de bien conduire ses affaires, « afin que votre vie soit honorable aux yeux des gens du dehors et que vous
ne manquiez de rien<ref>I Thess., {{sc|iv}}, 11-12. Comp. Col., {{sc|iv}}, 5.</ref>. » Quelques membres de l’Église, dont saint Paul a entendu dire « qu’ils ne travaillent pas, ou qu’ils font autre chose que leurs propres affaires, » sont sévèrement repris<ref>II Thess., {{sc|iii}}, 11-12.</ref>. Cette alliance de bon sens pratique et d’illuminisme ne doit jamais surprendre. La race anglaise, en Europe
et en Amérique, ne nous offre-t-elle pas le même contraste : si pleine de bon sens dans les choses de la terre, si absurde dans les choses du ciel ? Le quakerisme, de même, commença par être un tissu d’absurdités jusqu’au jour où, par l’influence de Guillaume Penn, il devint quelque chose de pratiquement grand et fécond.
Les dons surnaturels du Saint-Esprit, tels que la prophétie, n’étaient pas négligés<ref>I Thess., {{sc|v}}, 19-21.</ref>. Mais on voit bien que, dans les Églises de Grèce, composées de non-juifs, ces exercices bizarres n’avaient plus beaucoup de sens, et on devine qu’ils tomberont bientôt en désuétude. La discipline chrétienne tournait à une sorte
de piété déiste, consistant à servir le vrai Dieu, à
<references/>
|
Geoffroy - Napoléon et la conquête du monde, 1836.djvu/412
|
{{tiret2|descen|daient}} jusqu’au sol, recouvertes de velours, d’or et de pierres précieuses.
Pour soutenir la toiture de toile qui recouvrait la tente dans une étendue aussi grande, on avait eu recours à des moyens nouveaux. Des ballons remplis de gaz hydrogène étaient répartis et fixés sur divers points, et leurs forces ascendantes, habilement calculées, soulevaient les étoffes et les soutenaient dans les airs avec une merveilleuse harmonie.
Des trônes, des amphithéâtres, des ornements de la plus grande somptuosité étaient disposés dans l’intérieur de cette tente ; les velours, les marbres, les métaux précieux, les pierreries, les fleurs les plus rares venaient chaque jour s’y accumuler pour préparer dignement le temple à la solennité encore inconnue.
Cependant, tous les peuples et tous les rois y semblaient conviés et arrivaient en foule. Paris regorgeait d’étrangers déployant dans la capitale de l’Europe les costumes et les usages de tous les pays du globe.
L’empereur, qui était de retour depuis le 20 juin, n’avait pas paru depuis cette époque ; on le disait enfermé dans ses cabinets avec les rois et les ministres, et absorbé dans les travaux les plus importants.
{{brn|5}}
{{---}}
<br /><br />
<references/>
|
Duret - Voyage en Asie.djvu/356
|
sur le territoire de Jodpour qui n’ait son sabre à la ceinture et son bouclier dans le dos. Les gens comme il faut, allant à cheval, ont en plus un fusil ou quelque vieille paire de pistolets. Tout ce monde n’en est pas moins fort pacifique et fort poli, nous saluant du plus loin avec de grandes marques de respect.
Contrairement aux Hindous de la vallée du Gange, qui ne conservent que la moustache, les Rajpouts, au milieu desquels nous nous trouvons, portent toute la barbe. Ils la dressent d’une façon très-particulière, rebroussée de chaque côté vers les oreilles.
Cela leur donne l’air ébouriffé. Ce sont gens dévots,
fort attachés à la religion brahmanique ; ils ont au cou des médailles, et nous recommençons à voir presque tous les fronts marqués de divers signes religieux tracés avec de la bouse de vache. Partout aussi on trouve des chapelles et l’étalage à profusion des emblèmes assez peu décents du culte de Siva.
La route que nous avons prise nous tient éloignés
de Jodpour, la capitale de l’État, mais nous passons
à Pali, qui est la ville la plus importante après
la capitale, et que le dictionnaire géographique
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 47.djvu/246
|
Ramskein, et seigneur d’Angeot. — Il parait que l’origine des Dietrich serait plutôt lorraine et qu’au XVIe siècle, celui qui fonda cette famille s’appelait Didier. Il était né à Saint-Nicolas en 1549 et s’était établi à Strasbourg en changeant son nom de Didier contre celui de Dietrich, de forme plus alsacienne. Ce Lorrain, transformé en Alsacien, avait épousé la fille de l’Ammeister Heller. — Grâce à une fortune loyalement acquise, Jean de Dietrich était devenu le particulier le plus riche de la province d’Alsace. A ses titres nobiliaires il avait ajouté de hautes fonctions, comme celles de secrétaire des Suisses et Grisons, de Commissaire général des Mines, Foyers et Hauts Fourneaux de France. Il devint échevin de la Tribu des Drapiers en 1745, membre du grand Sénat de Strasbourg en 1747 et du Comité les XV en 1756 ; puis Ammeister-Régent, comme son bisaïeul Dominique Dietrich et enfin Stattmeister honoraire en 1762. Il eut de Dorothée Hermanni trois fils. Le premier s’appelait Jean comme son père et fut officier de cavalerie au régiment Royal-Alsace ; le second s’appelait Philippe-Frédéric ; c’est celui-là même qui est l’objet de ce travail ; le troisième, Henri, mourut en bas-âge.
Philippe-Frédéric montra, dès sa jeunesse, plus de goût pour le travail et de dispositions savantes que l’aîné et, par-là même, s’attira de son père une affection toute particulière. Ce fut sur lui, en effet, que Jean de Dietrich plaça toutes ses espérances pour la continuation des traditions familiales, tant pour le nom et la dignité que pour les études et les affaires. Il le fit voyager en Italie, en Hongrie, en Allemagne, en France, en Angleterre et porta son attention laborieuse sur les mines et usines de divers pays, notamment des Pyrénées et de la Lorraine, sur des travaux de chimie, de physique, d’histoire naturelle et d’économie politique. Ces études mirent le jeune savant en relations avec Turgot et Condorcet et l’amenèrent à être élu correspondant, puis membre de l’Académie des Sciences.
Frédéric était luthérien de religion, mais non de pratique, et l’un de ses meilleurs biographes, Louis Spach, regrette que, disciple de J.-J. Rousseau et pénétré des idées du ''Vicaire Savoyard'', « il n’eût pas tout à fait compris la nécessité de cette régénération intime qui est, de nos jours, le fond de toutes les consciences délicates, de tous les esprits élevés et de toutes les natures droites, à quelque condition sociale et à quelque
<references/>
|
Payen-Chevallier - Traité de la pomme de terre, 1826.djvu/60
|
il n'en est pas ainsi : les pommes de terre venues dans des terrains humides, pendant une saison pluvieuse, contiennent quelquefois une si grande proportion d'eau, que celle-ci suffît pour réduire en pâte toute la fécule : on dit de ces pommes de terre qu'elles ne sont pas farineuses ; cuites à l'eau, leur consistance pâteuse les rend plus difficiles à pénétrer par l'assaisonnement que l'on y ajoute; elles conservent un goût fade. On reconnaîtra quelquefois aussi, surtout parmi celles dont la surface sous l'épiderme est colorée en rouge, dont les yeux sont fortement prononcés, des pommes de terre qui ont un goût acre désagréable, dû à un principe volatil; dans ces deux cas, la vapeur fait perdre aux pommes de terre la plus grande partie de leur goût acre, et l'on évite leur formé pâteuse, en les faisant cuire sans eau dans un vase fermé. La figure 6 de la planche 2 indique une sorte de marmite A, propre à cet usage ; elle est en fonte peu épaisse, de forme elliptique ; son couvercle B de même matière, et que l'on appelle ordinairement une cloche, la recouvre en l'enveloppant sur toute sa hauteur ; et reposant sur un rebord G, la ferme presque hermétiquement. Lorsque la marmite est remplie de tubercules, on pose le couvercle, on amasse autour des cendres chaudes,mêlées de braise incandescente; la température s'élève graduellement dans l'intérieur de cette marmite, les pommes de terre perdent une partie de leur eau de végétation qui se réduit en vapeur, et entraîne l'huile essentielle qui causait le goût acre ; la vapeur entretient une température uniforme dans toute la masse; la cuisson se fait très - également, et les pommes de terre devenues moins aqueuses ne sont pas réduites en pâte, et ont une saveur plus agréable.
Ce mode de cuisson, bien préférable surtout pour les tubercules de qualités inférieures, s'applique avec avantage aussi aux pommes de terre de bonne qualité; il produit enfin les bons effets de la cuisson sous la cendre des tubercules à nu,
<references/>
|
Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/304
|
PETITE BIBLIOTHÈQUE LITTÉRAIRE
(suïeuns CDHTEHPOILAIHS)
: ur 1- -1
Volumes peti : in-12. (format des Elzévirs)
imprimés sur papier vélin teinté
Chaque volume : 5 ou ófr.
Chngue œuvre est ornée d’1m portroi ! grflwš ci fmuforte
BARBE ? |J Îa-UREVI-LLÎ. L’E11.1or.*: eI¿e. 1 vol....... 6
— —- Une Vieille Maitresse. 2 vol.... IO
- —- I.eC11¢1 : r1Z£er des Toucher. 1 vol... 6
- - Un Prärn marié. 2 vol.... io
6 Eaux-fortes dessinées et gravées par Fstlx Buuor
Epour illustrer le CÎJEUQII-UT des Touches. Prix.... to
7 a.u11~fortes dessinées et gravées par Feux Honor
pour illustrer Pfirisorceiee. Prix........ io
11 Eaux-fortes dessinées et ravées par FÉ1.1x BU !-[OT
pour illustrer in Vieille Îlaitresse. Prix..... 1 ;
THÊUDUIIE ne Ba1w11.1.11 I¢2 vNespmssimms. 1 vol.... 5
— - Les. S’taIu¢: r1’1'.-ss. 1 vol.. . g
—›- —- Ode : furrornbulesgues. 1 sol.. 6
—~ - Le Song de la coupe. 1 vol... 6
— — Les Exilés. 1 vol...... 6
— Öccirlemfaies, 1 fu-I. . 6
— - Les Corilrrides. 1 lol...... 6
— — Théâtre. 1 vol....... 6
Auousrs Bsizeux. Poésies 1 Moria. — Îiîrlm Amor, —1-hmq
Brrir. 1 vol................ 5
- Les Bromus. 1 vol........ 5
— -~ Hi :1tu1’re.1 rustiques. 2 vol....... IOCH.L’rE11U1s1w1111J. Alain, René, le Dsrrzicr AZ›e11ce1*oge, avec
notices et notes par Auarois Fesses. 1 vol... 6
ÀNDRÉ C11È1~111111. Poésies complètes. 3 roi, .... 18
F1=121 :ço1s Corses. Poésies (1864-1869). 1 vol... 5
— - Poésies (1869-18’ ;4}. 1 vol. 5
— — Poésies l.18’]4-1878). 1 vol... 5
— — Théâtre (1869-1872). 1 vol..... 5
— —- Thèå1re(187.z-18’,18) 1 vol..... 5
Psui.-Louis COU111E1=1. Pamphlets et lettres politiques, avec
notice et noies, par M. 11. ne Csussans. 1 vol. 6
Gusïave FLAUBERT..Modmrre Emery, 2 volunws... to
— - SaZum :11i !5, 2 rol...... 10
7 Eaux-fortes dessinées et gravées par B~0IL’1H pour
illustrer ilfodarrre Bovary. Prix...... X2
Lson Goz1...111. Aris1¢’a'¢ Froùsurt. 1 volume..... 6
— — Polydor : Moro : nin, etc. 1 vol.. 6
— - Nouvelles. 1 vol........ 6
VICTOR HUGO. Poésies. 10 vol. ; chaque volume.. 6
— Théâtre. 4 vol. ; chaque volume.... 6
PARIS. — CH. U11s11~1GE.11, imprimeur, rue du Bac, 81.
ir
fr
fr
fr
fr.
fr,
fr
fr
fr
fr.
fr
fr.
fr.
fr
fr
fr.
fr
fr
fr.
fr.
fr
fr
fr
ir
fr
fr
fr
fr
fr
fr
fr
fr
fr.
fr
<references/>
|
Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/121
|
je m’en fusse plus vite débarrassé dans un sens ou
dans l’autre.
— Alors, vous en voulez un peu à vos amis d’avoir,
agi pour vous comme ils agiraient pour eux-mêmes ?
— Non pas ! La médecine trouvera peu à peu le
moyen de tout guérir sans rien tuer en nous. Il faut
bien qu’elle expérimente sur nous, et que nous nous
soumettions à payer ses tâtonnements. Nous lui appartenons
à nos risques et périls, comme nos volontés,
nos intelligences et notre dévouement appartiennent à
tout progrès. Je me suis dit cela en voyant le médecin
près de moi. J’ai pensé à la mort, dont je n’avais pas
encore eu l’avertissement dans mon sommeil, et je me
suis dit : « Allons ! voici le creuset ! j’en {{corr|sortitai|sortirai}} or ou
poussière. » J’eusse mieux aimé me passer de cela et
n’avoir affaire qu’à dame nature, qui est plus maligne
qu’on ne croit ; mais il ne faut ni vivre ni mourir en
égoïste, et nous allons voir l’effet des poisons. Si ce
jeune médecin me tue, il saura qu’il faut ménager la
dose à un autre, et ses autres malades le trouveront
plus prudent !
» Savez-vous, dit-il encore après une pause, que je
crois avoir un peu vu, pendant quelques instants, de
l’autre côté de la colline de la vie ? Vous me demanderez
comme c’était fait par là ? Mon Dieu, c’était fait
comme mon propre esprit voulait que ce fût fait, et
ce sera vraisemblablement ainsi, car nos instincts sont
des révélations. Chacun rêve son paradis à sa manière,
c’est son droit. Le seul droit qu’il n’ait pas, c’est de
vouloir imposer aux autres la forme que sa vie présente
imprime d’avance à sa vie future. Chacun va où
il veut aller, car, si la mort n’était pas la délivrance,
elle ne serait pas un bien. Dieu merci, elle est un bien
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/229
|
de mitrailleuses s’établissent à Dixmude et plus en arrière, avec une grand’garde sur la route de Beerst. Le groupe d’artillerie Pontus est mis en batterie au Sud de la chapelle Notre-Dame du Bon Secours, 1 kilomètre à l’Est de Dixmude où j’établis mon poste de commandement.
Dans l’après-midi, je me rends compte que notre ligne d’avant-poste a un développement trop grand pour 2 bataillons. Je pousse donc le bataillon Rabot (3/1) sur Eessen, en soutien, et je fais organiser la lisière Est de Dixmude par le bataillon de Sainte-Marie (1/1) et une compagnie du génie belge. Une fois ces mouvements effectués, ma brigade a donc deux bataillons et un groupe d’artillerie en ligne, deux bataillons en soutien, et deux bataillons en réserve.
Les conditions physiques du terrain sont les suivantes : La ville de Dixmude, dont la grande place est à la cote 8, est bâtie sur la rive Est de l’Yser, à l’extrémité Nord-Ouest d’un éperon qui vient du Sud-Est, et qui forme, en somme, le terminus de la terre ferme. Dans la direction de Clercken, qui est l’arête de cet éperon, si l’on peut ainsi parler, le terrain monte à la cote 30 en deux kilomètres, pour atteindre la cote 40 aux environs de Clercken. Dans tous les autres azimuts, l’éperon est bordé par le polder dont les drains principaux sont le canal de Vladsloo qui monte vers le Nord, le canal d’Handzaeme qui aboutit à, l’Yser, et l’Yser lui-même qui est canalisé avec chemin de halage en digue sur la rive Ouest. A l’Ouest de l’Yser, le polder s’étend à perte de vue, à la cote 4 en général, et ses routes ou voies ferrées sont toutes en remblai. Le polder est sillonné dans tous les sens par une infinité de canaux (vaarts) grands ou petits, et de fossés d’eau (vliets) qui en assurent le drainage, et qui rendent la circulation des troupes très difficile, si les routes et chemins de terre ou d’herbe sont battus par l’artillerie. Il résulte de cela que celui qui possède l’éperon Clercken-Dixmude se procure des avantages très sérieux sur un adversaire qui n’occupe que le polder. D’une part, il peut se protéger en s’enterrant dans des tranchées aussi profondes qu’il le veut, et il peut aussi dissimuler facilement son artillerie. D’autre part, il voit tout ce qui se passe dans le polder, où l’adversaire ne peut rien cacher, car il ne peut creuser la terre sans rencontrer une nappe d’eau a 1 mètre de profondeur au maximum, quand le niveau général de la nappe souterraine est normal.
<references/>
|
Basset - Contes arabes, 1883.djvu/71
|
et celui-ci fit de l’enfant son héritier présomptif et son futur successeur. Des années
passèrent : le prince mourut et fut remplacé
par le jeune homme qui s’assit sur le trône
et vit prospérer ses affaires.
Pendant ce temps, ses parents parcouraient
à sa recherche et à celle de son frère toutes
les îles de la mer, dans l’espoir qu’ils auraient été jetés sur l’une d’elles, mais ils ne
trouvaient pas de renseignements. Un jour
que le père était dans un marché, il aperçut
un crieur public, tenant un jeune homme
qu’il voulait vendre. « Je l’achèterai, se dit-il,
peut-être me consolera-t-il de la perte de
mon fils. » — Il en fit l’acquisition et l’emmena
dans sa maison. Quand sa femme l’aperçut,
elle poussa un cri : « Par Dieu ! c’est mon
fils. » Les parents se réjouirent fort et lui
firent des questions sur son frère. « La mer
nous a séparés, répondit-il, je ne sais ce qu’il
est devenu. » Ils se consolèrent, et là-dessus
bien des années se passèrent.
Ils habitaient dans le pays où régnait leur
autre fils. Quand l’enfant retrouvé fut grand,
son père lui donna des marchandises pour
voyager. Il entra dans la ville où résidait son
frère : celui-ci, informé qu’un trafiquant
<references/>
|
Luzel - Soniou Breiz Izel vol 1 1890.djvu/203
|
<poem>
D’entendre votre voix je serai ravi,
Comme si je vous avais, vous avais épousée.
Quiconque est sur la terre,
Et n’est destiné à trouver sa compagne,
Il ne lui reste plus qu’à imiter ces gens-là,
Et il sera un jour couronné dans le ciel,
</poem>
{{droite|Jannot {{sc|Morvan}}. — ''Rospes''.}}
{{centré|{{taille|L’AVENUE DES ROMARINS|130}}}}
<br />
<poem>
— Bonjour à vous, ma douce jolie !
— Et à vous aussi, jeune clerc !
— Me voici venu vous voir,
Si je ne vous aimais, je ne serais pas (venu).
— Si vous aimez, aimez toujours,
Si elle est ici, celle que vous aimez.
— C’est dans cet espoir-là que je vis :
Elle est ici, celle que j’aime.
Quand je passai (devant) la petite porte,
Vous chantiez et vous faisiez du feu ;
Vous chantiez et vous faisiez du feu,
Vous aviez beau m’entendre, vous ne faisiez cas.
— Si vous aviez voulu dire (que vous étiez là),
Je vous aurais ouvert la porte.
— Moi, j’ai une maison et un courtil,
Un tas de fagots, à l’entrée de ma cour ;
Étang et fontaine j’ai aussi,
Il ne me manque plus qu’une fille jolie.
— Si c’est une fille jolie qu’il vous faut,
Ce n’est pas moi qui puis vous convenir :
Moi, je suis par Dieu privée
De gentillesse et de beauté ;</poem><section end="debut" />
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 47.djvu/911
|
tous les déplacements de valeurs. À chaque passage d’argent, l’Etat percevrait un péage ; n’est-ce pas son droit, puisqu’il est pour ainsi dire invisible et présent dans chacune de ces transactions qui ne tirent leur force que de l’armature légale, de l’appareil judiciaire, de l’organisation, en un mot, du corps social ? Pierre qui route n’amasse pas mousse : l’argent qui circule apporterait au moins des recettes au Trésor. Et des recettes considérables : on calcule que le montant total des paiements approche en France de 400 milliards par an. Associé à l’activité des transactions, le Trésor verrait ainsi ses rentrées suivre pas à pas les progrès de la richesse dans le pays. Sans doute, des distinctions s’imposeraient. Sous ce terme de transactions se mêlent toutes sortes d’opérations dont la portée économique est aussi différente que le caractère légal, et qu’on ne saurait mettre sur le même pied devant l’impôt. Elles peuvent être civiles, ou commerciales ; tantôt elles résulteront de contrats, tantôt elles représenteront un paiement au sens juridique, une extinction de dette ; capitaux ou revenus, ventes en gros ou au détail, matières premières ou produits ouvrés, leur objet peut varier à l’infini : il importerait que tout cela ne fut pas confondu, fiscalement parlant. C’est assez dire que l’idée fort séduisante d’imposer les transactions, ou même seulement les dépenses, n’est guère facile à mettre on pratique.
C’est au reste ce que montre l’expérience. Nous disions qu’elle est nouvelle ? Oui, dans notre monde nouveau. Mais comme toutes les idées justes, on en retrouve l’origine jusque dans les temps très anciens. Excusons-nous du pédantisme : jusque dans l’Égypte des Ptolémées. Au temps d’Épiphane et de Philométor, tout achat, toute vente subissait en Égypte une taxe ({{lang|grc|Τέλος ὠνῆς}}) du vingtième, plus tard du dixième. Voici même un fait curieux. Comme les droits de succession, — il y en avait déjà ! — étaient d’un taux plus fort que la taxe sur les achats et ventes, on cherchait à échapper par celle-ci à ceux-là ; ainsi lit-on dans un vieux texte qu’IHrus Choachyle des Memnonies vendit, à soixante-dix ans, ses propriétés à ses enfants, sa maison étant réservée à sa fille Tagès, le tout pour la somme minime de deux talents : les fraudes successorales ne datent pas d’hier ! — De la terre des Lagides, l’idée passa à Rome ; on sait que l’Égypte fut pour bien des choses l’école de César, comme l’Inde avait été celle d’Alexandre ; d’ailleurs, un
<references/>
|
Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/410
|
que l’on nomme le Club de la Révolution ; elle se tient chaque soir dans la même salle où fut formée la fameuse ligue sous le règne de Henri III, et ils sont si nombreux que toutes les propositions sont discutées ici avant d’être portées à l’Assemblée nationale. J’ai rendu visite ce matin à plusieurs personnes, toutes très dévouées à ce parti et je leur ai dit que ceci ressemblait trop à une junte parisienne gouvernant toute la France, pour ne pas devenir à la longue impopulaire et dangereux. Il m’a été répondu que l’ascendant que Paris s’était arrogé était absolument nécessaire pour la sûreté de la nation entière ; que si rien ne se faisait que par le consentement préalable de tous, on perdrait les plus précieuses occasions, et l’Assemblée serait constamment exposée à une contre-révolution. On avouait cependant que cela faisait naître de grandes jalousies, surtout à Versailles, où ( ajoutait-on ) se trouvent sans doute les complots qui ont la personne du roi pour objet.
Il y a là des émeutes fréquentes, sous prétexte de la cherté du pain, et de tels mouvements sont certainement très dangereux, car ils ne peuvent éclater si près de Paris sans que le parti aristocratique de l’ancien gouvernement ne s’efforce d’en prendre avantage pour les tourner vers un but bien différent de celui qu’elles s’étaient d’abord proposé. Je remarquai dans toutes les conversations combien est générale la croyance des menées du vieux parti pour mettre le roi en liberté. On semble presque persuadé que la révolution ne sera entièrement consommée que par l’une de ces tentatives. Il est curieux de voir l’opinion déclarer que, si l’une d’elles offrait la moindre apparence de succès, le roi la payerait immanquablement de sa vie ; le caractère national est si changé, non seulement sous le rapport
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/904
|
plus raffiné de s’égayer ainsi aux dépens du prochain.
Mais Carmontelle était bien trop avisé pour appuyer le trait
et risquer d’irriter ses victimes. Ses caricatures ne sont jamais
méchantes ni scandaleuses, mais, au contraire, badines et souriantes. Il eût fallu vraiment se montrer d’humeur bien acariâtre pour en garder rancune. Ne cherchons donc pas dans ces courtes piécettes, au dialogue heureusement coupé, frappé au
coin d’une mondanité superlative, l’amertume révoltée d’un
Beaumarchais, ni même ce goût de « rosser sur autrui, » comme
dit M. Maurice Donnay, qu’ont porté à sa perfection les auteurs
de notre Théâtre libre. Carmontelle n’a pas davantage la hardiesse ni l’ampleur d’un Théodore Leclercq, dans la satire morale et politique. Il est de son époque et sait conserver ses distances. Ses ''Proverbes'' gardent le ton d’un galant marivaudage
de Cour, d’un babil spirituel sur les jolis rien du cœur.
Il les mettait en scène lui-même et fort soigneusement, surveillant les répétitions, dirigeant les acteurs et se fâchant très
fort, affirme le baron de Frénilly, lorsqu’on lui massacrait son
texte. Il fallait apprendre sa prose aussi religieusement que les
vers de Racine. Par prudence aussi, il se réservait les rôles
ingrats, ceux des maris bernés, des amoureux hors d’âge, des
Cassandre et des Pantalon, à la fois ridicules, avares et jaloux,
dont eût pu s’effaroucher la susceptibilité des nobles interprètes.
Mme de Genlis affirme sa supériorité dans cette sorte d’emploi.
Pour donner une idée de sa « manière » je vais résumer
ici l’un de ses proverbes les meilleurs : ''le Distrait'' qui a eu
l’honneur d’inspirer Alfred de Musset et dont le poète des ''Nuits''
s’est même si bien souvenu qu’il en a transcrit des scènes
entières sans y changer un mot, dans ''On ne saurait penser à tout''.
''Præsens abest'', a dit énergiquement Térence, nous sommes
dans l’hôtel d’une jeune veuve, la comtesse de Belle-Roche.
Plus hurluberlu encore que Ménalque ou le Léandre de
Regnard, le marquis de Marière, — le Valberg de Musset, — y
est entré, se figurant bonnement aller aux Tuileries. Il est fort
épris de la comtesse et sa passion lui brouille l’entendement.
Un solliciteur, le chevalier de Saint-Léger, l’accompagne :
LE CHEVALIER, ''suivant le marquis'', — Mais, marquis, pourquoi dites-vous que vous voulez vous promener aux Tuileries et me faites-vous pénétrer ici ?
<references/>
|
Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/39
|
Il tenait sous son bras gauche un trébuchet à deux compartiments ; dans le compartiment supérieur, un pape empaillé était fixé dans l’attitude du combat ; dans le compartiment d’en bas, deux prisonniers s’agitaient dans tous les sens, éperdus de surprise et de colère.
Démon ôta son chapeau, dit bonjour à son père, sa mère, son grand-père, et courut a Chant-d’Oisel ; il posa son trébuchet sur le plancher, essuya rapidement son visage avec son mouchoir, et serra sa sœur dans ses bras. Mme Saint-Ybars lui dit de venir près d’elle.
« Quel enfant, mon Dieu ! s’écria-t-elle ; te voici dans un bel état. Mais tu dois mourir de faim. Dire qu’il est parti depuis huit heures du matin ! Tu ne peux donc pas rester à la maison.
« Mais, maman, répondit l’enfant, je ne suis pas une petite fille, moi, pour rester tranquille à la maison.
« Ah ! oui, voilà ton grand mot, ton cheval de bataille, dit Mme Saint-Ybars ; tu ne veux, à aucun prix, avoir l’air d’une petite fille. Allons, va te laver et changer d’habits, pour que ton père te présente à ton nouveau professeur. »
Démon ouvrit de grands yeux, et regarda tout autour de la table.
« Madame, je vous en prie, dit Pélasge en se levant, laissez M. Démon venir près de moi tel qu’il est. »
Démon, honteux de l’état dans lequel était toute sa personne, s’approcha timidement ; Pélasge alla à sa rencontre, et lui prit affectueusement la main. La physionomie de l’enfant changea subitement, elle devint douce et pensive. Pélasge sentit la petite main qu’il tenait serrer la sienne ; Démon et lui se regardèrent et sourirent ; sans se parler, ils se disaient dans le langage mystérieux de la sympathie : « Nous serons amis. » Ce début affectueux ne fut pas du goût de M. Héhé. Il eût bien voulu dire une méchanceté : mais n’en trouvant pas d’assez piquante, il se contenta de se renverser sur sa chaise, en prenant l’air le plus sarcastique possible. Mlle Pulchérie vint à son secours. Bon ou mauvais, elle trouvait toujours un mot à répondre ; il est
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 65.djvu/159
|
mais s’il en mangeait, ce n’était que fort peu ; d’une poire ou d’une pomme, par exemple, il n’en prenait qu’un quartier ; du raisin, qu’un petit grappillon. Ce qu’il aimait beaucoup, c’étaient les amandes fraîches. Il en était tellement friand, qu’il mangeait presque toute l’assiettée. Il aimait aussi les gaufres roulées, dans lesquelles on avait mis un peu de crème. Deux ou trois pastilles étaient tout ce qu’il prenait de la sucrerie. Après ses repas, déjeuner ou diner, on lui donnait un peu de café, dont il laissait souvent une bonne partie. Jamais de liqueurs. Étant à bord du ''Northumberland'', à la table de l’amiral, chaque jour, au diner, on lui offrait un petit verre d’une liqueur quelconque ; rarement il y portait les lèvres ; il se plaisait seulement à en aspirer le parfum.
Sa nourriture avait été à Paris ce qu’elle était à Sainte-Hélène ; mais ici manquaient la qualité, la variété des mets et leur recherche. Ce dont il se plaignait souvent, c’était de ne pas trouver de viande tendre. Sa boisson à Sainte-Hélène était du claret (Bordeaux) ; en France, elle avait été du chambertin. Il buvait rarement sa demi-bouteille et toujours mettant autant d’eau que de vin. Presque jamais de vins fins. Quelquefois, dans la journée, il buvait un verre de vin de Champagne, mais jamais sans y joindre pour le moins autant d’eau ; c’était une limonade. Le temps employé à ses repas n’était guère plus de quinze ou vingt minutes ; mais, à Sainte-Hélène, si le temps était mauvais, il faisait durer le dessert pendant assez longtemps, en s’amusant à lire à haute voix un acte d’une comédie, d’une tragédie ou quelque pièce de vers ou toute autre chose.
Après le départ de M. de Las Cases et du général Gourgaud, l’Empereur aimait assez à prendre son déjeuner en plein air dans un de ses jardins, tantôt d’un côté, tantôt d’un autre, en compagnie du général Montholon et quelquefois aussi du Grand-Maréchal, quand celui-ci était appelé ou venait voir l’Empereur.
Ordinairement, vers les cinq heures, cinq heures et demie, six heures du matin, l’Empereur sonnait le valet de chambre de service, faisait tirer les rideaux de ses fenêtres et ouvrir ses persiennes. « Quel temps fait-il ? — Sire, il fait beau. — Donne-moi ma robe de chambre, mon pantalon. » On lui passait l’un et l’autre et on lui chaussait ses pantoufles. « Ouvre les portes, les fenêtres, disait-il ; laisse entrer l’air que Dieu a fait. » C’était une phrase dont il se servait quand il était de
<references/>
|
Clausewitz - Théorie de la grande guerre, I.djvu/140
|
{{T3|{{sc|des significations diverses du combat.}}|CHAPITRE {{rom-maj|V}}.}}
Bien que dans la forme absolue que nous venons de lui reconnaître le combat représente assez exactement l’image réduite de toute la guerre, il n’en constitue cependant que l’élément essentiel, et comme tel se tient nécessairement en rapports avec les autres éléments dont elle se compose dans son entier. Nous allons maintenant procéder à l’étude de ces rapports et débuter, dans le présent chapitre, par la recherche de la signification immédiate qu’un combat peut avoir.
La guerre n’étant, en somme, qu’un acte de destruction réciproque, le plus naturel semble être de s’y représenter chacun des deux adversaires comme agissant et manœuvrant incessamment de façon à réaliser la solution d’un coup, par le choc unique de toutes ses forces réunies en une seule grande masse contre la totalité des forces de l’ennemi. Cette idée a certainement beaucoup de vrai, et il semble très salutaire, ne s’en écartant pas en général, de ne considérer tout d’abord les petits combats que comme les préludes ou les compléments des grands. La chose n’est cependant jamais très facile à régler.
La multiplicité des engagements résulte nécessairement du fractionnement des forces ; ce ne sera donc
<references/>
{{rom|i}}. {{FlotteADroite|9|marge=10%}}
|
Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 9.djvu/19
|
{{nr||SIEYES.|15}}— Il avait en effet résolu le problème pour lui le plus difficile de ce temps, celui de ne pas périr.
Après le 9{{lié}}thermidor, il fut l’un des chefs du parti légal et modéré de la convention. Il proposa et il obtint la rentrée des girondins proscrits. Voulant mettre désormais l’assemblée à l’abri des factions extérieures, il fit adopter la loi martiale contre les émeutes et désigner la ville de Châlons-sur-Marne pour son lieu de refuge et de réunion, si l’on attentait encore à sa liberté. Nommé président de la convention et membre du nouveau comité de salut public, il coopéra aux premières ébauches de pacification intérieure et aux premiers traités que la révolution française négocia avec les vieux états de l’Europe résignés à son existence et convaincus par ses victoires. Il alla lui-même en Hollande conclure un traité d’alliance qui fut signé à la quatrième conférence. Les traités de Bâle avec la Prusse et avec l’Espagne, en 1795, auxquels Sieyes prit une fort grande part comme l’un des principaux chefs du gouvernement, détachèrent ces deux puissances de la coalition européenne. La révolution française consacra par les traités ce qu’elle avait acquis par l’épée, le droit de vivre et d’être grande, son existence et ses conquêtes.
Le but que paraît s’être proposé à cette époque Sieyes fut la pacification et la grandeur de son pays. Il ne songea ni à le constituer, ni à le régir. En effet, appelé à préparer la constitution directoriale de l’an{{lié}}{{rom-maj|iii|3}}, il ne contribua point à sa rédaction. Nommé l’un des cinq directeurs, il déclina cette part de souveraineté. Il ne consentit donc à être ni législateur, ni gouvernant, et il attendit un moment plus favorable pour ses idées et pour son autorité. Il rentra volontairement dans l’inaction.
Ce fut à cette époque que l’un de ses compatriotes du département du Var, l’abbé Poulle, se présenta chez lui et lui tira un coup de pistolet à bout portant. Une balle lui fracassa le poignet, une autre lui effleura la poitrine. Il montra beaucoup de sang-froid. Appelé en témoignage, et voyant à l’audience que les penchans des juges étaient pour l’accusé, de retour chez lui il dit spirituellement à son portier : « Si Poulle revient, vous lui direz que je n’y suis pas. »
Quelque temps après, l’occasion de consolider et d’étendre l’œuvre pacificatrice à laquelle il avait travaillé vers la fin de la {{tiret|con|vention}}
<references/>
|
Germain de Montauzan - Les Aqueducs antiques, 1908.djvu/496
|
- La distribution de l’eau du Gier.
- La citerne du Grand-Séminaire.
- Distribution des eaux de La Brévenne et des autres aqueducs.
§ II. - '''Mesure du débit et de la distribution'''.
Divers systèmes modulaires.
- Evaluation du quinaire, unité modulaire de Frontin.
- Opinions opposées de Rondelet et de Belgrand.
- Essai d’évaluation a posteriori et par les formules usuelles. Valeur moyenne.
- Procédés employés à Rome pour régulariser la distribution.
- Calcul du débit des aqueducs de Lyon.
§ III. - '''Dérivations avant la ville '''
§ IV. - '''Tuyaux de distribution '''
Tuyaux de terre cuite.
- Tuyaux de plomb pour la distribution. Leur épigraphie. Mode d’impression des caractères. Catégories de personnages désignés.
- Tuyaux du musée de Lyon.
- Réseau de la canalisation. Pose et renouvellement des calices aux châteaux d’eau.
{{AN|CHAPITRE VI MAIN-D’OEUVRE, DIRECTION ET ADMINISTRATION }}
§ I. - '''Personnel de la construction '''
Les collèges ou corporations d’artisans.
- Entrepreneurs et ingénieurs.
- Magistrats chargés des travaux publics
- La curatelle des eaux.
- La garnison de Rome et les travaux publics.
- Travaux des légions dans les provinces.
- Personnel militaire fourni aux villes pour les travaux publics.
- Réquisition des habitants.
- Part du pouvoir central aux travaux des villes.
- Eléments divers du personnel employé à la construction des aqueducs de Lyon.
- Importance numérique du personnel. Salaires.
§ II. - '''Personnel du service ordinaire '''
Hiérarchie des emplois.
- Service des eaux dans les provinces et spécialement à Lyon.
§ III. - '''Lois et règlements '''
I. - CONCESSIONS
Sous la République, régime sans concessions.
- Sous l’empire, concessions avec primauté de l’intérêt public.
- Don et renouvellement des concessions.
II. - EXPROPRIATIONS ET SERVITUDES
Etendue restreinte du droit d’expropriation. Coude de l’aqueduc du Gier à Chaponost.
- Servitudes et droits divers.
III. - PROTECTION DES AQUEDUCS
Bornes ou cippes-jalons aux aqueducs de Rome.
- Bornes de protection.
- La pierre de Chagnon.
IV. - SANCTIONS PENALES
Règlements de Frontin.
- Constitutions impériales.
§ IV. - '''Reconstructions, revenus et frais '''
I. - TRAVAUX DE RECONSTRUCTION
Opportunité des travaux de restauration.
- Restaurations principales faites aux aqueducs de Rome.
- Procédés et aspect des restaurations, suivant les époques, aux aqueducs de Rome.
- Restaurations aux aqueducs de Lyon.
II. - FRAIS DE CONSTRUCTION
Aqueducs de Rome.
- Aqueducs modernes.
- Aqueducs de Lyon.
III. - DUREE DU TRAVAIL
IV. - SOURCE DES FONDS NECESSAIRES
Libéralités impériales.
- Dons de magistrats ou de simples citoyens.
- Trésor public des villes.
V. - REVENUS DES AQUEDUCS
Conclusions
<references/>
|
Sacher-Masoch - La Pantoufle de Sapho et autres contes, 1907.djvu/202
|
{{Nr||LOUP ET LOUVE|199}}simple fils de sacristain, mais avec la lyre dans
mes armoiries, je trouvai bon accueil au château
de son père. Comme toutes nos hautes et gracieuses
dames nées pour commander, pleine d’ardeur
pour les arts et les sciences, Loba fut de bonne
heure avide de s’instruire. Elle eut d’abord pour
maître un chapelain de Carcassonne, puis moi. Je
lui enseignai la poésie et la musique, et elle, elle
fut mon professeur d’amour. Mais, lorsque j’implorai
grâce à ses pieds, elle refusa mes services
et accepta la main du seigneur de Gabaret. Ce
faisant, elle me brisa le cœur. Oh, elle était belle et
sage et, si aimable ! Élancée et blanche comme un
lys, avec des cheveux luisant comme l’or du soleil
et des yeux sombres dont le regard pénétrant
vous dardait au cœur des flèches mortelles, sous
l’arc de ses sourcils noirs. Elle avait une manière
si attirante de subjuguer et de faire de vous véritablement
son esclave ! Mais, après, elle savait être
cruelle, tout à fait comme une ''louve''. Je m’essayai
à l’oublier. Je quittai Penautier et mon pays, et
me rendis en Italie où je produisis mes chansons
à la cour des Monteferre, des Malaspine, des
d’Este. Mais, dans mon cœur, l’amour continuait
de brûler, l’amour de la louve féroce, comme une
<references/>
|
Buies - Chroniques, Tome 2, Voyages, 1875.djvu/265
|
{{nr|268|CONFÉRENCES||}}d’un désir ardent chez les uns, d’une nécessité inévitable,
aux yeux des autres, mais sans qu’on voulût se rendre compte des modifications et des tempéraments que le temps
pouvait apporter à cette nécessité et à ce désir. Parce que
les uns désiraient l’annexion et parce que les autres la
croyaient nécessaire, il eût fallu, d’après eux, la faire sans
délai, au risque de la mal faire et d’étouffer, pour un temps
peut être bien court, des répugnances qui auraient pu devenir
par la suite fatales à l’Union américaine.
Ce n’est pas ainsi que l’envisageaient les grands hommes
d’état américains. Jefferson, Adams, Everitt prévoyaient
la réunion éventuelle de toutes les parties de l’Amérique
du Nord, mais ils ne voulaient pas devancer les événements.
Pour eux, précipiter la destinée, c’était la contrarier, et, au
lieu de fruits mûrs, ne recueillir que des fruits amers et
semer des germes de démembrement futur. Ils comptaient
par demi-siècles et quarts de siècles et comprenaient toute
la nécessité d’une éducation préalable qui habituât les
jeunes peuples environnant la république, à ses institutions,
à son esprit public, à ses mœurs. Nous, au contraire,
nous n’avons presque jamais parlé d’annexion qu’à la manière
des enfants qui crient après un joujou, à la manière des
affamés qui se jettent sur un morceau appétissant, ou bien
à la façon de ceux dont les espérances déçues ou l’existence
déclassée ne leur font plus trouver de remède et d’avenir
que dans une révolution.
Un des faits dominants de l’histoire des États-Unis, c’est
l’admission successive dans leur sein de tous les territoires
de ce continent qui leur ont été nécessaires. En général,
ces acquisitions se sont faites paisiblement, le plus souvent
par voie d’achat. Ainsi, en 1803, la Louisiane, embrassant
<references/>
|
Rolland - Par la révolution, la paix.djvu/8
|
''mort du passé que traîne après lui l’esprit, ou de la ruse à ne pas voir ce qui le contraindrait à un nouvel effort, afin de s’en dégager. Ajoutons tous les risques, qu’entraîne une vue nouvelle de la société. Car voir oblige à agir. Et agir est périlleux, aux âges des grandes mutations.''
''C’est pourquoi notre génération d’intellectuels français a trouvé, parmi nos aînés, si peu d’aide à sortir de l’enchevêtrement des idéologies à double et triple faces. Bien plutôt, ces aînés, ainsi que pendant la guerre les maîtres de l’intelligence, se sont-ils acharnés à nous y emprisonner. Il a fallu faire seuls notre trouée, au travers. Et ce fut une rude tâche. Nous nous y sommes ensanglantés.''
''Nous étions des novices. Déshabitués d’agir sur le plan du réel, c’était à coups d’idéologies que, résistant à la guerre, nous avions, pendant la guerre, lutté contre les idéologies. Nous ne connaissions pas d’autres armes. Nous ne savions qu’opposer l’Esprit abstrait à la force, les droits de la conscience à la raison d’État, et à la violence sans frein la non-violence absolue.''
''C’est ainsi que nous abordâmes, au sortir de la guerre, en 1919, la confrontation des décrets de notre esprit à l’expérience sociale, qui s’effectuait, en ces jours, dans des conditions tragiques. À vrai dire, nous ne fûmes pas beaucoup, parmi les intellectuels, à poursuivre longtemps cette confrontation. Dès les premiers soupçons qu’elle tournerait peut-être à nos dépens, la plupart s’éclipsèrent, — de ceux mêmes, en nombre si réduit, qui avaient tenu tête à la guerre, — du moins idéologiquement. C’était assez, pour eux, d’avoir institué le procès de la guerre, par l’esprit. Ils n’étaient pas disposés à faire le procès de l’esprit.''
''Et cependant, il le fallait, pour pouvoir avancer. Nous nous sommes trouvés, et dès les premiers pas, dans une''
<references/>
|
Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/193
|
<poem>Reposez-vous sur moi, Seigneur, de tout son sort,
Et n’en appréhendez ni l’hymen ni la mort.</poem>
{{Scène|III}}
{{acteurs|Léontine, Eudoxe}}
<poem>Ce n’est plus avec vous qu’il faut que je déguise :
À ne vous rien cacher son amour m’autorise.
Vous saurez les desseins de tout ce que j’ai fait,
Et pourrez me servir à presser leur effet.
Notre vrai Martian adore la princesse ;
Animons toutes deux l’amant pour la maîtresse,
Faisons que son amour nous venge de Phocas,
Et de son propre fils arme pour nous le bras.
Si j’ai pris soin de lui, si je l’ai laissé vivre,
Si je perdis Léonce et ne le fis pas suivre,
Ce fut sur l’espoir seul qu’un jour, pour s’agrandir,
À ma pleine vengeance il pourrait s’enhardir.
Je ne l’ai conservé que pour ce parricide.</poem>
<poem>Ah ! Madame.</poem>
<poem>{{caché|Ah ! Madame.}}Ce mot déjà vous intimide !
C’est à de telles mains qu’il nous faut recourir,
C’est par là qu’un tyran est digne de périr,
Et le courroux du ciel, pour en purger la terre,
Nous doit un parricide au refus du tonnerre.
C’est à nous qu’il remet de l’y précipiter.
Phocas le commettra s’il le peut éviter,
</poem>
<references/>
|
De Bougainville - Voyage autour du monde, 1771.djvu/15
|
en Angleterre, où il arriva le 12 octobre 1686. Ce navigateur n’a fait aucune découverte dans la mer du Sud ; il prétend avoir découvert dans celle du Nord, par quarante-sept degrés de latitude australe et quatre-vingts lieues de la côte des Patagons, l’île Pepis. Je l’ai cherchée trois fois, et les Anglais deux, sans la trouver.
Wood Roger, Anglais, sortit de Bristol le 2 août 1708, passa le cap de Horn, fit la guerre sur les côtes espagnoles jusqu’en Californie, d’où, par une route frayée déjà plusieurs fois, il passa aux Larrones, aux Moluques, à Batavia et, doublant le cap de Bonne Espérance, il ternit aux Dunes le 1er octobre 1711.
Dix ans après, Roggewin, Mecklembourgeois, au service de la Hollande, sortit du Texel avec trois vaisseaux, il entra dans la mer du Sud par le cap de Horn, y chercha la Terre de Davis sans la trouver ; découvrit dans le sud du tropique austral l’île de Pâques, dont la latitude est incertaine ; puis, entre le quinzième et le seizième parallèle austral, les îles Pernicieuses, où il perdit un de ses vaisseaux ; puis à peu près dans la même latitude, les îles Aurore, Vespres, le Labyrinthe composé de six îles, et l’île de la Récréation, où il relâcha. Il découvrit ensuite, sous le douzième parallèle sud,
<references/>
|
Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/351
|
{{nr|338|L’AMI FRITZ.|}}du Grand-Cerf, ils en causaient entre eux, disant : « Que c’est une grande folie de se marier avec une femme d’une condition inférieure à la nôtre, que de là résultent les ennuis et les jalousies de toute sorte. Qu’il vaut mieux ne pas se marier du tout. Qu’on ne voit pas un seul mari sur la terre aussi content, aussi riant, aussi bien portant que les vieux garçons. »
« Oui, s’écriait Schoûltz, indigné de n’avoir pas été prévenu par Kobus, maintenant nous ne verrons plus le gros Fritz ; il va vivre dans sa coquille, et tâcher de retirer ses cornes à l’intérieur. Voilà comme l’âge alourdit les hommes ; quand ils sont devenus faibles, une simple fille des champs les dompte et les conduit avec une faveur rose. Il n’y a que les vieux militaires qui résistent ! C’est ainsi que nous verrons le bon Kobus, et nous pouvons bien lui dire : « Adieu, adieu, repose en paix ! » comme lorsqu’on enterre le Mardi-Gras. »
Hâan regardait sous la table, tout rêveur, et vidait les cendres de sa grosse pipe entre ses genoux. Mais comme à force de parler, on avait fini par reprendre haleine, il dit à son tour :
« Le mariage est la fin de la joie, et, pour ma part, j’aimerais mieux me fourrer la tête dans un fagot d’épines, que de me mettre cette corde au cou. Malgré cela, puisque notre ami Kobus s’est
<references/>
|
Charlevoix - Histoire du Paraguay, tome 3.djvu/67
|
»u Paraguay. Liv. X. j)
ïfpagndls , d'entendre la MefTe , & on ne ^^ • ""
itiarquôit point dans quelle Eglife , quoi-
que r Interdit ftt général & fans exception.
Un A6le Çl informe parut nul à bien des
Gens, & chacun prit fon parti félon fat
confciencc : de forte qu'il y eut des Eglifes
toujours ouvertes, & d'autres toujours
fermées. Le Gouverneur de fon côté pré-
tendoit qu'en vertu de fa Charge , on ne
devoir pas k tenir pour excommunié exté-
rieurement , & qu'on devoit l'abfoudre.
Les Jéfuites forcés de dire leur fentiment^
après s'en être long-tems défendus, dirent
que le Gouverneur n'aïant point de guerre
lur les bras , ils croïoient que pour éviter
le fcandale il devoit fe tenir pour excom-
munié , jufqu'à ce qu'il eut été abfous par'
rEvcque même. Les Pères de Saint Domi-
nique & dé la Merci décidèrent que le
grand Vicaire pouvoir le relever des Ccn-*
lures ; & Dom Grégorio s'en tenant là y
requit le grand Vicaire de l'abfoudre. Celui-
ci le rcnvoïa à ceux qui av oient décidé en
fa faveur 5 & fur fon refus D. Grégorio fit'
battre la générale & marcha à la tête des^
Trouppes à (on Logis, en fit clouer U
porte & les fenêtres , & lui envoïa dire
que perfonnc n'y entreroit , ni n'en forti-
roit , qu'il ne lui eût donné l'Abfolution.
Le grand Vicaire tint bon ; le Gouverneut
fc. laffa d'attendre & fe retira.
Dès qu'il fut «rentré chez lui, il fitdref- L'Ffê^ue É'
fer des Procès-verbaux de tout ce qui s'é- le Gouvcr-
toit paffé dans la Province depuis que Dom ^^^^^ P°^[^^^^;
Bernardin de Cardenas y étoit entré, & àT'Auvfiînoe-
te» envoïa à l'Audience roïale des Char; toïalc^
C iij
<references/>
|
Bréal - Essai de Sémantique.djvu/50
|
{{Numérotation|LES LOIS INTELLECTUELLES DU LANGAGE.|34}}{{tiret2|par|ticulière}} sur ce terrain purement humain et historique, toute l’argumentation de Fénelon.
Nous avons l’habitude de faire une distinction entre le courage actif, qui va au-devant du danger pour le combattre, et le courage passif, qui consiste à supporter la mauvaise fortune avec égalité d’âme. Bien que pouvant exister chez le même homme, ce sont, au fond, deux sentiments différents, comme on peut le voir en observant où conduit l’exagération de l’un et de l’autre. Poussé trop loin, le courage actif aboutit à la témérité ; le courage passif, porté au delà de la juste mesure, dégénère en apathie.
On s’attendrait à voir le langage reproduire dès les plus anciens temps une distinction si naturelle ; mais il n’en est rien. Dans la langue d’Homère, les deux idées ont l’air de se confondre, et le même verbe {{lang|grc|τολμάω}}, qui veut dire « oser », signifie aussi « supporter » ; le même adjectif {{lang|grc|τλήμων}}, qui veut dire « patient », signifie aussi « audacieux »<ref>''{{abr|Il.|Iliade}}'', {{rom-maj|XX|20}}, 19 ; ''{{abr|Od.|Odyssée}}'', {{rom-maj|XXIV|24}}, 162,{{lié}}etc.</ref>. Après Homère, la poésie gnomique nous fournit d’autres exemples de cette confusion :
« Force est, dit un proverbe, de supporter ce que les dieux envoient aux mortels ».
{{c|{{lang|grc|Τολμᾶν χρὴ τὰ διδοῦσι θεοὶ θνητοῖσι βροτοῖσιν.}}|fs=90%|m=calc(1em / 0.9)}}
Et ailleurs :
« Sois endurante, ô mon âme, dans le malheur,
<references/>
|
Viard - Grandes chroniques de France - Tome 8.djvu/175
|
de la garde au roy de Chipre, qui aus quarniaux ne aus deffenses fussent, si s’atournerent ilec de toutes pars pour la cité assaillir, et emplirent les fossés tout entour de bois et d’autres choses, et percierent tantost les murs. Adonc entrerent communement en la cité et dechacierent et bouterent les crestiens par {{sc|i}} pou jusques ou milieu de la cité. Mès ainçois ot fait de ça et de là grant abateis et occision de leur gent, et furent deboutez et chaciez hors de la cité en la vesprée d’icelui jour par le mareschal<ref>Mathieu de Clermont, maréchal de l’Hôpital.</ref> et le ministre de la chevalerie de l’Ospital<ref>Jean de Villiers, grand maître de l’Hôpital.</ref>. Et ensement le firent le jour ensuivant ainsi. Et adecertes le tiers jour ensement ensuivant, les Sarrazins venans de toutes pars à l’assaut et vindrent en la cité et entrerent par la porte Saint Anthoine, et les Templiers et les Hospitaliers<ref>Sur l’action des Templiers et des Hospitaliers à la porte Saint-Antoine, cf. ''Excidium urbis Acconis'', col. 781-782.</ref> se combatirent viguereusement, et les craventerent de touz poins et occistrent le peuple. Et ainsi les desloiaux mescreans pristrent la cité<ref>Saint-Jean-d’Acre fut pris le 28 mai 1291.</ref> et la trebuchierent et destruirent avec les murs et les tours et les maisons et les eglises jusques aus fondemens, tout ce dessus dessouz, dont ce fu très grant domage. Et lors, les patriarches et les menistres de l’Ospital qui navrez estoient à mort furent au repaire<ref>Ce ''repaire'' était une barque, un dromon, « tracti a suis in dromundo ».</ref> et avec pluseurs autres, et perirent en la mer. Et ainsi Acre, la cité qui estoit le secours et l’aide de crestienté en ycelles parties d’outre mer, par leurs pechiez, et ce requerans, fu destruite des {{tiret|ane|mis}}
<references/>
|
Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/409
|
voulus condescendre, ce dont il eut du mécontentement, quoique sans raison. Je lui représentois qu’il étoit bien raisonnable que, quoi qu’il arrivât, je me trouvasse en l’état où j’étois entré en cette charge, où, ne voulant rien profiter, il étoit plus que juste que je ne me misse en hasard de perdre tout.
Je lui représentois encore que, si je me défaisois de mon évêché, il sembleroit que j’eusse acheté et me fusse acquis l’emploi de la charge où il me mettoit, au prix d’un bénéfice, ce qui ne se pouvoit en conscience, et ne seroit pas honorable ni pour lui ni pour moi. Mais toutes ces raisons ne le contentèrent point, et le sieur Barbin, qui étoit plus pratique de son humeur que moi, me dit que, quoi que je pusse faire, il ne seroit pas satisfait s’il ne venoit à ses fins, parce que son intention étoit, en me dépouillant de ce que j’avois, de me rendre plus nécessairement dépendant de ses volontés. En quoi il témoigna être véritablement mon ami, en me fortifiant sous main dans la résolution que j’avois prise de ne me défaire pas de mon évêché.
Quant au sieur du Vair, jamais homme ne vint en cette charge avec plus de réputation, et ne s’en acquitta avec moins d’estime ; si bien que le choix qu’on fit de sa personne ne servit qu’à faire connoître la différence qu’il y a entre le palais et la cour, entre rendre la justice aux particuliers et la conduite des affaires publiques. Il étoit rude en sa conversation, irrésolu ès moindres difficultés, et sans sentiment des obligations reçues.
Messieurs de Bouillon et de Mayenne avoient un tel pouvoir sur son esprit, qu’il ne pouvoit {{tiret|s’empê|cher}}
<references/>
|
Sacher-Masoch - A Kolomea - Contes juifs et petits russiens, 1879.djvu/176
|
— D’où êtes-vous ?
— De Lwow.
— C’est bien loin. Et d’où venez-vous ?
— De Jamna.
— De la seigneurie ?
— Oui. »
Un fin sourire passa sur ses beaux traits hardis.
« Vous a-t-on montré le désastre et parlé de Magasse
l’oprischek<ref>Bandit.</ref> ?
— On m’en a parlé.
— Et de moi aussi, probablement.
— De vous aussi.
— Et vous avez eu envie de me connaître ?
— En effet, répondit le père Antoni ; j’étais curieux de
vous voir tous les deux. »
La Houzoule le perça de son œil scrutateur ; sous ce
regard, l’abbé courba la tête.
« Maintenant, vous m’avez vue. Que voulez-vous encore ?
— Je désirerais vous demander un entretien. »
La géante eut un second sourire de pitié. Elle fit un
signe à la vieille femme qui sortit lentement.
« Vous pouvez vous asseoir, » ajouta la Houzoule avec
une majesté de reine.
Le père Antoni s’approcha d’elle et lui tendit la main.
Elle ne bougea pas.
« Touchez-moi donc la main ! »
Elle la lui présenta, froide et fière. Le jeune homme
la retint fortement dans les siennes et murmura d’une
voix basse et suppliante.
« Vous êtes une belle femme ! par Dieu ! une femme
superbe !
<references/>
|
Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/275
|
d’être ou de n’être pas la fille d’un homme que je
n’ai pas connu et qui ne m’a point aimée ; mais il
m’importe beaucoup de n’être jamais la femme
d’un homme qui manque de délicatesse. Je vous
en supplie, mes amis, ne me parlez plus de lui, à
moins que vous n’ayez les moyens de le disculper
entièrement. Je suis en train de me réhabiliter à
mes propres yeux de toutes mes erreurs de jugement
et de toutes mes prétentions au bonheur
idéal. Je suis forte ci présent, j’ai véritablement
souffert. Depuis deux mois, je n’ai pas vécu un
seul moment pour moi-même. Dieu m’a pardonné,
j’en suis sûr, car, à l’idée de perdre Jennie et en
voyant ses souffrances, j’ai maudit mon orgueil et
abjuré toutes mes ambitions. À présent, je suis
certaine que nous pouvons vivre heureux tous trois
avec le peu qu’elle possède et le peu que je pourrai
gagner. Restons donc ici tant que vivra l’abbé
Costel. Après cela, si nous n’avons plus rien, nous
irons chercher de l’ouvrage ailleurs. La misère ne
s’appesantit jamais sur ceux qui se respectent, et
je suis certaine qu’avec de l’ordre et de l’activité
nous n’en subirons pas les extrêmes conséquences ;
mais, fallût-il mendier, je ne me plaindrai pas,
pourvu que Jennie vive et soit votre femme.
Lucienne de Valangis N’existe plus, et vous ne
devez plus chercher à la faire revivre ; celle qui
<references/>
|
Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 11, 1904.djvu/198
|
{{Nr||L’ÉGLISE|175}}
respectueuse, peindront ensemble le même tableau, ou séparément deux fois le même tableau dans deux cadres différents. — Chez les Slaves et les Grecs, la foi, comme l’Église et le rite, est une chose nationale ; le dogme fait corps avec la patrie, on est moins enclin à le contester ; d’ailleurs il est peu gênant : ce n’est qu’une relique héréditaire, un mémorial domestique, une ''icône'' de famille, œuvre sommaire d’un art épuisé qu’on ne comprend plus très bien et qui a cessé de produire. Elle est plutôt ébauchée qu’achevée, on n’y a pas ajouté un seul trait depuis le {{s|X}} ; voilà huit cents ans que ce tableau repose dans une arrière-chambre de la mémoire, sous des toiles d’araignée aussi vieilles que lui, mal éclairé, rarement visité ; on sait bien qu’il est là, on en parle, avec vénération, on ne voudra jamais s’en défaire, mais on ne l’a pas chaque jour sous les yeux, pour le comparer avec le tableau scientifique. — Tout au rebours pour le tableau catholique : depuis huit cents ans, chaque siècle y a donné des coups de pinceau ; encore aujourd’hui, nous le voyons se faire, sous nos yeux, acquérir un relief plus fort, un coloris plus intense, une harmonie plus rigoureuse, une expression plus saisissante et plus définitive. — Aux articles de foi qui le composent pour l’Église grecque et slave, treize conciles ultérieurs en ont ajouté beaucoup d’autres, et les deux dogmes principaux décrétés par les deux derniers conciles, la Transsubstantiation par celui de Trente, et l’Infaillibilité du pape par celui du Vatican, sont justement les
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 53.djvu/90
|
du choix des magistrats, il s’est formé à New-York une association
très puissante de ''lawyers'' qui, à chaque élection, désigne ses candidats en déterminant son choix uniquement d’après leurs aptitudes juridiques, sans s’inquiéter de savoir s’ils sont républicains
ou démocrates. C’est ainsi que, moi républicain, j’ai voté et je voterai encore souvent pour des magistrats démocrates, ou plutôt pour
des magistrats qui sont depuis longtemps en possession de leurs
fonctions et dont la réélection n’est qu’une simple formalité. Nous
corrigeons par là dans la pratique les inconvéniens d’une institution qui peut avoir ses dangers. »
Tout en rendant justice au bon sens américain, qui sait corriger
par des tempéramens l’excès du mal résultant de ses propres institutions, je ne puis pas dire cependant que cette argumentation
m’ait rallié au principe de l’élection des juges par le suffrage universel, d’autant que nous aurions certainement en France le mal
sans les tempéramens. Mais ces élections judiciaires me paraissent
ne préoccuper que médiocrement l’opinion, dont tout l’intérêt est
concentré sur deux élections : celle d’un représentant au congrès
de Washington et celle du maire de Brooklyn, immense ville de cinq
cent mille habitans qui n’est en réalité qu’un faubourg de New-York, mais qui a son autonomie municipale. Pour le congrès, deux
candidats sont en présence : un avocat démocrate, qu’on dit un
homme de mérite, et un jeune homme, fils d’un des plus riches propriétaires de New-York, et appartenant à la meilleure société de la
ville, car la société élégante est en grande majorité républicaine. En
général, on ne fait guère de doute que le succès du candidat républicain ne soit assuré par son immense fortune. Mais quelques esprits
enclins au paradoxe prétendent que sa fortune même pourrait bien
lui nuire et qu’il y a dans les rangs populaires une certaine réaction
contre la trop grande influence électorale de l’argent. C’est du reste
un fait assez nouveau que ces candidatures aux fonctions politiques
de jeunes gens appartenant aux bonnes et relativement anciennes
familles du pays, ces fonctions étant, au contraire, jusqu’à ces dernières années abandonnées par eux avec un certain dédain aux candidats issus des ''nouvelles couches''. C’est le mouvement inverse de
celui qui se produit en France. Quant à l’élection de Brooklyn, ce
qui en fait l’intérêt, c’est que le maire en fonction est un des personnages importans du parti démocratique dans l’état de New-York,
un des ''boss''<ref> Le mot ''boss'' était employé en particulier par les nègres pour désigner le contre-maître sous la surveillance duquel ils travaillaient. </ref>, pour me servir d’un terme emprunté à l’argot politique américain. Son concurrent est, au contraire, à ce qu’il paraît,
un jeune homme que recommande surtout sa grande valeur personnelle
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 1.djvu/53
|
{{nr||VOYAGE DANS LA MER DU SUD.|45}}{{tiret2|l’em|ploi}} de charger nos armes, tandis que Martin Bushart et moi faisions feu. Bushart était natif de Prusse ; il avait été tirailleur dans son pays et était fort adroit. Il tua vingt-sept sauvages dans vingt-huit coups, n’en ayant manqué qu’un seul. J’en tuai et blessai aussi quelques-uns quand la nécessité m’y obligea. Nos ennemis, voyant qu’ils ne pouvaient venir à bout de nous sans perdre un grand nombre des leurs, s’éloignèrent en nous menaçant de leur vengeance.
La chair de nos malheureux compagnons étant cuite, on la retira des fours et elle fut partagée entre les différentes tribus qui la dévorèrent avec avidité. De temps en temps les sauvages m’invitaient à descendre et à me laisser tuer avant la fin du jour, afin de leur épargner la peine de me dépecer pendant la nuit. J’étais dévolu pièce par pièce aux différens chefs dont chacun désignait celle qu’il voulait avoir, et qui tous brandissaient leurs armes en se glorifiant du nombre d’hommes blancs qu’ils avaient tués dans cette journée.
En réponse à leurs affreux discours, je déclarai que si j’étais tué, leurs compatriotes détenus à bord le seraient aussi ; mais que, si j’avais la vie sauve, ils l’auraient également. Ces barbares répliquèrent : « Le capitaine Robson peut tuer et manger les nôtres, s’il lui plaît. Nous vous tuerons et nous vous mangerons tous trois. Quand il fera sombre, vous ne verrez plus clair pour nous ajuster, et vous n’aurez bientôt plus de poudre. »
Voyant qu’il ne nous restait plus d’espoir sur la terre, mes compagnons et moi tournâmes nos {{Tiret|re|gards}}
<references/>
|
Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, V.djvu/524
|
^ lo Correspondance.
» et de desguiser, du mieux qu'il peut, ses larcins, ainsy que m'ont ad-
» uoué les meilleurs espritz qui ont eu la patience de lire son livre. A n'en
» poinct mentir, ce n'est pas seulement aux despens de M. V. qu'il a voulu
» paroistre habile homme; ie vous feray, par vous mesme, voir vne autre
» foys, qu'il a pris en plusieurs autres autheurs ce qu'il a trouué a l'escart,
» croyant qu'il n'y auroit personne qui eust assez de lecture, ny la veue
» assez subtile pour s'en apperceuoir. Maintenant retournons a nostre sub-
» iect, et, pour exemple de l'vsage de la précédente réduction, trouuons
» la valeur de la racine de ceste équation :
a"' o — 144A — 10 368
» le la réduis a vne autre équation, dont la quantité connue du troisiesme
9 terme soit l'vnité. Supposant, conformément a nostre reigle, que
» 144 E" soit esgala AA, et en reformant l'eqûation dont il s'agit, ie
» trouue ceste autre :
E'" — I E — 6,
» en laquelle on connoist la valeur de la quantité inconnue, pourueu que
» ce ne soit poinct vn nombre sourd, en trouuant la racine cubique du
î) moindre nombre cube qui surpasse 6, a cause que E est marqué par — ;
» laquelle racine est 2 d'où il est aisé a reconnoistre que la racine de la
» précédente équation est 24 Et sy È eust esté marqué par -\-, il eust fallu
» prendre la racine du plus grand nombre cube au dessous de 6. Ainsy,
» par ceste réduction, vous n'auez quelquefois pas plus de peine a trouuer
» la valeur de la quantité inconnue d'vne équation, que l'on en a pour
» extraire la racine d'vn nombre entier ; qui est l'vn des principaux aduan-
» tages que l'on en peut retirer. »
a La réduction des équations, qui ont quatre degrez, a vne autre qui
» n'en contienne que trois, est demonstree fort au long très euidament
» dans le chapitre Quemadmodum equationes quadraticç-quadraticœ de-
» primuntur ad quadraticas per médium cubicarum a radice plana, seu de
» climacticâ paraplerosi', au lieu que le Méthodique Impertinent, pour
» s'en attribuer l'inuention, a mis, mal a propos, a la fin ce que M. V. a
» iugé astre mieux au commancement, et a supprimé la démonstration
» qui est dans ce mesme chapitre. Mais, affin que vous puissiez lire en
» ceste lettre vn abrégé des choses les plus vtiles et nécessaires, qui sont
» contenues dans l'ceuure De equationum recognitione et emendatione, ie
» veux vous expliquer en peu de mots ceste reigle, et vous la demonstrer
» en sorte qu'il vous sera facile de l'apliquer a toutes les équations du qua-
)) triesme degré, pourueu seulement que vous en ayez osté le second terme,
» ainsy que i'ay monstre, cy dessus, que l'on peut faire en toutes sortes
» d'équations, de quelque degré qu'elles soient.
» Soit A'" + 2GA" + BA esgal a Z.
a. ViETE, De em, œq., chap. vi (p. 140)
��
�
<references/>
|
Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/224
|
où l’on étoit. Voilà, dit Agis, une musique qui
me plaît, & non pas ce détestable tambourin.
Je vous félicite de ce goût, dit la fée : on voit,
ajouta-t-elle en regardant la gouvernante, que
dans vos amours & dans vos plaisirs vous cherchez
la tranquillité. Agis n’osa répondre à cette
raillerie, qui n’augmenta pas l’amitié que la
gouvernante avoit pour Cabrioline.
On trouva dans la salle où étoit le bal une
nombreuse assemblée des plus jeunes dames de
Solinie ; elles avoient vu grande lumière au palais ;
elles s’étoient levées tout doucement d’auprès
de leurs maris, & étoient venues voir
quelle étoit cette nouveauté ; elles avoient pris
leurs plus beaux ornemens, & paroissoient
charmantes, quoiqu’elles se fussent habillées
sans chandelle (tant il est vrai que les femmes
viennent à bout de réussir à tout ce qu’elles entreprennent).
Plusieurs jeunes gens s’étoient
masqués, & les avoient suivies ; en sorte que
l’assemblée étoit des plus brillantes & des plus
nombreuses. Mais les bourgeoises de Solinie,
qui savaient vivre, avoient laissé les premières
places vides pour le roi & toute sa cour.
Le roi ouvrit le bal avec la princesse, & après
que l’on eut dansé plusieurs ménuets, on en
vint aux contredanses. Cabrioline en enseigna
de nouvelles, qui charmèrent tout le monde,
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 15.djvu/677
|
ils transformaient en Olympiens nos rudes divinités
celtiques, celles de la Germanie, celles même de l’ancienne
Rome. M. Alfred Foucher, dans une jolie page, nous les fait
voir à l’œuvre : « Que vous faut-il ? Un Hésus, un Tentatès ?
Nous vous ferons un Mars, un Mercure : libre à vous de les
vénérer sous le nom qu’il vous plaira... Vous voulez un Mithra,
nous n’en avons pas fait encore : mais nous savons représenter
le jeune Ganymède avec un bonnet phrygien, et nous le pencherons sur le taureau du sacrifice, dans l’attitude des Victoires... Et comme ils sculptaient le marbre d’Afrique, le calcaire du Jura, le porphyre de Pannonie, nous les retrouvons
taillant le schiste du Gandhâra, faisant un ''Mâra'' d’un Eros, et,
avec un turban et des boucles d’oreilles, changeant en ''Garoûda''
l’aigle de Jupiter. »
Revenons à notre vitrine : voyez cette admirable figure de
jeune homme, ce profil délicat qui se dessine si noblement dans
la pierre d’un bleu gris d’ardoise, ces yeux mi-clos, cette bouche
sinueuse, qui semble retenir son souffle, ces cheveux parfumés,
aux ondulations légères, ce visage d’un si beau modelé, ces joues
pures que le jour enveloppe comme un flot d’ambroisie. Platon
eût sur-le-champ reconnu le fils de Latone. C’est un Bouddha.
Vous voyez à son front le signe de l’''ourna'', sur sa tête le monticule, la « bosse » de l’''usnisha'', marque de l’omniscience, et
que l’artiste, par un artifice plein de tact, déguise d’un chignon
finement crespelé. Sans doute, l’auteur de ce morceau n’était
point un Scopas. Illustre dans sa profession, eût-il été si loin,
à la cour d’un barbare Scythe, chercher son gagne-pain ? Était-il
même un Grec, ou seulement un de ces provinciaux, un de
ces ''colonials'', Égyptiens, Syriens, que nous désignons sous le
nom commun d’alexandrins ? Pourtant, une supériorité immense
éclate dans son œuvre : c’est ce génie de clarté, de résolution, ce don décisif de l’artiste qui est le partage de la Grèce
et qui, partout où elle passa, demeure son héritage.
Ce n’est pas tout. Il ne suffisait pas d’avoir donné à l’Inde le
type du Bouddha, d’avoir fixé sa rêverie et arrêté cet idéal flottant
et indécis, à demi dissous dans les vapeurs de cette terre
fabuleuse, qui rendent presque insaisissable, à force d’impersonnalité, la figure réelle du grand apôtre de l’Amour. En forçant ce vague fantôme à redescendre sur la terre, en l’obligeant à prendre un corps, c’était, du même coup, toute l’iconographie
<references/>
|
Ibn Battuta - Voyages - Traduction Sanguinetti - Volume 4.djvu/482
|
<div style="margin-left:10%; margin-right:5%; font-size: 90%" >{{tiret2|ex|portation}}, etc. 120. — Monnaie consistant en cauris, 121. — Des femmes des Maldives, 122. — Parures, 123. — Singuliers détails, 124. — Récit du motif pour lequel les habitants de ces îles se convertirent à l’islamisme ; description des malins esprits d’entre les génies qui leur causaient du dommage tous les mois, 126. — De la souveraine de ces îles, 130. — Cérémonial ou étiquette, 182. — Armée, ibid. — Des fonctionnaires et de leur manière d’agir, 133. — Vicissitudes éprouvées par notre voyageur dans ces îles, depuis le moment de son arrivée, 135. — Son dessein était de se rendre tout de suite des Maldives sur la côte de Coromandel, puis à Ceylan, au Bengale et en Chine, ''ibid.'' — De l’île de Cannaloûs, où il était débarqué, Ibn Batoutah se rend à celle de Mahal, siège de la sultane et de son mari, 136. — La région de Teïm, ''ibid.'' — L’île d’Othmân, l’île du vizir appelé Télemdy, 137. — L’île de Mahal, ''ibid.'' — Repas d’hospitalité, 138. — Don, 139. — Curieux détails, 141. — Récit d’une partie des bienfaits du grand vizir envers Ibn Batoutah, ''ibid.'' — Du changement de dispositions du vizir ; du projet que notre voyageur forma de partir, et du séjour qu’il fit ensuite aux Maldives, 143. — Récit de la fête à laquelle le voyageur assista en compagnie des insulaires, 147. — De son mariage et de sa nomination à la dignité de kâdhi, 149. — De l’arrivée du vizir ’Abdallah, fils de Mohammed Alhadhramy, que le sultan Chihâb eddîn avait exilé à Souweïd ; récit de ce qui se passa entre lui et notre voyageur, 152. — Du départ d’Ibn Batoutah de l’île de Mahal, et quel en fut le motif, 155. — L’île du vizir ’Aly, 162. — Des femmes qui n’ont qu’une seule mamelle, ''ibid.'' — L’île de Moloûc, 163. — Séjour de deux mois et demi environ dans cette île, 164. — Curieux détails, ''ibid.''</div>
{{brn|1}}
{{table|titre=Voyage dans l’île de Ceylan, et dans le Coromandel. |page=165}}
<div style="margin-left:10%; margin-right:5%; font-size: 90%" >La montagne de Sérendîb (pic d’Adam), p. 165. — La ville de Batthâlah (Putelam), 166. — Du sultan de Ceylan, 167. — Pèlerinage du voyageur, pour visiter le pied d’Adam, 170. — Les villes de Ménâr-Mendely et Bender-Sélâouât, ibid. — La ville de Conacâr, 172. — Du sultan de Conacâr, 173. — Des pierres précieuses, ''ibid.'' — La caverne d’Osthâ Mahmoud Alloûry et la baie des singes,</div>
<references/>
|
Gautier - L’Orient, tome 1, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/68
|
Précédé d’un pandour nègre armé jusqu’aux dents, et suivi de son interprète, M. Valerio se rendit chez le commandant militaire de Silistrie, qu’il trouva, après avoir monté un escalier vermoulu, au premier étage d’une méchante maison, dans une petite chambre éclairée par une chandelle vacillante. Le pacha était un homme d’une physionomie noble, grave et religieuse ; assis les jambes croisées sur son divan, il égrenait un chapelet d’ambre ; il fit apporter des pipes et du café, cérémonie à laquelle l’hospitalité turque ne manque jamais.
La chambre habitée par le pacha avait à peu près sept pieds de long sur six de large. Les fenêtres garnies de papier livraient en quelques endroits passage au vent, qui faisait trembloter la flamme de la chandelle ; les murailles crevassées n’avaient pour tout ornement qu’une giberne, une paire de pistolets et un sabre turc avec son ceinturon. Tout le mobilier consistait en une mauvaise table de bois chargée de quelques livres frugalement mêlés de pommes, une estrade de
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/764
|
{{SDT}}
{{c| '''ESQUISSE D’UN PROGRAMME NAVAL'''|fs=200%|lh=2}}
{{c| '''EN 1900'''|fs=160%|lh=2}}
{{—|lh=5}}
C’était en 1889. J’avais été rappelé du Tonkin, où je remplissais de très importantes et très attrayantes fonctions, pour remettre en ordre les affaires de l’artillerie, au ministère de la Marine, en qualité de chef de bureau ; j’occupais ce poste depuis quelques mois : un navire s’était plaint de n’avoir pas, en munitions, ce qui lui revenait. Bien que la chose fût insignifiante en elle-même, la Presse, par suite de déplorables habitudes, en avait été informée, s’en était émue, sans savoir exactement de quoi il s’agissait, en déclarant que la patrie était en danger.
Le Port soutenait qu’il avait donné au navire ce qui lui était dû. J’allai trouver le ministre, et je lui fis la proposition suivante : « Si vous voulez m’en croire, vous écrirez au commandant du navire qu’il a les munitions qu’il réclame, et vous le prierez de faire dresser immédiatement un état détaillé de ce qui existe à bord ; et, en même temps, vous écrirez au Port, et vous lui direz qu’il n’a pas délivré tout ce qui revenait au navire, en lui demandant de vous adresser l’état des délivrances faites. Vous êtes certain que vous aurez raison des deux côtés. »
C’est ce qui arriva. Il manquait au navire, qui ne s’en était pas aperçu, quelques projectiles d’exercice d’une certaine espèce ; et il avait, en revanche, les munitions dont l’absence supposée avait plongé ses chefs dans le désespoir, surexcité la presse et alarmé la France, superficiellement, tout au moins, pour quelques jours. La conversation, qui suivit cette histoire, eut lieu à peu près dans les termes suivans :
« LE MINISTRE. — C’est un désordre désespérant !
<references/>
|
Boutroux - De l’idee de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines.djvu/54
|
fût-il admis, il ne nous donnerait que médiocrement satisfaction, parce qu’il laisserait hors de nos prises le monde du mouvement dans l’espace, c’est-à-dire, en définitive, le monde où nous vivons et sur lequel il nous importe tout d’abord de pouvoir agir.
La liaison mécanique, il faut le reconnaître, est la forme la plus parfaite du déterminisme, parce qu’elle représente la coïncidence de la réalité expérimentale et des mathématiques. Mais la question est de savoir si ce déterminisme doit être transporté, de l’explication des phénomènes qu’il régit, aux êtres mêmes dont nous cherchons à systématiser les manifestations. Quand nous nous demandons si le mode d’action des corps les uns sur les autres compromet notre liberté, nous posons mal la question. Les corps n’agissent pas les uns sur les autres. C’est par abstraction et construction artificielle que nous isolons un monde d’atomes et de forces mécaniques et le considérons comme se suffisant à lui-même. Ce monde, dans la réalité, ne se suffit pas. Non seulement les atomes et la causalité mécanique ne se conçoivent pas sans un esprit qui les pense, mais les mouvements mécaniques ne peuvent être isolés des phénomènes physiques et organiques existant dans la nature. Savons-nous si les lois mécaniques sont cause ou conséquence des autres lois ? Et, si par hasard elles étaient conséquence, pourrions-nous affirmer qu’elles sont rigoureuses et qu’elles sont immuables ? S’il y a des actions dans la nature, ces actions sont tout autre chose que la prétendue action d’un corps sur un autre, laquelle n’est qu’une relation numérique. Et, comme rien ne prouve que le support réel des phénomènes dits mécaniques soit lui-même mécanique et soumis au déterminisme, il n’y a point de chaîne à rompre pour
<references/>
|
Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/41
|
que neuf cents francs au lieu de mille, — sans aucun travail,
sans autre peine que celle de placer cent francs par
an, elle peut accroître son Capital et sa Rente dans une
progression si rapide qu’elle sera bientôt en mesure de
consommer autant que cent familles d’ouvriers laborieux.
Tout cela ne dénote-t-il pas que la société actuelle porte
dans son sein un cancer hideux, qu’il faut extirper, au risque
de quelques souffrances passagères ?
Voilà, ce me semble, les tristes et irritantes réflexions
que doit susciter dans votre esprit l’active et trop facile
propagande qui se fait contre le capital et la rente.
D’un autre côté, j’en suis bien convaincu, il y a des moments
où votre intelligence conçoit des doutes et votre
conscience des scrupules. Vous devez vous dire quelquefois :
Mais proclamer que le capital ne doit pas produire
d’intérêts, c’est proclamer que le prêt doit être gratuit,
c’est dire que celui qui a créé des Instruments de travail,
ou des Matériaux, ou des Provisions de toute espèce, doit
les céder sans compensation. Cela est-il juste ? et puis, s’il
en est ainsi, qui voudra prêter ces instruments, ces matériaux,
ces provisions ? qui voudra les mettre en réserve ?
qui voudra même les créer ? chacun les consommera à
mesure, et l’humanité ne fera jamais un pas en avant. Le
capital ne se formera plus, puisqu’il n’y aura plus ''intérêt'' à
le former. Il sera d’une rareté excessive. Singulier acheminement
vers le prêt gratuit ! singulier moyen d’améliorer
le sort des emprunteurs que de les mettre dans l’impossibilité
d’emprunter à aucun prix ! Que deviendra le
travail lui-même ? car il n’y aura plus d’''avances'' dans la société,
et l’on ne saurait citer un seul genre de travail, pas
même la chasse, qui se puisse exécuter sans avances. Et
nous-mêmes, que deviendrons-nous ? Quoi ! il ne nous sera
plus permis d’''emprunter,'' pour travailler, dans l’âge de la
force, et de ''prêter,'' pour nous reposer, dans nos vieux
<references/>
|
Wilson - Voyage autour du monde, 1923.djvu/409
|
{{t3|ISMAÏLIA — CANA|{{sc|Chapitre I}}}}
{{Centré|''En route pour la Palestine — Ismaïlia — El-Kantara — Jaffa — Ludd — Jérusalem — Bethléem — La mer Morte — Jéricho — Le Jourdain — Haïfa — Le Carmel — Atlitt — La Galilée — Nazareth — Le lac de Tibériade — Capharnaüm — Magdala — Cana.''}}
Partis du Caire à 6 heures 15 p.m., par l’express de
Jérusalem, nous passons par Ismaïlia et El-Kantara que
nous avons vues deux fois déjà : la première lorsque nous
avons remonté le canal de Suez à bord du Cordillère,
la seconde en chemin de fer de Port-Saïd au Caire.
À dix heures p.m., le train stoppe ; c’est la traverse du
canal sur un pont flottant et tournant. Formalités des
passeports : deux officiers anglais installés à une petite
table sur le quai de la gare examinent à la belle étoile
nos papiers qu’ils recouvrent de nouveaux hiéroglyphes.
Nous marchons quelques cents pieds dans le sable jusqu’à
la cheville avant d’atteindre le train qui attend dans le
désert. La nuit est tout étoilée ; il fait un peu froid,
à désirer un paletot léger. C’est un saut de thermomètre
assez raide depuis le Caire où il faisait 92° à midi et
où soufflait le ''khamsin'', vent brûlant qui vient du désert.
Excellent compartiment et bons lits. Nous filons vers
la Sainte Sion que nous atteindrons à midi, demain.
''6 mai'' — Notre projet d’aller prendre le bateau à Jaffa, pour la Syrie et la Turquie, reçoit un rude coup.
La dépêche suivante que nous lisons dans la ''Gazette Égyptienne'' n’est pas rassurante :
<references/>
|
Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/599
|
{{nr||SUR VOLTAIRE.|585}}
{{tiret2|natio-|nale}}, que lorsque, soit par sa grandeur, soit par sa forme, il diminue l’intérêt de former des entreprises de culture, ou qu’il les fait négliger. Il n’était pas encore parvenu à ce point en 1760 ; et quoiqu’il y eût en France beaucoup de malheureux, quoique le peuple gémît sous le poids de la fiscalité, le royaume était encore riche et bien cultivé. Tout était si peu perdu à cette époque, que quelques années d’une bonne administration eussent alors suffi pour tout réparer. Ce que dit ici M. de Voltaire était donc très-vrai ; mais ce n’était en aucune manière une excuse pour ceux qui gouvernaient.
{{Centré|''Sur ces vers d'Aménaïde dans la même pièce <ref>Tome IV, p. 441.</ref>:''}}
::Je pleure mon destin, je gémis sur mon père.
Iphigénie, près d’être immolée, dit à son père :
<poem>
D’un œil aussi content, d’un cœur aussi soumis.
Que j’acceptais l’époux que vous m’aviez promis,
Je saurai, s’il le faut, victime obéissante.
Tendre au fer de Calchas une tète innocente.
</poem>
Cette résignation parait exagérée : le sentiment
d’Aménaïde est plus vrai et aussi touchant ; mais
dans cette comparaison ce n’est point Racine qui est
inférieur à Voltaire, c’est l’art qui a fait des progrès.
Pour rendre les vertus dramatiques plus imposantes,
on les a d’abord exagérées ; mais le comble de l’art
est de les rendre à la fois naturelles et héroïques.
<references/>
|
Bourassa - Jacques et Marie, souvenir d'un peuple dispersé, 1866.djvu/159
|
{{nr||{{sc|souvenir d’un peuple dispersé}}|{{sc|161}}}}mais elle la sauva. Sa pauvre mère, qui aurait pu se trouver froissée de l’impitoyable accueil fait à ses débuts, était toute heureuse du résultat qu’ils avaient eu pour son enfant, et elle était prête à recommencer la dose ; mais Marie lui épargna ce soin délicat, en la priant de lui passer la lettre, lui faisant signe, en même temps, de s’approcher bien près d’elle, pour qu’elle pût se faire
entendre.
Alors elle recommença la lecture de la précieuse épître que sa mère avait trop agréablement variée pour ne pas en altérer un peu le sens et l’effet : la voici intégralement :
« Monsieur, dans votre douleur, j’ai la consolation de vous apprendre que j’ai pu obtenir de notre colonel que vous resteriez libre dans votre famille, sous ma responsabilité, jusqu’au moment
du départ des vaisseaux. C’est tout ce que j’ai pu pour vous aujourd’hui ; peut-être que si j’étais dans d’autres conditions, il me serait permis d’espérer davantage, mais il faudrait pour cela l’intervention de la Providence, et des actes qui ne dépendent pas de ma seule volonté : je prie et je désire de toute l’ardeur de mon cœur que ces choses s’accomplissent... Je n’ai dans ce moment qu’une pensée, qu’une seule préoccupation, c’est d’alléger vos maux. Ma position est bien précaire, mon action est fort restreinte ; mais s’il est
quelque bien, quelque grâce que je puisse obtenir pour vous, faites-les moi dire par Pierriche. Veuillez aussi m’apprendre l’état où
vous vous trouvez tous.
{{d|« Votre ami dévoué et respectueux,|6}}
{{d|« {{sc|George Gordon}} »|2}}
À ces derniers mots, Marie laissa tomber le papier, et elle sentit de nouveau le tremblement de la feuillée de liane {{corr|courrir|courir}} sur ses membres ; mais un effort de sa volonté y ramena bien vite le calme ; elle étendit ses deux bras autour du cou de son père et de sa mère, et attirant leur tête sur son sein, elle leur dit en touchant leur front de ses lèvres :
— Que Dieu le bénisse, il a eu pitié de vous, au moins, cet ennemi-là- ; il est bon, monsieur George, n’est-ce pas, père ?...
Le père fit un léger signe de tête, mais ne répondit pas.
Pierriche, impatient de voir que personne n’articulait une syllabe après une pareille lecture, se hâta de s’écrier :
— Je vous l’avais bien dit qu’il voulait vous sauver tous !
Puis s’approchant de sa petite maîtresse les mains jointes, avec un air d’adoration : — Mon Jésus, mamselle ! ajouta-t-il, que ça me donne du contentement de vous voir sourire ainsi de la façon d’autrefois ;
<references/>
|
Nichault - Une aventure du chevalier de Grammont.djvu/16
|
<poem>Ah ! nous ne serions pas exilés de Paris,
Si d’un trop noble amour il eût su se défendre :
À des plaisirs de roi monsieur osa prétendre,
Et d’un rival puissant il subit le courroux.</poem>
<poem>Sans doute il fut aimé ?</poem>
<poem>{{caché|Sans doute il fut aimé ?}}Quelque démon jaloux
Le voulut.</poem>
{{personnageD|LA MARQUISE|c|avec affectation.}}
<poem>{{caché|Le voulut.}}Ah ! vraiment, je n’en suis pas surprise.</poem>
{{personnageD|THERME|c|à part.}}
<poem>Elle soupire !... Allons, encore une de prise.</poem>
<poem>Il dut être bien triste en partant pour Turin ?</poem>
<poem>Nous nous sommes un peu divertis en chemin.
La douleur, voyez-vous, a besoin d’assistance,
Et nous avons joué pour tromper la souffrance.</poem>
<poem>Ainsi tous les amants qui partent désolés,
Lorsque la route est longue, arrivent consolés.
Mais avec ces plaisirs qu’on prend sans conséquence,
On trompe les absents, aussi bien que l’absence.
Est-ce encor pour charmer ses regrets douloureux,
Qu’ici le Chevalier paraît tant amoureux
De Delphine ?</poem>
<poem>{{caché|De Delphine ?}}Amoureux !</poem>
<poem>{{caché|De Delphine ? Amoureux !}}A-t-il vraiment pour elle
Un sentiment profond ?</poem>
<poem>{{caché|Un sentiment profond ?}}Elle est jeune, elle est belle :
Mais aux femmes de cour mon maître accoutumé,</poem>
<references/>
|
Verne - L’École des Robinsons - Le Rayon vert.djvu/329
|
{{nr||{{sc|les ruines d’iona.}}|109}}
Miss Campbell, outrée de ce sans-gêne de minéralogiste, se dirigea aussitôt vers lui :
« Que faites-vous là, monsieur ? demanda-t-elle.
— Vous le voyez, miss Campbell, répondit Aristobulus Ursiclos, je cherche à détacher un morceau de ce granit.
— Mais à quoi bon ces manies ? Je croyais que le temps des iconoclastes était passé !
— Je ne suis point un iconoclaste, répondit Aristobulus Ursiclos, mais je suis un géologue, et, comme tel, je tiens à savoir quelle est la nature de cette pierre. »
Un violent coup de marteau avait fini l’œuvre de dégradation : une pierre du soubassement venait de rouler sur le sol.
Aristobulus Ursiclos la ramassa, et, doublant le pouvoir optique de ses lunettes d’une grosse loupe de naturaliste, qu’il tira de son étui, il rapprocha du bout de son nez.
« C’est bien ce que je pensais, dit-il. Voilà un granit rouge, d’un grain très serré, très résistant, qui a dû être tiré de l’îlot des Nonnes, en tout semblable à celui dont les architectes du {{s|xii}} se sont servis pour construire la cathédrale d’Iona. »
Et Aristobulus Ursiclos ne perdit pas une si belle occasion de se lancer dans une dissertation archéologique, que les frères Melvill — ils venaient de le rejoindre — crurent devoir écouter{{corr||.}}
Miss Campbell, sans plus de cérémonie, était revenue vers Olivier Sinclair, et, lorsque le dessin fut achevé, tous se retrouvèrent au parvis de la cathédrale.
Ce monument est un édifice complexe, fait de deux églises accouplées, dont les murs, épais comme des courtines, les piliers, solides comme des roches, ont bravé les injures de ce climat depuis treize cents ans.
Pendant quelques minutes, les visiteurs se promenèrent dans la première église, qui est romane par le cintre de ses voûtes et la courbe de ses arcades, puis dans la seconde, édifice gothique du {{s|xii}}, formant la nef et les transepts de la première. Ils allaient ainsi, à travers ces ruines, d’une époque à une autre, foulant les grandes dalles carrées, dont les jointures laissaient poindre le sol. Ici c’étaient des couvercles de tombes ; là, quelques pierres funéraires, dressées dans les coins, avec leurs figures sculptées, qui semblaient attendre l’aumône du passant.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/855
|
probablement la lance, ayant de la barbe au menton, et sur sa figure, indépendamment de la rudesse que lui donnent les arêtes saillantes du style éginétique, une expression indubitable de vieillesse, a pris le nom de Télamon. Un autre guerrier, étendu, penché sur son bouclier, coiffé de son casque, nu aussi, portant la barbe et souriant en tombant, a reçu celui du roi troyen Laomédon. C’est Hercule qu’on a vu dans un sagittaire, agenouillé, bandant son arc comme faisaient les archers du fronton précédent, portant sur sa tête un casque qui a la forme d’une tête de loup assez semblable à celle du ''Penseroso'' de Michel-Ange, et qui rappelle les dépouilles sauvages dont le héros thébain avait coutume de se parer. La quatrième figure, qui est de toutes la plus digne d’admiration, est connue sous le nom de héros blessé ; elle est renversée sur le dos, couchée dans son bouclier où elle s’agite encore pour combattre et où sa main élevée en l’air brandissait sans doute une arme, inutile. L’unité qui règne dans la divergence multipliée de ses lignes et l’harmonie qui naît sans efforts de l’agitation même de ses membres, devraient être longuement méditées par les artistes qui accusent, de nos jours, le repos absolu de l’art antique, et qui, en cherchant le mouvement, oublient de poursuivre la grace et la beauté.
Indépendamment de ces statues, et avec elles, on a trouvé à Égine deux statuettes qui donnent lieu aux plus curieuses dissertations ; elles sont en tout semblables l’une à l’autre, si ce n’est que leurs draperies sont combinées de manière à ce qu’elles se servent mutuellement de pendant. Toutes deux relèvent de la main leurs longues robes à plis symétriques et verticaux. M. Cockerell, qui a dessiné une restauration du temple de Jupiter Panhellénien, les a placées au sommet de l’angle extérieur du fronton, et il a supposé qu’elles y servaient d’accompagnement à l’αετος qui couronnait tous les ornemens du temple. Les savans allemands ont salué ces deux déesses du nom de Damia et d’Auxhesia. Voilà des divinités qu’on ne trouve guère dans les livres de mythologie répandus dans le public.
Ces deux déesses, dont Hérodote raconte l’histoire fort au long, avec une naïveté charmante, dans son cinquième livre, sont celles qu’Égine enleva à Épidaure, lorsqu’elle se révolta contre sa métropole. Épidaure les avait consacrées pour obtenir la fin d’une sécheresse qui désolait son territoire. L’oracle consulté avait répondu que, pour fléchir la colère des dieux, il fallait façonner deux statues de bois d’olivier. Par une raison qu’il n’est pas facile de démêler, Épidaure fut obligé de demander aux Athéniens le bois destiné à cet
<references/>
|
Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/334
|
se fait pas en une heure ; l’orchidée dont vous parlez ne fleurit pas en un jour ; l’on avance si lentement, que les mortifications s’espacent, que les fatigues se répartissent sur les années et qu’on les tolère aisément, en somme.
En règle générale, il faut, pour franchir la distance qui nous sépare du Créateur, passer par les trois degrés de cette science de la Perfection chrétienne qu’est la Mystique ; il faut successivement vivre la vie Purgative, la vie Illuminative, la vie Unitive, pour joindre le Bien incréé et se verser en lui.
Que ces trois grandes phases de l’existence ascétique se subdivisent, elles-mêmes, en une infinité d’étapes, que ces étapes soient des degrés pour saint Bonaventure, des demeures pour sainte Térèse, des pas pour sainte Angèle, peu importe ; ils peuvent varier de longueur et de nombre, suivant la volonté du seigneur et le tempérament de ceux qui les parcourent. Il n’en reste pas moins acquis que l’itinéraire de l’âme vers Dieu comprend, d’abord, des chemins à pic et des casse-cou — ce sont les chemins de la vie purgative — puis, des sentiers encore étroits, mais déjà taillés en lacets et accessibles — ce sont les sentiers de la vie illuminative — enfin, une route large, presque plane, la route de la vie unitive, au bout de laquelle l’âme se jette dans la fournaise de l’Amour, tombe dans l’abîme de la suradorable infinité !
En somme, ces trois voies sont successivement réservées à ceux qui débutent dans l’ascèse chrétienne, à ceux qui la pratiquent, à ceux enfin qui touchent le but suprême, la mort de leur Moi et la vie en Dieu.
<references/>
|
Bakounine - Œuvres t2.djvu/228
|
ne se soucie pas beaucoup, et ne pouvant s’en servir, ne pouvant détourner la passion patriotique, unitaire et vaniteuse des Allemands, il doit la satisfaire, — et il ne peut la satisfaire qu’au détriment de la France, qu’en lui arrachant au moins un milliard, et deux provinces : la Lorraine et l’Alsace, et en lui imposant, pour se garantir contre ses vengeances à venir, une dynastie, un régime
et des conditions telles, qu’elle soit affaiblie, enchaînée et empêchée de bouger pour longtemps. Car la presse allemande est unanime sur ce point, et elle a mille fois raison : que l’Allemagne ne peut pas faire tous les deux ans des sacrifices inouïs pour maintenir son indépendance. Il est donc absolument nécessaire pour la nation allemande, qui prétend occuper aujourd’hui la position dominante de la France en Europe, de réduire la France précisément à l’état dans lequel cette puissance a maintenu jusqu’à cette heure l’Italie, d’en faire une vassale, une vice-royauté de l’Allemagne, du grand Empire allemand.
Telle est donc la situation du roi de Prusse et de Bismarck. Ils ne peuvent pas retourner en Allemagne sans avoir arraché à la France deux provinces, un milliard, et sans lui avoir imposé un régime qui leur garantisse sa résignation et sa soumission. Mais tout cela ne peut être arraché à la France qu’à Paris. Les Prussiens sont donc forcés de prendre Paris. Ils savent fort bien que ce n’est pas facile du tout. Aussi font-ils des efforts inouïs pour doubler leur armée, afin d’écraser littéralement Paris et la France. Pendant que la France s’organise, la Prusse ne dort pas non plus, — elle s’organise aussi.
Voyons maintenant laquelle de ces deux organisations promet les meilleurs résultats.
<references/>
|
Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/217
|
212 LE SERPENT Nom '
tenait sur la' banquette. Il gémissait, se dressait, et,
de ses pattes impatientes, grilïait le cuir. Mais l‘équi—
page s‘arrêta près de l’aube1·ge avant que l‘animal eût
pu nous échapper, quelles que fussent les supplica-
tions ou les indignations de ses œillades humaines.
· En culotte et en guêtres, coiffé de son chapeau
breton, le docteurnous attendait la. Sa bicyclette pou-
dreuse reposait contre le mur neuf. Madame Hélène
l’avait reconnu la première, mais sans nous le dire.
Ce silence trop prudent était un indice, encore. Gil-
berte, joyeuse et brutale, le dénonça:
— Maman, c’est lui!... Tu ne le vois donc pas?...
-— Oui... oui, - murmura sa mere, discrete,
embarrassée.
M"‘° La Revellière haussa- les épaules. Je n’en tinis
plus de m’extasier a grand bruit sur les eaux éblouis-
santes, que, de·ci, de-la, mouchetaient les petites
ailes brunes des barques lointaines. Elle tit ·eilort
pour merépondre au lieu de molester sa bru. En
descendant, elle se rattrapa :
— Docteur! je suis_ sûre que cette petite a encore
de la lièvre. Tâtez-lui le pouls!
Goulven s’empressa. Gilberte lui sautait au cou,
grimpant à son corps émacié comme le long d’un
arbre. Les jambes brunes enlaçaient les guètres de
cuir fauve. Il se débarrassa d'elle doucement,. lui
palpa le poignet, puis nous atlirma qu‘elle n’avait
point de température symptomatique, mais le pouls
capricant.
- Entin! -— interrompit la grand‘mère, — ne
vaut-il pas mieux que nous allions achever la saison
en Touraine? L’air de l’0céan me semble, depuis
quinze jours, l‘exaspérer beaucoup trop...
<references/>
|
René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/60
|
paternel, ou pensait-il vraiment que sa fille, en raison du triste avenir qui la menaçait, faisait mieux de déserter la lutte ?
Quoi qu’il en fût, une huitaine de jours plus tard, Blanche partit avec sa mère dont le désespoir était profond. La pauvre femme, qui ne pouvait se consoler de la mort de son fils, comprenait bien que c’était un second enfant qu’elle allait perdre pour toujours. Mais malgré toutes ses infortunes successives, elle demeurait l’épouse soumise, aveugle, qu’elle avait toujours été, plaignant son mari plus encore qu’elle ne se trouvait à plaindre elle-même.
Éva, à qui on avait soigneusement caché le motif réel du départ de sa sœur, supposait tout simplement qu’elle devait se placer en France, dans quelque pensionnat, et cette séparation lui causait déjà beaucoup de chagrin, car elle l’aimait sincèrement et pressentait aussi que sa vie à elle, restée seule, allait devenir plus triste encore. Mais quand après une absence d’un mois, sa mère revint et, le cœur brisé, lui dit toute la vérité, elle fondit en larmes et, courant après son père, qui, aux premiers mots de l’explication donnée par sa femme, avait esquissé un mouvement de retraite, elle s’écria :
— Et tu l’as laissée partir ! Oh ! que c’est mal, que c’est mal !
Pour la première fois, la jeune fille sentait son cœur s’ouvrir au blâme et à la révolte. M. de Tiessant le comprit si bien et en fut si blessé dans son orgueil, qu’il riposta brutalement :
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/829
|
avoir cet amour du créateur au-dessus de tout, ni du prochain comme lui-même ; » il entreprend modestement de se justifier, article par article, mais en réalité, il convient de presque tout. Il est vrai qu’il est renfermé assez souvent, mais il écrit beaucoup certains jours. La prière et la lecture lui prennent aussi du temps, quoiqu’il y soit moins régulier qu’il ne devrait. Il est vrai que la présomption absolue de Vendôme, ses projets subits et non digérés l’empêchent d’avoir aucune confiance en lui, et que cependant il a trop acquiescé dans des occasions où il devait au contraire décider, joignant en cela la faiblesse à peut-être un pou de prévention. Il est vrai qu’il a quelquefois badiné, mais rarement, et qu’il a souvent perdu du temps. Il est vrai que, pour être bien averti, il aurait dû agir autrement, et qu’il ne l’a pas fait toujours, se laissant aller à une mauvaise complaisance, faiblesse, ou respect humain. Il prend même la peine d’expliquer les ordres donnés par lui à Oudenarde, et pourquoi il n’a pas marché au secours de Lille ; enfin, après cette longue apologie, il continue : « Je m’attends à bien des discours que l’on tient et que l’on tiendra encore. Je passe condamnation sur ceux que je mérite, et méprise les autres, pardonnant véritablement à ceux qui me veulent et me font du mal, et priant pour eux tous les jours de ma vie. Voilà mes sentimens, mon cher archevêque, et malgré mes chutes et défauts, une détermination absolue d’être à Dieu. Priez donc le incessamment d’achever en moi ce qu’il y a commencé, et de détruire ce qui vient du péché originel et de moi<ref>Fénélon. ''Œuvres complètes''. Édition de Saint-Sulpice, t. VII, p. 275. </ref>. » Quand on lit ces lettres édifiantes, on est touché, ému, attendri, et cependant on sent qu’il y manque quelque chose. Il y manque l’ardeur, la flamme ; il y manque, tranchons le mot, le sens de l’honneur militaire, qui semble, par momens, faire défaut à ce fils de France, et que ni les lettres de la Duchesse de Bourgogne ni celles de l’archevêque ne parvenaient à réveiller en lui.
« C’est dommage que la ville de Lille ait capitulé si tost ; j’en suis pénétré de douleur, » ne craignait pas d’écrire Vendôme à Chamillart, alors que, par ses lenteurs, il était en grande partie
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/722
|
{{nr|716|REVUE DES DEUX MONDES.|}}aride de sa vie, et qu’il adressait aux cantonniers, aux mulets et aux pierres du chemin, faute d’un auditoire plus intelligent. Il s’arrêta aux rochers de Vaucluse, décidé à vivre et à mourir sur le bord de cette fontaine où Pétrarque allait évoquer le spectre de Laure dans le miroir des eaux. Je ne m’inquiétais pas beaucoup de cette funeste résolution. Je connais trop mon Malgache pour croire jamais à une douleur irréparable pour lui. Tant qu’il y aura des fleurs et des insectes sur la terre, Cupidon ne lui adressera que des flèches perdues. Précisément le mois de mars tapissait des plus vertes fontinales et des plus frais cressons les rives du ruisseau et les parois des rochers de Vaucluse. Le Malgache abandonna le rôle de Cardénio, fit une collection de mousses aquatiques, et vers la fin d’avril il m’écrivit : — « Tout cela est bel et bon, mais si mon inhumaine s’imagine que je vais rester ici jusqu’à ce qu’elle juge à propos de couronner ma constance, elle se trompe. Dis-lui qu’elle cesse de pleurer mon trépas, je suis encore sain et dispos. Mon herbier est complet, mes souliers tirent à leur fin, et pendant ce temps-là, ma pépinière bourgeonne sans moi. Ce n’est pas mon avis de laisser faire mes greffes par des gringalets. Oppose-toi à ce que personne y mette la main ; je ne demande que le temps de faire rémouler ma serpette, et j’arrive. »
L’infortuné revint et se résigna à être adoré dans sa famille, aimé saintement de sa Dulcinée, chéri de moi, son frère et son élève. Il se bâtit un joli pavillon sur le coteau, au-dessus de son jardin, de sa prairie, de sa pépinière et de son ruisseau. Peu après, il devint père d’un second enfant. Son fils s’appelait Olivier ; voulant aussi donner un nom de plante à sa fille, et n’en connaissant pas de plus agréable et de plus estimable que la plante fébrifuge à pétales roses, qui croît dans nos prés, il voulut l’appeler ''Petite Centaurée'' ; ce fut avec bien de la peine que sa famille le décida à renoncer à ce nom étrange.
La première visite qu’il rendit à la dame de ses pensées, après l’équipée de Vaucluse, lui coûta bien un peu. Il craignait qu’elle ne fût piquée de le voir si tôt consolé et revenu. Mais elle courut à sa rencontre et lui donna en riant deux gros baisers sur les joues. Il entra dans sa chambre et vit qu’elle avait précieusement
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/1137
|
y étant abandonnées généralement à des compagnies exploitantes, on y a perdu de vue trop tôt les bienfaits de toute nature que ces voies répandent sur le pays, pour les considérer exclusivement comme des valeurs financières, sources de revenus commerciaux. La Belgique et la Hollande, au contraire, pays très bas et souvent exposés, surtout vers le littoral de la mer, à être couverts par les eaux, ont été fréquemment rappelés, par leur situation même, à des sentimens plus justes. Les premiers travaux qui y ont été exécutés en ce genre sont des canaux d’épuisement, destinés à verser le superflu des eaux dans la mer. Dans cette prévision, on y a créé d’ancienne date d’excellentes institutions, dont nous avons vu une imitation et comme un reflet dans une contrée de la France voisine de la Belgique, et placée à certains égards dans une situation semblable. Il semble que ces premiers canaux, commandés par la nécessité, et dont l’unique but était le desséchement des terres, aient, en multipliant leurs services au-delà des espérances qu’ils avaient fait naître, donné comme l’avant-goût de ce que ces utiles créations pouvaient produire, et encouragé de semblables travaux là même où une nécessité impérieuse ne les commandait plus. Toujours est-il que ces deux pays ont persévéré dans la voie féconde où ils s’étaient engagés. Ils présentent aujourd’hui un système de canalisation supérieur à celui de tous les pays du continent.
La Belgique ne paraît pas avoir perdu l’excellente tradition qu’elle s’était faite. Quoiqu’elle possède déjà un ensemble de canaux très respectable, elle n’en poursuit pas moins son œuvre de canalisation avec une ardeur réglée et une persévérance infatigable. Il semble que l’esprit des sociétés particulières instituées pour le régime des eaux ait passé dans le gouvernement et dans les chambres. Malgré l’achèvement complet du chemin de fer national, quoiqu’il semble que rien ne manque plus désormais pour faciliter les communications régulières dans le pays, les travaux de canalisation suivent leur cours toutes les voies d’eau naturelles ou artificielles se perfectionnent, s’achèvent ou se complètent. Chose étrange ! pendant que la France, qui n’a pas encore de chemins de fer, dont le système de canalisation est à peine ébauché, paraît accueillir, sur la foi de quelques bravades irréfléchies, l’idée barbare de l’abandon de ses rivières, de l’abandon de ses canaux, la Belgique, si bien pourvue quant aux deux modes de transport, s’impose en faveur de ses voies d’eau de nouveaux sacrifices. C’est qu’on a compris dans ce pays, par l’expérience qu’on en a faite, la merveilleuse utilité de ces travaux.
On a dit, en parlant de la Belgique, que si, lors de la création des chemins de fer, les canaux n’avaient pas existé, si le gouvernement
<references/>
|
Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/257
|
joue tous les soirs avec lui au trictrac. Il attend M. de la Trémouille, afin de rendre tous ses devoirs, et puis revenir ici avec sa femme : c’est le plus honnête parti qu’il puisse prendre. Je suis encore seule, je ne m’en trouve point mal ; j’aurai demain cette femme de Vitré ; elle avoit des affaires.
Il faut que je vous conte que Mme de la Fayette m’écrit, du ton d’un arrêt du conseil d’en haut, de sa part premièrement, puis de celle de Mme de Chaulnes et de Mme de Lavardin, me menaçant de ne me plus aimer, si je refuse de retourner tout à l’heure à Paris<ref>13. Voyez la lettre de Mme de la Fayette, ci-dessus, p. 244-</ref>; que je serai malade ici<ref>14. « .....à Paris, et me disant que je serai malade ici, etc. » (Édition de 1754.)</ref>, que je mourrai, que mon esprit baissera, qu’enfin, point de raisonnement, il faut venir, elle ne lira seulement point mes méchantes raisons<ref>15. «... il faut venir, et qu’elle ne lira seulement pas mes méchantes raisons. » (''Ibidem.)</ref>. Ma fille, cela est d’une vivacité et d’une amitié qui m’a fait plaisir, et puis elle continue; voici les moyens<ref>16. « qui m’a fait plaisir. Voici les moyens qu’elle me propose. » (''Ibidem''.)</ref>: j’irai à Malicorne avec l’équipage de mon fils ; Mme de Chaulnes y fait trouver celui de M. le. duc de Chaulnes ; j’arriverai à Paris, je serai logée chez cette duchesse ; je n’achèterai des chevaux que ce printemps<ref>17. « celui de M. le duc de Chaulnes ; je logerai chez elle à Paris, je n’achèterai deux chevaux que ce printemps, etc. » (''Ibidem''.)</ref>; et voici le beau : je trouverai mille, écus chez moi de quelqu’un qui n’en a que faire, qui me les prête sans intérêt, qui ne me pressera point de les rendre et que je parte tout à l’heure. Cette lettre est longue<ref name=p251>18. Les lettres de Mme de la Fayette étaient toujours fort courtes. Voyez celle du 30 juin 1673, tome III, p. 208. Ce membre de</ref> au sortir d’un accès de fièvre ;
''
<references/>
|
Paine - Théorie et pratique des droits de l homme (1793).djvu/143
|
<center>(140)</center>{{tiret2|dé|pense}} quelle a faite pour la folle guerre d’amérique.
Il ne reste plus qu’à considérer la dette nationale, comme un sujet de mécontentement. Pour l’éloigner, ou plutôt pour le prévenir, ce seroit une bonne politique de la part même des propriétaires des fonds, de les considérer comme toute autre propriété, sujette à supporter une portion de la taxe. On tourneroit ainsi la nation en faveur de la dette ; elle acquerroit une nouvelle sûreté ; & comme une grande partie de ses inconvéniens, sont balancés par les avantages du capital qu’elle tient en circulation, une mesure de cette espèce finiroit de l’emporter, & répondroit à toute objection<ref>Les créanciers de l’angleterre ont le plus grand intérêt, pour la sûreté de leurs créances, que ce que paine propose leur arrive. L’aristocratie & le despotisme eussent fait faire la banqueroute en france, s’il s’étoient maintenus. Mais les créanciers de l’état y ont fait la faute, de ne pas demander, eux-mêmes, que la dette soit assujettie à un impôt, avec plus de patriotisme, ou seulement, les vues plus étendues, ils eussent mieux pourvu à leur sûreté ; ils auroient eu alors plus de titres, pour empêcher bien du désordre, s’ils avoient porté sur les finances, l’œil observateur, que leur propre intérêt devoit leur donner, afin d’empêcher les dilapidations horribles qui s’y sont commises depuis la révolution. Leur négligence, leur avidité & leur impéritie les exposent aujourd’hui à toutes les conséquences du désordre dans lequel on cherche à nous jetter. Ce sera une leçon pour les créanciers de l’angleterre. Ils seront certainement plus habiles à profiter du reveil de cette nation, qui ne sera pas moins généreuse que sa voisine, mais qui sera plus exactement juste, en se guidant par les principes qui sont ici exposés. ''Note du traducteur''.</ref>.
Ces vues peuvent être remplies par des moyens graduels, tels que ce qui est nécessaire sera fait convenablement, avec la facilité la plus grande.
Au lieu de taxer le capital, la meilleure méthode seroit de taxer l’intérêt dans quelque rapport progressif, & de diminuer les impositions publiques, dans la même proportion que la diminution de l’intérêt.
<references/>
|
René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/269
|
joie d’apprendre que tu as enfin abandonné ton existence de désordre et que tu as cessé d’être un objet de scandale, pour demander au Tout-Puissant, toi aussi, le pardon de tes fautes. Seul ce pardon, tu le sais, te permettra de retrouver dans une autre vie les chers morts qui, là-haut, implorent pour nous deux. »
Après avoir lu cette lettre où son père demeurait l’impitoyable qu’il avait toujours été pour elle, où il ne se trouvait pas même un de ces mots affectueux que son renoncement au monde et par conséquent à sa haine aurait dû lui dicter, où il ne lui était parlé de sa mère et de son frère que pour l’outrager de nouveau, et de Dieu, que pour la menacer de sa colère, {{Mlle}} de Tiessant s’était sentie mourir, et sa femme de chambre n’avait eu que le temps de la prendre dans ses bras pour l’étendre sur son lit.
Pendant quelques instants, Éva demeura immobile, anéantie, puis, tout à coup, se soulevant à demi, elle porta les deux mains à sa poitrine, comme pour la délivrer d’un poids énorme qui l’étouffait, et d’une voix étranglée, courbée en deux, elle poussa de douloureux gémissements.
Supposant que sa maîtresse n’était atteinte que d’un de ces accès dont elle avait été témoin déjà plusieurs fois, Jeanne lui prodigua les soins accoutumés en pareilles circonstances ; mais loin de s’apaiser, les souffrances de la malheureuse devenaient plus aiguës encore.
Bientôt, quoiqu’elle parût respirer sans difficulté,
<references/>
|
Filion - À deux, 1937.djvu/93
|
{{nr||— 91 —}}mère connaissait ce sentiment par expérience, et
que cette expérience avait été le malheur de sa vie.
Ses traits étaient si ravagés. Il y avait dans ses yeux
tant de pitié pour cette enfant qui défendait son
amour menacé.
Laure entoura la pauvre femme de ses bras, et
la serrant pour la première fois avec effusion sur
son cœur :
— Maman, je vous ai fait mal, mais je souffre
tant, je l’aime tant. Ayez, ayez pitié de votre petite
fille. En cet instant elle se sentait si petite.
La mère rendit son étreinte à l’enfant passionnée
qu’elle reconnaissait si bien dans cette exclamation
véhémente, et une fois de plus, elle fit allusion
à celui qui lui avait donné la vie :
— Comme lui, tu ne sais pas te commander.
Laure voulut savoir qui sa mère désignait par
ce mot : lui. Elle avait bien compris qu’il s’agissait
de son père. Mais son nom, elle ne l’avait jamais
prononcé. Était-il bien un Lavoise ? Quel était son
vrai nom de famille ? Lui ferait-elle toujours un
mystère de l’existence de son père ?
Lasse de questionner inutilement, elle se mit à
marcher dans la chambre à pas saccadés.
L’arrivée de cette missive leur avait fait oublier
l’heure et le déjeuner. Après quelque temps de cette
course fatigante dans un espace aussi restreint,
Laure proposa :
— Si nous allions dîner.
— Comme tu voudras, avait répondu sa mère.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 16.djvu/434
|
marins sont débarqués. Français, Russes, Anglais, Américains, Japonais, Italiens, seront ici à sept heures du soir. Les B... et le reste de notre bande arrivent à trois heures. Enfin, nous allons pouvoir changer de chemise et nous laver !
Sept heures et demie. — Un certain nombre d’Européens sont allés à cheval au-devant des troupes. Enfin le clairon sonne. Soixante-quinze marins défilent gaiement devant l’hôtel et se rendent à la Légation. Demain, ils se fractionneront pour aller occuper le Petang et l’hôpital catholique. Ce soir la rue des Légations est en fête. On rencontre les uniformes de toutes les nations. Que les fils du Ciel essayent donc de bouger ! Nous avons le sentiment d’être maîtres de la Chine et de tenir entre nos mains, avec nos cinq cents soldats, le gouvernement et la capitale.
''1{{er}} juin''. — L’effervescence ne paraît pas aussi complètement calmée qu’on s’y attendait. Toujours, devant l’hôtel de M. Chamot, stationne une foule houleuse aux intentions mal définies. De temps à autre, pour la faire circuler, on l’arrose avec la pompe à incendie. Cela donne lieu à un sauve-qui-peut assez réjouissant. Nous entreprenons cependant de visiter un peu Pékin dont nous ne connaissons guère que le chemin qui mène à la gare. Armés de revolvers, nous frétons des pousse-pousses et partons pour l’Observatoire situé sur la muraille de la seconde enceinte. On traverse, pour s’y rendre, une partie de la cité tartare à qui ses ruelles calmes et presque désertes donnent une physionomie si différente de celle de la cité chinoise. Du haut des murs, la vue s’étendrait sur toute la ville, si une poussière opaque qui flotte comme un brouillard n’en dissimulait la majeure partie. Ce qu’on en voit est entremêlé de terrains vagues, d’arbres rabougris, de canaux, de champs cultivés. Cela donne l’impression d’un immense camp retranché plus que d’une capitale. Je ne dirai rien des magnifiques instrumens de bronze construits par les Jésuites au XVIIe siècle, ni des quelques monumens que nous avons visités. Pékin a été maintes fois décrit, mieux que je ne le pourrais faire, par des gens qui l’ont visité plus à loisir et dans des conditions plus calmes.
Comme on ne peut, vu les circonstances actuelles, songer à se rendre au tombeau des Min et à la grande muraille, que presque tous les temples sont fermés, et que le séjour n’est pas enchanteur à l’hôtel, où la plupart d’entre nous n’ont pas même de chambre, nous décidons de repartir, dès aujourd’hui, si nous le pouvons.
<references/>
|
Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 22.djvu/850
|
est très agréable, car la vérité la plus vulgaire prend, sous sa plume, un air ingénieux et piquant.
D’abord M. Proudhon n’est pas communiste, bien loin de là ; il ne laisse échapper aucune occasion de protester contre toute solidarité avec cette doctrine barbare. Dans le plus étendu de ses ouvrages, qui a pour titre : ''Système des contradictions économiques ou Philosophie de la misère'', il consacre un demi-volume à la réfutation en règle du communisme. Après avoir remarqué avec juste raison que toutes les utopies communistes, depuis ''l’Atlantide'' de Platon jusqu’à ''l’Icarie'' de M. Cabet, ne sont au fond qu’une seule et même rêverie, et que le mérite de l’invention y est nul, surtout pour les derniers venus, M. Proudhon établit qu’il y a dans la nature des choses qui sont naturellement ''communes'' et d’autres qui naturellement aussi deviennent ''propres'', d’où il suit que la vie sociale consiste à jouir en commun de ce qui est commun et en particulier de ce qui est propre. Reste à distinguer ce qui est propre de ce qui est commun. Que l’on pousse l’usage en commun aussi loin que possible, rien de mieux, dit-il, et je suis tout-à-fait de son avis : la société doit à chacun de ses membres tout ce qu’elle peut lui donner sans nuire au droit d’autrui ; mais il y a une limite. Le communisme proprement dit est incompatible avec la famille, et la famille, je le dis à son honneur, est sacrée aux yeux de M. Proudhon ; le communisme est impossible sans une loi de répartition, car il faut bien répartir au moins le travail entre les membres de la communauté, et la communauté, dit encore M. Proudhon, périt par la répartition, car la division du travail entraîne celle des produits. Enfin, pour résumer dans un de ces mots énergiques qu’il affectionne son jugement sur le communisme, il l’appelle ''la religion de la misère'' ; il n’y a rien de plus fort à en dire.
Non-seulement M. Proudhon est ennemi du communisme dans sa forme la plus grossière et la plus générale, mais il repousse encore ce communisme mitigé, qui est la doctrine d’un bon nombre de nos républicains de la veille, et qui consiste à tout remettre dans les mains de l’état. La création des ateliers nationaux n’a pas de plus grand adversaire ; il s’indigne à l’idée de voir l’état se faire banquier, entrepreneur, commerçant ; il réclame à haute voix, pour le travail, non cette organisation mensongère qui le ruine, mais la liberté qui le vivifie. Bien qu’il se prononce en toute occasion contre l’économie politique moderne, il a du moins cela de commun avec elle, qu’il adopte pleinement son principe, la liberté du travail.
Ensuite M. Proudhon n’apprécie pas moins bien, selon moi, le véritable caractère de la révolution de février. Il reconnaît que cette révolution a été profondément ''illégale'', c’est le mot dont il se sert, distinction fondamentale entre elle et celle de 1830, qui a été ''légale'' dans toute
<references/>
|
Voyage en Asie (Duret 1871)/Inde/05
|
Théodore Duret Voyage en Asie Michel Lévy, 1874 (p. 265-270). ◄ IV. Tanjore. (Septembre 1872). VI. Madras. (Octobre l872). ► bookVoyage en AsieThéodore DuretMichel Lévy1874ParisVDuret - Voyage en Asie.djvuDuret - Voyage en Asie.djvu/7265-270 Karikal, possession française. — Petit nombre des Français. — Esprit de l’administration française dans l’Inde. — Pondichéry. Octobre 1872. Le chemin de fer qui nous a menés de Trichinopoly à Tanjore nous mène aussi de Tanjore à Négapatam, sur la côte de Coromandel. Là le chemin de fer prend fin, Negapatam étant tête de ligne, et, pour continuer notre route vers le nord le long de la mer, nous devons reprendre des charrettes et des bœufs. A six milles de Negapatam, nous rencontrons un indigène en uniforme, qui a sur la poitrine une plaque avec une inscription en français. Nous venons de mettre le pied sur le territoire français de Karikal. Il est bien petit ce territoire. Il ne figure guère sur la carte de l’Inde que comme une tête d’épingle enchâssée au milieu des possessions britanniques ; mais il est tout entier composé de terrains d’alluvion, arrosés par des dérivations du Gauvery ; la fertilité de son sol est des plus grandes et, malgré son exiguïté, il renferme 96 000 habitants. La ville de Karikal a un air de capitale au petit pied qui n’est point messéant. Faisant face à ]a rue principale, s’élève la maison du gouvernement ; dans le voisinage sont des édifices publics, des écoles, des églises. La population indigène a rangé ses maisonnettes le long de rues se coupant à angle droit. Tout cela est fort propre et annonce un grand bien-être. Le nombre des Français de France ne dépasse guère la douzaine. Il y a le chef de service, qui fait fonction de gouverneur, un chef de bureau qui prend le titre de chef des détails, un juge, un procureur de la république, un médecin de marine, un commissaire de police, un sous-lieutenant à la tête du détachement des cipayes, deux ou trois religieux qui tiennent un collège, autant de civils qui combinent tous les genres de commerce avec toutes les sortes de professions. Tous ces braves gens réalisent quelque chose comme le souhait de César : chacun, tout petit en soi qu’il est, n’en est pas moins le premier dans son emploi. On dépend de Pondichéry, qui est à trois jours de marche avec des bœufs, à travers le territoire anglais, un voyage qu’on ne fait qu’à la dernière extrémité. Le sous-lieutenant qui commande les cipayes et le commissaire de police composent à eux deux tout le contingent militaire fourni par la race conquérante. Les cipayes du sous-lieutenant et les policiers du commissaire sont, sans exception, des indigènes. Ces bons cipayes, malgré leur pantalon à la zouave, ont un air paterne qui ôte toute idée qu’ils puissent jamais servir à autre chose qu’à monter la garde à la porte du chef de service. Voici au moins une colonie française où ne fleurit point le militarisme. Un gouvernement dans les mains d’une douzaine d’hommes de race blanche maintenant l’ordre au milieu de cent mille individus de race étrangère est certes un type de gouvernement civil. Quand M. le chef de service fait sa promenade par les rues de sa capitale et va donner au bazar et aux écoles le coup d’œil du maître, sans autre pompe que le parapluie qu’il ouvre contre le soleil, les respects qui l’accueillent partout prouvent que la domination française à KarikaI s’appuie sur la sympathie des populations et non point sur la force. Les habitants de cette partie de l’Inde n’ont eu, depuis des générations, de choix possible qu’entre deux dominations : la française ou l’anglaise. On ne saurait dire, au cas où nous nous fussions rendus maîtres de toute l’Inde à la place des Anglais, si les indigènes eussent préféré notre gouvernement au leur ; ce qui est certain, c’est que les indigènes des parcelles territoriales restées à la France préfèrent la domination française à celle que les Anglais exercent sur le reste du territoire. La raison en est simple : ils payent moins d’impôts et sont laissés plus à eux-mêmes. Les indigènes soumis à l’Angleterre font partie d’un vaste empire qui a de grandes armées, une dette publique considérable, qui entreprend de grandes transformations dont ses sujets doivent payer les frais et subir le contre-coup. Les indigènes du territoire français sont gouvernés d’une façon paternelle par des fonctionnaires modestes, qui n’ont point de grandes forces militaires à entretenir, et qui administrent à très-peu de frais. Les Hindous soumis à la France n’échangeraient donc pas volontiers notre gouvernement pour celui des Anglais, et le seul sentiment de satisfaction que le Français puisse éprouver en parcourant le lopin de terre qui lui est resté, perdu au milieu de l’empire anglais, naît de la préférence qui existe en faveur de sa domination sur celle d’à-côté. En trois jours nous nous rendons de KarikaI à Pondichéry en visitant sur la route le grand temple de Chelambran, un de ceux du sud de l’Inde dont l’architecture est la plus soignée. Pondichéry, la capitale des possessions françaises de l’Inde, a conservé un certain air d’ancien régime et comme de style Louis XVI qui lui donne un cachet de bon goût et de distinction. Elle a eu autrefois de grandes espérances qui ne se sont point réalisées. Aujourd’hui on y végète honorablement en souvenir du passé, mais sans aucune espèce d’avenir. Le territoire que les Anglais ont laissé à la France autour de la ville, mal délimité et découpé comme par lambeaux au milieu du leur, est trop restreint pour alimenter un grand commerce, et les affaires du territoire anglais, sauf celles du voisinage immédiat, vont à Madras, où convergent les chemins de fer. A Pondichéry, les castes avec leurs divisions et subdivisions exercent encore tout leur empire. A la grande fontaine publique ou l’on va chercher l’eau, on se partage les côtés ; personne ne pense à prendre son eau ailleurs qu’aux robinets de sa caste. Mais il y a encore ici quelque chose de plus que la caste : on se divise en gens de la main gauche et gens de la main droite. Les gens de ces deux divisions n’habitent point indifféremment les mêmes rues ; ils se querellent à l’occasion et entrent en lutte sous les prétextes les plus futiles. Quand on pense que de pareilles pratiques existent encore dans une ville occupée depuis deux siècles par les Européens, on comprend avec quelle lenteur ont lieu les transformations qui changent les mœurs des peuples.
|
Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/337
|
criminelle : il se trouve qu’avec le pays ce sont eux et leurs successeurs qui en ont profité.
Les cahiers du Tiers État traitaient avec énergie et précision de la réforme judiciaire. Ils demandaient que la vénalité des offices fût abolie, que les juridictions fussent simplifiées, que tout privilège disparût, que les tribunaux fussent ramenés à leur fonction propre, qui est de rendre la justice et non de se mêler aux affaires de l’État. Toutes les plaintes contre l’esprit de caste et contre la cherté des procès, contre l’orgueil intransigeant des Parlemens et leur maladresse suprême à se mettre en travers de l’opinion publique, avaient été recueillies par les représentans des bailliages, avocats ou magistrats inférieurs. Mais, ce qui dominait ces doléances, la grande, l’unanime réclamation, non seulement du Tiers, mais des ordres privilégiés, c’était le vœu, ou plutôt la volonté absolue de mettre à bas, pour qu’il n’en restât rien, l’odieuse procédure criminelle. On est à la fin du XVIIIe siècle ; on a vu de terribles erreurs judiciaires ; on a constaté, et les écrits des philosophes en ont secoué tous les esprits, à quoi pouvait conduire une procédure qui laissait d’abord la liberté individuelle à la merci du pouvoir, et qui abandonnait ensuite, dans le secret le plus étroit, le sort, la vie d’un accusé aux horreurs de la question préalable et à l’absolue souveraineté des magistrats. De cela, personne ne veut plus, à aucun prix. Cet édifice, miné de toutes parts, s’écroule. Le 21 août, l’Assemblée rend un décret sur l’arrestation et la détention, qui protège la liberté individuelle. Les 8 et 9 octobre, un autre décret consomme la ruine de l’ancien système, en proclamant cette nouveauté qui devait transformer la justice même : la publicité du débat criminel.
Le débat public comportait, à l’égard des avocats, deux conséquences primordiales : l’accusé trouvait à l’audience un défenseur, pour discuter à ses côtés l’accusation ; et dans ce rôle infiniment varié, l’avocat avait pour spectateurs, non seulement les personnes présentes dans la salle de justice, mais la foule des lecteurs de journaux, car les journaux allaient immédiatement s’emparer de ce sujet tout neuf et d’un intérêt qui n’a pas vieilli, le compte rendu des procès. Ainsi le décret des 8 et 9 octobre 1789, qui réalise en France un des progrès les plus certains de la civilisation, crée du même coup l’avocat des causes criminelles et la chronique judiciaire. On s’en aperçoit
<references/>
|
Ségur - Les petites filles modèles.djvu/241
|
passer quelqu’un qui pourra nous ramener ; et puis il fera moins humide qu’au bord de l’eau.
— Nous allons encore nous déchirer dans les épines, dit Marguerite.
— Il faut pourtant essayer de nous retrouver ; nous ne pouvons rester ici. »
Marguerite se leva en soupirant et suivit Sophie, qui chercha à lui rendre le passage moins pénible en marchant la première. Après bien du temps et des efforts, elles se retrouvèrent enfin sur le chemin. La nuit était venue tout à fait ; elles ne voyaient plus où elles allaient, et elles se résolurent à attendre jusqu’au lendemain.
Il y avait une heure environ qu’elles étaient assises près d’un arbre, lorsqu’elles entendirent un frou-frou dans le bois ; ce bruit semblait être produit par un animal qui marchait avec précaution. Immobiles de terreur, les pauvres petites avaient peine à respirer ; le frou-frou approchait, approchait ; tout à coup, Marguerite sentit un souffle chaud près de son cou ; elle poussa un cri, auquel Sophie répondit par un cri plus fort ; elles entendirent alors un bruit de branches cassées, et elles virent un gros animal qui s’enfuyait dans le bois. Moitié mortes de peur, elles se resserrèrent l’une contre l’autre, n’osant ni parler, ni faire un mouvement, et elles restèrent ainsi jusqu’à ce qu’un nouveau bruit, plus effrayant, vînt leur rendre le courage de se lever et de chercher leur salut dans
<references/>
|
L’Encyclopédie/1re édition/EXCISE
|
Mallet L’Encyclopédie, 1re éd. 1751 (Tome 6, p. 220-221). ◄ EXCIPIENT EXCLAMATION ► dictionaryL’Encyclopédie, 1re éd.Mallet1751VTome 6Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvuDiderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/1220-221 EXCISE, s. f. (Hist. mod. & Comm.) est une entrée ou impôt mis sur la bierre, l’aile ou bierre douce, le cidre, & autres liqueurs faites pour les vendre, dans le royaume d’Angleterre, dans la principauté de Galles, & dans la ville de Berwick, sur la riviere de Twed. Voyez Impôt. L’impôt de l’excise fut d’abord accordé au roi Charles second par un acte du parlement en l’année 1660, pour la vie de ce prince seulement : mais il a été continué & augmenté par différens parlemens sous les différens princes qui ont regné depuis, & il a été étendu à l’Ecosse. Cet impôt dans l’état où il est actuellement, est sur le pié de 4 s. 9 d. par tonneau de bierre forte ou d’aile, & de 1 s. 6. d. pour petite bierre. Maintenant comme on accorde aux Brasseurs pour le remplissage de la bierre trois tonneaux sur 23, pour l’aile ou bierre douce, deux sur 22 ; l’excise exact d’un tonneau de forte bierre monte à 4. s. 1 d. 2 3 {\displaystyle \scriptstyle {\frac {2}{3}}} : celui de l’aile ou bierre douce, 4 s. 3 d. 3 4 {\displaystyle \scriptstyle {\frac {3}{4}}} , & celui de la petite bierre à 1 s. 1 d. 1 q. 14 15 {\displaystyle \scriptstyle {\frac {14}{15}}} . L’excise est une des plus considérables branches du revenu du roi : anciennement ce droit étoit affermé : mais à présent il est régi pour le roi par sept commissaires qui demeurent au bureau général de l’excise, reçoivent tout le produit de l’excise de la bierre, de l’aile, & autres liqueurs, & du dreche, qui se perçoit sur toute l’Angleterre, & le portent au thrésor. Voyez Echiquier. Leurs appointemens sont de 800 liv. par an, & ils s’obligent par serment de ne recevoir de droits ou de salaire que du roi seulement. On peut appeller des commis de l’excise à cinq autres qu’on nomme les commissaires des appels. Le nombre des officiers qui sont employés dans cette branche des revenus est fort grand. Outre les commissaires ci-dessus & leurs officiers subordonnés, comme les porte-registres, les ambulans, &c... il y a un auditeur de l’excise avec ses commis, &c... un porte-registre, un secrétaire, un solliciteur, un caissier, un receveur, un clerc des assûrances, un concierge, un portier, un arithméticien pour l’argent, un jaugeur général, des chiffreurs généraux avec leurs assistans, des ambulans, un secrétaire pour les marchandises qui ne se transportent pas, des examinateurs, un secrétaire pour les journaux qui ont été examinés, des chiffreurs, des examinateurs, &c... pour la distillerie de Londres pour le vinaigre, le cidre, &c. Il y a aussi des examinateurs pour le dreche, des intendans généraux & autres, de la brasserie de Londres, avec des assistans & autres officiers au nombre de cent, des intendans généraux, & autres pour la distillerie de Londres, avec d’autres officiers au nombre de 40, un collecteur, & un intendant pour les liqueurs qu’on fait venir, avec un intendant de débarquement à la doüanne, &c. Les appointemens annuels de tous les officiers de l’excise montent suivant le calcul de M. Chamberlayne à 23650 livres. De plus il y a dans les provinces cinquante collecteurs & 150 inspecteurs, avec un grand nombre d’officiers inférieurs appellés jaugeurs ou collecteurs de l’excise ; ce qui augmente le nombre de ceux qui sont employés à la perception de ce revenu, jusqu’au nombre de 2000. L’excise sur la bierre, l’aile, & les autres liqueurs qui sont sujetes à ce droit, même en tems de guerre, monte à 1100000 livres par an, & est perçû sur 300000 personnes ou environ. L’impôt sur le dreche avec l’impôt qu’on a ajoûté sur le cidre, &c. monte entre six à sept cents mille livres par an, & se perçoit sur une plus grande quantité de monde que le premier. Et cependant toute la dépense faite pour le recueillement de ces droits, ne monte pas à vingt sols pour livre sterling : ce qu’on regarde comme une exactitude & une économie, dont on ne peut pas trouver d’exemple dans aucuns revenus perçûs soit dans ce pays, soit par-tout ailleurs. Tel est le prix ou le produit exact des différentes impositions de l’excise. Chambers. (G)
|
Subsets and Splits
No community queries yet
The top public SQL queries from the community will appear here once available.